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Décisions

CA Besançon, 1re ch. civ. et com., 20 octobre 2020, n° 19/00389

BESANÇON

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Decreuse l'Artisan du Fumé (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Mazarin

Conseillers :

Mme Chiaradia ,

Avocats :

Me Bauer, Me Vernier

T. com. Besançon, du 16 janv. 2019

16 janvier 2019

FAITS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 25 janvier 2005, la SARL Decreuse l'artisan du fumé (la société Decreuse) a conclu avec la SARL Agence commerciale X (l’agence) un contrat d'agent commercial sur le secteur Franche-Comté/Bourgogne pour la clientèle supermarché, hypermarché et entrepôt, en exclusivité.

Le 2 février 2011, l'agence a adressé un courrier recommandé avec avis de réception à son mandant afin de lui rappeler le retard dans le paiement de ses commissions pour le dernier trimestre 2010 et constater la rupture du contrat pour défaut de respect des obligations du mandant.

Par exploit d'huissier délivré le 31 janvier 2012, l'agence a fait assigner la société Decreuse devant le tribunal de grand commerce de Besançon afin d'obtenir le paiement des sommes dues par son mandant et l'instauration d'une mesure d'expertise.

Par jugement avant dire droit du 27 mai 2015, ce tribunal a désigné Monsieur F en qualité d'expert.

L'agence n'a cependant pas procédé à la consignation qui lui incombait et l'appel formé à l'encontre de cette décision a été déclaré irrecevable par ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 30 mars 2016, confirmée sur déféré par arrêt de la présente cour du 5 juillet 2016.

Par jugement rendu le 16 janvier 2019, le tribunal de commerce de Besançon, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, considérant notamment que la rupture n'était pas imputable à la société Decreuse, qu'une erreur de facturation par l'agent était avérée s'agissant du taux et que le préjudice commercial invoqué par la société Decreuse n'était pas suffisamment étayé, a :

- dit que la société Decreuse est redevable envers l'agence de la somme de 15 169,99 euros HT au titre des commissions des mois de février, mars et avril 2011,

- dit que l'agence est redevable envers la société Decreuse de la somme de 28 768,20 euros au titre de l'erreur sur le taux de commission contractuelle,

- ordonné la compensation des-dites sommes,

- condamné en conséquence l'agence à payer à la société Decreuse la somme de 13 598,21 euros HT,

- débouté les parties de leurs autres demandes,

- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile et mis les dépens à la charge de l'agence.

Suivant déclaration reçue au greffe le 22 février 2019, la société Decreuse a relevé appel de ce jugement et aux termes de ses dernières écritures transmises le 1er octobre 2019, elle demande à la cour de :

- le confirmer sauf en ce qu'il rejette sa demande de dommages-intérêts en réparation des agissements déloyaux de l'agence, de ses manquements aux obligations de fidélité, confidentialité et de non-concurrence,

- statuant de nouveau de ce chef, condamner l'agence à lui payer la somme de 355 362 euros correspondant à deux années de perte de marge brute sur le secteur confié à son agent commercial,

- débouter l'agence de ses demandes,

- la condamner à lui payer 4 000 euros au titre des frais irrépétibles ainsi qu'aux dépens.

Par dernières écritures déposées le 29 janvier 2020, l'agence demande à la cour de :

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il déboute la société Decreuse de sa demande de dommages-intérêts et l'infirmer pour le surplus,

- dire que la société Decreuse est, par ses manquements, seule à l'origine de la rupture du contrat d'agence,

- la condamner à lui payer les sommes de :

* 20 466,10 euros au titre des factures de commissions et du solde dû à la rupture,

* 128 179,29 euros au titre de l'indemnité compensatrice de l'article L. 134-12 du code de commerce,

* 42 299 euros au titre de l'indemnité de remploi,

- dire que ces sommes seront assorties de l'intérêt au taux légal à compter de l'assignation, avec capitalisation en application de l'article 1154 du code civil,

- condamner la société Decreuse à lui verser une indemnité de 6 000 euros au titre des frais irrépétibles et à supporter les entiers dépens,

- par même arrêt, avant dire droit, ordonner une mesure d'expertise afin de dresser un état exhaustif annuel des commandes et facturations de la société Decreuse et de faire le compte entre les parties,

- réserver les dépens sur cette partie de la décision.

Pour l'exposé complet des moyens des parties, la cour se réfère à leurs dernières conclusions susvisées, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

La clôture de l'instruction de l'affaire a été prononcée par ordonnance du 25 août 2020.

MOTIFS DE L'ARRÊT

* Sur le fondement de la rupture du contrat d'agence

Attendu que l'agence a pris, par lettre recommandée avec avis de réception du 2 février 2011, l'initiative de la rupture de son contrat d'agence intervenu le 25 juillet 2005 avec la société Decreuse, motif pris de ce que les commissions pour la période d'octobre à décembre 2010 étaient demeurées impayées en dépit de nombreuses relances ; qu'aucun autre motif n'est invoqué à l'appui de la rupture unilatérale du contrat par l'agent ;

Que l'appelante soutient à cet égard que cette rupture est abusive puisqu'elle repose exclusivement sur un prétendu retard de paiement de commissions du dernier trimestre 2010, qui n'a, au surplus, été précédée d'aucune mise en demeure, alors qu'elle a réglé ces trois commissions à son agent le 4 février 2011, soit respectivement deux mois, un mois et trois jours après la facturation de chacune d'elles, et que le contrat d'agent stipule un délai de paiement de trois mois ;

Attendu qu'en vertu de l'article 7.6 du contrat d'agent précité, « les commissions sont payables chaque trimestre ou chaque mois avec l'envoi dans les quinze jours suivant la fin du trimestre ou du mois d'un bordereau indiquant la totalité des affaires relevant de droit à commissions » ;

Qu'en l'espèce, la facturation des commissions sur ventes pour octobre, novembre et décembre 2010 a été envoyée à la société Decreuse par son agent commercial respectivement le 29 novembre 2010, le 31 décembre 2010 et le 28 janvier 2011 ; que le règlement des trois commissions correspondantes est intervenu par virements bancaires le 4 février 2011, ce que ne conteste pas l'intimée ;

Que par ailleurs selon l'article R. 134-3 du code de commerce « le mandant remet à l'agent commercial un relevé des commissions dues, au plus tard le dernier jour du mois suivant le trimestre au cours duquel elles sont acquises. Ce relevé mentionne tous les éléments sur la base desquels le montant des commissions a été calculé » ;

Que si les stipulations contractuelles précitées ne sont pas dépourvues d'une certaine imprécision, notamment en ce qu'elles laissent une option quant à la périodicité des paiements de commissions et un vide en ce qui concerne le délai de paiement, il n'en demeure pas moins qu'en l'occurrence, les trois commissions litigieuses ont été acquittées largement avant l'expiration d'un délai de trois mois à compter leur facturation respective comme le souligne à juste titre l'appelante, de sorte que l'agent commercial ne pouvait valablement fonder la rupture du contrat d'agence sur ce seul motif, a fortiori sans mise en demeure préalable par lettre recommandée avec avis de réception ; qu'il doit par conséquent, comme l'ont fait à bon droit les premiers juges, être retenu que la rupture du contrat à l'initiative de l'agent commercial sans faute caractérisée imputable à son mandant ne saurait être intervenue aux torts de ce dernier étant précisé que l'intimée ne peut à ce titre se prévaloir de griefs portant sur des faits ultérieurs à cette rupture ;

* Sur les créances respectives invoquées par les parties au titre des commissions

Attendu en premier lieu que dans son appel limité, la société Decreuse n'a pas critiqué le jugement déféré en ce qu'il l'a condamnée à payer à son agent la somme de 15 169,99 euros HT au titre des commissions des mois de février, mars et avril 2011 correspondant à l'exécution du préavis et explique qu'elle ne les a pas réglées spontanément dès lors qu'elle contestait le taux appliqué par son agent ;

Que l'intimée a en revanche formé appel incident de ce chef et sollicité l'allocation d'une somme de 20 466,10 euros en appliquant un taux de 6,25 % correspondant, selon ses écrits, au solde dû à la date de la rupture (2 février 2011) et aux facturations de commissions ultérieurement émises ;

Attendu que la société Decreuse soutient par ailleurs que le taux de commission contractuellement défini est de 5,25 % et non pas de 6,25 %, de sorte qu'elle est bien fondée à solliciter la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a condamné son contradicteur au paiement du trop-versé suite à l'erreur d'application du taux par son agent dans ses facturations ;

Que l'agence objecte que le taux de commission fixé à 5,25 % dans le contrat initial a été porté dès 2006 à 6,25 % comme en attestent plusieurs pièces émanant de la société Decreuse elle-même et, notamment, un tableau de production édité le 11 septembre 2009, et soutient que son mandant ne peut sérieusement prétendre avoir procédé à des paiements par erreur depuis 2006 ; qu'elle affirme encore que la périodicité des paiements choisie par les parties était mensuelle, que les règlements de ses commissions étaient tardifs voire incomplets, puisque, outre les facturations de février et mars 2011, son mandant reste lui devoir un solde de 6 142,50 euros résultant de la propre comptabilité de celui-ci et ajoute que la société Decreuse ne lui communiquait pas la comptabilité des affaires commissionnables ;

1/ sur la restitution du trop-versé à l'agent,

Attendu qu'il n'est pas contestable que le taux conventionnellement fixé par le contrat du 25 janvier 2005 liant les parties s'élève à 5,25 % et qu'aucun avenant écrit à ce contrat n'est allégué en la cause ;

Que si l'article L. 134-2 du code de commerce, régissant le contrat d'agence commerciale, n'exige aucun écrit et que la preuve d'un accord des parties peut être rapportée, entre commerçants, par tous moyens, il est de principe que cela ne s'applique que lorsque l'agent commercial n'entend pas prouver contre et outre le contenu du contrat mais seulement, comme c'est le cas en l'espèce, démontrer que son mandant avait accepté un avenant au contrat initial portant sur le taux de rémunération de sa prestation et ainsi renoncé au taux initialement fixé ;

Attendu qu'en l'espèce il ressort d'un document émanant de la société Decreuse elle-même intitulé « CA Agence X Decreuse 2010 » que le taux de rémunération apparaissant en dernière page du document s'élève à 6,25 % ; qu'il en est de même du tableau adressé par le mandant à son agent, édité le 11 septembre 2009, lequel fait clairement apparaître un taux de 6,25 % pour l'année 2008 ; que l'appelante qui, pendant au moins trois ans, a réglé les factures établies par l'intimée sans contester le taux majoré appliqué au chiffre d'affaire est par conséquent mal fondée à soutenir aujourd'hui, au regard de ce qui précède, que les règlements effectués sont indus pour la part excédant le taux de 5,25 % ; que ce comportement accrédite effectivement la thèse de l'intimée selon laquelle l'augmentation du taux de commissionnement a été acceptée par le mandant au moyen d'un avenant implicite, non concrétisé par écrit, mais qui a toute valeur entre les parties, dès lors qu'il a reçu application pendant plusieurs années et que le mandant lui-même le mentionne dans ses propres documents comptables, attestant par là même avoir renoncé au taux initialement fixé ;

Qu'il s'ensuit que c'est à tort que les juges consulaires ont estimé que le mandant était légitime à solliciter la restitution d'un trop versé à ce titre ; que le jugement querellé sera infirmé en ce qu'il a fixé la créance de la société Decreuse à l'encontre de l'agence à la somme de 28 768,20 euros ;

2/ sur le solde de commissions restant dû,

Attendu que l'agence étant bien fondée à appliquer un taux de 6,25 % sur ses facturations au titre des commissions dues pour février 2011 (9 877,76 euros) et mars 2011 (4 513,11 euros), son mandant lui est redevable à ce titre de la somme de 14 390,87 euros ;

Que par ailleurs il résulte de la facture établie le 10 mars 2011 au titre de sa commission pour le mois de janvier 2011, soit antérieurement à la rupture du contrat, que le mandant lui est également redevable à ce titre d'une somme de 6 075,23 euros, qu'elle a au demeurant validé dans sa comptabilité puisqu'elle apparaît dans son grand livre des comptes pour ce même montant ;

Qu'il résulte de ce qui précède que la société Decreuse sera condamnée à payer à l'agence, conformément à la demande de celle-ci, la somme totale de 20 466,10 euros au titre des commissions de janvier à mars 2011 inclus qui produira intérêts au taux légal à compter de l'assignation avec anatocisme ;

* Sur les manquements imputés à l'agent commercial

Attendu que la société Decreuse prétend que Monsieur X a, tant en cours d'exécution de son mandat qu'après la rupture du contrat, commis des agissements déloyaux ayant généré la perte immédiate de nombreux clients par un détournement et une fidélisation de ces clients pour le compte d'un autre mandant, en particulier le client Saborec ; qu'elle ajoute qu'il a fait bénéficier certains clients d'avantages commerciaux et d'avoirs prohibitifs non validés par elle ; qu'elle considère par conséquent que les négligences et agissements délibérés de son agent lui ont causé un préjudice commercial, qui ne peut s'expliquer par le seul incendie survenu en juillet 2012 comme l'ont retenu à tort selon elle les juges consulaires ; 

Que l'agence conteste tout acte déloyal au détriment de son mandant, souligne que ces allégations ne sont pas étayées, et s'oppose à la demande indemnitaire adverse, ce d'autant que la perte de chiffre d'affaire invoquée résulte manifestement de l'incendie dont a été victime la société Decreuse en juillet 2012, qui a paralysé sa production, et du fait que son agence comportant trois VRP a été remplacée, plus d'un an après la rupture du contrat litigieux, par un seul agent commercial qui ne pouvait assurément aboutir aux mêmes résultats ;

Attendu que l'article 6.3 du contrat d'agence du 25 janvier 2005 disposait que « pendant la durée du contrat et un an après sa fin pour quelque cause que ce soit, l'agent s'interdit de représenter dans son secteur directement ou indirectement tout produit concurrent des produits visés au présent contrat » ;

Que toutefois, il résulte des pièces communiquées que le client Saborec a conclu un contrat d'agence commerciale le 22 mars 2011 avec la SARL Agence DAC (X agence commerciale) qui constitue une entité juridique distincte dont le gérant est Monsieur Y, frère de Monsieur X, lequel contrat a cessé le 30 avril 2013, de sorte que la violation de l'obligation contractuelle précitée n'est pas constituée ; que pour le surplus, il n'est produit par l'appelante aucune pièce étayant ses allégations pour d'autres clients ;

Que par ailleurs s'il est produit une correspondance du conseil de la société Decreuse, datée du 4 mai 2011, enjoignant l'agence de cesser ses agissements consistant à informer certains de ses clients, notamment sur le secteur du Jura, de ce que la société Decreuse n'existe plus ou ne veut plus vendre ses produits à la grande distribution, cette pièce non étayée par des témoignages de clients attestant avoir reçu l'information erronée alléguée ne saurait suffire à constituer une preuve suffisante puisqu'elle émane d'un avocat sur déclaration de sa cliente, partie au litige ;

Qu'enfin, si Madame Z, recrutée en juin 2012 par la société Decreuse en qualité d'attachée commerciale, atteste que « l'agence X avait repris une carte de salaisons charcuterie Saborec avec passage de ses agents en magasin », elle commet la même confusion que l'appelante au sujet de l'agence DAC ; que si elle indique qu'à ce jour elle n'a « toujours pas repris d'échanges commerciaux avec certains clients » et précise que « certains clients réguliers et fidèles avaient arrêté tout commerce avec Decreuse alors qu'aucune raison particulière ne le justifiait », évoquant à cette occasion qu'elle « pensait même que les clients avaient dû entendre des propos négatifs et avaient peut-être été incités à cesser tout commerce avec Decreuse » ces allégations constituent à l'évidence une impression subjective et en tout état de cause n'incriminent pas l'agence ;

Qu'en outre l'argument consistant pour l'intimée à souligner le fait qu'aucune activité d'agent commercial n'a eu lieu entre le 4 mai 2011, date de fin de son préavis, et juin 2012, date de recrutement de Madame Z, laquelle a succédé plus d'un après à trois VRP, a nécessairement eu une incidence sur l'évolution du chiffre d'affaire, ne manque pas de pertinence ;

Que si l'attachée commerciale indique enfin qu'elle a récupéré plusieurs dossiers conflictuels dans lesquels l'intimée avait accordé, sans l'accord de son mandant, des conditions exceptionnelles et très avantageuses à certains clients et qu'il ressort de quelques échanges avec Monsieur X que son agence a accordé certains avoirs sans observer la procédure d'usage, il n'est pas démontré que ce comportement ait causé un préjudice commercial à la société Decreuse ;

Attendu qu'il résulte de ce qui précède que les agissements fautifs imputés à son agent commercial n'étant pas suffisamment caractérisés, la demande indemnitaire formée par la société Decreuse ne saurait prospérer ;

Que par substitution de motifs, il y a lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté celle-ci de sa prétention à ce titre ;

* Sur les préjudices subséquents à la rupture du contrat d'agence

Attendu qu'en vertu des dispositions combinées des articles L. 134-12 et L. 134-13 du code de commerce, l'agent commercial qui a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi en cas de cessation de ses relations avec le mandant, en est toutefois privé lorsque la cessation du contrat résulte de son initiative à moins que cette cessation ne soit justifiée par des circonstances imputables au mandant ;

Qu'il a été précédemment retenu que le motif invoqué par l'agent commercial à l'appui de la rupture du contrat d'agence à son initiative n'était pas de nature à constituer une faute imputable au mandant et à considérer que cette rupture devait l'être aux torts de ce dernier ;

Qu'il s'ensuit que l'agence n'est pas fondée à se prévaloir à l'encontre de la société Decreuse d'une indemnité compensatrice ; que pour les mêmes motifs, elle doit également être déboutée de sa demande d'indemnité de réemploi ;

Que le jugement déféré sera dès lors confirmé en ce qu'il a débouté l'intéressée de ses prétentions à ce titre ;

* Sur la demande d'expertise

Attendu que l'agence réitère à hauteur de cour sa demande d'expertise ; que la société Decreuse s'en étonne en rappelant qu'alors qu'il avait été fait droit à cette demande par le tribunal son contradicteur a refusé de consigner en dépit d'une réouverture des débats pour ce faire, de sorte que la demande d'expertise est définitivement caduque ;

Que l'intimée lui objecte que sa demande d'expertise est parfaitement recevable dès lors que la mission est distincte de celle qui avait été impartie au premier expert et qu'elle est bien fondée puisqu'elle repose sur l'obligation d'ordre public du mandant de communiquer à l'agent les éléments comptables lui permettant de vérifier son droit à commission, ce qu'il n'a pas obtenu spontanément ;

Attendu que par jugement avant dire droit du 27 mai 2015 le tribunal de commerce de Besançon a fait droit à la demande d'expertise de l'agence ; qu'en dépit d'un délai supplémentaire pour y procéder cette dernière n'a consigné la somme mise à sa charge à valoir sur la rémunération de l'expert, de sorte que la désignation de celui-ci est devenue caduque ;

Que l'intimée fait valoir que la mission qu'elle souhaite voir assigner à l'expert, n'est pas la même que celle de l'expertise initiale ; que si les deux missions ne sont effectivement pas scrupuleusement identiques, il n'en demeure pas moins qu'elles ont le même dessein de faire le compte entre les parties et de mettre en évidence une éventuelle créance de commissions au bénéfice de l'agent commercial ;

Qu'au surplus, cette demande réitérée apparaît particulièrement tardive ; que le jugement déféré qui l'a rejetée sera confirmé de ce chef ;

* Sur les demandes accessoires

Attendu que les parties succombant chacune partiellement en leurs prétentions, il n'est pas inéquitable de laisser à leur charge leurs frais irrépétibles de première instance et d'appel ; que la société Decreuse qui succombe au principal supportera les dépens de première instance et d'appel, le jugement déféré étant sur ce point infirmé ;

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement, et après en avoir délibéré conformément à la loi,

CONFIRME le jugement rendu le 16 janvier 2019 par le tribunal de commerce de Besançon sauf en ce qu'il a fixé les créances respectives des parties, ordonné compensation, condamné la SA Agence Commerciale X à payer à la SARL Decreuse la somme de 13 598,21 euros HT et mis les dépens à la charge de la SA Agence Commerciale X.

Statuant à nouveau des chefs ainsi infirmés et y ajoutant,

DIT que la rupture du contrat d'agence à l'initiative de la SA Agence Commerciale X n'est pas imputable à une faute de la SARL Decreuse.

CONDAMNE la SARL Decreuse à payer à la SA Agence Commerciale X la somme de vingt mille quatre cent soixante six euros et dix centimes (20 466,10 euros), outre intérêts au taux légal à compter du 31 janvier 2012, date de l'assignation, au titre des commissions de janvier à mars 2011 inclus.

DIT qu'à compter du 31 janvier 2012 les intérêts ayant couru sur une période d'au moins une année produiront eux-mêmes intérêts au taux légal, conformément à l'article 1154 ancien de code de procédure civile.

DÉBOUTE la SARL Decreuse et la SA Agence Commerciale X de leurs demandes au titre des frais irrépétibles d'appel.

CONDAMNE la SARL Decreuse aux dépens de première instance et d'appel.