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Décisions

CA Paris, Pôle 1 ch. 8, 23 octobre 2020, n° 19/21530

PARIS

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Demandeur :

Transports Petitdidier et Fils (SAS), Entreprise G Corre (SARL)

Défendeur :

Renault Trucks (SASU) , DAF Trucks NV (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Lagemi

Conseillers :

M. Vasseur, Mme Aldebert

Avocats :

Me Baudin, Me Boccon Gibod, Me Philippe, Me Hardouin, Me Fadre

T. com. Lyon, prés., du 29 oct. 2019

29 octobre 2019

Par une décision du 19 juillet 2016 (affaire AT.39824), la Commission, sanctionnant plusieurs sociétés productrices de camions, a retenu que la société Renault Trucks avait participé à la conclusion d'ententes sur la fixation et l'augmentation des prix de camions dans l'espace économique européen, entre le 17 janvier 1997 et le 18 janvier 2011. Faisant bénéficier la société Renault Trucks de la procédure de clémence, la Commission a notamment infligé une amende de 468 855,017 euros à trois sociétés tenues solidairement, dont la société Renault Trucks.

Entre les années 1997 et 2013, la société Transports Petitdidier et Fils et sa filiale, la société Entreprise G Gorre ont acquis des camions de diverses marques. Estimant que les ententes sanctionnées par la Commission lui avait causé un préjudice, la société Transports Petitdidier et Fils a, par courriers du mois de mai 2019, adressé à plusieurs constructeurs de camions une mise en demeure de réparer ce qu'elle estimait être son préjudice résultant de ces ententes.

Par acte du 7 juin 2019, la société Transports Petitdidier et Fils a fait assigner la société Renault Trucks devant le juge des référés du tribunal de commerce de Lyon afin que soit ordonnée une mesure d'expertise de nature à lui permettre d'évaluer son préjudice. Les sociétés DAF Trucks NV et Entreprise G Gorre sont intervenues volontairement à l'instance, la première pour solliciter un sursis à statuer dans l'attente de l'issue du recours formé contre la décision de la Commission du 27 septembre 2017 par la société Scania qui avait refusé de transiger et la seconde pour soutenir les demandes de la société Transports Petitdidier et Fils. Les sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre ont également demandé des provisions à valoir sur ce qu'elles indiquaient être leurs préjudices.

Par ordonnance du 29 octobre 2019, le juge des référés du tribunal de commerce de Lyon a :

Pris acte de l'intervention volontaire des sociétés DAF Trucks NV et Entreprise G Corre ;

Débouté la SAS Transports Petitdidier et Fils et la SARL Entreprise G Corre de leur demande d'expertise à défaut de motif légitime ;

Dit qu'il n'y a pas lieu à statuer sur la demande de sursis à statuer ;

Condamné la SAS Transports Petitdidier et Fils et la SARL Entreprise G Corre à payer la somme de 7 000 euros à la SAS Renault Trucks et la somme de 3 000 euros à la société DAF Trucks NV en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamné la SAS Transports Petitdidier et Fils et la SARL Entreprise G Corre aux dépens de l'instance.

Par déclaration en date du 21 novembre 2019, la SAS Transports Petitdidier et Fils et la SARL Entreprise G Corre ont interjeté appel de cette ordonnance devant la cour d'appel de Paris en visant l'ensemble des chefs de dispositif de l'ordonnance.

Dans leurs dernières conclusions remises le 8 septembre 2020, auxquelles il est renvoyé s'agissant des moyens qui y sont développés, les sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Corre demandent à la cour, sur le fondement des articles 145 et 873 du code de procédure civile, des articles 1832 ancien et 1240 nouveau du code civil, des articles L. 420-1 et L. 481-1 et suivants du code du commerce, de l'article L. 133-21 du code monétaire et financier, de la directive 2014/104/CE du 26 novembre 2014 et de l'article 101 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, de :

Dire et juger leur appel recevable et bien fondé ;

Infirmer l'ordonnance du président du tribunal de commerce de Lyon du 29 octobre 2019 en toutes ses dispositions ;

En conséquence,

Statuant à nouveau,

Les dire et juger recevables et bien fondées en leurs demandes ;

Dire et juger irrecevables et à tout le moins infondées les demandes de la SAS Renault Trucks et de la société DAF Trucks NV ;

Débouter la société DAF Trucks NV de sa demande de sursis à statuer ;

En conséquence,

A titre principal :

Rappeler que la SAS Renault Trucks et la société DAF Trucks NV ont commis des fautes engageant leur responsabilité en raison de leur implication dans des pratiques anticoncurrentielles constatées et sanctionnées par la Commission européenne aux termes de sa décision en date du 19 juillet 2016 au visa de l'article 101 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

Dire et juger que ces fautes, constatées et sanctionnées par la Commission européenne aux termes de sa décision en date du 19 juillet 2016 au visa de l'article 101 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, leur ont nécessairement causé un préjudice dont elles sont fondées à solliciter la réparation intégrale ;

En conséquence,

Ordonner une expertise judiciaire confiée à tel expert qu'il plaira à la juridiction de céans de bien vouloir nommer, avec mission ci-après décrite :

Convoquer et entendre les parties, assistées le cas échéant de leurs conseils, et recueillir leurs observations à l'occasion de l'exécution des opérations ou de la tenue des réunions d'expertises ;

Se faire communiquer tout document utile, contractuel ou autre ;

Évaluer le surcoût engendré dans le secteur des camions pesant entre 6 et 16 tonnes et plus de 16 tonnes visées par la décision du 19 juillet 2016 de la Commission européenne (n°C (2016) 4673) ;

Évaluer leur entier préjudice ;

Faire toutes les observations utiles au règlement du litige ;

Ordonner aux sociétés Renault Trucks et DAF Trucks NV de communiquer dans les plus brefs délais à l'expert désigné tous documents utiles à l'exercice de sa mission, notamment les rapports établis au cours de l'instruction par la Commission européenne ;

Condamner les sociétés Renault Trucks et DAF Trucks NV à payer à la SAS Transports Petitdidier et Fils une provision d'un montant de 15 000 euros au titre des frais d'expertise ;

Condamner les sociétés Renault Trucks et DAF Trucks NV à payer à la société Entreprise G Corre une provision d'un montant de 15 000 euros au titre des frais d'expertise ;

Dire et juger qu'en cas de refus ou d'empêchement de l'expert désigné, il sera procédé à son remplacement par ordonnance ;

Dire et juger que l'expert devra déposer son rapport au greffe de cette juridiction dans les six mois de sa saisine ;

Condamner solidairement les sociétés Renault Trucks et DAF Trucks NV à verser à la société Transports Petitdidier et Fils à titre provisionnel, la somme, à parfaire, de 128 000 euros au titre du préjudice causé par les pratiques anticoncurrentielles commises, dans l'attente du dépôt du rapport de l'expert ;

Condamner solidairement les sociétés Renault Trucks et DAF Trucks NV à verser à la société Entreprise G Corre à titre provisionnel la somme, à parfaire, de 28.000 euros, au titre du préjudice causé par les pratiques anticoncurrentielles commises, dans l'attente du dépôt du rapport de l'expert ;

Débouter les sociétés Renault Trucks et DAF Trucks NV de l'ensemble de leurs demandes ;

A titre subsidiaire :

Ordonner le renvoi de l'affaire au fond ;

En tout état de cause :

Débouter les sociétés Renault Trucks et DAF Trucks NV de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

Condamner solidairement les sociétés Renault Trucks et DAF Trucks NV au paiement, au titre des frais irrépétibles de première instance, des sommes de :

4 000 euros au profit de la société Transports Petitdidier et Fils ;

4 000 euros au profit de la société Entreprise G Corre ;

Condamner solidairement les sociétés Renault Trucks et DAF Trucks NV au règlement au profit de la société Transports Petitdidier et Fils de la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles engagés en cause d'appel ;

Condamner solidairement les sociétés Renault Trucks et DAF Trucks NV au règlement au profit de la société Entreprise G Corre de la somme de 5 000 euros au titre des frais

Irrépétibles engagés en cause d'appel ; condamner solidairement les sociétés Renault Trucks et DAF Trucks NV aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions remises le 1er septembre 2020, auxquelles il est renvoyé s'agissant des moyens qui y sont développés, la société Renault Trucks demande à la cour de :

Sur la demande d'expertise :

Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il n'a pas déclaré la société Transports Petitdidier et Fils irrecevable en sa demande au regard de l'expertise sollicitée ;

Confirmer le jugement entrepris pour le surplus ;

A titre principal, statuant à nouveau :

Dire et juger que la société Transports Petitdidier et Fils n'a ni qualité, ni intérêt à agir à l'encontre de la société Renault Trucks ;

En conséquence :

Déclarer la société Transports Petitdidier et Fils irrecevable en sa demande d'expertise à l'égard de la société Renault Trucks ;

A titre subsidiaire, confirmant le jugement :

Dire et juger que l'expertise sollicitée par les sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre contrevient aux dispositions du code de procédure civile, et particulièrement de celles de l'article 145 du code de procédure civile, en ce qu'elle ne repose sur aucun motif légitime ;

Dire et juger au surplus que les demandes formées dans la présente instance par les sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre sont invoquées sur la base de dispositions inapplicables aux faits de l'espèce ;

En conséquence :

Rejeter la demande de désignation d'expert formulée par les sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre ainsi que toute demande afférente ;

A titre infiniment subsidiaire :

Prendre acte des protestations et réserves d'usage de la société Renault Trucks ;

Désigner un expert judiciaire ayant pour mission de :

Convoquer et procéder à l'audition des parties, assistées le cas échéant de leurs conseils, et recueillir leurs observations à l'occasion de l'exécution des opérations ou de la tenue des réunions d'expertise ;

Procéder à l'audition des parties afin de déterminer, dans le respect du principe du contradictoire, la méthode économétrique la plus adaptée dans le cadre de l'évaluation d'un préjudice allégué à la suite d'une pratique anticoncurrentielle concernant les sept châssis Renault Trucks ;

Procéder à l'évaluation du préjudice allégué concernant les sept camions Renault Trucks pesant entre 6 et 16 tonnes et plus de 16 tonnes et qui serait imputable aux pratiques visées par la décision du 19 juillet 2016 de la Commission européenne (n° C (2016) 4673) par la mise en œuvre de la méthode économétrique qui sera retenue à  l'issue d'un débat contradictoire entre les parties et l'expert ;

Délimiter précisément le périmètre des données nécessaires pour l'analyse du préjudice allégué, conformément à la méthode économétrique arrêtée concernant les sept châssis Renault Trucks ; définir une liste exhaustive de l'intégralité des variables nécessaires à l'évaluation du préjudice allégué par les sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre concernant les sept châssis Renault Trucks, en ce compris l'impact qu'a pu avoir la crise de 2008 sur l'évolution des prix des châssis, et tenir compte de ces variables dans toute analyse produite ;

S’assurer, par des tests de robustesse, de la fiabilité des résultats observés ;

Déterminer les dates effectives de début et de fin d'effets de la pratique sur les prix nets, et isoler les périodes où aucun effet n'est ressenti ;

Déterminer / quantifier le lien allégué entre une hausse de prix bruts et les prix nets effectivement payés ;

Examiner l'évolution des coûts et des marges des sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre entre la période infractionnelle et la période s'étant écoulée depuis la fin de la période infractionnelle ;

Le cas échéant, identifier la cause de toute éventuelle hausse des coûts des sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre ;

Évaluer dans quelle mesure l'éventuel surcoût supporté par les sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre a été répercuté sur leurs propres clients ;

Mener une analyse économétrique en tenant compte des différences entre les contrats passés par le biais d'un concessionnaire et les contrats conclus directement par la société Renault Trucks afin d'analyser dans quelle mesure le revendeur a pu répercuter l'éventuel surcoût sur les sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre ;

Se faire communiquer par les sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre l'ensemble des éléments de leurs comptabilités depuis le début de la période infractionnelle concernant les sept châssis Renault Trucks ;

Se faire communiquer par les sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre tout élément relatif à leur politique tarifaire et à leurs relations commerciales avec leurs propres clients, au cours de la période infractionnelle et depuis ;

Établir un prérapport reprenant l'ensemble de ses constatations et conclusions à l'issue de ses diligences ;

Recueillir les observations des parties au sujet de ce prérapport, conformément à l'article 276 du code de procédure civile, puis établir un rapport définitif, tenant compte des dires des parties, qui sera déposé au greffe de la cour et adressé en copie à chacune des parties ;

Mettre à la charge exclusive de la société Transports Petitdidier et Fils la provision à valoir sur les frais de l'expertise qu'il plaira à la cour de fixer ;

A titre subsidiaire :

Rejeter la demande de production forcée de documents formulée par les sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre ;

Rejeter la demande de provision formée par les sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre au titre des frais d'expertise ;

En tout état de cause, si la cour envisageait une production forcée de documents :

Juger qu'elle prendra connaissance seule des documents dont la communication est envisagée avant toute décision de production forcée de ces documents, hors la présence des sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre ;

À cette fin, fixer un calendrier afin que la SAS Renault Trucks communique à la cour :

a. les documents protégés au titre de la clémence et de la transaction par l'article L. 483-5 du code de commerce ;

b. pour les documents contenant du secret des affaires, (i) une version intégrale des documents litigieux identifiant les informations relevant de la protection du secret des affaires ; (ii) une version non confidentielle ou un résumé des documents litigieux ; et (iii) un mémoire précisant les motifs qui lui confèrent le caractère d'un secret des affaires ;

En conséquence et in fine, débouter les sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre de leur demande de production forcée s'ils concernent des documents protégés par les procédures et de transaction, et par le secret des affaires, après avoir examiné les documents litigieux, recueilli les observations et entendu la société Renault Trucks ;

Sur les autres demandes :

Dire et juger que la cour d'appel n'est pas saisie de ces demandes ;

En conséquence, les déclarer irrecevables ;

En particulier :

Sur les demandes formulées par les sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre qui excèdent les pouvoirs du juge des référés :

A titre principal :

Dire et juger qu'au regard de l'article 562 du code de procédure civile, la cour d'appel n'est pas saisie des demandes suivantes :

« Rappeler que la SAS Renault Trucks a commis des fautes engageant sa responsabilité en raison de son implication dans des pratiques anticoncurrentielles constatées et sanctionnées par la Commission européenne aux termes de sa décision en date du 19 juillet 2016 au visa de l'article 101 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne » ;

« Dire et juger que ces fautes, constatées et sanctionnées par la Commission européenne aux termes de sa décision en date du 19 juillet 2016 au visa de l'article 101 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, ont nécessairement causé un préjudice à la SAS Transports Petitdidier et Fils et à la SARL Entreprise G Corre dont celles-ci sont fondées à solliciter la réparation intégrale » ;

En conséquence, déclarer ces demandes irrecevables ;

A titre subsidiaire :

Dire et juger qu'en soumettant à la cour, investie des mêmes pouvoirs que le président du tribunal de commerce de Lyon statuant en référé, les demandes rappelées ci-après, les sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre l'invitent à trancher des questions de fond et, de ce fait, lui demandent d'excéder ses pouvoirs :

« Rappeler que la SAS Renault Trucks a commis des fautes engageant sa responsabilité en raison de son implication dans des pratiques anticoncurrentielles constatées et sanctionnées par la Commission européenne aux termes de sa décision en date du 19 juillet 2016 au visa de l'article 101 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ».

« Dire et juger que ces fautes, constatées et sanctionnées par la Commission européenne aux termes de sa décision en date du 19 juillet 2016 au visa de l'article 101 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, ont nécessairement causé un préjudice à la SAS Transports Petitdidier et Fils et à la SARL Entreprise G Corre dont celles-ci sont fondées à solliciter la réparation intégrale » ;

En conséquence : dire n'y avoir lieu à référé s'agissant de ces demandes et les rejeter ;

Sur la demande de provision formée par les sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre au titre du préjudice prétendument subi du fait des pratiques anticoncurrentielles alléguées :

A titre principal :

Dire et juger qu'au regard de l'article 562 du code de procédure civile, la cour d'appel n'est pas saisie de la demande de provision formée par les sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre au titre du préjudice prétendument subi du fait des pratiques anticoncurrentielles alléguées ;

En conséquence, déclarer cette demande irrecevable ;

A titre subsidiaire :

Dire et juger que l'existence de l'obligation dont se prévalent les sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre pour solliciter l'octroi d'une provision au titre du préjudice prétendument causé par les pratiques anticoncurrentielles est éminemment contestable ;

Rejeter la demande de provision formée par les sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre au titre du préjudice prétendument subi du fait des pratiques anticoncurrentielles ;

Sur la demande de renvoi de l'affaire au fond :

A titre principal :

Dire et juger qu'au regard de l'article 562 du code de procédure civile, la cour d'appel n'est pas saisie de la demande de renvoi de l'affaire au fond formée par les sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre ;

En conséquence, déclarer cette demande irrecevable ;

A titre subsidiaire :

Rejeter la demande formée par les sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre de voir ordonner le renvoi de l'affaire au fond ;

En tout état de cause :

Débouter les sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

Condamner in solidum les sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre à payer à la société Renault Trucks 30.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles au titre de l'appel ;

Condamner in solidum les sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre aux entiers dépens de première instance et d'appel, ces derniers pouvant être recouvrés directement par son avocat en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions remises le 18 août 2020, auxquelles il est renvoyé s'agissant des moyens qui y sont développés, la société DAF Trucks NV demande à la cour de :

In limine litis :

La déclarer recevable en son appel incident et celui-ci bien fondé ;

Infirmer en conséquence l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a refusé de surseoir à statuer jusqu'à l'issue définitive du recours introduit le 11 décembre 2017 devant le Tribunal de l'Union (affaire T-799/17) par Scania AB et Scania CV AB contre la décision de la Commission européenne du 27 septembre 2017 ;

Prononcer un tel sursis à statuer, qui aurait vocation à être maintenu dans le cas où un recours serait ensuite introduit devant la Cour de justice de l'Union européenne contre l'arrêt à venir du Tribunal de l'Union ;

A titre subsidiaire :

Confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a fait échec aux prétentions des appelantes ;

Dire et juger que le « motif légitime » exigé par l'article 145 du code de procédure civile implique de la part des appelantes la démonstration de ce que les faits qu'elles invoquent et l'action qu'elles projettent d'exercer sont plausibles ;

Dire et juger que tel n'est pas le cas puisque les appelantes se contentent d'invoquer des « présomptions » inapplicables en l'espèce, sans rapporter le moindre indice objectif de l'existence d'une faute imputable à l'un quelconque des constructeurs concernés par leur action, d'un préjudice personnel et d'un lien de causalité entre les deux ;

Dire et juger en conséquence qu'aucune expertise ne saurait être ordonnée en l'espèce ;

Dire et juger que plusieurs contestations sérieuses font obstacle à l'octroi d'une provision au profit des appelantes dans la mesure où :

Aucune faute manifeste et certaine ne peut être alléguée à son encontre et/ou à l'encontre de l'un quelconque des autres constructeurs ;

Aucune pièce ne démontre l'existence manifeste et certaine d'un préjudice susceptible d'être revendiqué par les appelantes ;

Les appelantes n'administrent à aucun moment la preuve manifeste et certaine de ce que leurs prétendus préjudices procèdent directement des fautes qu'elles allèguent ;

Rejeter en conséquence les demandes de provisions formulées par les appelantes ;

Dire et juger (i) que les appelantes n'ont pas démontré qu'il est plausible qu'elles aient subi un préjudice ; (ii) qu'elles n'ont pas identifié précisément de pièces ni même de catégorie de pièces dont la communication est demandée ; (iii) qu'elles n'ont pas non plus démontré qu'une telle de communication était fondée au regard des critères de l'article L. 483-1 du code de commerce ;

Rejeter en conséquence la demande de communication de pièces ;

Débouter les appelantes de toutes leurs autres prétentions, y compris la demande subsidiaire de renvoi de l'affaire au fond ;

Condamner les sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre au paiement d'une somme de 10 000 euros (chacune) au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens, dont distraction au profit de SELARL 2H.

Très subsidiairement, dans l'hypothèse où la demande de communication de pièces serait accueillie favorablement :

Provoquer un débat sur les modalités permettant de protéger les informations confidentielles contenues dans ces pièces ;

Très subsidiairement, dans l'hypothèse où la demande d'expertise serait accueillie favorablement :

Lui donner acte de ses protestations et réserves au sujet de l'ensemble des allégations des appelantes ;

Désigner tel expert avec pour mission de :

Convoquer les parties en veillant à leur indiquer au préalable l'objet de chaque réunion d'expertise ;

Réaliser, après avoir sollicité la communication de tout document utile, une analyse économétrique fondée sur une explication crédible des conséquences de l'infraction sanctionnée par la Commission européenne ainsi qu'une analyse de tous les facteurs qui ont pu avoir un impact sur les marges des sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre ;

Établir un pré-rapport reprenant l'ensemble de ses constatations et conclusions à l'issue de ses diligences ;

Recueillir les observations des parties au sujet de ce prérapport, puis établir un pré-rapport définitif, à la lumière des dires des parties, rapport qui sera déposé au greffe du Tribunal et adressé en copie à chacune des parties ;

Autoriser l'expert à solliciter de manière motivée la communication de tout document précisément identifié et utile à l'accomplissement de sa mission et à entendre tout sachant ;

Dire que l'expert aura rempli sa mission dans un délai de six mois à compter de sa saisine ;

Condamner les sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre au paiement d'une provision d'un montant qu'il plaira à la cour d'appel de fixer au titre des frais d'expertise.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 septembre 2020.

SUR CE, LA COUR,

Sur l'intérêt et la qualité à agir de la société Renault Trucks :

La société Renault Trucks demande à ce qu'il soit jugé que la société Transports Petitdidier et Fils n'a ni qualité ni intérêt pour agir à son encontre, en exposant qu'elle n'a elle-même pas acquis de camions Renault et qu'elle ne peut agir dans l'intérêt de sa seule filiale, la société Entreprise G Gorre.

Cependant, la société Transports Petitdidier et Fils se fondant sur l'article 11 de la directive 2014/104/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 novembre 2014 relative à certaines règles régissant les actions en dommages et intérêts en droit national pour les infractions aux dispositions du droit de la concurrence des États membres et de l'Union européenne dont il résulte que la partie lésée a le droit d'exiger la réparation intégrale de chacune des entreprises ayant enfreint le droit de la concurrence, la fin de non-recevoir soulevée par la société Renault Trucks ne peut être retenue. Le point de savoir si cette directive a vocation à s'appliquer ou non au contentieux envisagé par les appelantes procède d'une question susceptible de conditionner les demandes d'expertise et de provision mais ne saurait priver la société Renault Trucks d'une qualité, non plus que d'un intérêt à agir.

Sur la demande de sursis à statuer formée par la société DAF Trucks NV :

Invoquant le fait que les appelantes prennent uniquement appui sur le caractère infractionnel de certaines pratiques sanctionnées par la Commission et que la société Scania a contesté les caractères essentiels de l'infraction constatée à son égard par la Commission, la société DAF Trucks NV sollicite un sursis à statuer jusqu'à l'issue définitive du recours introduit le 11 décembre 2017 devant le tribunal de l'Union européenne (affaire T-799/17) par Scania AB et Scania CV AB contre la décision de la Commission européenne du 27 septembre 2017.

Cette demande de sursis à statuer est mal fondée : en effet, la décision du 19 juillet 2016 (affaire AT.39824) est définitive  à l'égard des sociétés Renault Trucks et DAF Trucks NV ainsi que de plusieurs autres industriels. Seules les sociétés du groupe Scania ont décidé de ne pas transiger avec la Commission, en introduisant, le 11 décembre 2017, un recours en annulation de la décision de la Commission du 27 septembre 2017 qui les concerne elles seules. L'issue de cette procédure étant sans incidence sur le caractère définitif de la décision de la Commission du 19 juillet 2016, il n'y a pas lieu d'accueillir la demande de sursis à statuer formulée par la société DAF Trucks NV, de sorte que l'ordonnance entreprise sera confirmée sur ce point.

Sur les demandes des appelantes tendant à déclarer que leurs adversaires ont commis des fautes :

Les appelantes demandent à la cour, dans le dispositif de leurs écritures, de rappeler que la SAS Renault Trucks et la société DAF Trucks NV ont commis des fautes engageant leur responsabilité en raison de leur implication dans des pratiques anticoncurrentielles constatées et sanctionnées par la Commission européenne aux termes de sa décision en date du 19 juillet 2016 au visa de l'article 101 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et dire et juger que ces fautes, constatées et sanctionnées par la Commission européenne aux termes de sa décision en date du 19 juillet 2016 au visa de l'article 101 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, leur ont nécessairement causé un préjudice dont elles sont fondées à solliciter la réparation intégrale. Dans la partie explicative de leurs conclusions (en page 54), les appelantes exposent qu'il s'agirait pour le juge des référés de constater les termes de la décision de la Commission, sur lesquels ni le juge des référés ni le juge du fond n'ont de pouvoir de réformation.

Il n'appartient pas au juge des référés de "rappeler" que des parties ont commis des fautes, non plus que de dire que ces fautes auraient nécessairement causé un préjudice, et pas davantage de constater dans le dispositif de sa décision ce qu'aurait déjà indiqué la Commission. Ces chefs de dispositif des conclusions des sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre seraient susceptibles de constituer des moyens mais ne sauraient saisir la cour de demandes sur lesquelles elle devrait statuer.

Sur la demande d'expertise et les demandes de provision pour frais d'expertise :

Aux termes de l'article 145 du code de procédure civile, s'il existe un motif légitime de conserver ou d'établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d'un litige, les mesures d'instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé sur requête ou en référé.

Si la mise en œuvre de l'article 145 du code de procédure civile ne nécessite pas de se déterminer sur l'issue du litige envisagé au fond, il convient cependant que l'action en justice en vue de laquelle s'inscrit la démarche probatoire du demandeur ne soit pas manifestement vouée à l'échec.

Or, en invoquant au soutien de leur action éventuelle à venir les dispositions de transposition de la directive 2014/104/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 novembre 2014 relative à certaines règles régissant les actions en dommages et intérêts en droit national pour les infractions aux dispositions du droit de la concurrence des États membres et de l'Union européenne, les sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre méconnaissent de manière manifeste les dispositions d'application de ce texte dans le temps.

En effet, cette directive a été transposée en droit interne par l'ordonnance n° 2017-303 du 9 mars 2017 relative aux actions en dommages et intérêts du fait des pratiques anticoncurrentielles et par son décret d'application n° 2017-305 du même jour. Il résulte de l'article L. 481-1 du code de commerce que le titre VIII du livre IV de ce code est applicable à toute action en justice ayant pour objet l'obtention d'une indemnisation introduite par une victime en raison de la commission d'une ou de plusieurs pratiques prohibées par les dispositions qui, en droit de l'Union sont directement applicables par les juridictions des Etats membres, à savoir les articles 101 (ententes) et 102 (abus de position dominante).

C'est notamment parce qu'elles fondent leur demande sur ce dispositif que l'appel a été interjeté devant la cour d'appel de Paris alors que la décision de première instance a été prononcée par le juge des référés du tribunal de commerce de Lyon. C'est également en considération de ce dispositif que les sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre entendent demander réparation de leur entier préjudice auprès de la société Renault Trucks, en tant que société ayant pris part à une entente, sans que celle-ci ne puisse opposer le bénéfice de discussion ou de division, l'article L. 481-9 du code de commerce prévoyant une obligation de réparer le préjudice concurrentiel subi par la victime, dont est tenue chacune des entités ayant concouru à la réalisation de la pratique prohibée.

Or, il résulte des dispositions d'application dans le temps de ce dispositif qu'il n'est pas applicable aux acquisitions dont font état chacune des appelantes. L'ordonnance précitée du 9 mars 2017 prévoit au premier alinéa du I de l'article 12 que ses dispositions entrent en vigueur au lendemain de sa publication, laquelle est intervenue au Journal officiel du 10 mars 2017. Ainsi, qu'il s'agisse des règles nouvelles en droit interne instaurant des présomptions (alinéa 2 de l'article L. 481-2, article L. 481-4, alinéa 2 à 6 de l'article L. 481-5, articles L. 481-6 et L. 481-7), de celles relatives aux modes de preuve admissibles (derniers alinéas des articles L. 483-5 et L. 483-8, article L. 483-10) ou de celles relatives au droit de la responsabilité (articles L. 481-1, L. 481-3, premier alinéa de l'article L. 481-5, articles L. 481-8 à L. 481-14), toutes ne concernent que les créances de réparation nées d'un fait générateur survenu postérieurement à l'entrée en vigueur de ce dispositif.

Les camions acquis par la société Transports Petitdidier et Fils l'ont été, selon le tableau qu'elle communique en pages 11 et 12 de ses conclusions, entre le 10 février 1997 et le 30 septembre 2013. Ceux acquis par la société Entreprise G Gorre l'ont été entre le 4 avril 2007 et le 14 avril 2010. Ainsi, le fait générateur des créances de réparation alléguées est antérieur de plusieurs années à l'entrée en vigueur, le 11 mars 2017, du dispositif invoqué par les appelantes au soutien de leurs demandes.

Par ailleurs, plusieurs des camions pour lesquels il est allégué un surcoût ont été acquis par des opérations de crédit-bail quand d'autres l'ont été par voie de vente, sans que les appelantes ne précisent plus avant quels sont ceux acquis selon chacune de ces modalités. S'agissant des camions acquis par voie de vente, l'absence de participation aux mesures d'expertise de certains des cocontractants de la société Transports Petitdidier et Fils, telles les sociétés Iveco et Mercedes, empêcherait l'expert de disposer des éléments lui permettant de calculer un éventuel surcoût que ces dernières lui auraient appliqué. S'agissant de ceux ayant fait l'objet de crédits-bails, l'expert judiciaire ne pourrait évaluer le préjudice subi par les appelantes qu'en reconstituant la chaîne de distribution, ce qui nécessiterait la participation de chaque acteur de cette chaîne aux opérations d'expertise. Or, les opérateurs des crédits-bails n'ont pas été appelés en la cause, ce qui priverait la mesure d'expertise sollicitée de son efficacité.

Etant dépourvue d'utilité, la mesure d'expertise demandée ne procède pas d'un motif légitime. Aussi est-ce à bon droit que le juge de première instance l'a rejetée.

La demande de communication de pièce formée par les appelantes est formulée pour l'hypothèse où une expertise aurait été ordonnée dès lors qu'elle porte sur la communication à l'expert de tous documents utiles à l'exercice de sa mission, notamment les rapports établis au cours de l'instruction par la Commission européenne. Le rejet de la mesure d'expertise entraîne par voie de conséquence celui de cette demande.

Sur les autres demandes de provisions formées par les appelantes :

En demandant l'allocation d'une provision de 4 000 euros par camion acquis, les sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre sollicitent respectivement la condamnation des défenderesses à leur verser les sommes de 128 000 et 28 000 euros.

Alors qu'elles avaient formé ces demandes en première instance, le juge des référés du tribunal de commerce n'a pas statué à cet égard : ni la motivation de sa décision ni son dispositif ne font mention de ces demandes. Le juge de première instance a donc omis de statuer sur cette demande.

Or, dès lors qu'un appel n'est pas exclusivement formé pour réparer une omission de statuer, il appartient à la cour d'appel, en raison de l'effet dévolutif, de statuer sur la demande de réparation qui lui est faite (Cass. 2e civ., 22 octobre 1997, n° 95-18.923, Bull. civ. II, n° 250). Encore convient-il dans cette hypothèse que l'acte d'appel vise les demandes sur lesquelles le premier juge n'a pas statué, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, comme le souligne la société Renault Trucks qui soulève dès lors à juste titre l'irrecevabilité de cette demande à raison de l'absence d'effet dévolutif de la présente déclaration d'appel.

Aussi convient-il de déclarer irrecevable ces demandes de provision.

Sur la demande de renvoi au juge du fond :

Sans le motiver dans ses conclusions ni dire sur le fondement de quelle disposition elles le sollicitent, les sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre sollicitent que soit « ordonné le renvoi de l'affaire au fond ».

Si l'article 873-1 du code de procédure civile prévoit qu'à la demande de l'une des parties, et si l'urgence le justifie, le président saisi en référé peut renvoyer l'affaire à une audience dont il fixe la date pour qu'il soit statué au fond, une partie ne peut demander au juge d'appel, sur le fondement de cette disposition au demeurant non invoquée, de saisir directement le juge du premier degré (Civ. 3e, 8 octobre 2003, Bull. n° 175, pourvoi n° 02-10.708). Au demeurant, la condition de l'urgence n'est pas invoquée par les appelantes.

Aussi convient-il de rejeter cette demande.

Sur les mesures accessoires :

Compte-tenu de ce que les fins de non-recevoir tirées du défaut d'intérêt et de qualité à agir soulevées par la société Renault Trucks et de ce que la demande de sursis à statuer formée par la société DAF Trucks NV sont rejetées, il convient de dire que les parties conserveront chacune la charge des dépens d'appel qu'elles ont respectivement exposés.

PAR CES MOTIFS

Rejette les fins de non-recevoir tirées du défaut d'intérêt et du défaut de qualité à agir soulevées par la société Renault Trucks ;

Confirme l'ordonnance entreprise ;

Déclare irrecevables les demandes de provision de 128 000 et de 28 000 euros formées respectivement par les sociétés Transports Petitdidier et Fils et Entreprise G Gorre ;

Dit n'y avoir lieu de statuer sur ce que les appelantes présentent comme des demandes tendant à dire que leurs adversaires auraient commis des fautes leur ayant causé un préjudice ;

Rejette la demande de renvoi de l'affaire au fond formée par les appelantes ;

Dit que les parties conserveront chacune la charge des dépens d'appel qu'elles ont respectivement exposés ;

Rejette les demandes de chacune des parties formulées au titre de l'article 700 du code de procédure civile.