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Décisions

CJUE, 10e ch., 8 octobre 2020, n° C-456/19

COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPEENNE

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

Aktiebolaget Östgötatrafiken

Défendeur :

Patent- och registreringsverket

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Présidents de chambre :

M. Ilešič,

Juges :

M. Juhász (rapporteur) , M. Jarukaitis

Avocat général :

M. Pitruzzella

CJUE n° C-456/19

8 octobre 2020

LA COUR (dixième chambre),

1 La demande de décision préjudicielle porte, en substance, sur l’interprétation de l’article 3, paragraphe 1, sous b), de la directive 2008/95/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2008, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 2008, L 299, p. 25).

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Aktiebolaget Östgötatrafiken au Patent- och registreringsverket (Office de la propriété intellectuelle, Suède) au sujet du rejet d’une demande d’enregistrement de marque.

 Le cadre juridique

 La directive 2008/95

3 L’article 2 de la directive 2008/95, intitulé « Signes susceptibles de constituer une marque », disposait :

« Peuvent constituer des marques tous les signes susceptibles d’une représentation graphique, notamment [...] les dessins, [...] la forme du produit ou de son conditionnement, à condition que de tels signes soient propres à distinguer les produits ou les services d’une entreprise de ceux d’autres entreprises. »

4 L’article 3 de cette directive, intitulé « Motifs de refus ou de nullité », énonçait :

« 1. Sont refusés à l’enregistrement ou sont susceptibles d’être déclarés nuls s’ils sont enregistrés :

[...]

b) les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif ;

[...]

3. Une marque n’est pas refusée à l’enregistrement ou, si elle est enregistrée, n’est pas susceptible d’être déclarée nulle en application du paragraphe 1, points b), c) ou d), si, avant la date de la demande d’enregistrement et après l’usage qui en a été fait, elle a acquis un caractère distinctif. En outre, les États membres peuvent prévoir que la présente disposition s’applique également lorsque le caractère distinctif a été acquis après la demande d’enregistrement ou après l’enregistrement.

[...] »

5 La directive 2008/95 a été abrogée, avec effet au 15 janvier 2019, par la directive (UE) 2015/2436 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2015, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 2015, L 336, p. 1).

 La directive 2015/2436

6 L’article 3 de la directive 2015/2436, intitulé « Signes susceptibles de constituer une marque », est ainsi libellé :

« Peuvent constituer des marques tous les signes, notamment [...] les dessins, [...] les couleurs, la forme d’un produit ou de son conditionnement [...], à condition que ces signes soient propres à :

a) distinguer les produits ou les services d’une entreprise de ceux d’autres entreprises ; [...]

[...] »

7 L’article 4 de cette directive, intitulé « Motifs absolus de refus ou de nullité », prévoit :

« 1. Sont refusés à l’enregistrement ou sont susceptibles d’être déclarés nuls s’ils sont enregistrés :

[...]

b) les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif ;

[...]

4. Une marque n’est pas refusée à l’enregistrement en application du paragraphe 1, point b), c) ou d), si, avant la date de la demande d’enregistrement et à la suite de l’usage qui en a été fait, elle a acquis un caractère distinctif. Une marque n’est pas déclarée nulle pour les mêmes motifs si, avant la date de la demande en nullité et à la suite de l’usage qui en a été fait, elle a acquis un caractère distinctif.

5. Les États membres peuvent prévoir que le paragraphe 4 s’applique également lorsque le caractère distinctif a été acquis après la date de la demande d’enregistrement mais avant la date de l’enregistrement. »

8 Conformément à l’article 54 de ladite directive, intitulé « Transposition », les États membres étaient tenus de transposer, notamment, les articles 3 à 6 de celle-ci au plus tard le 14 janvier 2019.

 Le litige au principal et les questions préjudicielles

9 La requérante au principal est titulaire de marques figuratives enregistrées auprès de l’Office de la propriété intellectuelle sous les numéros 363521 à 363523, pour des services fournis à l’aide de véhicules et des services de transport relevant de la classe 39 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié.

10 Ces marques figuratives sont représentées comme suit :

– no 363521

image 1.png

– no 363522

image 2.png

– no 363523

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11 Le 23 novembre 2016, la requérante au principal a introduit auprès de l’Office de la propriété intellectuelle trois demandes de marques, pour divers services fournis à l’aide de véhicules et des services de transport relevant de la classe 39 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques.

12 Ces trois demandes étaient accompagnées de la description suivante : « Coloration de véhicules dans les couleurs rouge, blanche et orange, comme indiqué ». La requérante au principal précisait en outre que ces demandes ne concernaient pas la forme même des véhicules ou les champs de couleur noire ou grise recouvrant celle-ci.

13 Par une décision du 29 août 2017, l’Office de la propriété intellectuelle a rejeté lesdites demandes, au motif que les signes dont l’enregistrement était sollicité au titre du droit des marques n’avaient qu’un caractère décoratif, qu’ils ne pouvaient être perçus comme étant des signes propres à distinguer les services couverts par ces mêmes demandes et qu’ils étaient ainsi dépourvus de caractère distinctif.

14 La requérante au principal a contesté cette décision devant le Patent- och marknadsdomstolen (tribunal de la propriété intellectuelle et des affaires économiques, Suède).

15 Au soutien de son recours, elle a indiqué que les marques demandées constituaient des « marques de position », se composant d’ellipses de dimensions différentes et de couleurs rouge, orange et blanche, avec une taille déterminée et placées dans une certaine position sur les autobus et les trains permettant l’exécution de la prestation de services de transport.

16 Elle a fourni les images suivantes des marques demandées, en faisant apparaître les contours des véhicules en pointillés, afin de mettre en évidence que la protection sollicitée ne concernait pas la forme de ces véhicules :

iMAGE 4.PNG

IMAGE 5.PNG

IMAGE 6.PNG

IMAGE 7.PNG

IMAGE 8.PNG

IMAGE 9.PNG

17 La requérante au principal a également soutenu que les marques demandées faisaient naître une impression comparable à celle suscitée par les marques enregistrées sous les numéros 363521 à 363523 et que le caractère distinctif des premières ne devait pas être apprécié différemment au seul motif qu’elles avaient vocation à être placées d’une manière déterminée sur les véhicules qui servent au service de transport. Plus généralement, elle a ajouté que les différentes sociétés de transport apposent leur propre graphisme ou coloration sur leurs véhicules, de sorte que les utilisateurs des services qu’elles fournissent considèrent ces graphismes ou ces colorations comme étant des indicateurs de l’origine commerciale.

18 L’Office de la propriété intellectuelle a, quant à lui, fait valoir que la protection des éléments figuratifs des marques en cause au principal a été demandée non pas de manière abstraite, mais pour faire figurer ces éléments figuratifs sur les véhicules utilisés par la requérante au principal. Dans la mesure où l’appréciation du caractère distinctif doit être effectuée dans son ensemble et où les véhicules de transport commercial sont souvent décorés par des motifs de couleur, les consommateurs devraient s’être familiarisés au préalable avec de tels éléments pour considérer qu’il s’agit d’une marque, à défaut de quoi ils les considéreraient comme des éléments décoratifs. Compte tenu de la diversité dans la coloration et la décoration des véhicules de transport utilisés dans le secteur économique concerné, les signes en cause au principal ne pourraient être perçus comme une indication de l’origine commerciale qu’en divergeant suffisamment de la norme ou des habitudes du secteur, ce qui ne serait pas le cas.

19 Par jugement du 29 mars 2018, le Patent- och marknadsdomstolen (tribunal de la propriété intellectuelle et des affaires économiques) a rejeté le recours introduit par la requérante au principal, au motif que les éléments de preuve produits ne suffisaient pas pour conclure que les couleurs et la forme des signes dont la protection était sollicitée au titre du droit des marques divergeaient à ce point de la manière dont d’autres entreprises décorent leur véhicule, de sorte qu’il ne pouvait être considéré que ces signes seraient perçus par le public pertinent comme une indication de l’origine commerciale.

20 La requérante au principal a interjeté appel de ce jugement devant le Svea hovrätt, Patent- och marknadsöverdomstolen (cour d’appel de Stockholm, siégeant en tant que cour d’appel de la propriété intellectuelle et des affaires économiques, Suède).

21 Cette juridiction relève que l’exigence fondamentale énoncée à l’article 3 de la directive 2015/2436 est que, pour être une marque, un signe doit avoir un caractère distinctif.

22 À cet égard, elle souligne que, en vertu d’une jurisprudence constante de la Cour, la perception du caractère distinctif d’un signe par le public pertinent n’est pas nécessairement la même selon que la marque considérée est une marque tridimensionnelle, constituée par l’apparence du produit lui-même, ou une marque verbale ou figurative. En effet, les consommateurs moyens n’ayant pas pour habitude de présumer l’origine des produits en se fondant sur leur forme ou sur celle de leur emballage, il pourrait s’avérer plus difficile d’établir le caractère distinctif d’une marque tridimensionnelle plutôt que celui d’une marque verbale ou figurative. C’est pourquoi, ainsi que la Cour l’a jugé, un signe qui se confond avec l’apparence du produit ne peut être considéré comme revêtant un caractère distinctif qu’à la condition qu’il diverge de manière significative de la norme ou des habitudes du secteur économique concerné.

23 En matière de marque désignant un service, la même juridiction mentionne que, au point 20 de l’arrêt du 10 juillet 2014, Apple (C‑421/13, EU:C:2014:2070), la Cour a jugé que l’aménagement d’un espace de vente peut être propre à distinguer les produits ou services d’une entreprise de ceux d’autres entreprises lorsque l’aménagement visualisé diverge de manière significative de la norme ou des habitudes du secteur économique concerné.

24 La juridiction de renvoi fait toutefois observer que, dans cet arrêt, la Cour n’a pas précisé dans quelles conditions l’exigence de la divergence significative par rapport à la norme ou aux habitudes du secteur doit être appliquée en ce qui concerne une marque désignant un service.

25 De plus, elle souligne que, dans ce même arrêt, la Cour n’a pas analysé si la marque en cause n’était pas indépendante de l’aspect des objets matériels qui permettaient l’exécution des services à l’égard desquels cette marque avait été enregistrée.

26 Ainsi, la juridiction de renvoi s’interroge sur le point de savoir si, pour apprécier le caractère distinctif des signes ayant vocation à être apposés sur certaines parties des véhicules d’un prestataire de services de transport aux fins de distinguer celui-ci, de tels signes doivent diverger de manière significative de la norme ou des habitudes du secteur économique concerné.

27 Dans ces circonstances, le Svea hovrätt, Patent- och marknadsöverdomstolen (cour d’appel de Stockholm, siégeant en tant que cour d’appel de la propriété intellectuelle et des affaires économiques) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1) L’article 4, paragraphe 1, sous b), de la directive [2015/2436] doit-il, dans le cas d’une demande d’enregistrement d’une marque désignant des services qui consiste en un signe placé dans une certaine position et recouvrant de grandes parties de la surface des objets matériels utilisés pour la fourniture desdits services, être interprété en ce sens qu’il requiert l’examen du point de savoir dans quelle mesure la marque n’est pas indépendante de l’aspect desdits objets ?

2) S’il y a lieu de répondre à la première question par l’affirmative, faut-il que la marque, pour pouvoir être considérée comme présentant un caractère distinctif, diverge de manière significative de la norme ou des habitudes du secteur économique concerné ? »

 Sur les questions préjudicielles

28 À titre liminaire, il convient de relever que, s’agissant d’un refus d’enregistrement de marque, la date de la demande d’enregistrement de cette marque est déterminante aux fins de l’identification du droit matériel applicable (voir, par analogie, arrêt du 29 janvier 2020, Sky e.a., C‑371/18, EU:C:2020:45, point 49).

29 En l’occurrence, dans la mesure où les demandes d’enregistrement en cause au principal ont été introduites le 23 novembre 2016, soit à une date où le délai de transposition de la directive 2015/2436 n’avait pas encore expiré et où la directive 2008/95 n’était pas encore abrogée, les dispositions applicables aux faits en cause au principal sont celles de la directive 2008/95 et non celles de la directive 2015/2436.

30 De plus, il y a lieu de souligner que, si les motifs de couleur sur lesquels portent les demandes d’enregistrement en cause au principal sont destinés à être apposés d’une manière déterminée sur une grande partie des biens utilisés pour la fourniture de services de transport, la requérante au principal a expressément indiqué que la forme de ces biens ne faisait pas l’objet en tant que telle de ces demandes.

31 Par conséquent, il y a lieu de considérer que, par ses deux questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 3, paragraphe 1, sous b), de la directive 2008/95 doit être interprété en ce sens que le caractère distinctif d’un signe dont l’enregistrement en tant que marque est demandé pour un service, qui est composé de motifs de couleur et qui est destiné à être apposé exclusivement et systématiquement d’une manière déterminée sur une grande partie des biens utilisés pour la fourniture de ce service doit être apprécié en relation avec ces biens et en examinant si ce signe diverge de manière significative de la norme ou des habitudes du secteur économique concerné.

32 À cet égard, il résulte d’une jurisprudence constante de la Cour que la fonction essentielle de la marque est de garantir au consommateur ou à l’utilisateur final l’identité d’origine du produit ou du service marqué, en lui permettant de distinguer sans confusion possible ce produit ou ce service de ceux qui ont une autre provenance (arrêt du 12 juin 2019, Hansson, C‑705/17, EU:C:2019:481, point 31 et jurisprudence citée). Ce caractère distinctif, au sens de l’article 3 de la directive 2008/95, doit s’apprécier, d’une part, par rapport aux produits ou aux services pour lesquels l’enregistrement est demandé et, d’autre part, par rapport à la perception qu’en a le public pertinent, qui est constitué par le consommateur moyen desdits produits ou services, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé [voir, en ce sens, arrêts du 12 février 2004, Koninklijke KPN Nederland, C‑363/99, EU:C:2004:86, point 34, ainsi que du 12 septembre 2019, Deutsches Patent- und Markenamt (#darferdas ?), C‑541/18, EU:C:2019:725, point 20].

33 En outre, en vue de l’appréciation du caractère distinctif d’un signe, au sens de l’article 3, paragraphe 1, sous b), de la directive 2008/95, l’autorité compétente doit procéder à un examen in concreto, en prenant en compte toutes les circonstances pertinentes du cas d’espèce, y compris, le cas échéant, l’usage qui a été fait de ce signe (voir, en ce sens, arrêt du 27 mars 2019, Hartwall, C‑578/17, EU:C:2019:261, point 26 et jurisprudence citée).

34 Lorsque, comme dans l’affaire en cause au principal, la demande de marque concerne un signe destiné à être apposé exclusivement et systématiquement d’une manière déterminée sur une grande partie des biens utilisés pour exécuter la prestation de services, le caractère distinctif de ce signe ne saurait s’apprécier indépendamment de la perception qu’a le public pertinent de l’apposition de ce signe sur ces biens.

35 En effet, même si les biens qui servent à l’exécution de la prestation de services ne font pas l’objet de la demande de marque, il demeure que le public pertinent perçoit les motifs de couleur composant le signe considéré comme étant apposés sur les biens qui leur servent de support exclusif.

36 Il s’ensuit que l’appréciation du caractère distinctif d’un signe composé de motifs de couleur qui ont vocation à être apposés exclusivement et systématiquement sur les biens qui servent à exécuter des prestations de services doit notamment se faire en tenant compte de ladite perception.

37 En l’occurrence, il appartiendra à la juridiction de renvoi de déterminer, dans le cadre de son analyse in concreto et globale du dossier, si les combinaisons de couleurs comportant un agencement systématique, telles qu’indiquées dans les demandes d’enregistrement, sont susceptibles de conférer aux signes en question un caractère distinctif intrinsèque (voir, par analogie, arrêt du 27 mars 2019, Hartwall, C‑578/17, EU:C:2019:261, point 34). Cette condition devra être considérée comme étant remplie s’il ressort de cette analyse que les combinaisons de couleurs, apposées sur les véhicules de transport de la requérante au principal, permettent au consommateur moyen de distinguer sans confusion possible les services de transport fournis par cette entreprise des services fournis par d’autres entreprises.

38 S’il s’avère que lesdites combinaisons de couleurs ne revêtent pas un caractère distinctif intrinsèque pour les services en cause, cette circonstance ne sera pas de nature à exclure qu’elles puissent revêtir un tel caractère distinctif après l’usage qui en sera fait.

39 Dans le cadre de ladite analyse, il n’y a pas lieu d’examiner si les signes dont l’enregistrement en tant que marque est demandé divergent de manière significative de la norme ou des habitudes du secteur économique concerné.

40 En effet, ainsi qu’il résulte d’une jurisprudence constante de la Cour, le critère d’appréciation tenant à l’existence d’une divergence significative de la norme ou des habitudes du secteur économique concerné s’applique aux cas où le signe est constitué par l’apparence du produit pour lequel l’enregistrement en tant que marque est demandé, le consommateur moyen n’ayant pas pour habitude de présumer l’origine des produits en se fondant, en l’absence de tout élément graphique ou textuel, sur leur forme ou celle de leur emballage (voir, en ce sens, arrêts du 29 avril 2004, Henkel/OHMI, C‑456/01 P et C‑457/01 P, EU:C:2004:258, point 39 ; du 22 juin 2006, Storck/OHMI, C‑25/05 P, EU:C:2006:422, points 27 à 29, ainsi que du 7 mai 2015, Voss of Norway/OHMI, C‑445/13 P, EU:C:2015:303, points 90 et 91).

41 Ce critère d’appréciation s’applique également lorsque le signe est constitué de la représentation de l’aménagement de l’espace physique dans lequel sont fournis les services pour lesquels l’enregistrement en tant que marque est demandé (voir, en ce sens, arrêt du 10 juillet 2014, Apple, C‑421/13, EU:C:2014:2070, point 20).

42 Or, une telle situation ne se présente pas dans un cas où, comme en l’occurrence, les signes en cause sont constitués d’éléments graphiques destinés à être apposés sur les biens qui sont utilisés pour fournir les services désignés par la demande d’enregistrement.

43 À cet égard, il y a lieu de relever que, si les biens utilisés pour la fourniture des services en cause au principal, à savoir des véhicules de transport, figurent en pointillés dans les demandes d’enregistrement, aux fins d’indiquer tant les endroits où les marques demandées sont destinées à être apposées que les contours de celles-ci, les signes dont l’enregistrement en tant que marque est demandé ne se confondent pas pour autant avec la forme ou l’emballage de ces biens ni n’ont pour objet de représenter l’espace physique dans lequel sont fournis les services. En effet, lesdits signes consistent en des compositions de couleurs systématiquement agencées et limitées dans l’espace. Ces demandes d’enregistrement portent ainsi sur des éléments graphiques bien déterminés qui, contrairement aux signes visés par la jurisprudence citée aux points 40 et 41 du présent arrêt, n’ont pas pour objet de représenter un bien ou un espace de prestation de services par la simple reproduction des lignes et des contours de celui-ci.

44 Eu égard à ce qui précède, il convient de répondre aux questions posées que l’article 3, paragraphe 1, sous b), de la directive 2008/95 doit être interprété en ce sens que le caractère distinctif d’un signe dont l’enregistrement en tant que marque est demandé pour un service, qui est composé de motifs de couleur et qui est destiné à être apposé exclusivement et systématiquement d’une manière déterminée sur une grande partie des biens utilisés pour la fourniture de ce service doit être apprécié en tenant compte de la perception qu’a le public pertinent de l’apposition de ce signe sur ces biens, sans qu’il y ait lieu d’examiner si ce signe diverge de manière significative de la norme ou des habitudes du secteur économique concerné.

  Sur les dépens

45 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (dixième chambre) dit pour droit :

L’article 3, paragraphe 1, sous b), de la directive 2008/95/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2008, rapprochant les législations des États membres sur les marques, doit être interprété en ce sens que le caractère distinctif d’un signe dont l’enregistrement en tant que marque est demandé pour un service, qui est composé de motifs de couleur et qui est destiné à être apposé exclusivement et systématiquement d’une manière déterminée sur une grande partie des biens utilisés pour la fourniture de ce service doit être apprécié en tenant compte de la perception qu’a le public pertinent de l’apposition de ce signe sur ces biens, sans qu’il y ait lieu d’examiner si ce signe diverge de manière significative de la norme ou des habitudes du secteur économique concerné.