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Décisions

CA Versailles, 12e ch., 24 septembre 2020, n° 19/03132

VERSAILLES

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

MM06 (SARL)

Défendeur :

Endurance Shop (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Thomas

Conseillers :

Mme Muller, M. Nut

T. com. Nanterre, du 28 mars 2019

28 mars 2019

EXPOSE DU LITIGE

La SAS Endurance Shop exploite depuis 2003 un réseau de magasins franchisés commercialisant des articles de sport. La SARL MM06 a signé un contrat de licence de la marque Endurance Shop le 11 février 2013 pour une durée de 3 ans renouvelable par tacite reconduction pour l'exploitation d'un magasin situé à Nice.

Au mois de mars 2016, Monsieur X a acquis l'intégralité des parts sociales de la société MM06.

Le 10 avril 2017, la société Endurance Shop reprochant à la société MM06 de nombreux manquements à ses obligations contractuelles lui a adressé un courrier en recommandé avec accusé de réception résiliant le contrat de licence de marque à effet immédiat.

La société Endurance Shop a saisi le juge des référés du tribunal de commerce de Nanterre par remise au greffe de l'assignation délivrée le 8 janvier 2018, afin de faire cesser le trouble manifestement illicite causé par la poursuite de l'utilisation des signes distinctifs de la marque Endurance Shop et d'obtenir la condamnation de la société MM06 à lui verser une provision sur l'indemnité prévue au contrat de licence en cas d'utilisation de la marque après rupture du contrat.

Par ordonnance de référé rendue le 28 février 2018 le président du tribunal de commerce de Nanterre, a condamné la société MM06 à payer à la société Endurance Shop la somme de 2 637,63 euros au titre des redevances de licences impayées, la somme provisionnelle de 20 000 euros « en conséquence de l'article 13.1 du contrat de licence de marque conclu entre les parties le 11 février 2013 » outre 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile. La société MM06 n'a pas interjeté appel à l'encontre de cette ordonnance.

Par exploit d'huissier en date du 19 avril 2018, la société MM06 et M. X ont fait assigner la SAS Endurance Shop, et ont demandé au tribunal de commerce de Nanterre d'ordonner la caducité de l'ordonnance de référé, de condamner la société Endurance Shop à restituer les sommes versées au titre de l'ordonnance de référé et de la condamner au paiement de la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts, outre une somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Par jugement du 28 mars 2019, le tribunal de commerce de Nanterre a :

- dit n'y avoir lieu de prononcer la caducité de l'ordonnance de référé n°2018R00043 rendue le 28 février 2018 par le tribunal de commerce de Nanterre, et confirme les condamnations,

- débouté la SARL MM06 et M. X de leur demande de dommages et intérêts au titre de la résiliation du contrat de licence de marque,

- condamné solidairement la SARL MM06 et M. X à payer à la SAS Endurance Shop la somme de 5 000 euros de dommages et intérêts en application de l'article -13- du contrat de licence de marque du 11 février 2018,

- condamné solidairement la SARL MM06 et M. X à payer la somme de 2 000 euros à la SAS Endurance Shop au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire du présent jugement,

- condamné solidairement la SARL MM06 et M. X aux entiers dépens,

Par déclaration du 26 avril 2019, M. X et la SARL MM06 ont interjeté appel du jugement.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par dernières conclusions notifiées le 2 juin 2020, la SARL MM06 et M. X demandent à la cour de :

- réformer le jugement querellé en toutes ses dispositions,

- constater des rapports étroits ayant existé entre les parties,

- constater que la société MM06 et Monsieur X n'ont jamais failli à leurs obligations contractuelles,

- constater que la société MM06 n'est redevable d'aucune somme à ce jour,

In limine Litis,

- ordonner la caducité de l'ordonnance de référé,

A défaut,

- constater l'absence de motivation du jugement querellé sur le rejet de la caducité,

- prononcer la nullité du jugement du tribunal de commerce de Nanterre,

A titre subsidiaire,

- condamner la société Endurance Shop à restituer les sommes versées au titre de l'ordonnance de référé dans le cadre de l'exécution forcée,

- constater que la lettre de résiliation du 10 avril 2017 n'a fixé aucun délai pour cesser l'utilisation de la marque,

- dire que la société MM06 n'utilisait plus les signes de la marque au jour de l'assignation en référé,

- dire que la société MM06 et Monsieur X n'ont pas dénigré la société Endurance Shop sur les réseaux sociaux ou avec des tiers,

- condamner la société Endurance Shop au paiement de la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- condamner la société Endurance Shop au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Endurance Shop aux entiers dépens, en ce compris les frais d'exécution forcée.

Par dernières conclusions notifiées le 25 juin 2020, la SAS Endurance Shop demande à la cour de :

- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 28 mars 2019 en ce qu'il a dit n'y avoir pas lieu à prononcer la caducité de l'ordonnance de référé n° 2018R00043 rendue le 28 février 2018 et en ce qu'il a confirmé les condamnations prononcées à l'encontre de la société MM06 au titre de cette ordonnance,

En conséquence,

- constater le caractère définitif de l'ordonnance de référé du 28 février 2018 en ce qu'elle a condamné la société MM06 à payer à la société Endurance Shop :

La somme de 2 637,63 au titre du solde débiteur de son compte dans les comptes de la société Endurance Shop augmentée des intérêts de droit à compter de la date d'assignation,

La somme de 20 000 euros au titre de l'application de l'article 13-1du contrat de licence de marque conclu entre la société Endurance Shop et la société MM06 le 1 février 2013,

La somme de 2 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

- débouter la société MM06 de sa demande d'annulation du jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 28 mars 2019,

- débouter la société MM06 de ses demandes de restitution des sommes versées au titre de l'ordonnance de référé,

- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 28 mars 2019 en ce qu'il a débouté la société MM06 et M. X de leurs demandes de dommages et intérêts,

- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 28 mars 2019 en ce qu'il a condamné solidairement la société MM06 et M. X à payer la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Recevoir la société Endurance Shop en son appel incident,

Y faisant droit,

- réformer le jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 28 mars 2019 en ce qu'il a condamné solidairement la société MM06 et M. X à payer à la société Endurance Shop la somme de 5 000 euros de dommages et intérêts en application de l'article 13 du contrat de licence de marque du 11 février 2013,

En conséquence,

- condamner solidairement la société MM06 et M. X à payer à la société Endurance Shop la somme de 270 000 euros au titre de l'application de la clause 13 du contrat de licence de marque, à parfaire des sommes déjà allouées par le juge des référés et le juge du fond - savoir 25 000 euros - et après prise en compte de la provision de 10 100 euros payée par MM06 au titre de l'exécution partielle de l'ordonnance de référé du 28 février 2018,

Dans tous les cas,

- condamner solidairement la société MM06 et M. X à verser la somme de 7 000 euros à la société Endurance Shop sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- les condamner aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 2 juillet 2020.

Les parties ont été invitées à s'expliquer par note en délibéré à adresser au plus tard à la cour le 15 septembre 2020 sur l'irrecevabilité de la demande de nullité du jugement présentée dans le dispositif des dernières conclusions de la SARL MM06 et de M. X après la demande de réformation du jugement, et ce en application des articles 74 et 954 du code de procédure civile.

La cour a également invité les parties à s'expliquer par une note en délibéré à déposer au plus tard le 18 septembre 2020 sur l'irrecevabilité de la demande de condamnation de M. X solidairement avec la société MM06 au paiement de la somme de 270 000 euros au titre de l'application de la clause 13 du contrat de licence de marque présentée pour la première fois en cause d'appel par la société Endurance Shop, la demande de condamnation au paiement de la somme de 268 000 euros sur le même fondement ayant été dirigée uniquement à l'encontre de la société MM06 en première instance, et ce en application de l'article 564 du code de procédure civile.

Le conseil des appelants a transmis sa note le 18 septembre 2020 et soutient que l'exception de nullité a été soulevée avant toute défense au fond et qu'ils étaient dans l'obligation de demander dans le dispositif des conclusions la réformation du jugement querellé, fondement de l'appel, avant de réclamer le bénéfice de l'exception soulevée. Il s'associe à l'argumentaire développé par la société intimée puisqu'aucune solidarité n'avait été réclamée en première instance.

Le conseil de la société Endurance Shop a adressé sa note en délibéré le 18 septembre 2020 soutenant que les conclusions déposées en première instance au nom de cette société ne font pas état de solidarité, la demande a été présentée lors de l'audience ce qui a amené les premiers juges à prononcer les condamnations solidaires de la Sarl MM06 et de M. X à 5 000 euros de dommages et intérêt et 2000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et s'en remettant à l'appréciation de la cour.

Sur ce, la cour,

Sur la procédure

La recevabilité de l'appel n'est pas contestée et l'examen des pièces de la procédure ne révèle l'existence d'aucune fin de non-recevoir susceptible d'être relevée d'office.

L'article 901 du code de procédure civile dispose que la déclaration d'appel est faite par acte contenant notamment, outre les mentions prescrites par l'article 57 (dans sa version en vigueur au 1er janvier 2020), et à peine de nullité, les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

Il ressort de l'article 562 alinéa 1er du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, que l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent.

Il est rappelé qu'en application de l'article 954 alinéas 3 et 4 du code de procédure civile la cour ne statue, dans la limite de l'effet dévolutif de l'appel, que sur les prétentions énoncées au dispositif des dernières conclusions des parties et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion, étant précisé qu'en application de l'article 4 du code de procédure civile, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties et que les demandes de « constater » ne constituant pas des prétentions au sens de l'article précité mais des rappels des moyens invoqués à l'appui des prétentions, ne conférant pas -hormis les cas prévus par la loi- de droit à la partie qui les requiert, tout comme les demandes de « Dire et juger que la société MM06 n'utilisait plus les signes de la marque au jour de l'assignation en référé » et « dire et juger que la société MM06 et M. X n'ont pas dénigré la société Endurance Shop sur les réseaux sociaux ou avec des tiers » qui ne constituent pas des prétentions au sens des articles 4 et 954 précités mais des moyens de fait, il ne sera pas statué par la cour sur ces différents points.

Pour un exposé plus détaillé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie à leurs écritures conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

Sur la nullité du jugement

L'article 74 du code de procédure civile dispose que :

Les exceptions doivent, à peine d'irrecevabilité, être soulevées simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir. Il en est ainsi alors même que les règles invoquées au soutien de l'exception seraient d'ordre public.

Selon l'article 542 du code de procédure civile l'appel tend par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré à sa réformation ou à son annulation par la cour d'appel.

Il ressort de l'article 954 du code de procédure civile que :

Les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l'énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu'un dispositif récapitulant les prétentions.

La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

M. X et la société MM06 qui ont, aux termes du dispositif de leurs dernières conclusions sur lequel la cour est tenue de statuer, soulevé la nullité du jugement après qu'ils aient demandé à la cour de réformer le jugement en toutes ses dispositions et d'ordonner la caducité de l'ordonnance de référé, bien qu'ils n'aient pas précisé dans leur acte d'appel que l'appel tendait à l'annulation de cette décision, seront déclarés irrecevables en cette demande faute d'avoir soulevé cette exception de nullité du jugement avant toute défense au fond.

Sur le fond

Sur l'ordonnance de référé rendue le 28 février 2018

Les appelants sollicitent de la cour la réformation du jugement afin que soit prononcée la caducité de l'ordonnance de référé rendue par le président du tribunal de commerce de Nanterre le 28 février 2018 en raison du jugement prononcé au fond entre les mêmes parties et sur le même objet, contestant ensuite devoir la somme au titre des redevances retenue à titre de provision par le juge des référés, ainsi que l'usage de la marque marque "Endurance Shop"

La société Endurance Shop s'oppose à cette demande soutenant que la procédure de référé à l'origine de l'ordonnance du 28 février 2018 et la procédure au fond à l'origine de la décision n'ont pas le même objet et ne concernent pas les mêmes parties et sollicite la confirmation du jugement.

Il ressort de l'article 488 du code de procédure civile que : L'ordonnance de référé n'a pas, au principal, l'autorité de la chose jugée.

Il s'en suit que les mesures ordonnées en référé ne peuvent pas s'imposer au juge du fond, et qu'il est loisible à l'une des parties à la procédure de référé de saisir le juge du fond pour obtenir un jugement définitif.

En outre, la décision rendue en référé, qui n'a pas l'autorité de la chose jugée, peut être remise en cause par le juge du fond si ce dernier a été saisi aux mêmes fins que l'a été le juge des référés, le jugement se substituant alors à la décision rendue à titre provisoire par le juge des référés.

La société MM06 et M. X seront donc déboutés de leur demande tendant à voir prononcer la caducité de l'ordonnance de référé.

En revanche, les juges du fond n'étant pas les juges d'appel de l'ordonnance de référé ils ne pouvaient, sans dépasser leur pouvoir juridictionnel, confirmer les condamnations prononcées par le juge des référés.

La cour infirmera donc le jugement en ce qu'il a confirmé les condamnations de l'ordonnance de référé.

Sur la somme due au titre des redevances

La société MM06 expose ne plus être redevable de la somme de 2 637,63 euros au titre de redevances au paiement de laquelle elle a été condamnée à titre de provision aux termes de l'ordonnance de référé du 28 février 2018. Elle soutient s'en être acquittée et produit un extrait de compte de gestion certifié par un cabinet d'expertise comptable. Elle demande la condamnation de la société Endurance Shop à lui restituer les sommes versées au titre de l'ordonnance de référé dans le cadre de l'exécution forcée.

La société Endurance Shop soutient que la pièce produite par les appelants qui serait une simple reproduction d'un extrait des livres de comptes de la société MM06 ne présente aucune certification d'un cabinet d'expert-comptable alors qu'elle produit une attestation de son expert-comptable qui confirme que le compte de la société MM06 présente un solde débiteur de 2 637,63 euros.

Il ressort de l'extrait de compte certifié produit par la société Endurance Shop pour la période allant du 1er janvier 2016 au 22 décembre 2017 que la société MM06 est bien redevable à cette dernière date de la somme de 2 637,63 euros, l'extrait de compte non certifié produit par la société appelante étant incomplet en ce qu'il ne couvre que la période du 5 décembre 2016 au 6 mars 2017, et en ce qu'il ne montre pas le paiement effectif de la somme de 2637,63 euros.

La société MM06 sera dans ces conditions déboutée de sa demande de restitution de cette somme.

En revanche, en demandant à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a confirmé les condamnations prononcées à l'encontre de la société MM06 au titre de l'ordonnance de référé rendue le 28 février 2018, la société Endurance Shop sollicite la condamnation de cette dernière société à lui payer la somme de 2 637,63 euros au titre du solde débiteur de son compte avec intérêts de droit à compter de l'assignation. Il ressort de ce qui précède que la somme réclamée par la société Endurance Shop au titre des redevances impayées est due par la société MM06. La cour condamnera donc la société MM06 à payer à la société Endurance Shop la somme de 2 637,63 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation en référé.

Sur la demande de dommages et intérêts de la société Endurance Shop

La société Endurance Shop demande, en formant appel incident, que la société MM06 et M. X soient condamnés à lui payer la somme de 270 000 euros à titre de dommages et intérêts en application de l'article 13 du contrat de licence de marque conclu entre elle et la société Endurance Shop le 11 février 2013, aux motifs que la société MM06 a continué à utiliser les signes distinctifs de la marque Endurance Shop plus de 10 mois après la résiliation du contrat de licence.

La société MM06 et M. X s'opposent à cette demande en soutenant qu'au jour de l'assignation en référé la marque ne figurait plus sur les vitrines du local, que M. X n'a fait que relayer sur son compte Facebook une information de soldes pour ses amis qui étaient encore partenaires du groupe, ce qui ne démontre nullement qu'il a continué à exploiter la marque sans autorisation.

L'article 564 du code de procédure civile dispose que : A peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

Les premiers juges ont rappelé aux termes du jugement dont appel que les parties présentes ont confirmé que les termes de leurs dernières conclusions représentent bien l'intégralité de leurs demandes au sens de l'article 446-2 du code de procédure civile et qu'elles ont développé oralement leurs dernières conclusions. Ainsi, faute d'indication dans le jugement de prétentions exposées oralement à l'audience autres que celles contenues dans les dernières conclusions de la société Endurance Shop demandant aux premiers juges de Condamner la société MM06 à verser à la société Endurance Shop la somme de 268 000 euros à titre de dommages et intérêts en application de l'article 13 du contrat de licence de marque conclu entre les parties le 11 février 2013, à parfaire après déduction des sommes versées par MM06 en application de l'ordonnance de référé du 28 février 2018, aucune demande de condamnation solidaire n'a été présentée à ce titre à l'encontre de M.X.

Ainsi, en demandant pour la première fois en cause d'appel la condamnation de M. X, solidairement avec la société MM06, au paiement de la somme de 270 000 euros au titre de l'application de la clause 13 du contrat de licence de marque, demande qui ne tend pas à opposer de compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait nouveau, la société Endurance Shop a présenté une prétention nouvelle qui sera déclarée irrecevable par la cour.

L'article 1231-5 alinéa 2 du code civil énonce que le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.

Il ressort des termes de l'article 13.1 du contrat de licence qu'à la fin du contrat le licencié s'engage à cesser immédiatement toute exploitation de la marque, du concept et du savoir-faire sous quelque forme que ce soit, s'abstient de tout comportement susceptible d'entretenir dans l'esprit de la clientèle une confusion avec le réseau et supprime ou fait supprimer de tous supports les mentions pouvant avoir un tel effet et que faute pour le licencié d'exécuter les engagements dans les délais indiqués, il sera redevable de plein droit à l'égard du concédant, sans mise en demeure préalable, d'une indemnité de 1 000 euros par jour de retard jusqu'à l'exécution parfaite desdits engagements, ce qu'il reconnaît et accepte expressément.

Alors que le contrat de licence a été résilié le 10 avril 2017, le constat d'huissier de justice dressé le 6 juin 2017 a relevé la présence de la signalétique Endurance Shop tant sur la façade du magasin exploité par la société MM06, les linteaux et les vitrines, que sur les deux fanions installés sur le trottoir, soit 57 jours après la résiliation du contrat de licence de marque. La société Endurance Shop rapporte également la preuve de l'utilisation du nom Endurance Shop et des visuels de sa marque (même code couleur ainsi que les trois flèches verticales logées dans un cercle) sur la page Facebook du magasin de Nice (Domi EnduranceShop Nice) le 10 novembre 2017 à 13h09 et à 19 heures.

La cour retiendra également qu'à la date du 12 février 2018, soit plus de 10 mois après la résiliation du contrat, il était toujours porté sur l'extrait Kbis de la société MM06 l'indication de l'enseigne « Endurance Shop ».

Toutefois, au regard du montant de la redevance mensuelle due par le franchisé qui s'élevait à 835,20 euros soit 10 022,40 euros sur une année et qui est sans rapport avec l'indemnité réclamée de 270 000 euros, de l'utilisation faite de la marque et de l'absence de délai raisonnable imposé à la société MM06 afin qu'elle puisse retirer de son magasin toutes les signalétiques internes et externes de son franchiseur, c'est par une juste analyse que les premiers juges ont retenu une réparation s'élevant à 25 000 euros en retenant improprement la somme de 20 000 euros allouée par le juge des référés à titre provisionnel et en accordant une somme supplémentaire de 5 000 euros. En revanche, la cour retenant également l'utilisation de la marque dans l'extrait Kbis de la société MM06, il convient, au vu de ces éléments, de fixer à 27 000 euros le montant de l'indemnité allouée en application de l'article 13 du contrat de licence de marque du 11 février 2013.

Enfin, les premiers juges qui n'ont pas été saisis par la société Endurance Shop d'une demande de condamnation dirigée contre M. X, ne pouvaient entrer en voie de condamnation à son encontre. La cour infirmera dans ces conditions le jugement dont appel quant au montant des dommages et intérêts alloués à la société Endurance Shop et en ce qu'il a condamné M. X au paiement de ces dommages et intérêts et condamnera la société MM06 à payer à la société Endurance Shop la somme de 27 000 euros à titre d'indemnité.

Sur la demande de dommages et intérêts de la SARL MM06 et de M. X au titre de la résiliation du contrat de marque

La société MM06 et M. X demandent à la cour de condamner la société Endurance Shop au paiement de la somme de 50 000 euros à titre de dommages et intérêts aux motifs que M. X, nouveau gérant de la société MM06, était bien connu du groupe et du concédant, que le groupe était parfaitement informé de la cession des parts sociales et qu'il a été volontairement mis à l'écart du groupe causant à lui-même et à la société MM06 un préjudice.

La société Endurance Shop expose pour sa part que M. X avait pris l'habitude de systématiquement critiquer les actions commerciales à l'ensemble des membres du réseau ainsi qu'à certains salariés de la société Endurance Shop, qui constituent des tiers puisqu'ils ne sont pas des parties au contrat, de reprocher  au franchiseur des opérations marketing inadaptées et de jeter le discrédit sur ces choix ayant informé le réseau que sa société arrêtait de verser sa cotisation, que la société MM06 ne l'a pas informée du changement de contrôle par modification de son capital en raison de l'acquisition par M. X de la totalité des parts sociales de la société MM06, ce qui a justifié la résiliation du contrat de franchise à effet immédiat en application de l'article 10 du contrat. Elle soutient que les appelants ne font état d'aucune préjudice et que leur demande de dommages et intérêts n'est justifiée ni dans son objet ni dans son quantum et sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il les a déboutés de leur demande de dommages et intérêts.

La société MM06 s'étant engagée aux termes du contrat à demander l'accord préalable de son franchiseur au cas où la répartition du capital aboutirait à un changement de contrôle de la société franchisée, les appelants ne pouvant produire aux débats l'information préalable donnée à la société Endurance Shop de l'entrée majoritaire de M. X au capital de la société MM06, les liens ayant pu exister entre M. X et les membres fondateurs de la société Endurance Shop ne permettant pas à la société MM06 de s'affranchir de ses obligations contractuelles, cette dernière société a manqué à l'obligation qui lui était faite par l'article 10 du contrat d'obtenir l'accord préalable du concédant à toute modification de la répartition de son capital aboutissant à un changement de contrôle justifiant la résiliation du contrat sollicité par Endurance Shop, résiliation au demeurant non contestée par la société appelante.

Par ailleurs, M. X et la société MM06, qui ne précisent pas de quel préjudice ils ont souffert, seront donc déboutés de leur demande de dommages et intérêts et le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

Etant inéquitable de laisser à la charge de la société Endurance Shop les frais irrépétibles par elle exposés en cause d'appel, la société MM06 succombant sera condamnée à payer à la société Endurance Shop la somme de trois mille euros (3 000 euros) en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens, la société MM06 et M. X étant déboutés de leurs demandes présentées de ces chefs.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

INFIRME le jugement dont appel en ce qu'il a confirmé les condamnations prononcées par l'ordonnance de référé du 28 février 2018, et en ce qu'il a condamné solidairement la Sarl MM06 et M. X à payer à la Sas Endurance Shop la somme de 5 000 euros de dommages et intérêts en application de l'article 13 du contrat de licence de marque du 11 février 2018,

Statuant à nouveau,

CONDAMNE la Sarl MM06 à payer à la Sas Endurance Shop la somme de 2 637,63 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation en référé,

CONDAMNE la Sarl MM06 à payer à la Sas Endurance Shop la somme de 27 000 euros à titre d'indemnité,

REJETTE toute autre demande,

CONFIRME le jugement pour le surplus,

Y ajoutant,

DECLARE irrecevable la demande de condamnation de M. X, solidairement avec la Sarl

MM06, présentée par la Sas Endurance Shop, au paiement de la somme de 270 000 euros au titre de l'application de la clause 13 du contrat de licence de marque,

CONDAMNE la Sarl MM06 à payer à la Sas Endurance Shop la somme de trois mille euros (3 000 euros) en application de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la Sarl MM06 aux dépens.