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Décisions

Cass. 1re civ., 21 octobre 2020, n° 19-16.617

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Mottay (Epoux)

Défendeur :

BNP Paribas Personal Finance (SA), Bally MJ (Selarlu)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Batut

Rapporteur :

Mme Robin-Raschel

Avocats :

SCP Zribi et Texier, SCP Delvolvé et Trichet

Poitiers, 2e ch. civ., du 26 févr. 2019

26 février 2019

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 26 février 2019), le 6 février 2013, à la suite d'un démarchage à domicile, M. Mottay a acquis de la société Nouvelle régie des jonctions des énergies de France, exerçant sous le nom commercial « Groupe solaire de France » (le vendeur), une installation photovoltaïque, financée par un crédit souscrit par M. et Mme Mottay auprès de la société Banque Solfea, aux droits de laquelle se trouve la société BNP Paribas Personal Finance (le prêteur).  

2. Soutenant que des irrégularités affectaient le contrat de fourniture et d'installation et que leur consentement avait été vicié en raison de manoeuvres dolosives, M. et Mme Mottay ont assigné le vendeur, représenté par son liquidateur judiciaire, la SCP Moyrand-Bally, et le prêteur, en nullité des contrats principal et de crédit affecté, en restitution des sommes versées au titre du crédit et en paiement de dommages-intérêts.

Examen des moyens

Sur le premier moyen  

Enoncé du moyen

3. M. et Mme Mottay font grief à l'arrêt de rejeter leur demande d'annulation des contrats de vente et de crédit affecté, alors :  

« 1°/ qu'en ce qu'elle constitue l'un des résultats attendus de son utilisation, la rentabilité économique d'une installation photovoltaïque relève des caractéristiques essentielles du bien vendu, entrant par nature dans le champ contractuel ; que se rend, dès lors, coupable de manoeuvres dolosives l'entreprise qui fait miroiter aux acquéreurs un certain rendement de l'installation tout en sachant qu'il ne pourra jamais être atteint ; qu'après avoir constaté que le bon de commande remis à M. et Mme Mottay garantit un rendement à hauteur de 90 % sur vingt-cinq ans, la cour d'appel ne pouvait, sauf à priver sa décision de base légale au regard de l'article 1116 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, s'abstenir de rechercher si le vendeur ne leur avait pas délivré une fausse information dans l'intention de provoquer dans leur esprit une erreur déterminante de leur consentement ;

2°/ qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si le vendeur n'avait pas commis des manoeuvres dolosives en présentant l'opération contractuelle comme étant une candidature sans engagement, tandis qu'elle faisait en réalité signer un contrat ferme, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1116 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ;

3°/ qu'en retenant que M. et Mme Mottay ne fournissent pas de document permettant de faire, s'agissant de la rentabilité de l'installation, un comparatif précis entre ce qui leur a été présenté et ce qui a été réalisé, sans analyser, fût-ce sommairement, la simulation de rentabilité établie par le vendeur et les factures de production effective des époux Mottay, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour  

4. En premier lieu, dès lors, d'une part, que la rentabilité économique ne constitue une caractéristique essentielle d'une installation photovoltaïque au sens de l'article L. 111-1 du Code de la consommation, qu'à la condition que les parties l'aient fait entrer dans le champ contractuel, d'autre part, que l'arrêt relève que, si le bon de commande garantissait un rendement à hauteur de 90 % sur vingt-cinq ans, il ne comportait pas de précisions chiffrées engageant le vendeur et que la rentabilité économique n'était pas entrée dans le champ contractuel, la cour d'appel n'était tenue ni de procéder à la recherche visée à la première branche ni de procéder à l'analyse des pièces mentionnées à la deuxième branche.

5. En second lieu, ayant examiné les conditions dans lesquelles les contrats avaient été souscrits, elle a souverainement estimé, sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, que la preuve de manoeuvres trompeuses au sens de l'article 1116 du Code civil n'étaient pas rapportée.

6. Le moyen n'est donc pas fondé.

Sur le deuxième moyen  

Enoncé du moyen

7. M. et Mme Mottay font le même grief à l'arrêt, alors « que la confirmation d'un acte nul exige à la fois la connaissance du vice l'affectant et l'intention de le réparer ; qu'en retenant qu'en signant le bon de commande M. Mottay a pris nécessairement connaissance de la réglementation applicable et pouvait aisément en vérifier les anomalies en le confrontant aux textes reproduits à la troisième page, avant d'en déduire qu'en demandant et en poursuivant l'exécution du contrat, sans utiliser son droit de rétractation reproduisant le texte intégral des articles L. 121-23 à L. 121-26, M. et Mme Mottay ont entendu couvrir les nullités dont était affecté le bon de commande, la cour d'appel, qui a statué par des motifs impropres à établir que les acquéreurs avaient eu connaissance des vices entachant le bon de commande, ni qu'ils avaient eu l'intention de les réparer, n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1338 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour  

8. L'arrêt relève, en premier lieu, que l'acquéreur a pu avoir connaissance de l'irrégularité formelle affectant les mentions du contrat de vente, relativement au nom du démarcheur, à la désignation précise de la nature et des caractéristiques du bien offert et aux conditions d'exécution du contrat, s'agissant notamment des modalités et du délai de livraison des biens, dans la mesure où la reproduction intégrale des différents articles du code de la consommation figurait en caractères parfaitement lisibles dans les conditions générales de vente. Il énonce, en second lieu, qu'en laissant le contrat s'exécuter et en signant le 22 février 2013 un bon d'accord de fin des travaux réalisés, par lequel il a déclaré que le matériel livré et installé était conforme à sa commande, M. et Mme Mottay ont entendu, en toute connaissance de cause, poursuivre l'exécution du contrat qui leur a permis de bénéficier de l'installation de production d'électricité.

9. La cour d'appel a pu en déduire que les causes de nullité invoquées avaient été couvertes.  

10. Le moyen n'est donc pas fondé.  

Sur le troisième moyen  

Enoncé du moyen

11. M. et Mme Mottay font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes en paiement de dommages-intérêts et en restitution des sommes versées au titre du remboursement anticipé du contrat de crédit, alors « que la cassation à intervenir sur le premier et/ou sur le deuxième moyen de cassation, critiquant le chef de l'arrêt ayant débouté M. et Mme Mottay de leur demande d'annulation du contrat de vente et du contrat de crédit, entraînera, par application de l'article 624 du code de procédure civile, l'annulation par voie de conséquence du chef de l'arrêt les ayant, en raison de l'absence de nullité, déboutés de leurs différentes demandes indemnitaires. »

Réponse de la Cour  

12. Les premier et deuxième moyens étant rejetés, le troisième moyen, qui invoque une cassation par voie de conséquence, est sans portée.

PAR CES MOTIFS, la Cour, REJETTE le pourvoi.