CCE, 17 mai 1999, n° M.1397
COMMISSION DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES
Décision
SANOFI / SYNTHELABO
Messieurs,
Objet : Affaire n° IV/M. 1397 - SANOFI / SYNTHELABO
1. Le 12.02.1999, la Commission a reçu notification, au titre de l'article 4 du règlement du Conseil (CEE) n/ 4064/89, d'un projet de concentration aux termes duquel Sanofi, contrôlée par le groupe Elf-Aquitaine, et Synthélabo, contrôlée par le groupe L’Oréal, seront regroupées au sein d’une nouvelle société, dénommée Sanofi-Synthélabo. Le 15 mars 1999, cette opération a été autorisée par une décision fondée sur l’article 6(1)(b) du règlement susvisé.
2. La Commission a ensuite reçu cinq plaintes de tiers intéressés en date des 15, 17 mars et 6 avril 1999. Ces plaintes se rapportaient aux conséquences concurrentielles du rapprochement des activités de Sanofi et Synthélabo dans le domaine des principes actifs stupéfiants (morphine et principes actifs dérivés) par l’intermédiaire de leurs filiales respectives Francopia et Sochibo. La notification présentée affirmant qu’il n’y avait aucun recoupement entre les parties au niveau des principes actifs et l’enquête réalisée auprès des concurrents et clients n’ayant par conséquent pas porté sur l’impact de l’opération sur les marchés de la morphine et de ses dérivés, la décision du 15 mars 1999 ne comportait aucune analyse du rapprochement susvisé. En conséquence, des demandes de renseignements fondées sur l’article 11 ont été envoyées le 26 mars 1999 aux parties, les enjoignant à fournir des éclaircissements sur ces activités en remplissant les parties correspondantes du formulaire CO, de même qu’aux plaignants, afin d’obtenir des informations plus précises sur les problèmes concurrentiels qu’ils envisageaient. Les parties ont confirmé qu’elles n’avaient pas mentionné dans leur notification du 12 février 1999 le fait qu’elles disposaient chacune d’un monopole sur des principes actifs stupéfiants.
3. Les parties ont fourni le 20 avril 1999 les informations requises par le formulaire CO relatives aux principes actifs susvisés. Par lettre du 20 avril 1999, la Commission a communiqué aux parties les griefs retenus à leur encontre qui justifiaient la révocation de la décision. Ensuite, les parties ont annoncé qu’elles ne désiraient pas faire connaître leur point de vue sur ces griefs.
4. Dans la mesure où la décision du 15 mars 1999 reposait sur des informations inexactes et où il n’était pas exclu que le regroupement des activités respectives des parties dans ce domaine ne soulève des doutes sérieux quant à la compatibilité de l’opération avec le marché commun, la Commission l’a révoquée le 21 avril 1999, conformément à l’article 6(3)(a) de ce même règlement. Elle a repris l’examen du dossier, tel qu’amendé par les parties, à compter du 21 avril 1999.
I. LES ACTIVITÉS DES PARTIES ET L'OPÉRATION NOTIFIÉE
5. Sanofi est une société anonyme de droit français, dont 53,61 % des actions sont détenues directement ou indirectement par Elf-Aquitaine, le reste étant détenu par des investisseurs privés. Sanofi est présente dans trois secteurs d’activités : le secteur de la santé, où elle intervient essentiellement en pharmacie, mais aussi dans les domaines des diagnostics et de la santé animale ; le secteur de la chimie ; et le secteur de la beauté, où elle produit et commercialise des parfums et des cosmétiques.
6. Synthélabo est une société anonyme de droit français, dont 56,64 % des actions sont détenues par L’Oréal, le reste étant détenu par des investisseurs privés. Synthélabo est présente dans deux secteurs d’activités : le secteur de la santé, où elle intervient en pharmacie et dans le biomédical, et le secteur de la chimie.
7. Les activités fusionnées comprennent les secteurs de la santé, de la chimie et de la beauté, même si l’accord prévoit que l’activité « beauté » de Sanofi sera cédée préalablement ou postérieurement à la présente opération.
II. CONCENTRATION
8. Le 16 décembre 1998, un accord-cadre est intervenu entre Elf-Aquitaine et L'Oréal, qui fixe les termes essentiels de l'opération proposée. Le rapprochement sera effectué par l'absorption de Sanofi et Synthélabo au sein d'une nouvelle société, dénommée Sanofi- Synthélabo. Compte-tenu de la parité retenue (13 actions Sanofi pour 10 actions Synthélabo), Elf-Aquitaine et L’Oréal détiendront respectivement 35,1 % et 19,4 % du capital, et environ 45 % et 25 % des droits de vote du nouvel ensemble.
L'Accord-cadre prévoit, en outre, qu'Elf-Aquitaine et L'Oréal signeront, préalablement aux assemblées générales extraordinaires de fusion de Sanofi et de Synthélabo, début mai 1999, un Pacte d'actionnaires d'une durée initiale expirant le 2 décembre 2003, afin d'organiser leurs relations en qualité d'actionnaires de Sanofi-Synthélabo et d'exercer une politique commune à l'égard de cette dernière.
Le Pacte d'actionnaires contient en son article 5 des dispositions spécifiques sur la composition du conseil d'administration de Sanofi-Synthélabo. Tant que la participation d'Elf-Aquitaine demeurera supérieure à celle de L' Oréal d'un montant au moins égal à 3% du capital de Sanofi-Synthélabo, le conseil d'administration de cette dernière sera composé de 12 administrateurs répartis de la manière suivante : 4 administrateurs choisis parmi les candidats proposés par Elf-Aquitaine, 3 administrateurs choisis parmi les candidats proposés par l'Oréal, 2 administrateurs devant exercer des fonctions opérationnelles dans Sanofi-Synthélabo, choisis d'un commun accord par Elf-Aquitaine et l'Oréal, 3 administrateurs choisis d'un commun accord par Elf-Aquitaine et l'Oréal, parmi les candidats indépendants d'Elf-Aquitaine et de l'Oréal.
Le Pacte prévoit aussi que "Lorsque la participation en capital du groupe Elf-Aquitaine ne sera plus supérieure à celle de L'Oréal dans la Société d'un montant au moins égal à 3% du capital de la Société, le conseil d'administration de la société sera composé de 11 administrateurs" ( le nombre des administrateurs choisis parmi les candidats proposés par Elf-Aquitaine étant ramené à 3).
Les règles du fonctionnement du conseil d'administration de Sanofi-Synthélabo sont régies par la loi française selon laquelle, pour les délibérations du conseil d’administration, le quorum est atteint lorsque la moitié des membres sont présents. Toutes les décisions stratégiques de l'entreprise (telles que l'adoption du budget et des projets commerciaux) doivent être prises à la majorité simple (sauf disposition contraire, ce qui n’est pas le cas ici) des membres présents ou représentés.
De plus, l'article 6 du Pacte d'actionnaires prévoit deux obligations de concertation à la charge d'Elf-Aquitaine et de L'Oréal. Tout d'abord, Elf-Aquitaine et L'Oréal devront se concerter avant toute assemblée générale des actionnaires de Sanofi-Synthélabo et faire en sorte que leurs représentants au conseil d'administration de cette dernière se concertent avant toute réunion du conseil d'administration, et ce "en vue d'établir une position commune sur les questions portées à l'ordre du jour desdits organes sociaux". En outre, "cette concertation pourra, si les parties en conviennent, donner lieu à un engagement des parties de ne pas modifier leur vote ou le vote de leurs représentants entre la date de concertation et la date de l'assemblée des actionnaires ou de la réunion du conseil d'administration". Par ailleurs, indépendamment des assemblées générales d'actionnaires et des conseils d'administration, Elf-Aquitaine et L'Oréal devront se concerter "en ce qui concerne toutes décisions importantes pouvant intéresser d'une manière générale les perspectives d'avenir de la société, en vue d'établir une politique générale commune pour cette dernière".
Enfin, les parties se sont engagées à s’interdire toute cession de titres concernés par le Pacte, à ne réaliser que sur accord unanime toute opération entraînant pour l’une d’entre elles une diminution de sa participation en capital ou en droit de vote dans Sanofi-Synthélabo qui aurait pour effet de l’empêcher de poursuivre une consolidation comptable, et à n’autoriser que sous conditions la cession de titres libres.
Contrôle conjoint
9. Les parties notifiantes affirment que l’opération constitue une fusion entre Sanofi et Synthélabo au sens de l’article 3.1.a du règlement CEE n° 4064/89 dans la mesure où il n’y a ni contrôle exclusif (dispositions spécifiques sur la composition du conseil d’administration de Sanofi-Synthélabo, qui ont d’après les parties pour effet de garantir que ni Elf-Aquitaine, ni L’Oréal ne disposeront d’une majorité au sein de ce conseil d’administration), ni contrôle conjoint (le pacte d’actionnaires prévoit des obligations de concertation mais n’oblige pas Elf-Aquitaine et L’Oréal à se mettre d’accord sur des positions communes).
10. Cependant, sur la base des éléments suivants, l'opération notifiée constitue une entreprise commune contrôlée conjointement par Elf-Aquitaine et L'Oréal.
11. En effet, Elf-Aquitaine et L'Oréal disposent de 80% des droits de vote à l'assemblée générale, et sont donc en mesure de nommer la totalité des membres du conseil d’administration. Aucun actionnaire minoritaire n’est susceptible de leur faire contrepoids et il résulte d’ailleurs des termes du pacte d’actionnaires que les partie sont convenues de nommer, soit isolément, soit par accord, la totalité des membres de ce conseil. De la sorte, Elf-Aquitaine et L'Oréal se trouvent en mesure de déterminer conjointement la conduite des affaires de Sanofi-Synthélabo.
12. Dans la situation où Elf-Aquitaine détiendrait quatre administrateurs et L’Oréal trois, la première, eu égard aux règles régissant le fonctionnement du conseil d’aministration, serait théoriquement en mesure d’imposer seule des décisions stratégiques. La Commission estime que cette hypothèse est improbable et se trouve par exemple combattue par la répétition des concertations informelles prévues par le pacte d’actionnaires en vue notamment d’établir une « politique générale commune ». Par ailleurs et jusqu’en 2003, les restrictions à la liberté de cession des titres de la société Sanofi-Synthélabo, pactés ou non, ainsi que les règles de protection de l’actionnaire affaibli par une dilution du capital, dont sont convenues les parties, limitent la liberté de l’actionnaire éventuellement majoritaire au sein du conseil d’administration.
13. Dès lors que l’égalité des droits de nomination au conseil d’administration serait établie, ni Elf-Aquitaine, ni L’Oréal ne serait en mesure d’imposer des décisions stratégiques au sein de Sanofi-Synthélabo, mais devraient nécessairement se concerter.
14. De plus, Sanofi-Synthélabo est une nouvelle société dans laquelle Elf-Aquitaine et L'Oréal transfèrent toutes leurs activités respectives dans les secteurs concernés par le projet de concentration. Il existe une telle convergence d’intérêts entre les deux sociétés mères qu’il serait peu réaliste de conclure que les deux sociétés mères ne prendront pas toute décision concernant la stratégie commerciale de Sanofi-Synthélabo d’un commun accord. Suivant la communication de la Commission sur la notion de concentration (point 34), lorque chaque entreprise fondatrice fait à l’entreprise commune un apport qui est vital pour son exploitation (ce qui est la cas ici), les entreprises fondatrices peuvent gérer en étroite association l’entreprise commune en se mettant d’accord sur les décisions stratégiques les plus importantes sans avoir à se ménager des droits de veto.
15. Par conséquent, Sanofi-Synthélabo sera contrôlée conjointement par ses deux sociétés mères.
Plein exercice
16. Les sociétés mères transfèrent définitivement à l'entreprise commune l'ensemble de leurs activités dans les secteurs concernés par le projet de concentration. L'entreprise commune disposera donc de toutes les ressources pour exercer ses activités de façon autonome et durable sur le marché.
17. En conclusion, Sanofi-Synthélabo constituera une entreprise commune dont la création constitue une opération de concentration au sens de l’article 3.1.b. du règlement CEE n° 4064/89.
III. DIMENSION COMMUNAUTAIRE
18. Les entreprises Sanofi et Synthélabo réalisent un chiffre d'affaires total sur le plan mondial de plus de 5 000 millions d'EURO (Sanofi : 3885 millions d'EURO et Synthelabo: 1776,5 millions d'EURO). Chacune d'entre elles réalise un chiffre d'affaires dans la Communauté de plus de 250 millions d' EURO (Sanofi : 2081,5 millions d'EURO ; Synthelabo : 1206 millions d'EURO), mais aucune d'entre elles ne réalise plus des deux tiers de son chiffre d'affaires dans un seul et même État membre. L'opération a donc une dimension communautaire, mais elle ne constitue pas un cas de coopération au sens de l'Accord EEE, en vertu de son article 57.
IV. LES MARCHES DE PRODUITS EN CAUSE
19. Selon les parties, les effets de l’opération concernent uniquement les secteurs de la pharmacie et de la chimie, seuls domaines où Sanofi et Synthélabo sont toutes deux présentes. En effet, Synthélabo n’a pas d’activités dans les secteurs des diagnostics, de la santé animale et de la beauté où Sanofi est présente, et Sanofi n’a pas d’activités dans le secteur du biomédical où Synthélabo est présente.
20. Néanmoins, l’activité « beauté » doit également faire l’objet d’une analyse concurrentielle, dans la mesure où l’une des entreprises-mères, L’Oréal, est active dans ce secteur.
21. En ce qui concerne la chimie, suivant la notification, il n’existe aucune addition de parts de marché entre les activités de Sanofi et Synthélabo qui fabriquent et commercialisent des substances chimiques différentes, à l’exception des principes actifs stupéfiants examinés ci-dessous.
A. Le secteur de la pharmacie
22. La Commission a examiné à de nombreuses reprises la question de la définition du marché en cause dans le cas des produits pharmaceutiques et elle a posé une série de principes dans les décisions qu’elle a rendues en la matière1. La pratique décisionnelle de la Commission distingue trois types de marchés : les marchés des médicaments existants, les marchés amonts des principes actifs et les marchés futurs de médicaments.
Les marchés des médicaments existants
Introduction
23. Dans ses décisions antérieures, le Commission a considéré que la délimitation des marchés selon le troisième niveau de l’”Anatomical Therapeutic Classification” (classification ATC 3), qui est reconnue et utilisée par l’Organisation mondiale de la santé (O.M.S.), est généralement la plus appropriée. En effet, cette classification permet de regrouper le produits suivant leur composition et leurs propriétés thérapeutiques. Les groupes de produits ainsi déterminés ont en général la même indication thérapeutique et ne sont pas interchangeables avec des produits d’autres classes. La Commission a également considéré qu’il ne faudrait pas pour autant négliger les autres niveaux de la classification ATC aux fins de l’analyse. Il se pourrait ainsi que certains groupes de produits doivent être réunis, notamment si des produits appartenant à différentes subdivisions de la classification ATC servent de produits de remplacement pour le traitement d'une maladie déterminée. Inversement, il pourrait également être utile d'accepter une délimitation du marché plus étroite lorsque les médicaments en question ont des indications nettement différentes.
24. Pour délimiter les marchés et calculer les données correspondantes, les parties se réfèrent à une classification élaborée par l’une des associations européennes des entreprises pharmaceutiques, à savoir l’« EPhMRA » (« European Pharmaceutical Market Research Association »). La classification EPhMRA a été développée par l’industrie pharmaceutique européenne comme un instrument de transparence de marché permettant d’établir des évaluations et des comparaisons de marchés pharmaceutiques au niveau international. Elle est sensée refléter plus exactement les prescriptions médicales et fournir des mises-à-jour plus fréquentes (donc une prise en compte des nouveaux produits plus importante).
25. Selon les parties, cette classification est très proche de la classification de l’OMS. Elle permet d’examiner les marchés de manière précise et d’identifier les marques correspondantes des entreprises actives sur le marché. Sur la base de son enquête, la Commission constate que les concurrents des parties estiment eux aussi qu’il existe une très grande concordance entre ces deux classifications. La comparaison détaillée des deux classifications pour chaque catégorie ATC 3 montre que leurs différences n’ont qu’une très faible influence sur l’analyse des marchés. En ce qui concerne les marchés EPhMRA affectés par la présente opération, il apparaît, suivant les données comparatives fournies par les parties, qu’une analyse sur la base de la classification OMS ne modifierait pas sensiblement l’analyse de concurrence. C’est pourquoi la Commission s'est basée, aux fins de son examen de l'opération envisagée, sur la délimitation et la dénomination des marchés retenues par les parties.
Les antiagrégants plaquettaires
26. S’agissant des marchés de produits à prendre en considération pour apprécier l'opération de concentration, les parties estiment que la délimitation des marchés selon le troisième niveau de la classification ATC est trop étroite en ce qui concerne les antiagrégants plaquettaires (B1C).
27. Les antiagrégants plaquettaires sont utilisés dans la prévention des accidents vasculaires liés à l’athérome. Les lésions d’athérome sont la cause principale des accidents ischémiques cardiaques (infarctus du myocarde, angor stable ou instable), neurologiques (accidents ischémiques transitoires, accidents vasculaires cérébraux) et périphériques (artériopathie des membres inférieurs). La lésion d’athérome est constituée par le dépôt au sein de la paroi vasculaire de différents lipides (dérivés du cholestérol) induisant une réaction inflammatoire locale avec, pour conséquence, une fragilisation de la paroi vasculaire. Dès lors, se produit une activation de la coagulation sanguine au niveau de la lésion vasculaire, avec adhésion des plaquettes, aboutissant à l’accident ischémique quel que soit le vaisseau concerné (coronaire, cérébral, cervical, périphérique).
28. Les parties estiment qu’il convient de regrouper trois classes ATC 3 de médicaments qui ont été utilisés lors d’études de prévention de l’athérothrombose : les antiagrégants plaquettaires (classe ATC 3 B1C), les anticoagulants oraux (classe ATC 3 B1A) et les hypocholestérolémiants (classe ATC 3 C10A).
Les antiagrégants plaquettaires comprennent en fait, selon les parties, deux types de produits distincts : d’une part des produits de large utilisation, de première intention et peu chers (AAS et dipyridamole), et d’autre part, un produit réservé à des indications bien ciblées de seconde intention, où aucune autre thérapeutique actuelle n’est suffisamment efficace, et au coût 10 fois plus élevé que les premiers (la ticlopidine).
Les anticoagulants oraux (warfarine) sont des médicaments de première intention à prix bas utilisés dans la prévention des accidents ischémiques cérébraux d’origine embolique cardiaque.
Les hypocholestérolémiants (statines) sont prescrits pour prévenir les complications de l’athérome, principalement en deuxième intention et ont un coût de traitement journalier important.
29. Au vu de ce qui précède, les parties affirment que la référence au niveau ATC 3 des antiagrégants plaquettaires n’est pas pertinente. Selon elles, deux approches en termes de définition de marché sont possibles. Soit intégrer d’autres catégories du troisième niveau de la classification ATC (au motif que les antiagrégants plaquettaires ne sont pas les seuls produits utilisés dans la prévention de l’athérothrombose) et considérer qu’il existe un marché global comprenant l’ensemble des médicaments utilisés dans la prévention cardiovasculaire (les trois catégories précitées). Soit, toujours en retenant cette hypothèse d’un marché global, distinguer les médicaments de première intention (AAS, dipyridamole et les anticoagulants oraux) et les médicaments utilisés en deuxième intention (ticlopidine et statines).
30. L’enquête de la Commission a montré que d’un point de vue médical, l’hypothèse d’un marché global pour les trois catégories précitées est inappropriée car elles ont chacune un mode d’action unique et bien identifié. Ainsi, il serait possible de regrouper les antiagrégants plaquettaires (qui agissent sur la structure plaquettaire) et les anticoagulants oraux (qui agissent sur la cascade de coagulation) au motif que ces catégories ont toutes deux pour principale indication d’agir sur la coagulation et l’agrégation des plaquettes. Mais la réduction des complications thrombotiques par les anticoagulants oraux s’accompagne d’un accroissement des complications hémorragiques, qui ne permet pas de l’inclure dans l’arsenal thérapeutique systématique des accidents vasculaires avec les antiagrégants plaquettaires. Ces classes B1C et B1A qui combattent toutes deux de façon directe le risque de thrombose, ne sont pas donc interchangeables sauf pour une catégorie précise de patients souffrant de fibrillation auriculaire. De même, il n’est pas possible d’inclure les hypocholestérolémiants dans le même marché que les antiagrégants plaquettaires, puisque leur fonction est de réduire le taux de cholestérol (et donc de réduire l’altération de la paroi vasculaire par le dépôt de dérivés du cholestérol en son sein) et leur action sur l’agrégation des plaquettes sur la paroi vasculaire n’est qu’indirecte.
31. Si les indications thérapeutiques ne permettent pas de retenir un groupe de produits plus large que la classe ATC 3 B1C, l’investigation de la Commission a montré qu’il est pertinent de la segmenter en deux marchés de produits différents dans la mesure où l’activité thérapeutique, l’étendue de l’utilisation, la date de commercialisation permettent de distinguer produits de première intention (AAS et dipyridamole) et de seconde intention (ticlopidine). En effet, la ticlopidine est prescrite dans des situations pour lesquelles l’usage des AAS (en association ou non avec le dipyridamole) serait soit inefficace (artériopathie des membres inférieurs, thromboses consécutives à l’angioplastie et à la pose de stents), soit inadaptée (intolérance à l’aspirine). La ticlopidine, contrairement à l’aspirine, n’est pas, dans la pratique médicale, utilisée en prévention primaire avant accident thrombotique (ce qui est d’ailleurs illustré par le fait qu’elle correspond à 11 % des traitements contre 77 % des traitements pour l’aspirine dans la classe B1C). Enfin, le coût du traitement journalier à base de ticlopidine est 24 fois supérieur à celui de l’aspirine.
32. En conclusion, en ce qui concerne les antiagrégants plaquettaires, deux marchés pertinents des produits de première intention et des produits de seconde intention seront retenus aux fins de la présente analyse.
33. L’analyse de la Commission a montré que trois autres marchés nécessitaient une définition approfondie : les antiarythmiques (C1B), les hypnotiques (N5B) et les urologiques (G4B).
Les antiarythmiques
34. L’arythmie est un trouble du rythme du coeur, caractérisée par une irrégularité des contractions. Les antiarythmiques visent à réduire ou prévenir l’arythmie en interférant directement, en général pour les bloquer, avec les courants ioniques transmembranaires responsables de ces troubles du rythme cardiaque. Deux approches peuvent être envisagées selon que l’on envisage globalement les antiarythmiques rassemblés au sein de la classe C1B (antiarythmiques de classe I à IV) ou que l’on distingue les diverses fonctions thérapeutiques des produits concernés. En effet, les antiarythmiques de la classe III (dont l’amiodarone et le sotalol) ont pour principal effet de diminuer les courants potassiques repolarisants alors que le mode d’action commun des antiarythmiques de classe III est la limitation des courants sodiques rapides. D’une part, le but de tous ces antiarythmiques est de traiter les arythmies ventriculaires, ce qui les place dans le même groupe de produits, mais d’autre part, certains antiarythmiques de classe III (tels que l’amiodarone) semble avoir des effets secondaires et d’accoutumance importants qui limitent sa prescription à des patients avec une arythmie importante, sur lesquels les antiarythmiques de classe I ont été inefficaces. Au cas présent, il n'est pas nécessaire de déterminer si la classe C1B doit être segmentée suivant les classes d’antiarythmiques puisque les résultats de l’analyse concurrentielle ne seraient pas modifiés.
Les hypnotiques
35. Les hypnotiques (N5B) permettent le traitement de l’insomnie et ils peuvent être divisés entre les hypnotiques à faible accoutumance et sans effet résiduel au matin, dont le prix est plus élevé (non benzodiazépiniques) et les hypnotiques plus anciens à prix faible (benzodiazépines ou barbituriques). Au cas présent, il n'est pas nécessaire de déterminer si la classe N5B doit être segmentée davantage, puisque les résultats de l’analyse concurrentielle ne seraient pas modifiés.
Les urologiques
36. La classe ATC 3 (G4B) des autres préparations urologiques comporte des produits destinés à traiter plusieurs pathologies, dont les troubles de la miction, qui peuvent entraîner des difficultés à émettre les urines (comme dans l’hypertrophie bénigne de la prostate) ou des difficultés à retenir les urines (comme dans l’incontinence). Deux approches peuvent donc être envisagées, selon que l’on envisage globalement les autres préparations urologiques ou que l’on distingue les diverses fonctions thérapeutiques des produits concernés. Au cas présent, il n'est pas nécessaire de déterminer si la classe G4B doit être segmentée davantage puisque les résultats de l’analyse concurrentielle ne seraient pas modifiés.
37. Pour les autres médicaments à prendre en considération pour l’appréciation du projet de concentration, les parties estiment que la délimitation du marché sur la base du troisième niveau de la classification ATC convient dans une large mesure. Les recherches de la Commission confirment ce dernier point.
Les marchés des principes actifs
38. La fabrication des produits pharmaceutiques comprend, en règle générale, deux étapes distinctes: la fabrication des substances ou principes actifs et celle des produits pharmaceutiques. Par fabrication des produits pharmaceutiques, on entend le mélange de la substance active avec d'autres substances, ainsi que la présentation sous une forme galénique (capsules, comprimés). Les substances actives sont donc non seulement fabriquées, mais également traitées dans un but déterminé. La Commission considère par conséquent qu’il existe des marchés spécifiques pour les principes actifs, qui se situent en amont des marchés des produits pharmaceutiques. Un principe actif constitue « un marché » dès lors que son ou ses fabricants le vendent en vrac à d’autres producteurs qui le conditionnent et en assurent la distribution.
39. Les marchés des principes actifs stupéfiants nécessitaient un examen approfondi. D’après les parties, les principes actifs stupéfiants peuvent être divisés en deux catégories : en amont, la morphine technique (qui constitue la matière première produite à partir du pavot ou de l’opium) et en aval, les dérivés de la morphine technique (et notamment la codéine, les morphines sulfate et chlorhydrate, et la pholcodine), qui rentrent en tant que tels dans la fabrication des produits pharmaceutiques.
40. Toujours selon les parties, les dérivés de la morphine technique ne sont pas substituables entre eux, dans la mesure où ils ont des caractéristiques thérapeutiques différentes, et constituent de ce fait autant de marchés de principes actifs distincts. La Commission a cependant constaté que la pholcodine et la codéine sont toutes deux utilisées dans la fabrication de médicaments antitussifs apartenant à une même classe ATC 3 (R5D). Néanmoins, les parties ayant présenté un engagement relatif aux principes actifs stupéfiants concernés, il n’est pas nécessaire de se prononcer définitivement sur la substituabilité de la codéine et de la pholcodine, les éventuels problèmes de concurrence découlant de l’opération ayant été de ce fait éliminés.
Les marchés futurs
41. Dans le cas de l’industrie pharmaceutique, l’appréciation des conditions de concurrence exige, pour être complète, un examen des produits qui ne sont pas encore sur le marché, mais qui se trouvent à un stade de développement avancé. Les chances que ces produits entrent en concurrence avec d’autres, qui sont soit également en cours de développement, soit déjà sur le marché, ne peuvent être évaluées qu’en tenant compte de leurs caractéristiques et de l’usage thérapeutique auquel ils sont destinés. La Commission doit examiner les capacités de recherche et de développement en tenant compte de leur importance pour les marchés non seulement actuels, mais aussi futurs (concurrence potentielle).
42. Si la recherche et le développement doivent être appréciés sous l'angle de leur importance pour les marchés futurs, il est évident que la délimitation du marché en cause est moins simple que pour les marchés existants. La délimitation du marché ne peut se fonder sur la classification ATC actuelle que si des produits existants sont amenés à être remplacés. Il faudrait sinon se fonder en priorité sur les indications auxquelles s'appliqueraient les produits futurs.
43. La Commission prend en compte les produits futurs, dont le développement se trouve à un stade avancé (deuxième ou troisième phase du processus de développement, lancement prévisible dans les trois à cinq ans) mais dont la commercialisation n’a pas encore été autorisée. Lorsqu’ils sont substituables avec un médicament existant, les produits futurs intègrent la classe ATC de ce médicament. Lorsque ce n’est pas le cas, ils sont inclus dans des marchés futurs.
B. Le secteur de la beauté
44. Au sein de ce secteur, les parfums et les produits cosmétiques de luxe constituent des catégories spécifiques de produits, car ce sont des articles de haute qualité au prix relativement élevé, commercialisés sous une marque de prestige et généralement vendus au moyen de réseaux de distributeurs agréés. Au sein de ces produits de luxe, la Commission a, dans ses décisions précédentes2, posé une segmentation en quatre marchés : parfums féminins, parfums masculins, produits de maquillage et produits de soin.
V. LES MARCHES GEOGRAPHIQUES EN CAUSE
A. Le secteur de la pharmacie
Les marchés des médicaments existants
45. Conformément à sa pratique décisionnelle, la Commission estime que les marchés de produits pharmaceutiques sont des marchés nationaux, même si toutes les principales entreprises pharmaceutiques sont actives dans tous les principaux pays..
46. Certes, des efforts sont menés en vue d'harmoniser ce secteur à l'échelle européenne. L'harmonisation des législations techniques dans la Communauté et l'entrée en vigueur de nouvelles procédures d'autorisation pour les médicaments constituent l'aboutissement du programme pour le marché intérieur en ce qui concerne les exigences scientifiques et techniques applicables aux médicaments. Depuis le début de l'année 1995, les entreprises pharmaceutiques ont la possibilité (ou l'obligation, lorsqu'elles fabriquent des produits issus de la biotechnologie) de présenter, pour les nouveaux médicaments, une demande d'autorisation à l'Agence européenne pour l'évaluation des médicaments, laquelle adresse alors un avis à la Commission, dont la décision ultérieure lie tous les États membres. Actuellement, les médicaments peuvent donc être autorisés dans divers États membres pour différentes indications thérapeutiques.
47. Néanmoins, la vente des médicaments dépend notamment des procédures administratives que les autorités sanitaires des États membres ont instituées et des politiques qu'elles pratiquent en matière d'achat. Dans certains pays, les autorités publiques influent directement ou indirectement sur les prix et le système de sécurité sociale prévoit différents niveaux de remboursement en fonction des catégories de médicaments. Les prix des médicaments varient donc d'un État membre à l'autre. Il existe, en outre, de fortes disparités entre les stratégies menées en matière de marque et de taille des emballages, ainsi qu'entre les systèmes de distribution. Ces différences soulignent le caractère national de ces marchés, qui est notamment illustré par le fait que les portefeuilles de produits de la plupart des entreprises pharmaceutiques varient de pays à pays. Les réponses transmises à la Commission dans le cadre de l'enquête réalisée auprès des concurrents et des clients des parties confirment cette appréciation
48. Dans leur notification, les parties ont indiqué qu’elles se ralliaient à cette délimitation. Par conséquent, les marchés géographiques concernés par l’opération sont les marchés nationaux des Etats membres de l’Espace économique européen sur lesquels les parties exercent des activités.
Les marchés des principes actifs
49. En amont, les marchés des substances actives présentent une dimension au moins communautaire3, à l’exception des marchés de principes actifs stupéfiants examinés ci- dessous. Compte tenu de l'élimination des barrières douanières et des cas fréquents de reconnaissance mutuelle des licences de fabrication entre les États-Unis et l'Espace économique européen, des marchés plus larges peuvent même être définis. Les concurrents interrogés par la Commission tendent d'ailleurs à considérer qu'il s'agit de marchés mondiaux. Il n'est pas nécessaire de déterminer plus précisément si les marchés géographiques de référence sont européens ou mondiaux car, quelle que soit l’option retenue au cas présent, les résultats de l’analyse seraient identiques.
50. Par exception, la production, l’importation et la commercialisation de principes actifs stupéfiants dans les Etats membres de la Communauté Européenne est strictement contrôlée, dans le cadre de la Convention des Nations Unies sur les stupéfiants du 21 mars 1961, pour des motifs de protection de la santé publique. Dans ce cadre, certains Etats membres (France, Belgique, Espagne, Italie, Portugal et Royaume-Uni) ont choisi de confier la production, l’importation et la commercialisation de la morphine technique et de ses dérivés à des entreprises uniques placées ainsi en situation de monopole. Les autres Etats ont adopté un modèle de surveillance qui repose sur le contrôle des importations. C’est pourquoi, par exception, les marchés géographiques des principes actifs stupéfiants présentent une dimension nationale, à tout le moins pour les pays mentionnés ci-dessus.
Les marchés futurs
51. Dans la mesure où ce sont les travaux de recherche et développement menés actuellement dans certains domaines qui permettront d’envisager ce que seront les futurs marchés de produits, lesdites restrictions nationales n’ont pas le même degré d’efficacité. Les marchés futurs se caractérisent par le fait qu’aucun produit n’a encore été autorisé. Étant donné la dimension mondiale que revêtent, normalement, les travaux de recherche et développement, l’examen des marchés futurs doit s’effectuer en considérant au moins l’échelle de la Communauté européenne, sinon l’échelle mondiale3. Par ailleurs, le champ d'application territoriale des brevets peut également jouer un rôle et la délimitation géographique peut être différente selon les projets considérés.
52. Il n'est pas nécessaire de déterminer plus précisément si les marchés géographiques de référence sont européens ou mondiaux car, quelle que soit l’option retenue au cas présent, les résultats de l’analyse seraient identiques.
B. Le secteur de la beauté
53. L’analyse géographique des marchés susdéfinis montrent que les réseaux de distribution, les réglementations en matière d’étiquetage ou de composition des produits restent nationaux même si les principaux opérateurs sont présents au niveau européen et si les flux commerciaux intraeuropéens sont importants.
54. Il n'est pas nécessaire de déterminer plus précisément si les marchés géographiques de référence sont européens ou nationaux car, quelle que soit l’option retenue au cas présent, les résultats de l’analyse concurrentielle seraient identiques.
VI. L’APPRECIATION SOUS L’ANGLE DE LA CONCURRENCE
A. Le secteur de la pharmacie
55. La présente opération situera le nouvel ensemble au sixième rang en termes de chiffre d’affaires dans ce secteur en Europe et au 19ème rang au plan mondial. Il affrontera la concurrence d’acteurs disposant d’une assise financière et commerciale importante, en particulier les groupes Merck, Rhône Poulenc Rorer, Hoechst Marion Roussel, Glaxo Wellcome, Novartis, Bristol Myers Squibb, Johnson & Johnson et Pfizer. L’industrie pharmaceutique est par ailleurs entrée dans un processus de concentration, généré selon les parties par une hausse des coûts de recherche et de développement, par des politiques publiques restrictives de contrôle des dépenses de santé et par la mondialisation des marchés. D’après les parties, la présente opération s’inscrit dans ce mouvement de consolidation et de recherche de la taille critique permettant un effort de recherche suffisant pour assurer le développement futur du groupe. L’intérêt principal de l’opération réside, selon les parties, dans l’existence de complémentarités fortes tant sur le plan des portefeuilles de produits que des projets de R&D ou de la présence géographique.
Les marchés des principes actifs
56. Selon les parties notifiantes, Sanofi et Synthélabo produisent un certain nombre de principes actifs mais, à l’exception des principes actifs stupéfiants, il n’y a aucun recoupement et donc aucune addition de parts de marché entre les parties à ce niveau. Les réponses transmises à la Commission dans le cadre de l’enquête qu’elle a réalisée auprès des concurrents et des clients des parties ont montré que le fait de disposer d’une gamme de substances actives pourrait constituer un avantage concurrentiel vis-à- vis des sociétés qui voudraient se développer sur le marché de génériques dont la préparation utilise cette gamme (influence possible sur les prix d’approvisionnement), mais que les marchés sont tellement vastes et hétérogènes, et les fournisseurs de substances actives tellement nombreux, qu’il n’est pas possible de développer une gamme entière de substances actives. Le succès sur ce type de marchés dépend davantage du caractère innovant des médicaments que de la détention d’une gamme de substances actives.
Les principes actifs stupéfiants
57. En application du Code de la santé publique en France, les pouvoirs publics ont confié à Sanofi (filiale Francopia) le monopole sur la production et la commercialisation de la morphine technique et de ses principes actifs dérivés, les morphines sulfate et chlorhydrate et la codéine. De même, ils ont accordé à Synthélabo (filiale Sochibo) le monopole de production et de commercialisation de la pholcodine. Le prix de ces principes actifs ne fait pas l’objet en France d’un mécanisme de contrôle de la part des pouvoirs publics.
58. Par ailleurs, Francopia commercialise aussi de la morphine technique en Allemagne, Belgique, Espagne et Royaume-Uni, de la codéine en Allemagne, Finlande, Grèce, Italie et Suède. Sanofi détient deux participations minoritaires dans le capital d’une société belge (49 %) et d’une société espagnole (40 %), qui sont toutes deux en situation de monopole sur leur marché national respectif en ce qui concerne la morphine technique et ses produits dérivés. Pour sa part, Sochibo exporte une quantité minime de sa production de pholcodine, mais hors d’Europe (Australie, Maroc). En conséquence, le seul marché géographique où les parties sont toutes deux présentes est la France, où elles commercialisent respectivement la codéine et la pholcodine, utilisées pour la fabrication de plusieurs médicaments antitussifs de la classe R5D. Par ailleurs, les produits antitussifs de Sanofi, à base de pholcodine, étaient en concurrence avant l’opération au niveau aval avec des produits antitussifs à base de codéine, substance active que Sanofi fournit elle-même de façon exclusive à ses propres concurrents sur le marché des médicaments antitussifs. L’opération semble donc avoir pour conséquence de faire disparaître la concurrence qui pourrait exister, au moins à moyen terme, entre la codéine et la pholcodine en tant que substances actives entrant dans la composition de produits antitussifs.. L’opération soulève donc des doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le marché commun sur le marché des produits antitussifs
59. En France, des liens verticaux existaient avant l’opération entre les parties. Francopia était le fournisseur exclusif de Sochibo en morphine technique et Sanofi achetait de la pholcodine à Sochibo pour fabriquer des médicaments antitussifs. Il ne peut donc pas être exclu que l’intégration verticale des parties au niveau des principes actifs ne renforce leur position, notamment au niveau des produits pharmaceutiques. Ceci a d’ailleurs été confirmé par les plaintes de tiers intéressés reçues par la Commission. En effet, celles-ci exprimaient la crainte que l’intégration verticale entre le seul producteur de pholcodine et le seul fournisseur de morphine technique et de codéine, lui-même acheteur de pholcodine, n’amène le nouveau groupe à toujours privilégier la satisfaction de ses propres besoins en principes actifs au détriment de ses clients qui seraient aussi ses concurrents sur les marchés de produits pharmaceutiques. Elles exprimaient également des inquiétudes relatives à une éventuelle augmentation des prix des substances en question dans la mesure où les autorisations de monopole délivrées par les pouvoirs publics ne sont pas assorties de mécanismes réglementaires de fixation des prix. L’opération telle que notifiée soulève donc des doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le marché commun.
Engagements proposés par les parties
60. Afin d’éliminer les problèmes de concurrence identifiés ci-dessus, les parties ont soumis à la Commission un engagement (qui figure en annexe à la présente décision), par lequel la société Synthélabo s’est engagée à mettre en vente irrévocablement l’ensemble de ses activités de production et de commercialisation de principes actifs stupéfiants et, en particulier, de pholcodine, en ce compris les actifs matériels et immatériels (brevets, savoir-faire, fichiers clientèle, etc…).
61. Cet engagement paraît propre à éliminer les éventuels risques concurrentiels horizontaux ou verticaux qu’aurait pu engendrer la présente opération, puisque seules les activités de production et de commercialisation de principes actifs stupéfiants de Francopia, actuelle filiale de Sanofi, seront intégrées à la nouvelle entité. La réalisation de cet engagement permettra de maintenir la séparation entre les activités de production et de commercialisation de pholcodine et celles de morphine brute et de codéine. Dans ces conditions, cet engagement est également proportionné à la nature et à la portée des éventuels effets horizontaux ou verticaux.
Les marchés futurs
62. Par ailleurs, les parties notifiantes affirment qu’il n’existe aucun marché futur affecté, dans la mesure où les médicaments en cours de développement (phase 2 et 3) chez Sanofi et Synthelabo concernent tous des classes ATC différentes. Ils peuvent donc être pris en compte comme concurrents potentiels de produits existants dans les classes ATC 3. L’enquête menée par la Commission a révélé que les parties ont des sphères de développement communes au niveau des produits futurs (cardiovasculaires, CNS et oncologie) mais que suivant les définitions de marché susvisées, il n’y aura pas de recoupement entre les parties lorsque ces produits entreront sur le marché. Ainsi, s’agissant de la classe ATC 3 des antiagrégants plaquettaires, on constate que seul Sanofi est présent sur le marché des antiagrégants plaquettaires de seconde intention, avec un médicament existant et un produit futur, alors que Synthélabo n’est présent que sur le marché des antiagrégants plaquettaires de première intention et n’a pas de produits en développement en ce qui concerne les antiagrégants plaquettaires de seconde intention.
Les marchés des médicaments existants
63. S’agissant des marchés de médicaments existants, 27 marchés sont affectés par la présente opération.
Sur 13 d’entre eux, l’opération ne crée ni ne renforce une position dominante, la part de marché cumulée des parties étant inférieure à 25 % et un certain nombre de concurrents puissants sont présents au niveau international. Cela concerne les antagonistes calciques (C8A), les tranquillisants (N5C), et les expectorants (R5C) en France, les antiarythmiques (C1B), les révulsifs percutanés et autres inhalants (R4A) en Allemagne, les stimulants cardiaques hors glycosides (C1C) et les antitussifs (R5D) en Belgique, les hémostatiques (B2G), les antiarythmiques (C1B), les inotropes positifs (C1F), les antivarriqueux topiques( C5B) et les antipsychotiques (N5A) en Italie, les antalgiques (N2B) au Portugal.
Sur 4 d’entre eux, l’opération ne crée ni ne renforce une position dominante car il n’y a aucun chevauchement d’activité entre les parties. Il s’agit des antiagrégants (B1C) de première intention et des antiagrégants de seconde intention en France, et des antiagrégants de seconde intention en Allemagne et en Belgique.
Sur 4 d’entre eux, l’opération ne crée ni ne renforce une position dominante car, si une des parties dispose d’une part de marché supérieure à 25 %, le chevauchement d’activité des parties est cependant inférieur à 1 % : les antiinfectueux intestinaux (A7A) et les antiépileptiques (N3A) en France, les myorelaxants (M3B) en Allemagne et les antiépileptiques (N3A) en Belgique. De plus, les concurrents sont des groupes puissants en mesure d’exercer une pression concurrentielle efficace (Bouchara, Merck, Novartis, Hoechst, Strathman, Glaxo Wellcome).
Sur 6 d’entre eux, la part de marché combinée des parties est supérieure à 25 % et le « gain » de part de marché est supérieur à 1 % : les antiarythmiques (C1B), les myorelaxants (M3B), les antipsychotiques (N5A) et les hypnotiques (N5B) en France, les autres préparations urologiques (G4B) au Royaume –Uni et les hypnotiques (N5B) en Suède.
Marchés où la part de marché combinée est supérieure à 25 % et le chevauchement supérieur à 1 %
64. Sur le marché français des antiarythmiques (C1B), la part de marché combinée des parties atteignait en 1997 [35-45]% en valeur et [30-40]% en volume. Sanofi détenait une part de marché de [30-40]% en valeur et de [25-35]% en volume. Synthélabo détenait [0-10]% de parts de marché en valeur et [0-10]% en volume.
Compte tenu de la présence sur le marché de concurrents importants, Minnesota 3M ([20-30]% de parts de marché en valeur et [10-20] % en volume), BMS ([15-25] % en valeur et [20-30] % en volume), BASF ([0-10]% en valeur et [0-10]% en volume) et HMR ([0-10]% en valeur et [0-10]% en volume), l’opération ne conduit pas à créer une position dominante individuelle sur ce marché.
Subsidiairement, dans l’hypothèse d’une segmentation de la classe C1B suivant les classes d’antiarythmiques, Sanofi est seulement présente sur le segment des antiarythmiques de classe III et Synthélabo sur celui des antiarythmiques de classe I. Si l’on considérait que ce sont deux marchés différents, ce qui confèrerait [65-75]% de parts de marché en valeur à Sanofi et [5-15]% à Synthélabo, il n’y aurait pas de recoupement entre les produits respectifs des parties et donc aucune modification de la structure concurrentielle.
Dans le cadre de l’examen d’une éventuelle position dominante collective, on constate que les parts de marché des principaux concurrents et leur évolution (la nouvelle entité, 3 M et BMS) ne sont pas symétriques puisque celles de Sanofi et Synthélabo diminuent légèrement alors que celles de 3M et BMS augmentent. En outre, l’enquête de la Commission a permis de constater l’absence de liens structurels entre 3M et BMS. La frange concurrentielle reste significative et est constituée d’acteurs puissants (BASF et HMR). Ce marché n’est pas caractérisé par de fortes barrières à l’entrée : aucun produit n’est breveté et de nombreux génériques sont commercialisés. Ainsi, Merck vient de lancer un générique d’un produit de Sanofi qui sera vendu 30 % moins cher, dans un contexte de nouvelles incitations des pouvoirs publics à la vente de génériques (nouvel article L. 512-3 du Code de la Santé Publique consacrant le droit de substitution des médecins). Enfin, Synthélabo n’était pas avant l’opération un garant essentiel du dynamisme concurrentiel de ce marché puisque sa part de marché était moyenne et fortement déclinante (passant entre 1995 et 1997 de [5-15]% à [0-10]% en valeur).
L’enquête menée par la Commission auprès des concurrents et clients des parties a confirmé que la présente opération ne crée ni ne renforce une position dominante sur ce marché.
65. Sur le marché français des myorelaxants (M3B) destinés à traiter les contractures musculaires accompagnant les atteintes articulaires, les lumbagos, les torticolis, ou les claquages, les parties détenaient en 1997 [35-45]% de parts de marché en valeur et [40-50]% de parts de marché en volume. Sanofi détenait une part de marché de [35- 45]% en valeur et de [30-40]% en volume. Synthelabo détenait [0-10]% de parts de marché en valeur et [0-10]% en volume.
Compte tenu de la présence sur le marché de concurrents importants, HMR ([25-35]% du marché en valeur et [15-25]% en volume), AHP ([15-25]% du marché en valeur et [10-20]% en volume) et Novartis ([0-10]% du marché en valeur et [5-15]% en volume), l’opération ne conduit pas à créer une position dominante individuelle sur ce marché.
L’évolution des parts de marché des trois principaux acteurs montrent une instabilité puisque la part de marché de Sanofi est en baisse depuis trois ans, comme celle de Hoechst, alors que celle d’AHP augmente fortement. En outre, dans le cadre de la maîtrise des dépenses de santé, la politique de limitation des dépenses médicales s’est notamment traduite par une incitation à la prescription de produits génériques sur ce marché. Celle-ci s’est répercutée sur la classe des myorelaxants avec le lancement de plusieurs produits génériques en 1997 et 1998. Au troisième trimestre 1998, les génériques ont ainsi atteint une part de marché de [20-30] %. Enfin, la part de marché de Synthélabo avant l’opération était faible ([0-10]% en valeur).
Pour toutes ces raisons, la présente opération rend peu probable la création ou le renforcement d’une position dominante individuelle ou collective sur ce marché.
66. Sur le marché français des antipsychotiques (N5A), les parties détenaient en 1997 [35- 45]% de parts de marché en valeur et [20-30]% en volume. La situation concurrentielle sur ce marché sera peu modifiée puisque la part de marché en valeur de Sanofi était de [0-10]% et le recoupement sera donc limité.
Les principaux concurrents sont RPR, Johnson & Johnson et Lundbeck (respectivement [25-35]%, [15-25]% et [0-10]% de parts de marché en valeur). Le lancement en Europe de deux nouveaux produits commercialisés par Lilly et Astra-Zeneca et la présence d’autres concurrents puissants (Novartis ou AHP) rendent peu probable la création ou le renforcement d’une position dominante individuelle ou collective sur ce marché.
67. Sur le marché français des hypnotiques (N5B), les parties détenaient en 1997 [20-30]% de parts de marché en valeur et [15-25]% en volume. Synthélabo détenait [15-25]% du marché en valeur et [10-20]% en volume. Sanofi détenait [0-10]% du marché en valeur et [0-10]% en volume.
La réalisation de l’opération ne devrait pas affecter significativement la situation de concurrence prévalant sur ce marché car la part de marché apportée par Sanofi est faible et il existe plusieurs concurrents actuels et potentiels. Les principaux concurrents sont RPR ([20-30]% de parts de marché en valeur et [15-25] % en volume), Roche ([10-20]% de parts de marché en valeur et [20-30] % en volume) et Novartis ([0-10] % de parts de marché en valeur et [0-10] % en volume).AHP est également en train d’introduire un produit concurrent, en cours d’enregistrement en Europe et aux Etats- Unis. Pour toutes ces raisons, la présente opération ne crée ni ne renforce une position dominante sur ce marché.
Subsidiairement, si l’on segmentait la classe N5B entre hypnotiques non benzodiazépiniques et autres, l’analyse concurrentielle ne serait pas modifiée car seule Synthélabo serait présente sur un marché des hypnotiques non benzodiazépiniques.
68. Sur le marché des autres préparations urologiques au Royaume-Uni (G4B), les parties détenaient en 1997 [30-40] % de parts de marché en valeur et [40-50] % de parts de marché en volume. Synthélabo détenait [30-40] % % du marché en valeur et [40-50] % en volume. Sanofi détenait [0-10] % du marché en valeur et [0-10] % en volume.
En raison de la faible part de marché détenue par Sanofi et de la présence sur le marché de concurrents importants, MSD ([25-35] % de parts de marché en valeur et [15-25] % en volume), Pharmacia Upjohn ([10-20] % en valeur et [0-10] % en volume) et Yamanouchi ([0-10] % de parts de marché en valeur et [0-10] % en volume), l’opération ne conduit pas à créer une position dominante individuelle sur ce marché. En outre, la structure de la concurrence montre que le principal concurrent Pharmacia Upjohn a été en mesure de passer de [0-10] % de parts de marché en valeur en 1995 à [15-25] % sur les 9 premiers mois de 1998. De même, les génériques ont vu leur part de marché passer de [0-10] % à [15-25] % sur la même période.
Subsidiairement, si l’on distinguait les produits traitant l’incontinence urinaire des produits traitant l’hypertrophie bénigne de la prostate au sein de la classe G4B, la conclusion serait identique. Certes, la part de marché de l’ensemble Sanofi-Synthélabo serait importante ([70-80] % en 1997) sur le segment des traitements de l’incontinence urinaire mais, outre le fait que la part de marché de Sanofi est très faible ([0-10] % en valeur en 1997), la part de marché combinée des parties montre une forte régression sur quatre ans du fait de la concurrence ([85-95] % en 1995, [85-95] % en 1996, [70-80] % en 1997, [45-55] % sur 9 mois en 1998).
69. Sur le marché suédois des hypnotiques (N5B), les parties détenaient en 1997 [35-45] % de parts de marché en valeur et [25-35] % en volume. Synthélabo détenait [20-30] % de parts de marché en valeur et [10-20] % en volume avec Stilnoct. Sanofi détenait [5- 15] % de parts de marché en valeur et [10-20] % en volume avec Propavan.
Le principal acteur du marché est RPR ([35-45] % des parts de marché en valeur et [15- 25] % en volume) avec Imovane, concurrent direct de Stilnoct. Les autres concurrents sont Merck ([0-10] % en valeur), Astra ([0-10] % en valeur), Roche et Pharmacia Upjohn.
La réalisation de l’opération n’est pas susceptible de créer une position dominante individuelle au profit du nouvel ensemble, étant donné la position sur le marché de RPR. De plus, il n’existe pas de risque de position dominante collective anticoncurrentielle pour les raisons suivantes :
- l’existence d’un entrant prévisible AHP, avec le Sonata qui est en cours d’enregistrement (hypnotique non benzodiazépiniques à faible accoutumance concurrençant directement les produits similaires de Synthélabo et RPR). Selon les parties, ce produit devrait développer assez rapidement une part de marché significative sur ce marché. Ceci n’a pas été contredit par l’enquête de la Commission.
- la frange concurrentielle est active et composée de concurrents puissants qui commercialisent de nombreux produits génériques ([15-25] % du marché en valeur et [25-35] % en volume).
B. Le secteur de la beauté
70. Les parties considèrent que l’opération ne devrait pas avoir d’impact sur la concurrence dans le secteur des parfums et des cosmétiques de luxe, principalement puisque Sanofi s’est contractuellement engagée à céder son activité « beauté » et qu’il n’est envisagé aucune relation d’aucune sorte entre la division Beauté de Sanofi-Synthélabo et L’Oréal.
71. En tout état de cause la structure de l’offre sur les différents marchés concernés est telle qu’il n’existe aucun risque de création ou de renforcement d’une quelconque position dominante collective .
72. Les parts de marché combinées de la division Beauté de Sanofi-Synthélabo et L’Oréal sont généralement comprises entre 15 et 25 %. Les seuls marchés où elles sont supérieures à 25 % sont :
- les marchés des produits de maquillage de luxe en France ([25-35] %), Allemagne ([25-35] %), Italie ([25-35] %) et Espagne ([20-30] %), de même qu’au niveau européen ([20-30] %)
- les marchés de produits de soins de luxe en France ([20-30] %) et en Espagne ([20- 30] %).
Même si sur ces marchés, les parts de marché combinées des parties seraient parfois nettement plus importantes que celles de ses concurrents, ceux-ci sont de taille à exercer une concurrence efficace. Ainsi sur le marché des produits de maquillage de luxe en France, LVMH détient [20-30] % de parts de marché, Chanel [5-15] %, Estée Lauder [0-10] %. Sur ce même marché de produits en Allemagne, Estée Lauder détient [15-25] % de parts de marché, LVMH [5-15] % et Chanel [0-10] %. Les répartitions de parts de marché sont similaires sur ce marché en Italie et en Espagne. Sur le marché des produits de soins de luxe en France, Clarins détient [15-25] % de parts de marché, Estée Lauder [5-15] % et LVMH [5-15] %. Sur ce même marché en Espagne, Estée Lauder détient [15-25] %, Clarins [0-10] % et LVMH [0-10] %. De plus, ces entreprises disposent toutes d’une gamme étoffée de produits, de marques à forte notoriété et de ressources financières importantes.
73. Ainsi, sur les différents marchés concernés, à supposer que la part de marché sur l’activité beauté de la nouvelle entité et celle de la société L’Oréal doivent être ajoutées, la concentration projetée ne crée ni ne renforce une position dominante ayant comme conséquence qu’une concurrence effective serait entravée dans le marché commun ou une partie substantielle de celui-ci.
VII. CONCLUSION
74. En conséquence, la Commission conclut que, sous réserve d’une exécution entière de l’engagement figurant à l’annexe 1 de la présente décision, le projet de concentration ne créera pas ou ne renforcera pas une position dominante de nature à entraver de manière significative une concurrence effective dans le marché commun ou une partie substantielle de celui-ci.
75. Pour les raisons exposées ci-avant, et sous réserve d’une exécution entière de l’engagement figurant à l’annexe 1 de la présente décision, la Commission a donc décidé de ne pas s’opposer à la concentration notifiée et de la déclarer compatible avec le marché commun et le fonctionnement de l'accord EEE. La présente décision est adoptée en application de l'article 6, paragraphe 1, point b, du règlement du Conseil (CEE) n° 4064/89, tel qu’amendé par le règlement du Conseil N° 1310/97.
Annexe 1
ENGAGEMENT
Conformément à l’article 6(2) du Règlement du Conseil n° 4064/89 relatif au contrôle des opérations de concentration entre entreprises et afin de lever tout doute quant aux effets sur la concurrence que l’opération de concentration entre Sanofi et Synthélabo serait susceptible d’avoir dans le domaine des principes actifs stupéfiants, la société Synthélabo s’engage:
1. A mettre en vente irrévocablement l’ensemble de ses activités de production et de commercialisation de principes actifs stupéfiants et, en particulier, de pholcodine (ci-après, les “Activités”), en ce compris les actifs matériels et immatériels (brevets, savoir-faire, fichiers clientèle, etc...);
2. A faire en sorte que, jusqu’à la date de leur cession, les Activités soient gérées indépendamment du reste des activités similaires du nouvel ensemble Sanofi-Synthélabo, issues de Sanofi;
3. A garantir, jusqu’à la date de leur cession, que les Activités soient poursuivies dans des conditions commerciales normales et maintenues à leur niveau actuel;
4. A réaliser la cession des Activités au bénéfice d’un tiers viable et indépendant, agréé par la Commission, dans un délai de .... 4, étant entendu qu’un tel délai pourra être, si cela est nécessaire, prolongé dans les conditions du point 9 ci-après par la Commission, celle-ci étant informée de ce que le cessionnaire devra par ailleurs être dûment autorisé par l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, conformément notamment à l’article L-627 du Code de la santé publique;
5. A informer promptement et par écrit la Commission de tout acquéreur potentiel viable et indépendant ayant clairement indiqué son intention d’acquérir les Activités;
6. A désigner dans les 15 jours de la réalisation de l’opération de concentration un administrateur (ci-après, “l’Administrateur”), par exemple une banque d’investissement dont la désignation sera agréée par la Commission et dont les tâches notamment seront -- dans le respect des réglementations spécifiques à la matière -- les suivantes:
* déterminer la meilleure structure de gestion pour assurer la viabilité, la valeur sur le marché et la compétitivité des Activités;
* surveiller l’exploitation et la gestion des Activités, pour en assurer la viabilité, la valeur sur le marché et la compétitivité;
* agir en tant que banquier d’affaires de Synthélabo pour mener en toute bonne foi des négociations avec des tiers intéressés, en vue de la cession des Activités;
* faire à la Commission européenne des comptes-rendus réguliers sur l’avancement desdites négociations et sur la gestion des Activités toutes les six semaines par écrit et oralement à la suite de toute question posée par la Commission;
* informer Synthélabo des différents contacts qu’il pourrait avoir avec la Commission, en lui adressant notamment une copie des comptes-rendus écrits mentionnés ci-dessus.
7. A faire approuver le mandat de l’Administrateur par la Commission.
8. A apporter à l’Administrateur toute l’assistance raisonnablement requise pour céder les Activités dans le délai prescrit. Synthélabo sera considérée avoir respecté ses engagements si, à cette date, elle a notamment signé un contrat de cession avec un acquéreur agréé par la Commission, pour autant que cette cession soit menée à bien dans un délai raisonnable accepté par la Commission.
9. A confier à l’Administrateur un mandat irrévocable de vente ne prévoyant aucun prix minimal, si Synthélabo ne devait pas réussir à vendre les Activités dans un délai de .... 5 après la date d’effet de l’engagement.
Pour sa part, Sanofi s’engage à fournir à l’acquéreur des Activités de la morphine technique à des conditions commerciales normales et non-discriminatoires, aussi longtemps qu’elle sera autorisée à produire et à commercialiser ce produit en France.
Cet engagement prendra effet dès l’adoption de la décision de la Commission déclarant la concentration Sanofi-Synthélabo compatible avec le marché commun.
1 voir décisions du 10 juin 1991, Sanofi/Sterling Drug (affaire n° IV/M.072), du 29 avril 1993, Procordia/Herbamond (affaire n° IV/M.323), du 18 avril 1994, Rhône-Poulenc/ Cooper (affaire n° IV/M.426), du 20 juin 1994, la Roche/Syntex (affaire n° IV/M.457), du 19 septembre 1994, AHP/Cynamid (affaire n° IV/M.500), du 28 février 1995, Glaxo/Wellcome (affaire n° IV/M.555), du 3 avril 1995, Behringwerke AG/Armour Pharmaceutical Co. (affaire n° IV/M.495), du 22 juin 1995, Hoechst/Marion Merell Dow (affaire n° IV/M.587), du 28 septembre 1995, Upjohn/Pharmacia (affaire n° IV/M.631), du 17 juillet 1996 , Ciba-Geigy / Sandoz (affaire n°IV/M.737), du 4 février 1998, Hoffman La Roche/Boehringer Mannheim (affaire n°IV/M.950), du 1er septembre 1997 , American Home Products/Monsanto (affaire n°IV/M.1229), du 14 août 1998.
2 Voir décisions du 1 mars 1993, Sanofi/Yves Saint Laurent (affaire n° IV/M.312), du 19 septembre 1997L’Oréal/Procasa/Cosmetique Iberica/Albesa (affaire n° IV/M.957)
3 Voir décisions Ciba-Geigy / Sandoz (affaire n°IV/M.737), du 4 février 1998, American Home Products/Monsanto (affaire n°IV/M.1229), du 14 août 1998.
4 Information omise: secret des affaires.