CJUE, 3e ch., 1 octobre 2020, n° C-649/18
COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPEENNE
Arrêt
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président de chambre :
Mme Prechal
Juges :
M. Lenaerts, président de la Cour, Mme Rossi, MM. J. Malenovský (rapporteur), F. Biltgen
Avocat général :
M. H. Saugmandsgaard Øe
Avocats :
M. Nordlander, Mme Robert, M. Guizard , S. Beaugendre
LA COUR (troisième chambre),
1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 34 TFUE, de l’article 85 quater de la directive 2001/83/CE du Parlement européen et du Conseil, du 6 novembre 2001, instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain (JO 2001, L 311, p. 67), telle que modifiée par la directive 2011/62/UE du Parlement européen et du Conseil, du 8 juin 2011 (JO 2011, L 174, p. 74) (ci–après la « directive 2001/83 »), ainsi que de l’article 3 de la directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil, du 8 juin 2000, relative à certains aspects juridiques des services de la société de l’information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur (« directive sur le commerce électronique ») (JO 2000, L 178, p. 1).
2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant A, une société de droit néerlandais exploitant une pharmacie d’officine établie aux Pays–Bas ainsi qu’un site Internet ciblant spécifiquement la clientèle française, à Daniel B, UD, AFP, B et L (ci-après « Daniel B e.a. »), qui sont des exploitants de pharmacies d’officine et des associations représentant les intérêts professionnels des pharmaciens établis en France, au sujet de la promotion par A dudit site Internet auprès de la clientèle française au moyen d’une campagne de publicité multiforme et de large ampleur.
Le cadre juridique
Le droit de l’Union
La directive 98/34
3 L’article 1er, premier alinéa, point 2, de la directive 98/34/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 juin 1998, prévoyant une procédure d’information dans le domaine des normes et réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l’information (JO 1998, L 204, p. 37), telle que modifiée par la directive 98/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 20 juillet 1998 (JO 1998, L 217, p. 18) (ci-après la « directive 98/34 »), prévoit :
« Au sens de la présente directive, on entend par :
[...]
2) “service” : tout service de la société de l’information, c’est-à-dire tout service presté normalement contre rémunération, à distance par voie électronique et à la demande individuelle d’un destinataire de services. »
La directive 2000/31
4 Les considérants 18 et 21 de la directive 2000/31 énoncent :
« (18) Les services de la société de l'information englobent un large éventail d'activités économiques qui ont lieu en ligne. Ces activités peuvent consister, en particulier, à vendre des biens en ligne. [...]
[...]
(21) La portée du domaine coordonné est sans préjudice d’une future harmonisation communautaire concernant les services de la société de l’information et de futures législations adoptées au niveau national conformément au droit communautaire. Le domaine coordonné ne couvre que les exigences relatives aux activités en ligne, telles que l’information en ligne, la publicité en ligne, les achats en ligne, la conclusion de contrats en ligne [...] »
5 L’article 1er, paragraphes 1 et 2, de cette directive est ainsi libellé :
« 1. La présente directive a pour objectif de contribuer au bon fonctionnement du marché intérieur en assurant la libre circulation des services de la société de l’information entre les États membres.
2. La présente directive rapproche, dans la mesure nécessaire à la réalisation de l’objectif visé au paragraphe 1, certaines dispositions nationales applicables aux services de la société de l’information et qui concernent le marché intérieur, l’établissement des prestataires, les communications commerciales, les contrats par voie électronique, la responsabilité des intermédiaires, les codes de conduite, le règlement extrajudiciaire des litiges, les recours juridictionnels et la coopération entre États membres. »
6 L’article 2, sous a), de ladite directive définit les « services de la société de l’information » comme les services au sens de l’article 1er, premier alinéa, point 2, de la directive 98/34.
7 L’article 2, sous h), de la directive 2000/31 dispose :
« Aux fins de la présente directive, on entend par :
h) “domaine coordonné” : les exigences prévues par les systèmes juridiques des États membres et applicables aux prestataires des services de la société de l’information ou aux services de la société de l’information, qu’elles revêtent un caractère général ou qu’elles aient été spécifiquement conçues pour eux.
i) Le domaine coordonné a trait à des exigences que le prestataire doit satisfaire et qui concernent :
– l’accès à l’activité d’un service de la société de l’information, telles que les exigences en matière de qualification, d’autorisation ou de notification,
– l’exercice de l’activité d’un service de la société de l’information, telles que les exigences portant sur le comportement du prestataire, la qualité ou le contenu du service, y compris en matière de publicité et de contrat, ou sur la responsabilité du prestataire.
ii) Le domaine coordonné ne couvre pas les exigences telles que :
– les exigences applicables aux biens en tant que tels,
– les exigences applicables à la livraison de biens,
– les exigences applicables aux services qui ne sont pas fournis par voie électronique. »
8 L’article 3 de cette directive, intitulé « Marché intérieur », dispose :
« 1. Chaque État membre veille à ce que les services de la société de l’information fournis par un prestataire établi sur son territoire respectent les dispositions nationales applicables dans cet État membre relevant du domaine coordonné.
2. Les États membres ne peuvent, pour des raisons relevant du domaine coordonné, restreindre la libre circulation des services de la société de l’information en provenance d’un autre État membre.
3. Les paragraphes 1 et 2 ne sont pas applicables aux domaines visés à l’annexe.
4. Les États membres peuvent prendre, à l’égard d’un service donné de la société de l’information, des mesures qui dérogent au paragraphe 2 si les conditions suivantes sont remplies :
a) les mesures doivent être :
i) nécessaires pour une des raisons suivantes :
– l’ordre public, en particulier la prévention, les investigations, la détection et les poursuites en matière pénale, notamment la protection des mineurs et la lutte contre l’incitation à la haine pour des raisons de race, de sexe, de religion ou de nationalité et contre les atteintes à la dignité de la personne humaine,
– la protection de la santé publique,
– la sécurité publique, y compris la protection de la sécurité et de la défense nationales,
– la protection des consommateurs, y compris des investisseurs ;
ii) prises à l’encontre d’un service de la société de l’information qui porte atteinte aux objectifs visés au point i) ou qui constitue un risque sérieux et grave d’atteinte à ces objectifs ;
iii) proportionnelles à ces objectifs ;
b) l’État membre a préalablement et sans préjudice de la procédure judiciaire, y compris la procédure préliminaire et les actes accomplis dans le cadre d’une enquête pénale :
– demandé à l’État membre visé au paragraphe 1 de prendre des mesures et ce dernier n’en a pas pris ou elles n’ont pas été suffisantes,
– notifié à la Commission [européenne] et à l’État membre visé au paragraphe 1 son intention de prendre de telles mesures.
[...] »
9 L’article 8, paragraphe 1, de ladite directive prévoit que « [l]es États membres veillent à ce que l’utilisation de communications commerciales qui font partie d’un service de la société de l’information fourni par un membre d’une profession réglementée, ou qui constituent un tel service, soit autorisée sous réserve du respect des règles professionnelles visant, notamment, l’indépendance, la dignité et l’honneur de la profession ainsi que le secret professionnel et la loyauté envers les clients et les autres membres de la profession ».
La directive 2001/83
10 Contenu dans le titre VII bis, intitulé « Vente à distance au public », de la directive 2001/83, l’article 85 quater de celle-ci énonce :
« 1. Sans préjudice des législations nationales qui interdisent l’offre à la vente à distance au public de médicaments soumis à prescription, au moyen de services de la société de l’information, les États membres veillent à ce que les médicaments soient offerts à la vente à distance au public au moyen de services de la société de l’information tels que définis dans la directive [98/34], aux conditions suivantes :
a) la personne physique ou morale offrant des médicaments est autorisée ou habilitée à délivrer des médicaments au public, également à distance, conformément à la législation nationale de l’État membre dans lequel cette personne est établie ;
b) la personne visée au point a) a notifié à l’État membre dans lequel elle est établie, au minimum, les informations suivantes :
[...]
c) les médicaments respectent la législation nationale de l’État membre de destination conformément à l’article 6, paragraphe 1 ;
d) sans préjudice des obligations d’information énoncées dans la directive [2000/31], le site [I]nternet offrant des médicaments contient au minimum :
[...]
2. Les États membres peuvent imposer des conditions, justifiées par la protection de la santé publique, pour la délivrance au détail, sur leur territoire, de médicaments offerts à la vente à distance au public au moyen de services de la société de l’information.
[...]
6. Sans préjudice de la directive [2000/31] et des exigences énoncées dans le présent titre, les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les personnes autres que celles visées au paragraphe 1 offrant à la vente à distance des médicaments au public au moyen de services de la société de l’information et exerçant leur activité sur leur territoire soient soumises à des sanctions efficaces, proportionnées et dissuasives. »
11 Le titre VIII, intitulé « Publicité », et le titre VIII bis, intitulé « Information et publicité », de la directive 2001/83 comportent, respectivement, les articles 86 à 88 et les articles 88 bis à 100 de ladite directive.
12 L’article 88, paragraphe 1, sous a), de la directive 2001/83 prévoit :
« Les États membres interdisent la publicité auprès du public faite à l’égard des médicaments :
a) qui ne peuvent être délivrés que sur prescription médicale, conformément au titre VI ».
La directive (UE) 2015/1535
13 La directive (UE) 2015/1535 du Parlement européen et du Conseil, du 9 septembre 2015, prévoyant une procédure d’information dans le domaine des réglementations techniques et des règles relatives aux services de la société de l’information (JO 2015, L 241, p. 1), a abrogé et remplacé, à compter du 7 octobre 2015, la directive 98/34.
14 L’article 1er, paragraphe 1, sous b), de la directive 2015/1535 énonce :
« Au sens de la présente directive, on entend par :
[...]
b) “service”, tout service de la société de l’information, c’est-à-dire tout service presté normalement contre rémunération, à distance, par voie électronique et à la demande individuelle d’un destinataire de services. »
15 En vertu de l’article 10, second alinéa, de la directive 2015/1535, les références faites à la directive 98/34 s’entendent comme faites à la directive 2015/1535.
Le droit français
Le code de la santé publique
16 L’article R. 4235–22 du code de la santé publique dispose qu’« [i]l est interdit aux pharmaciens de solliciter la clientèle par des procédés et moyens contraires à la dignité de la profession ».
17 L’article R. 4235–64 de ce code prévoit que « [l]e pharmacien ne doit pas, par quelque procédé ou moyen que ce soit, inciter ses patients à une consommation abusive de médicaments ».
L’arrêté relatif aux bonnes pratiques de dispensation des médicaments
18 Le point 7.1, intitulé « Conseil pharmaceutique », de la section 7, intitulée « Règles complémentaires applicables au commerce électronique de médicaments », de l’annexe de l’arrêté du 28 novembre 2016 relatif aux bonnes pratiques de dispensation des médicaments dans les pharmacies d’officine, les pharmacies mutualistes et les pharmacies de secours minières, mentionnées à l’article L. 5121–5 du code de la santé publique (JORF du 1er décembre 2016, texte no 25, ci–après l’« arrêté relatif aux bonnes pratiques de dispensation des médicaments ») dispose :
« Le site [I]nternet de commerce électronique de médicaments est conçu de façon qu’aucun médicament ne puisse être dispensé sans qu’un échange interactif entre le patient et le pharmacien de l’officine concernée soit rendu possible avant la validation de la commande. Une réponse automatisée à une question posée par le patient n’est donc pas suffisante pour assurer une information et un conseil adaptés au cas particulier du patient.
Certaines données à caractère personnel concernant le patient sont nécessaires au pharmacien pour que ce dernier s’assure de l’adéquation de la commande à l’état de santé du patient et qu’il puisse déceler d’éventuelles contre-indications. Ainsi, avant la validation de la première commande, le pharmacien met en ligne un questionnaire dans lequel l’âge, le poids, la taille, le sexe, les traitements en cours, les antécédents allergiques, les contre-indications et, le cas échéant, l’état de grossesse ou d’allaitement du patient sont renseignés. Le patient doit attester de la véracité de ces informations.
Le questionnaire est rempli lors de la première commande au cours du processus de validation de la commande. Si le questionnaire n’a pas été renseigné, aucun médicament ne peut être délivré. Le pharmacien procède ensuite à une validation du questionnaire, justifiant qu’il a pris connaissance des informations fournies par le patient, avant de valider la commande.
Une actualisation du questionnaire est proposée à chaque commande.
[...] »
L’arrêté relatif aux règles techniques
19 La section 1, intitulée « Fonctionnalités des sites [I]nternet de commerce électronique de médicaments », de l’annexe de l’arrêté du 28 novembre 2016 relatif aux règles techniques applicables aux sites [I]nternet de commerce électronique de médicaments prévues à l’article L. 5125–39 du code de la santé publique (JORF du 1er décembre 2016, texte no 26, ci–après l’« arrêté relatif aux règles techniques ») prévoit que « [l]a recherche de référencement dans des moteurs de recherche ou des comparateurs de prix contre rémunération est interdite ».
Le litige au principal et la question préjudicielle
20 A, une société de droit néerlandais, est enregistrée aux Pays–Bas pour l’exercice d’une activité d’exploitation d’une pharmacie d’officine. Cette société vend également des médicaments en ligne ainsi que des produits de parapharmacie au moyen de plusieurs sites Internet, dont l’un d’eux est spécialement dédié aux consommateurs français. Les médicaments commercialisés par l’intermédiaire de ce site bénéficient, en France, d’une autorisation de mise sur le marché et ne sont pas soumis à prescription médicale obligatoire.
21 A a mené une campagne de publicité pour l’activité de vente en ligne de médicaments ainsi dirigée vers les consommateurs français. Cette campagne comprenait l’insertion de prospectus publicitaires dans des colis expédiés par d’autres acteurs de la vente à distance (méthode dite de « l’asilage ») ainsi que l’envoi de courriers postaux publicitaires. A a également procédé à la publication sur ledit site Internet d’offres promotionnelles consistant à octroyer un rabais sur le prix global de la commande de médicaments lorsque celui-ci dépasse un certain montant, ainsi qu’à l’achat d’un référencement payant sur les moteurs de recherche.
22 Daniel B e.a. ont attrait A devant le tribunal de commerce de Paris (France) en vue, notamment, d’obtenir la réparation du préjudice qu’ils estiment avoir subi du fait de la concurrence déloyale que A aurait exercée en tirant indûment un avantage du non–respect de la réglementation française en matière de publicité et de vente de médicaments en ligne.
23 A considère, quant à elle, que cette réglementation ne lui est pas applicable dès lors qu’elle est régulièrement établie aux Pays–Bas pour une activité de pharmacie d’officine et qu’elle vend ses produits aux consommateurs français par la voie du commerce électronique.
24 Par jugement du 11 juillet 2017, le tribunal de commerce de Paris a jugé que le droit néerlandais régissait la création du site Internet s’adressant aux clients français. Toutefois, selon cette juridiction, les articles R. 4235–22 et R. 4235–64 du code de la santé publique sont applicables aux sociétés établies dans d’autres États membres qui vendent des médicaments par Internet aux patients français. Or, A aurait, en distribuant plus de trois millions de tracts publicitaires en dehors de son officine, sollicité la clientèle française par des moyens indignes de la profession de pharmacien, en violation de ces dispositions. Le tribunal de commerce de Paris en a conclu que la méconnaissance desdites dispositions, ayant conféré à A un avantage économique par rapport aux autres acteurs du marché, était constitutive d’actes de concurrence déloyale.
25 A a interjeté appel de ce jugement devant la cour d’appel de Paris (France) en faisant valoir que les articles R. 4235–22 et R. 4235–64 du code de la santé publique ne lui sont pas applicables. Ces dispositions constitueraient des atteintes au principe d’application des règles du pays d’origine posé à l’article 3 de la directive 2000/31, et à l’article 85 quater de la directive 2001/83 ainsi qu’à la libre circulation des marchandises garantie à l’article 34 TFUE, qui ne seraient pas justifiées par la protection de la santé publique.
26 Devant la cour d’appel de Paris, Daniel B e.a. demandent la confirmation du jugement du tribunal de commerce de Paris en ce que cette juridiction a appliqué le droit français concernant la publicité pour la vente de médicaments et a qualifié d’« acte de concurrence déloyale » la publicité massive effectuée par A, en raison de son caractère contraire à la dignité de la profession de pharmacien ainsi que de son contenu incitatif à la consommation abusive de médicaments. Daniel B e.a. poursuivent la réformation de ce jugement pour le surplus, en faisant valoir que le code de la santé publique et l’arrêté relatif aux bonnes pratiques de dispensation des médicaments régissent également le recours par A au référencement payant. Ces derniers allèguent que les restrictions à la publicité pour la vente de médicaments en ligne, qui résultent du code de la santé publique, sont justifiées par l’objectif de protection de la dignité et de l’honneur de la profession de pharmacien. Ces restrictions seraient proportionnées à la poursuite de cet objectif, lui–même lié à la protection de la santé publique.
27 Dans ces conditions, la cour d’appel de Paris a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :
« [...] [L]a réglementation européenne, dont notamment :
– l’article 34 [TFUE] ;
– les dispositions de l’article 85 quater de la directive [2001/83], [et]
– la clause de marché intérieur de l’article 3 de la directive [2000/31]
permet[–elle] à un État membre de l’Union [européenne] d’imposer sur son territoire aux pharmaciens ressortissants d’un autre État membre de l’Union, des règles spécifiques concernant :
– l’interdiction de solliciter la clientèle par des procédés et moyens considérés comme contraires à la dignité de la profession dans les termes de l’actuel article R. 4235–22 du [code de la santé publique] ?
– l’interdiction d’inciter les patients à une consommation abusive de médicaments dans les termes de l’actuel article R. 4235–64 du [code de la santé publique] ?
– l’obligation d’observer les bonnes pratiques de dispensation des médicaments définies par l’autorité publique de l’État membre, en exigeant en outre l’insertion d’un questionnaire de santé dans le processus de commande de médicaments en ligne et [en] interdisant de recourir au référencement payant, dans les termes de [l’arrêté relatif aux bonnes pratiques de dispensation des médicaments et de l’arrêté relatif aux règles techniques] ? »
Sur la question préjudicielle
Observations liminaires
28 Ainsi qu’il ressort du libellé de la question posée, celle-ci concerne, en substance, la conformité au droit de l’Union d’une réglementation nationale, appliquée par l’État membre de destination d’un service de vente en ligne de médicaments non soumis à prescription médicale, au prestataire de ce service établi dans un autre État membre.
29 En vue de répondre à cette question, il convient, en l’occurrence, d’avoir égard principalement aux dispositions de la directive 2000/31.
30 En effet, tout d’abord, conformément aux paragraphes 1 et 2 de l’article 1er de cette directive, lus ensemble, celle-ci a pour objectif de contribuer au bon fonctionnement du marché intérieur en assurant la libre circulation des services de la société de l’information entre les États membres, en rapprochant, dans la mesure nécessaire, certaines dispositions nationales applicables auxdits services.
31 Ensuite, l’article 2, sous a), de cette directive, lu conjointement avec l’article 1er, paragraphe 1, sous b), de la directive 2015/1535, définit les « services de la société de l’information », comme « tout service presté normalement contre rémunération, à distance, par voie électronique et à la demande individuelle d’un destinataire de services », étant entendu, ainsi qu’il découle du considérant 18 de la directive 2000/31, que ces services englobent un large éventail d’activités économiques qui ont lieu en ligne, telles que, notamment, la vente de biens en ligne.
32 Enfin, s’agissant, plus particulièrement, des services de vente en ligne de médicaments, il découle de l’article 1er, paragraphe 5, de la directive 2000/31, qu’une telle vente ne figure pas parmi les activités exclues de l’application de cette directive (voir, par analogie, arrêt du 2 décembre 2010, Ker-Optika, C‑108/09, EU:C:2010:725, point 27). Pour sa part, l’article 85 quater de la directive 2001/83 relatif aux ventes à distance au public de médicaments au moyen de services de la société de l’information renvoie notamment aux dispositions de la directive 2000/31 et n’interdit pas la vente à distance de médicaments non soumis à prescription médicale qui, seuls, font l’objet de l’affaire en cause au principal.
33 Il s’ensuit qu’un service de vente en ligne de médicaments, tel que celui en cause au principal, est susceptible de constituer un service de la société de l’information, au sens de l’article 2, sous a), de la directive 2000/31 et, partant, de relever du champ d’application de cette directive pour ce qui est des exigences applicables à ce service, qui relèvent du « domaine coordonné », au sens de l’article 2, sous h), de ladite directive.
34 Par ailleurs, en vertu de l’article 3, paragraphe 4, de la directive 2000/31, les États membres peuvent prendre, à l’égard d’un service donné de la société de l’information relevant du domaine coordonné, des mesures dérogeant au principe de libre circulation des services de la société de l’information si les deux conditions cumulatives figurant aux points a) et b) de cette disposition sont remplies (voir, en ce sens, arrêt du 19 décembre 2019, Airbnb Ireland, C‑390/18, EU:C:2019:1112, points 83 et 84). Ainsi, une interprétation de l’article 3, paragraphe 4, de cette directive, selon laquelle il serait permis aux États membres de justifier au titre du droit primaire une exigence ne remplissant pas les conditions prévues à ladite disposition priverait cette dernière de tout effet utile en désavouant, en définitive, l’harmonisation de ce domaine opérée par celle-ci (voir, par analogie, arrêt du 16 juin 2015, Rina Services e.a., C‑593/13, EU:C:2015:399, point 37). Dans ces conditions, il n’y a pas lieu d’apprécier la réglementation nationale en cause au principal à l’aune du droit primaire, notamment de l’article 34 TFUE.
Sur la recevabilité
35 D’une part, le gouvernement français excipe de l’irrecevabilité de la question préjudicielle en ce qu’elle porte sur l’interprétation des dispositions de la directive 2000/31. En effet, une partie privée ne peut opposer les dispositions d’une directive à une autre partie privée dans le cadre d’un litige de nature horizontale, aux fins de faire obstacle à l’application d’une réglementation nationale contraire à ces dispositions. Dès lors, cet aspect de la question posée revêtirait un caractère hypothétique.
36 À cet égard, il convient de rappeler qu’il appartient au seul juge national, qui est saisi du litige et qui doit assumer la responsabilité de la décision juridictionnelle à intervenir, d’apprécier, au regard des particularités de l’affaire, notamment la pertinence des questions qu’il pose à la Cour. En conséquence, dès lors que ces questions portent sur l’interprétation d’une règle de droit de l’Union, la Cour est, en principe, tenue de statuer (voir, en ce sens, arrêts du 16 juin 2015, Gauweiler e.a., C‑62/14, EU:C:2015:400, point 24, ainsi que du 7 février 2018, American Express, C‑304/16, EU:C:2018:66, point 31).
37 Les questions portant sur le droit de l’Union bénéficient d’une présomption de pertinence. Le refus de la Cour de statuer sur une question préjudicielle posée par une juridiction nationale n’est possible que s’il apparaît de manière manifeste que l’interprétation d’une règle de l’Union sollicitée n’a aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal, lorsque le problème est de nature hypothétique ou encore lorsque la Cour ne dispose pas des éléments de fait et de droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées (arrêts du 16 juin 2015, Gauweiler e.a., C‑62/14, EU:C:2015:400, point 25, ainsi que du 7 février 2018, American Express, C‑304/16, EU:C:2018:66, point 32).
38 Certes, il y a lieu de relever que, s’agissant d’un litige entre particuliers, la Cour a jugé de manière constante qu’une directive ne peut pas, par elle-même, créer d’obligations dans le chef d’un particulier et ne peut donc être invoquée en tant que telle à son égard. Toutefois, la Cour a également itérativement jugé que l’obligation des États membres, découlant d’une directive, d’atteindre le résultat prévu par celle-ci ainsi que leur devoir de prendre toutes mesures générales ou particulières propres à assurer l’exécution de cette obligation s’imposent à toutes les autorités des États membres, y compris, dans le cadre de leurs compétences, aux autorités juridictionnelles (arrêt du 19 avril 2016, DI, C‑441/14, EU:C:2016:278, point 30 et jurisprudence citée).
39 En appliquant le droit national, les juridictions nationales appelées à l’interpréter sont ainsi notamment tenues de prendre en considération l’ensemble des règles de ce droit et de faire application des méthodes d’interprétation reconnues par celui-ci afin de l’interpréter, dans toute la mesure possible, à la lumière du texte ainsi que de la finalité de la directive en cause pour atteindre le résultat fixé par celle-ci et de se conformer ainsi à l’article 288, troisième alinéa, TFUE (arrêt du 19 avril 2016, DI, C‑441/14, EU:C:2016:278, point 31 et jurisprudence citée).
40 Dans ces conditions, il n’apparaît pas de manière manifeste que la question posée, en ce qu’elle porte sur la directive 2000/31, soulève un problème de nature hypothétique.
41 D’autre part, A fait valoir que la République française n’a pas respecté l’obligation découlant de l’article 3, paragraphe 4, sous b), second tiret, de la directive 2000/31 de notifier les mesures restrictives qui font l’objet de l’affaire au principal.
42 À cet égard, il convient de relever que, lorsqu’une réglementation nationale qui prévoit différentes interdictions ou obligations imposées à un prestataire de services de la société de l’information restreint ainsi la liberté des services, l’État membre concerné doit, en application de ladite disposition, avoir préalablement notifié son intention de prendre les mesures restrictives concernées à la Commission et à l’État membre sur le territoire duquel le prestataire du service visé est établi (arrêt du 19 décembre 2019, Airbnb Ireland, C‑390/18, EU:C:2019:1112, point 85).
43 La Cour a, par ailleurs, déjà jugé qu’une telle obligation de notification constitue une exigence procédurale de nature substantielle justifiant l’inopposabilité aux particuliers des mesures non notifiées restreignant la libre circulation des services de la société de l’information (arrêt du 19 décembre 2019, Airbnb Ireland, C‑390/18, EU:C:2019:1112, point 94).
44 Cependant, ainsi qu’il ressort de la jurisprudence citée au point 37 du présent arrêt, les questions portant sur le droit de l’Union bénéficient d’une présomption de pertinence. Or, cette présomption ne saurait être renversée par la simple circonstance que l’une des parties au principal conteste un certain fait dont il appartient à la juridiction de renvoi et non à la Cour de vérifier l’existence (voir, en ce sens, arrêts du 5 décembre 2006, Cipolla e.a., C‑94/04 et C‑202/04, EU:C:2006:758, point 26, ainsi que du 14 avril 2016, Polkomtel, C‑397/14, EU:C:2016:256, point 38).
45 Il découle de tout ce qui précède que la question préjudicielle est recevable.
Sur le fond
46 Eu égard aux précisions exposées aux points 28 à 34 du présent arrêt et en vue de fournir à la juridiction de renvoi une réponse utile aux fins de résoudre le litige dont elle est saisie, il y a lieu de comprendre sa question comme visant à savoir, en substance, si la directive 2000/31 doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à l’application, par l’État membre de destination d’un service de vente en ligne de médicaments non soumis à prescription médicale, au prestataire de ce service établi dans un autre État membre, d’une réglementation nationale :
– interdisant à des pharmacies vendant ces médicaments, de solliciter leur clientèle par certains procédés et moyens, notamment ceux consistant à distribuer massivement des courriers postaux et des tracts à des fins publicitaires en dehors de leur officine ;
– interdisant à ces pharmacies de faire des offres promotionnelles visant à octroyer un rabais sur le prix global de la commande de médicaments lorsqu’un certain montant est dépassé ;
– obligeant lesdites pharmacies à insérer un questionnaire de santé dans le processus de commande de médicaments en ligne ;
– interdisant à ces mêmes pharmacies de recourir au référencement payant dans des moteurs de recherche et des comparateurs de prix.
Sur la première partie de la question posée
47 Par la première partie de sa question, la juridiction de renvoi cherche à savoir, en substance, si la directive 2000/31 doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à l’application, par l’État membre de destination d’un service de vente en ligne de médicaments non soumis à prescription médicale, au prestataire de ce service établi dans un autre État membre, d’une réglementation nationale interdisant à des pharmacies de solliciter leur clientèle par certains procédés et moyens, notamment ceux consistant à distribuer massivement des courriers postaux et des tracts à des fins publicitaires en dehors de leur officine.
48 En l’occurrence, il ressort de la décision de renvoi que le prestataire en cause au principal effectue une campagne de publicité multiforme et de large ampleur pour ses services de vente en ligne, tant au moyen de supports physiques, tels que notamment des courriers postaux ou des tracts, que par l’intermédiaire de son site Internet.
49 En vue de répondre à la première partie de la question posée, il importe d’emblée de relever qu’il n’y a pas lieu de tenir compte des titres VIII et VIII bis de la directive 2001/83 relatifs à la publicité pour les médicaments.
50 En effet, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 52 de ses conclusions, les articles 86 à 100 de la directive 2001/83 qui forment lesdits titres s’attachent à réglementer le contenu du message publicitaire et les modalités de la publicité pour des médicaments déterminés, mais ne régissent pas la publicité pour les services de vente en ligne de médicaments.
51 Il convient donc de vérifier, en premier lieu, si l’activité de publicité, telle que décrite au point 48 du présent arrêt, relève de la directive 2000/31, et ce, selon que cette activité s’effectue au moyen de supports physiques ou de supports électroniques.
52 À cet égard, l’article 3, paragraphe 1, de la directive 2000/31 prévoit que chaque État membre veille à ce que les services de la société de l’information fournis par un prestataire établi sur son territoire respectent les dispositions nationales applicables dans cet État membre relevant du « domaine coordonné », au sens de l’article 2, sous h), de cette directive.
53 Selon cette dernière disposition, le « domaine coordonné » ne couvre que les exigences applicables aux services qui sont fournis par voie électronique et, notamment, ainsi qu’il ressort du considérant 21 de cette même directive, les exigences relatives à la publicité en ligne.
54 Or, la publicité en cause au principal est en partie effectuée au moyen de supports physiques.
55 Cela étant, il convient de relever qu’une telle publicité vise, dans son ensemble, et indépendamment du procédé par lequel elle est concrètement effectuée, à attirer vers le site Internet d’une pharmacie des consommateurs potentiels et à promouvoir la vente de ses produits en ligne.
56 Une telle publicité faite par le prestataire apparaît ainsi comme un élément accessoire et indissociable de son service de vente de médicaments en ligne duquel elle tire tout son sens économique.
57 Dans ces circonstances, il serait artificiel de considérer la partie de la publicité effectuée en ligne comme relevant du « domaine coordonné » et d’exclure de ce domaine la partie de la publicité réalisée au moyen de supports physiques.
58 Au demeurant, cette interprétation est corroborée par l’article 2, sous h), i), de la directive 2000/31 qui prévoit que le « domaine coordonné » a trait à des exigences liées à l’exercice de l’activité d’un service de la société de l’information, telles que les exigences portant notamment sur le comportement du prestataire, la qualité ou le contenu du service, « y compris en matière de publicité ».
59 Il découle de ce qui précède que, indépendamment du support physique ou électronique au moyen duquel elle s’effectue, une activité de publicité telle que celle en cause au principal constitue un élément accessoire et indissociable du service de vente en ligne et relève, à ce titre, dans son intégralité, du « domaine coordonné », au sens de la directive 2000/31.
60 Dans ces conditions, il importe de rappeler, en deuxième lieu, que l’État membre de destination d’un service de vente en ligne de médicaments non soumis à prescription médicale ne peut, s’agissant de ladite activité, en principe, en vertu de l’article 3, paragraphe 2, de la directive 2000/31, restreindre la libre circulation des services de la société de l’information en provenance d’un autre État membre.
61 En l’occurrence, une interdiction, telle que celle en cause au principal, imposée par un État membre, est de nature à restreindre la possibilité pour une pharmacie, établie dans un autre État membre, de se faire connaître auprès de sa clientèle potentielle dans ce premier État membre et de promouvoir le service de vente de ses produits en ligne qu’elle propose à cette dernière.
62 Par conséquent, une telle interdiction doit être considérée comme comportant une restriction à la libre prestation des services de la société de l’information.
63 Cela étant, en troisième lieu, en vertu de l’article 3, paragraphe 4, sous a), de la directive 2000/31, les États membres peuvent, à l’égard d’un service donné de la société de l’information, prendre des mesures qui dérogent au paragraphe 2 de cet article, à condition, d’abord, que celles-ci soient nécessaires afin de garantir l’ordre public, la protection de la santé publique, la sécurité publique ou la protection des consommateurs, ensuite, qu’elles soient prises à l’encontre d’un service de la société de l’information qui porte effectivement atteinte à ces objectifs ou constitue un risque sérieux et grave d’atteinte à ces derniers, et, enfin, qu’elles soient proportionnées auxdits objectifs.
64 S’agissant des conditions de nécessité et de proportionnalité, prévues à l’article 3, paragraphe 4, sous a), de la directive 2000/31, il y a lieu de tenir compte, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 122 de ses conclusions, de la jurisprudence relative aux articles 34 et 56 TFUE, aux fins d’apprécier la conformité au droit de l’Union de la réglementation nationale en cause, dans la mesure où ces conditions recoupent largement celles au respect desquelles est subordonnée toute entrave aux libertés fondamentales garanties par ces articles du traité FUE.
65 À cet égard, le gouvernement français fait valoir que l’interdiction pour des pharmacies vendant des médicaments en ligne sans prescription médicale, de solliciter leur clientèle par des procédés et des moyens tels que ceux en cause au principal, utilisés massivement et intensivement, est justifiée au regard de la protection de la dignité de la profession de pharmacien.
66 Or, au regard de l’importance de la relation de confiance devant prévaloir entre un professionnel de la santé et son patient, la protection de la dignité d’une profession réglementée, à laquelle fait également écho l’article 8, paragraphe 1, de la directive 2000/31, est de nature à constituer une raison impérieuse d’intérêt général, relevant de la protection de la santé publique, susceptible de justifier une restriction à la libre prestation des services (voir, en ce sens, arrêt du 4 mai 2017, Vanderborght, C‑339/15, EU:C:2017:335, points 67 et 68).
67 À cet égard, la Cour a déjà jugé, notamment, que l’usage intensif de publicités ou le choix de messages promotionnels agressifs sont susceptibles de nuire à la protection de la santé et de porter atteinte à la dignité d’une profession de la santé (voir, par analogie, arrêt du 4 mai 2017, Vanderborght, C‑339/15, EU:C:2017:335, point 69).
68 L’interdiction en cause au principal poursuivant ainsi un objectif de protection de la santé publique, visé à l’article 3, paragraphe 4, sous a), de la directive 2000/31, ainsi que, au demeurant, à l’article 85 quater, paragraphe 2, de la directive 2001/83, il convient, ensuite, d’apprécier si cette interdiction est apte à garantir la réalisation de cet objectif.
69 À cet égard, une réglementation interdisant au prestataire, tel que celui en cause au principal, de faire une campagne de publicité massive et intensive, y compris en dehors de l’officine et au moyen de supports physiques et électroniques, apparaît comme apte à atteindre l’objectif de protection de la dignité de la profession de pharmacien et, en définitive, l’objectif de protection de la santé publique.
70 En effet, comme le soutient, à juste titre, le gouvernement espagnol, une telle pratique présente un risque d’assimilation des médicaments à des biens de consommation ordinaires, tels que ceux concernés par l’asilage auquel il est fait recours. En outre, la distribution à grande échelle de prospectus publicitaires véhicule une image commerciale et mercantile de la profession de pharmacien susceptible d’altérer la perception par le public de cette profession.
71 S’agissant du caractère nécessaire d’une interdiction telle que celle en cause au principal, il convient de rappeler que la santé et la vie des personnes occupent le premier rang parmi les biens et les intérêts protégés par le traité FUE et qu’il appartient aux États membres de décider du niveau auquel ils entendent assurer la protection de la santé publique ainsi que de la manière dont ce niveau doit être atteint. Celui-ci pouvant varier d’un État membre à l’autre, il convient de reconnaître aux États membres une marge d’appréciation (arrêt du 18 septembre 2019, VIPA, C‑222/18, EU:C:2019:751, point 71).
72 Cela étant, la Cour a déjà jugé que, nonobstant cette marge d’appréciation, la restriction découlant de l’application d’une législation nationale interdisant de manière générale et absolue toute forme de publicité utilisée par des professionnels de la santé pour promouvoir leurs activités de soins dépasse ce qui est nécessaire pour protéger la santé publique et la dignité d’une profession réglementée (voir, en ce sens, arrêt du 4 mai 2017, Vanderborght, C‑339/15, EU:C:2017:335, points 72 et 75).
73 Eu égard à cette jurisprudence, il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier si l’interdiction en cause au principal ne conduit pas à empêcher le prestataire en cause au principal d’effectuer une quelconque publicité en dehors de son officine, quel qu’en soit le support ou l’ampleur. Si tel était le cas, cette interdiction irait au-delà de ce qui est nécessaire pour garantir la réalisation des objectifs poursuivis.
74 Il découle de l’ensemble des considérations qui précèdent qu’il convient de répondre à la première partie de la question posée que la directive 2000/31 doit être interprétée en ce sens qu’elle ne s’oppose pas à l’application, par l’État membre de destination d’un service de vente en ligne de médicaments non soumis à prescription médicale, au prestataire de ce service établi dans un autre État membre, d’une réglementation nationale interdisant à des pharmacies de solliciter leur clientèle par certains procédés et moyens, notamment ceux consistant à distribuer massivement des courriers postaux et des tracts à des fins publicitaires en dehors de leur officine, à condition toutefois qu’elle ne conduise pas à empêcher le prestataire en cause d’effectuer une quelconque publicité en dehors de son officine, quel qu’en soit le support ou l’ampleur, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier.
Sur la deuxième partie de la question posée
75 Par la deuxième partie de sa question, la juridiction de renvoi cherche à savoir, en substance, si la directive 2000/31 doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à l’application, par l’État membre de destination d’un service de vente en ligne de médicaments non soumis à prescription médicale, au prestataire de ce service établi dans un autre État membre, d’une réglementation nationale interdisant à des pharmacies de faire des offres promotionnelles visant à octroyer un rabais sur le prix global de la commande de médicaments lorsqu’il dépasse un certain montant.
76 En l’occurrence, une interdiction, telle que celle en cause au principal, imposée par un État membre, est de nature à restreindre la possibilité pour une pharmacie, établie dans un autre État membre, d’attirer des personnes intéressées résidant dans ce premier État membre et de rendre plus attrayant le service de vente en ligne qu’elle y propose.
77 Il s’ensuit qu’une telle interdiction doit être considérée comme impliquant une restriction à la libre prestation des services de la société de l’information, au sens de l’article 3, paragraphe 2, de la directive 2000/31.
78 Il convient, dès lors, conformément à l’article 3, paragraphe 4, sous a), de cette directive, d’examiner si cette interdiction poursuit un objectif visé à cette disposition et si elle est apte à garantir celui-ci et ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour que cet objectif soit atteint.
79 Tout d’abord, le gouvernement français indique que l’interdiction en cause au principal vise à prévenir la consommation excessive ou inappropriée de médicaments.
80 À cet égard, il ressort de la jurisprudence qu’un tel objectif contribue à la réalisation d’un niveau élevé de protection de la santé publique (voir, en ce sens, arrêt du 19 mai 2009, Apothekerkammer des Saarlandes e.a., C‑171/07 et C‑172/07, EU:C:2009:316, points 32 à 34).
81 Ensuite, étant donné que des offres promotionnelles, telles que celles en cause au principal, sont susceptibles d’inciter les intéressés à acheter et, le cas échéant, à surconsommer des médicaments, il y a lieu de considérer que l’interdiction de telles offres est apte à garantir l’objectif de protection de la santé publique.
82 Enfin, s’agissant du caractère nécessaire de cette interdiction, A estime que celle‑ci revient en fait à considérer toute remise de prix comme étant de nature à inciter à la consommation abusive de médicaments, dès lors qu’elle ne fixe aucun seuil à partir duquel une offre promotionnelle doit être jugée comme entraînant une surconsommation. Par ailleurs, ladite interdiction concernerait également les produits parapharmaceutiques.
83 À cet égard, et dans la mesure où la Cour ne dispose pas d’informations suffisantes quant à l’existence éventuelle de conditions plus précises encadrant l’application de l’interdiction des offres promotionnelles et, notamment, quant au point de savoir si cette interdiction porte sur la promotion des seuls médicaments ou également de produits parapharmaceutiques, il appartiendra à la juridiction de renvoi de vérifier comment l’interdiction en cause est concrètement appliquée et si une telle application va, le cas échéant, au-delà de ce qui est nécessaire pour protéger la santé publique.
84 Il découle des considérations qui précèdent qu’il convient de répondre à la deuxième partie de la question posée que la directive 2000/31 doit être interprétée en ce sens qu’elle ne s’oppose pas à l’application, par l’État membre de destination d’un service de vente en ligne de médicaments non soumis à prescription médicale, au prestataire de ce service établi dans un autre État membre, d’une réglementation nationale interdisant à des pharmacies de faire des offres promotionnelles visant à octroyer un rabais sur le prix global de la commande de médicaments lorsqu’il dépasse un certain montant, à condition toutefois qu’une telle interdiction soit suffisamment encadrée, et notamment ciblée sur les seuls médicaments et non sur de simples produits parapharmaceutiques, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier.
Sur la troisième partie de la question posée
85 Par la troisième partie de sa question, la juridiction de renvoi se demande, en substance, si la directive 2000/31 doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à l’application, par l’État membre de destination d’un service de vente en ligne de médicaments non soumis à prescription médicale, au prestataire de ce service établi dans un autre État membre, d’une réglementation nationale imposant à des pharmacies vendant de tels médicaments l’obligation d’insérer un questionnaire de santé dans le processus de commande de médicaments en ligne.
86 En l’occurrence, la réglementation nationale concernée subordonne la validation de la première commande de médicaments effectuée par un patient sur le site Internet d’une officine au remplissage préalable d’un questionnaire de santé en ligne.
87 À cet égard, il convient de relever que, aux termes de l’article 2, sous h), i), de la directive 2000/31, le « domaine coordonné » englobe les exigences portant sur l’exercice de l’activité d’un service de la société de l’information, telles que notamment les exigences portant sur le contenu du service, y compris en matière de contrat.
88 Étant donné que la mesure en cause au principal encadre les conditions dans lesquelles le contrat de vente en ligne de médicaments non soumis à prescription médicale peut être conclu ainsi que la manière dont l’activité de vente et de conseil du pharmacien doit être exercée en ligne, elle doit être considérée comme relevant du « domaine coordonné » au sens de la directive 2000/31.
89 Partant, l’article 3, paragraphe 2, de la directive 2000/31, selon lequel l’État membre de destination d’un service de vente en ligne de médicaments ne peut, en principe, restreindre la libre circulation des services de la société de l’information en provenance d’un autre État membre, trouve à s’appliquer.
90 Or, une mesure, telle que celle en cause au principal, est manifestement de nature à produire un effet dissuasif sur des patients souhaitant acheter des médicaments en ligne et constitue, par conséquent, une telle restriction.
91 Il convient, dès lors, d’examiner, conformément à l’article 3, paragraphe 4, sous a), de cette directive, si une telle mesure poursuit un objectif visé à cette disposition et si elle est apte à garantir celui-ci et ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour que cet objectif soit atteint.
92 Tout d’abord, afin de justifier ladite mesure, le gouvernement français invoque l’objectif d’assurer un conseil personnalisé au patient en vue de le protéger contre une utilisation inappropriée de médicaments.
93 À cet égard, il convient de relever que la Cour a déjà reconnu qu’un tel objectif tenant à la protection de la santé publique est légitime (voir, en ce sens, arrêt du 11 décembre 2003, Deutscher Apothekerverband, C‑322/01, EU:C:2003:664, point 106).
94 Certes, la consommation de médicaments non soumis à prescription médicale ne présente pas, en principe, de risques analogues à ceux liés à la consommation des médicaments soumis à prescription médicale (voir, en ce sens, arrêt du 11 juin 2020, ratiopharm, C‑786/18, EU:C:2020:459, point 36). Toutefois, il ne saurait être exclu que certains risques s’attachent également à l’utilisation de médicaments non soumis à prescription médicale.
95 La mesure en cause au principal poursuit ainsi un objectif de protection de la santé publique, visé à l’article 3, paragraphe 4, sous a), de la directive 2000/31.
96 Le gouvernement français fait valoir qu’un questionnaire médical, tel que celui en cause au principal, s’impose dans la mesure où le pharmacien concerné ne reçoit pas le patient au sein de son officine et ne peut donc pas discuter directement avec lui. Il ne pourrait, dès lors, lui prodiguer un conseil de sa propre initiative. Dans ces circonstances, il y aurait lieu de considérer que ce questionnaire lui permet de mieux connaître le patient intéressé et, en décelant d’éventuelles contre-indications, de lui assurer la dispensation de médicaments la plus appropriée.
97 De telles considérations permettent en effet de considérer que la mesure en cause au principal est apte à protéger la santé du patient.
98 S’agissant, enfin, du caractère nécessaire d’une telle mesure, A fait valoir que l’arrêté relatif aux bonnes pratiques de dispensation des médicaments assurerait déjà que les patients puissent bénéficier de conseils personnalisés en exigeant que les pharmacies en ligne leur accordent la possibilité d’un échange interactif à distance avec un pharmacien. A observe, par ailleurs, que les quantités commandées de médicaments par un intéressé, par l’intermédiaire de son site Internet, sont contrôlées au cas par cas, sur la base de divers paramètres, parmi lesquels l’historique des commandes faites par l’intéressé. Ces vérifications seraient suffisantes afin de prévenir le risque d’une utilisation inappropriée de médicaments. La mesure en cause au principal irait, dès lors, au-delà de ce qui est nécessaire.
99 Toutefois, la Cour a déjà jugé que la multiplication des éléments interactifs existant sur Internet devant être utilisés par le client avant que celui–ci ne puisse procéder à un achat de médicaments constitue une mesure acceptable, moins attentatoire à la liberté de circulation des marchandises qu’une interdiction de vente en ligne de médicaments, qui permet de réaliser aussi efficacement l’objectif visant à diminuer le risque de mésusage des médicaments achetés en ligne (voir, en ce sens, arrêt du 11 décembre 2003, Deutscher Apothekerverband, C‑322/01, EU:C:2003:664, points 112 à 114).
100 Eu égard à cette jurisprudence ainsi qu’à la marge d’appréciation reconnue aux États membres et rappelée au point 71 du présent arrêt, une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, n’apparaît pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour garantir la réalisation de l’objectif poursuivi.
101 En outre, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 148 de ses conclusions, la faculté pour le patient de consulter un pharmacien en amont de sa commande, même couplée à un contrôle des quantités achetées par l’intéressé, ne constitue pas un moyen aussi efficace qu’un contrôle effectué moyennant la collecte préalable d’informations de la part du patient.
102 Il s’ensuit qu’il y a lieu de répondre à la troisième partie de la question posée que la directive 2000/31 doit être interprétée en ce sens qu’elle ne s’oppose pas à l’application, par l’État membre de destination d’un service de vente en ligne de médicaments non soumis à prescription médicale, au prestataire de ce service établi dans un autre État membre, d’une réglementation nationale imposant à des pharmacies vendant de tels médicaments l’obligation d’insérer un questionnaire de santé dans le processus de commande de médicaments en ligne.
Sur la quatrième partie de la question posée
103 Par la quatrième partie de sa question, la juridiction de renvoi cherche à savoir, en substance, si la directive 2000/31 doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à l’application, par l’État membre de destination d’un service de vente en ligne de médicaments non soumis à prescription médicale, au prestataire de ce service établi dans un autre État membre, d’une réglementation nationale interdisant à des pharmacies vendant de tels médicaments de recourir au référencement payant dans des moteurs de recherche et des comparateurs de prix.
104 Une telle réglementation est de nature à restreindre l’éventail des possibilités pour une pharmacie de se faire connaître auprès de la clientèle potentielle résidant dans un autre État membre et de promouvoir le service de vente en ligne qu’elle propose à cette dernière.
105 Dans ces conditions, ladite réglementation doit être considérée comme comportant une restriction à la libre prestation des services de la société de l’information dérogeant à l’interdiction de principe découlant de l’article 3, paragraphe 2, de la directive 2000/31.
106 Il convient, dès lors, d’examiner, conformément à l’article 3, paragraphe 4, sous a), de cette directive, si l’interdiction en cause au principal poursuit un objectif visé à cette disposition et si elle est apte à garantir cet objectif et ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour que cet objectif soit atteint.
107 Ainsi qu’il l’a indiqué lors de l’audience devant la Cour, le gouvernement français semble justifier l’interdiction du référencement payant dans des moteurs de recherche et des comparateurs de prix par le risque d’une incidence de celui-ci sur la répartition équilibrée des officines de pharmacie sur l’ensemble du territoire national, un tel référencement étant de nature à concentrer la commercialisation des médicaments entre les mains des officines de taille importante.
108 À cet égard, la Cour a déjà reconnu que l’objectif d’assurer un approvisionnement en médicaments de la population sûr et de qualité sur le territoire national est susceptible de justifier une restriction aux échanges entre les États membres, dans la mesure où il contribue à la protection de la santé et de la vie des personnes (voir, en ce sens, arrêt du 18 septembre 2019, VIPA, C‑222/18, EU:C:2019:751, point 68 et jurisprudence citée).
109 L’interdiction en cause au principal poursuivant ainsi l’objectif de protection de la santé publique, visé à l’article 3, paragraphe 4, sous a), de la directive 2000/31, il convient d’apprécier si elle est apte à garantir la réalisation de cet objectif et si elle ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire à cette fin.
110 La Cour a déjà jugé que, lorsque des incertitudes subsistent quant à l’existence ou à l’importance de risques pour la santé des personnes, il importe que l’État membre concerné puisse prendre des mesures de protection sans avoir à attendre que la réalité de ces risques soit pleinement démontrée. En outre, l’État membre concerné peut prendre les mesures qui réduisent, autant que possible, un risque pour la santé publique, y compris relatif à l’approvisionnement en médicaments de la population sûr et de qualité (arrêt du 18 septembre 2019, VIPA, C‑222/18, EU:C:2019:751, point 72 et jurisprudence citée).
111 Cela étant, il appartient aux États membres, dans chaque cas d’espèce, notamment, d’apporter les preuves de l’aptitude et du caractère nécessaire de la mesure dérogatoire à une liberté fondamentale qu’ils adoptent (voir, en ce sens, arrêt du 18 septembre 2019, VIPA, C‑222/18, EU:C:2019:751, points 69 et 70 ainsi que jurisprudence citée).
112 Or, il y a lieu de relever que le gouvernement français n’a étayé son affirmation générale, mentionnée au point 107 du présent arrêt, par aucun élément de preuve particulier. Une telle affirmation ne saurait, partant, satisfaire à l’exigence de preuve précisée au point précédent.
113 Par conséquent, il appartiendra à la juridiction de renvoi d’examiner de manière objective si les éléments de preuve qui viendraient le cas échéant à être fournis devant elle permettent raisonnablement d’estimer que les moyens choisis sont aptes à réaliser les objectifs poursuivis ainsi que s’il est possible d’atteindre ces derniers par des mesures moins restrictives (voir, par analogie, arrêt du 18 septembre 2019, VIPA, C‑222/18, EU:C:2019:751, point 70 et jurisprudence citée).
114 Il s’ensuit qu’il convient de répondre à la quatrième partie de la question posée que la directive 2000/31 doit être interprétée en ce sens qu’elle s’oppose à l’application, par l’État membre de destination d’un service de vente en ligne de médicaments non soumis à prescription médicale, au prestataire de ce service établi dans un autre État membre, d’une réglementation nationale interdisant à des pharmacies vendant de tels médicaments de recourir au référencement payant dans des moteurs de recherche et des comparateurs de prix, à moins qu’il ne soit dûment établi devant la juridiction de renvoi qu’une telle réglementation est apte à garantir la réalisation d’un objectif de protection de la santé publique et qu’elle ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour que cet objectif soit atteint.
115 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la question posée que la directive 2000/31 doit être interprétée en ce sens :
– qu’elle ne s’oppose pas à l’application, par l’État membre de destination d’un service de vente en ligne de médicaments non soumis à prescription médicale, au prestataire de ce service établi dans un autre État membre, d’une réglementation nationale interdisant à des pharmacies de solliciter leur clientèle par certains procédés et moyens, notamment ceux consistant à distribuer massivement des courriers postaux et des tracts à des fins publicitaires en dehors de leur officine, à condition qu’elle ne conduise pas à empêcher le prestataire en cause d’effectuer une quelconque publicité en dehors de son officine, quel qu’en soit le support ou l’ampleur, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier ;
– qu’elle ne s’oppose pas à l’application, par l’État membre de destination d’un service de vente en ligne de médicaments non soumis à prescription médicale, au prestataire de ce service établi dans un autre État membre, d’une réglementation nationale interdisant à des pharmacies de faire des offres promotionnelles visant à octroyer un rabais sur le prix global de la commande de médicaments lorsqu’il dépasse un certain montant, à condition toutefois qu’une telle interdiction soit suffisamment encadrée, et notamment ciblée sur les seuls médicaments et non sur de simples produits parapharmaceutiques, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier ;
– qu’elle ne s’oppose pas à l’application, par l’État membre de destination d’un service de vente en ligne de médicaments non soumis à prescription médicale, au prestataire de ce service établi dans un autre État membre, d’une réglementation nationale imposant à des pharmacies vendant de tels médicaments l’obligation d’insérer un questionnaire de santé dans le processus de commande de médicaments en ligne ;
– qu’elle s’oppose à l’application, par l’État membre de destination d’un service de vente en ligne de médicaments non soumis à prescription médicale, au prestataire de ce service établi dans un autre État membre, d’une réglementation nationale interdisant à des pharmacies vendant de tels médicaments de recourir au référencement payant dans des moteurs de recherche et des comparateurs de prix, à moins qu’il ne soit dûment établi devant la juridiction de renvoi qu’une telle réglementation est apte à garantir la réalisation d’un objectif de protection de la santé publique et qu’elle ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour que cet objectif soit atteint.
Sur les dépens
116 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.
Par ces motifs, la Cour (troisième chambre) dit pour droit :
La directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil, du 8 juin 2000, relative à certains aspects juridiques des services de la société de l’information, et notamment du commerce électronique dans le marché intérieur (« directive sur le commerce électronique »), doit être interprétée en ce sens :
– qu’elle ne s’oppose pas à l’application, par l’État membre de destination d’un service de vente en ligne de médicaments non soumis à prescription médicale, au prestataire de ce service établi dans un autre État membre, d’une réglementation nationale interdisant à des pharmacies de solliciter leur clientèle par certains procédés et moyens, notamment ceux consistant à distribuer massivement des courriers postaux et des tracts à des fins publicitaires en dehors de leur officine, à condition qu’elle ne conduise pas à empêcher le prestataire en cause d’effectuer une quelconque publicité en dehors de son officine, quel qu’en soit le support ou l’ampleur, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier ;
– qu’elle ne s’oppose pas à l’application, par l’État membre de destination d’un service de vente en ligne de médicaments non soumis à prescription médicale, au prestataire de ce service établi dans un autre État membre, d’une réglementation nationale interdisant à des pharmacies de faire des offres promotionnelles visant à octroyer un rabais sur le prix global de la commande de médicaments lorsqu’il dépasse un certain montant, à condition toutefois qu’une telle interdiction soit suffisamment encadrée, et notamment ciblée sur les seuls médicaments et non sur de simples produits parapharmaceutiques, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier ;
– qu’elle ne s’oppose pas à l’application, par l’État membre de destination d’un service de vente en ligne de médicaments non soumis à prescription médicale, au prestataire de ce service établi dans un autre État membre, d’une réglementation nationale imposant à des pharmacies vendant de tels médicaments l’obligation d’insérer un questionnaire de santé dans le processus de commande de médicaments en ligne ;
– qu’elle s’oppose à l’application, par l’État membre de destination d’un service de vente en ligne de médicaments non soumis à prescription médicale, au prestataire de ce service établi dans un autre État membre, d’une réglementation nationale interdisant à des pharmacies vendant de tels médicaments de recourir au référencement payant dans des moteurs de recherche et des comparateurs de prix, à moins qu’il ne soit dûment établi devant la juridiction de renvoi qu’une telle réglementation est apte à garantir la réalisation d’un objectif de protection de la santé publique et qu’elle ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour que cet objectif soit atteint.