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Décisions

Cass. com., 30 septembre 2020, n° 18-22.724

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Alteo Gardanne (Sté), Avazeri (ès qual.), Jeannerot (ès qual.)

Défendeur :

Entreprise de Bâtiment Daniel Fils (Sté), Louis et Lageat (ès qual.)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

Mme Poillot-Peruzzetto

Avocat général :

M. Douvreleur

Avocats :

Me Occhipinti, SCP Spinosi et Sureau,

T. com. Marseille, du 26 janv. 2016

26 janvier 2016

Reprise d’instance et intervention

1. Il est donné acte à MM. Azaveri et Jeannerot, de leur intervention volontaire, en qualité d'administrateurs au redressement judiciaire de la société Alteo Gardanne, au soutien du pourvoi formé par cette société.

2. Il est donné acte à la SCP Louis et Lageat de ce qu’elle reprend l'instance en qualité de liquidateur judiciaire de la société Entreprise de Bâtiment Daniel et Fils.

Faits et procédure  

3. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 23 mai 2018), la société Aluminium Pechiney a conclu, à partir du 1er juin 1998, plusieurs contrats successifs avec la société Entreprise de Bâtiment Daniel Fils (la société Daniel), qui exerce l’activité de nettoyage industriel, pour le nettoyage de son usine de Gardanne, spécialisée dans la production d'alumine. Ces sociétés ont conclu, le 2 septembre 2008, une convention complémentaire, dite « contrat filtre presse », ayant pour objet les prestations de transport et stockage inhérentes au traitement et à l'exploitation des déchets inertes, notamment la bauxaline, de la même usine. Ayant repris cette activité de la société Aluminium Pechiney, la société Alteo Gardanne (la société Alteo) a poursuivi cette relation jusqu'au 2 septembre 2013, date à laquelle elle a informé la société Daniel du lancement d'une procédure d'appel d'offres pour une entrée en fonction en janvier 2014.  

4. Reprochant à la société Alteo la rupture brutale des relations commerciales établies, la société Daniel l’a assignée en réparation de ses préjudices.

Examen des moyens

Sur le moyen unique du pourvoi incident

5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Mais sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa première branche  

Enoncé du moyen

6. La société Alteo fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société Daniel la somme de 414 140 euros hors taxe à titre de dommages-intérêts pour rupture brutale de la relation commerciale établie au titre du contrat de prestation de nettoyage industriel alors « que la société Alteo Gardanne demandait qu'en cas de condamnation pour rupture brutale des relations commerciales, la plus-value réalisée par la société Daniel Fils lors de la vente de ses matériels soit prise en compte ; que la société Daniel Fils, dans le calcul de son dommage, déduisait explicitement cette plus-value ; qu'en s'abstenant d'en tenir compte dans le calcul du préjudice, la cour d'appel a méconnu l'accord des parties sur ce point, violant ainsi l'article 4 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour  

Vu l’article 4 du code de procédure civile :

7. Selon ce texte, l’objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties.

8. Pour condamner la société Alteo à payer à la société Daniel la somme de 414 140 euros à titre de dommages-intérêts pour rupture brutale de la relation commerciale établie au titre du contrat de prestation de nettoyage industriel, l’arrêt justifie ce montant par la seule application du taux de marge sur coûts variables au chiffre d’affaires mensuel moyen, multiplié par le nombre de mois de préavis.

9. En statuant ainsi, sans tenir compte de la plus-value réalisée par la société Daniel lors de la vente de ses matériels, que les parties étaient convenues, comme elles en avaient la possibilité, de déduire du montant du préjudice causé par la brutalité de la rupture de leur relation, la cour d’appel, qui a méconnu l'objet du litige, a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

10. La cassation, qui porte sur la condamnation au paiement de dommages-intérêts pour rupture brutale de la relation au titre du contrat de prestation de nettoyage industriel, ainsi que sur les chefs de dispositif relatifs aux dépens d’appel et à l’application de l’article 700 du code de procédure civile, ne remet pas en cause l’arrêt attaqué en ce qu’il confirme le jugement sur les autres points, notamment sur le rejet des demandes formées par la société Daniel au titre du contrat « filtre presse » et sur les condamnations prononcées en application de l’article 700 du code de procédure civile et au titre des dépens de première instance.

11. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L.  411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

12. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le second grief du pourvoi principal, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, infirmant le jugement, il condamne la société Alteo Gardanne à payer à la société Entreprise Bâtiment Daniel Fils la somme de 414 140 euros HT à titre de dommages-intérêts pour rupture brutale de la relation commerciale établie au titre du contrat de prestation de nettoyage industriel, et en ce qu’il statue sur les dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 23 mai 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;  

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Fixe à la somme de 139 745 euros HT, à titre de dommages-intérêts pour rupture brutale de la relation commerciale établie au titre du contrat de prestation de nettoyage industriel, la créance de la société Entreprise Bâtiment Daniel Fils au passif de la société Alteo Gardanne, en redressement judiciaire.