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Décisions

Cass. soc., 9 septembre 2020, n° 18-20.487

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Défendeur :

Safilo France (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Schamber

Rapporteur :

Mme Thomas-Davost

Avocats :

SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol

Paris, pôle 6 ch. 5, du 31 mai 2018

31 mai 2018

Faits et procédure  

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, le 31 mai 2018), M. Perret a été engagé par la société Safilo, à compter du 14 janvier 2002, en qualité de délégué commercial, avec le statut de cadre.  

2. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale le 6 septembre 2013 de diverses demandes.

3. Il a été licencié le 26 septembre 2013.

Examen des moyens  

Sur les premier et troisième moyens du pourvoi principal du salarié, ci-après annexés

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le premier moyen du pourvoi incident de l'employeur  

Enoncé du moyen

5. L'employeur fait grief à l'arrêt de dire que la réalité du statut de vendeur représentant placier (VRP) était établie et, par conséquent, de le condamner à payer au salarié une certaine somme à titre d'indemnité de retour sur échantillonnage outre les congés payés afférents, de le condamner au paiement d'une indemnité conventionnelle de licenciement ainsi que d'une indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, alors « que le statut de VRP n'est pas applicable au commercial dont le secteur géographique de prospection n'est pas fixe ; que la modification conséquente du secteur géographique du commercial, serait-elle opérée au sein d'une même région, est exclusive du statut de VRP ; qu'en l'espèce, il ressort des constations de l'arrêt que le secteur géographique de M. Perret était à l'origine composé des 2e à 6e, 9e à 11e, 18e et 19e arrondissements de Paris, de la Seine-Saint-Denis (93) et du Val-d'Oise (95) et qu'il a par la suite été modifié par l'employeur pour inclure tous les arrondissements parisiens, la Seine-et-Marne (77), les Yvelines (78), l'Essonne (91), les Hauts-de-Seine (92), la Seine-Saint-Denis (93), le Val-de-Marne (94) et le Val-d'Oise (95) ; qu'en jugeant néanmoins que malgré le retrait et le rajout de certaines zones, le cœur du secteur géographique de M. Perret était constitué par la région Ile-de-France, de sorte qu'il répondait à l'exigence légale de fixité, la cour d'appel a violé l'article L. 7311-3 du code du travail. »

Réponse de la Cour  

6. Ayant relevé que le cœur du secteur géographique attribué au salarié, constitué par la région d'Ile-de-France, était demeuré déterminé et stable, en dépit du retrait et du rajout de certaines zones géographiques, de telle sorte que l'exigence légale de fixité était remplie, la cour d'appel a exactement retenu que le salarié avait la qualité de VRP.

7. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le deuxième moyen du pourvoi incident de l'employeur

Enoncé du moyen  

8. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner au paiement d'une indemnité de retour sur échantillonnage, alors :

« 1°) que le voyageur représentant placier a droit aux commissions et remises sur les ordres non encore transmis à la date de son départ à la condition que ces ordres soient la suite directe des remises d'échantillon et des prix faits antérieurement à l'expiration du contrat ; qu'en l'espèce, la société faisait valoir que la rupture du contrat de travail de M. Perret avait été effective le 26 septembre 2013 si bien qu'il avait commercialisé sur le terrain une collection complète sur l'intégralité de la campagne courant de juillet à septembre et qu'il n'avait pu fournir un travail de présentation sur la campagne débutant au mois d'octobre 2013 pour laquelle aucun prix n'avait encore été fixé ; qu'en condamnant la société au paiement d'une indemnité de retour sur échantillonnage sans caractériser l'existence d'ordres qui auraient été la suite directe des remises d'échantillon et des prix faits antérieurement à l'expiration du contrat, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 7313-11 du code du travail ;

2°) que le juge doit préciser l'origine de ses constatations et ne peut statuer par voie de simple affirmation ; qu'en l'espèce, M. Perret prétendait au paiement d'une indemnité de retour sur échantillonnage d'un montant de 78 149,87 euros qu'il calculait sur la base de sa rémunération de l'année précédente, soit 156 299,75 euros ; qu'en réponse la société demandait à ce que M. Perret soit débouté de cette demande et, subsidiairement, que la somme de 906,56 euros bruts soit retenue au titre de l'indemnité de retour sur échantillonnage ; qu'en jugeant qu'au vu des pièces produites par les parties, le montant des commissions restant dues devait être fixé à 32 244,56 euros, sans cependant préciser de quelle pièce elle tirait un tel chiffre qui n'avait pas même été avancé par les parties et sans justifier cette affirmation la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »  

Réponse de la Cour  

9. Ayant constaté, au regard des pièces produites par les parties, que des commissions restaient dues au salarié, la cour d'appel, qui a fait ressortir, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation, que ces commissions étaient la suite directe des remises d'échantillon et des prix faits antérieurement à l'expiration du contrat du salarié, a légalement justifié sa décision.

10. La cour d'appel a, ensuite, souverainement évalué l'importance de ces commissions et fixé en conséquence les créances salariales s'y rapportant, sans être tenue de s'expliquer ni sur les pièces qu'elle entendait retenir ou écarter ni sur le détail du calcul appliqué.

11. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le troisième moyen du pourvoi incident de l'employeur  

Enoncé du moyen  

12. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner au paiement d'une indemnité pour utilisation professionnelle du domicile personnel alors « que les juges du fond, tenus de motiver leur décision, ne peuvent statuer par voie de simple affirmation ; qu'en l'espèce, la société contestait l'occupation par le salarié d'une pièce de son domicile à des fins professionnelles en faisant valoir qu'elle n'était pas établie et en soulignant que pour exercer ses fonctions, M. Perret avait besoin de deux ou trois valisettes et qu'il disposait d'un ordinateur et d'une clef USB sur lesquels il saisissait ses commandes chez l'opticien ; qu'en affirmant péremptoirement que M. Perret consacrait une pièce de son logement pour accomplir des tâches administratives lui incombant et stocker les collections de montures de lunettes, sans nullement justifier cette affirmation, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour  

13. La cour d'appel, qui a constaté que le salarié, qui exerçait des fonctions à caractère itinérant et ne disposait pas de bureau au sein de l'entreprise, consacrait une pièce de son logement pour accomplir les tâches administratives lui incombant et stocker son matériel, a retenu, par une décision motivée, qu'il pouvait prétendre à une indemnité pour l'occupation professionnelle de son domicile.

14. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le deuxième moyen du pourvoi principal du salarié

Enoncé du moyen

15. Le salarié fait grief à l'arrêt de limiter le montant de l'indemnité pour l'utilisation professionnelle du domicile personnel à une certaine somme alors « qu'en énonçant, dans ses motifs, que ''l'indemnisation due au titre de la période de septembre 2008 à septembre 2013 doit donc être évaluée à 3 000 euros (50 euros x 12 mois x 5 ans)'' et dans le dispositif de sa décision que ''la cour (…) condamne la société Safilo à payer à M. Brice Perret (…) à titre d'indemnité pour l'utilisation professionnelle du domicile personnel : 2 808 euros '', la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction entre les motifs et le dispositif, violant l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour  

16. La contradiction existant entre les motifs et le dispositif, invoquée par ce moyen, procède d'une erreur matérielle qui peut, selon l'article 462 du code de procédure civile, être réparée par la Cour de cassation à laquelle est déféré l'arrêt et dont la rectification sera ci-après ordonnée.

17. Le moyen ne peut donc pas être accueilli.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE les pourvois tant principal qu'incident ;

Rectifie le dispositif de l'arrêt attaqué en ce sens :

Condamne la société Safilo à payer à M. Perret la somme de 3 000 euros, à titre d'indemnité pour l'utilisation professionnelle du domicile personnel.