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Décisions

CA Rennes, 5eme ch., 28 octobre 2020, n° 17/04065

RENNES

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Pacifica (SA)

Défendeur :

Axa France Iard (SA), Prefa Elec (SARL), Nouvelle Tresco Venant Aux Droits De La Sa Tresco (SAS), Genvex Société (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Le François

Conseillers :

Mme Daups, Mme Le Potier

Avocats :

Me Oger , Me Bonte, Me Morvan , Me Chaudet , Me Verrando , Me Doceul, Me Lhermitte , Me Shefet

du 9 mai 2017

9 mai 2017

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 15 mars 2012, un incendie a endommagé la maison de M. A Y et de Mme G Y née H, située 13 bis les Cinq routes à Paulx (44), assurée auprès de la société Pacifica qui les a indemnisés.

La zone de départ du feu a été localisée dans l 'environnement immédiat d'un cumulus thermodynamique, soit un chauffe-eau couplé à une pompe à chaleur, de marque Taneo vendu à M. et Mme Y par la société Préfa Elec assurée auprès d'Axa France, fourni par la société Tresco et fabriqué par la société danoise Genvex.

M. et Mme Y et la SA Pacifica ont obtenu la nomination d'un expert par ordonnance de référé du 24 mai 2012 avec extension des opérations aux différentes sociétés concernées par ordonnances des 9 août 2012 et 7 mars 2013. L'expert désigné, M. X F, a déposé son rapport le 18 décembre 2013.

Se prévalant de ce que ce rapport concluait à un défaut intrinsèque du chauffe-eau, M. et Mme Y et la société Pacifica ont assigné la société Genvex, au domicile élu de son avocat français, la SARL Préfa Elec et la SA Axa France devant le tribunal de grande instance de Nantes, par acte d'huissier du 14 octobre 2014, en demandant leur condamnation solidaire au paiement des sommes de 261 870,41 euros à la société Pacifica et de 33 250 euros aux époux Z

Par actes d'huissiers des 17 et 21 août 2015, la SA Axa France iard et la SARL Préfa Elec ont fait citer respectivement la SA Tresco et la société Genvex à son siège afin d'obtenir leur garantie de toutes condamnations du chef de l'incendie du 15 mars 2012.

Par jugement du 9 mai 2017, le tribunal a :

- constaté l'intervention volontaire de la société Nouvelle Tresco au lieu et ...,

- débouté les époux A Y et la SA Pacifica de leur demande,

- condamné les époux A Y et la SA Pacifica à payer à la SARL Préfa Elec et la SA Axa France Iard une somme de 2 000 euros et à la société danoise Genvex une somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeté toutes autres prétentions plus amples ou contraires,

- condamné les époux A Y et la SA Pacifica aux dépens.

Le 2 juin 2017, M. A Y, Mme G Y née H et la société Pacifica ont interjeté appel de cette décision et aux termes de leurs dernières écritures notifiées le 31 août 2018, ils demandent à la cour de :

- déclarer les sociétés Genvex, Préfa Elec et Tresco entièrement responsables du sinistre incendie survenu au domicile des époux Y à Paulx le 4 mars 2012,

En conséquence :

- infirmer le jugement du 9 mai 2017, et ce faisant,

- les condamner conjointement et solidairement, ainsi que la société Axa France, ou l'un à défaut de l'autre, au paiement de la somme principale de 277 820,41 euros HT au bénéfice de la société Pacifica outre intérêts au taux légal à compter des paiements effectués par la société Pacifica, outre capitalisation des intérêts,

- les condamner au bénéfice des époux Y au paiement d'une somme de 69 315,59 euros outre intérêts au taux légal à compter de l'assignation de première instance, valant mise en demeure, outre capitalisation des intérêts,

- les condamner au bénéfice de la société Pacifica au paiement d'une indemnité de 8 000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- rejeter les demandes des sociétés Genvex, Nouvelle Tresco, Préfa Elec et Axa fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,

- les condamner aux dépens qui comprendront les frais d'expertise.

Par dernières conclusions notifiées le 6 décembre 2017, la société Axa France Iard et la société Préfa Elec demandent à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, en ce qu'il a débouté les époux Y et Pacifica de leurs demandes contre Préfa Elec et Axa, et condamner les demandeurs à payer 2 000 euros au titre des frais irrépétibles, et en tous les dépens,

- débouter les époux Y et Pacifica de toutes leurs demandes, fins et conclusions en appel, comme étant fondées sur l'article 1641-1 du code civil,

Subsidiairement, et s'il est jugé que le sinistre d'incendie provient d'un vice intrinsèque du chauffe-eau fabriqué par la société Genvex,

- dire et juger que la société Genvex est exclusivement responsable du sinistre,

- en conséquence, mettre hors de cause la société Préfa Elec et son assureur, la société Axa France,

Très subsidiairement, et si par impossible la société Préfa Elec et son assureur Axa France étaient condamnés,

- condamner les sociétés Genvex et Tresco in solidum, ou l'une à défaut de l'autre, à relever et garantir indemnes les sociétés Préfa Elec et Axa France de toute condamnation qui pourrait être prononcées à leur encontre,

- débouter les époux Y et Pacifica de leurs demandes, fins et conclusions injustifiées et excessives,

- débouter la société Genvex de sa demande au titre des frais irrépétibles, dirigée contre les sociétés Axa France et Préfa Elec,

En toute hypothèse,

- condamner la société Genvex, Tresco, Pacifica ou les époux Y, solidairement ou l'un à défaut de l'autre, à verser à la société Axa France, et à la société Préfa Elec la somme de 3 600 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile et en tous les dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais de mise en cause de la société Genvex en accordant à la SCP Chaudet avocat postulant, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées le 26 décembre 2017, la société Nouvelle Tresco demande à la cour de :

- la déclarer recevable et bien fondée en toutes ses demandes, fins et conclusions,

- déclarer l'appel principal non fondé à son encontre,

- déclarer irrecevables et en tout état de cause mal fondées les demandes, fins et conclusions en tant qu'elles sont dirigées contre la société Nouvelle Tresco,

- confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions,

- rejeter tout appel incident en ce qu'il est dirigé à l'encontre de la société Nouvelle Tresco,

En conséquence,

À titre principal, sur le mal fondé des demandes dirigées à l'encontre de la société Nouvelle Tresco,

1°) Sur le mal fondé des demandes dirigées au visa de l'article 1641 du code civil

- constater que la société Nouvelle Tresco n'est que le distributeur du chauffe-eau vendu par la société Préfa Elec aux consorts Y,

- constater que la société Nouvelle Tresco n'avait aucunement connaissance du vice,

- constater que le chauffe-eau livré aux consorts Y était affecté d'un défaut intrinsèque dû à un défaut de fabrication,

- en déduire que la société Nouvelle Tresco n'est pas le débiteur de la garantie des vices cachés,

- confirmer le jugement entrepris qui a mis hors de cause la société Nouvelle Tresco,

- débouter en conséquence les consorts Y et leur assureur, la compagnie Pacifica des demandes de condamnation dirigées à l'encontre de la société Nouvelle Tresco,

2°) Sur le mal fondé des demandes dirigées au visa de l'article 1386-1 et suivants du code civil,

- constater qu'aucune demande n'est dirigée sur ce fondement à l'encontre de la société Nouvelle Tresco,

- constater que la société Nouvelle Tresco n'est que le distributeur du chauffe-eau vendu par la société Préfa Elec aux consorts Y,

- constater que la société Genvex est le fabricant du chauffe-eau thermodynamique fourni par la société Préfa Elec aux consorts Y,

- constater que le chauffe-eau livré aux consorts Y était affecté d'un défaut intrinsèque dû à un défaut de fabrication,

- dire et juger que la survenance du sinistre a bien pour origine le défaut intrinsèque du chauffe-eau,

- en déduire que la société Nouvelle Tresco ne peut voir sa responsabilité recherchée du fait des produits défectueux,

- confirmer le jugement entrepris qui a mis hors de cause la société Nouvelle Tresco,

- débouter en conséquence tout appel en garantie formé à l'encontre de la société Nouvelle Tresco,

À titre particulièrement subsidiaire, sur le quantum des préjudices allégués,

1°) sur le fondement de la garantie des vices cachés

- dire et juger que seul le prix de vente peut être restitué à la société Pacifica et aux consorts Y,

- dire et juger que la société Pacifica et M. et Mme Beillevert ne sont pas fondés à solliciter l'indemnisation des conséquences résultant de l'incendie survenu le 15 mars 2012 ;

- dire et juger que les consorts Y ne justifient pas de la somme de 7 074 euros correspondant au compteur EDF photovoltaïque pour un montant de 2 000 euros à la perte de production photovoltaïque pour un montant de 3 398 euros et à des frais paysagers pour les abords de leur habitation à hauteur de 1 676 euros,

- dire et juger que les consorts Y doivent garder à leur charge la vétusté appliquée par les experts sur les postes bâtiment à hauteur de 10 108 euros et contenu à hauteur de 16 068 euros,

- débouter en conséquence les demandeurs de leurs prétentions au titre d'une réparation intégrale ;

- débouter la société Genvex, la société Préfa Elec et la société Axa France iard des demandes incidentes formées contre la société Nouvelle Tresco,

2°) sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux

- dire et juger que les consorts Y ne sont pas fondés à réclamer la restitution du prix du chauffe-eau ainsi que sa vétusté,

- dire et juger que les consorts Y ne justifient pas de la somme de 7 074 euros correspondant au compteur EDF photovoltaïque, pour un montant de 2 000 euros, à la perte de production photovoltaïque pour un montant de 3 398 euros et à des frais paysagers pour les abords de leur habitation à hauteur de 1 676 euros,

- dire et juger que les consorts Y doivent garder à leur charge la vétusté appliquée par les experts sur les postes bâtiment à hauteur de 10 108 euros et contenu à hauteur de 16 068 euros,

- débouter en conséquence les demandeurs de leurs prétentions au titre d'une réparation intégrale,

- débouter la société Genvex et la société Préfa Elec et la société Axa France iard des demandes incidentes formées contre la société Nouvelle Tresco,

À titre plus subsidiaire, sur les appels en garantie,

- dire et juger que la société Genvex est seule et exclusivement responsable des désordres affectant le chauffe-eau livré aux consorts Y,

- constater que l'expert judiciaire conclut à l'absence de responsabilité de la société Nouvelle Tresco,

- dire et juger en conséquence que la société Nouvelle Tresco est recevable et bien fondée en sa demande en garantie contre la société Genvex, et condamner cette dernière à garantir la société Nouvelle Tresco de l'intégralité des condamnations qui seraient mises à sa charge en principal, intérêts, frais et accessoires, et ce au visa conjugué des articles 1641 et 1386-1 (1245) et suivants du code civil,

En tout état de cause,

- condamner la société Genvex ou tout succombant à payer à la société Nouvelle Tresco la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Genvex ou tout succombant aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel, avec distraction pour ces derniers au profit de la SELARL Lexavoue Rennes Angers aux offres de droit.

Par dernières conclusions notifiées le 7 mai 2020, la société Genvex demande à la cour de :

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré,

En conséquence,

- débouter la société Pacifica et les époux Y de l'ensemble de leurs demandes, fins et conclusions contre la société Genvex,

- débouter également les sociétés Préfa Elec, Axa France iard et Nouvelle Tresco de l'ensemble de leurs demandes contre la société Genvex,

- condamner la société Pacifica et les époux Y, ainsi que subsidiairement les sociétés Préfa Elec, Axa France IARD et Nouvelle Tresco à verser à la société Genvex la somme de 8 000 euros au titre de l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner les mêmes en tous les frais et dépens de l'instance, distraits au profit de la SCP Gautier et Lhermitte, avocats postulants, sous leur affirmation de droit.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 17 juin 2020, avant l'ouverture des débats.

MOTIFS

La cour relève au préalable, d'une part, que le moyen, écarté par le tribunal de l'irrecevabilité de la demande de la société Pacifica pour défaut de production de sa quittance subrogative n'est plus maintenu en appel, et, d'autre part, que les parties qui critiquent le rapport d'expertise en la forme ne demandent pas la nullité du rapport d'expertise.

Les demandes de M. et Mme Y et de la société Pacifica

Les appelants demandent l'infirmation du jugement et la condamnation solidaire de la société Préfa Elec, leur vendeur du cumulus thermodynamique, de la société Tresco qui a vendu l'appareil à Préfa Elec, sur le fondement de la garantie des vices cachés des articles 1641 et suivants du code civil, et de la société Genvex, fabricant, sur le fondement de la garantie des produits défectueux des articles 1386-1 et suivants devenus 1245 et suivants du code civil, au paiement de dommages et intérêts correspondant aux préjudices consécutifs à l'incendie de la maison d'habitation, le feu ayant pris dans le cumulus qui était affecté d'un défaut interne.

Ils font grief au jugement d'avoir inexactement retenu s'agissant de la conformité de l'installation électrique que l'attestation du B a été établie par les époux Y sans recours à un professionnel indépendant, que la preuve d'un vice interne à l'appareil n'est pas suffisamment rapportée, l'expertise ne permettant pas d'écarter une non-conformité de la protection électrique sur l'installation de la maison à propos du chauffe-eau, qu'une utilisation anormale a été mentionnée le jour des faits, que la cosse de la résistance présumée à l'origine d'un effet Joule n'a pas été recherchée ni élucidée et qu'elle peut très bien résulter d'une manœuvre malencontreuse ou de précautions d'emploi insuffisantes et pas nécessairement d'un défaut précédant la vente.

Ils font valoir qu'il résulte clairement de l'expertise judiciaire que l'origine de l'incendie se trouve dans un défaut intrinsèque au chauffe-eau, que l'expert a écarté un défaut de conformité de l'installation électrique réalisée par M. Z

Ils indiquent que compte tenu des motifs techniquement inexacts du jugement ils ont dû à nouveau interroger l'expert E qui a établi une note technique complémentaire au sujet de l'attestation B et de la non-conformité de l'installation, reprenant ce qu'avait pédagogiquement exposé l'expert judiciaire.

La société Préfa Elec et la société Axa France, concluent à titre principal à la confirmation du jugement en reprenant les motifs du tribunal pour soutenir que la preuve d'un vice caché comme fait générateur du sinistre n'est pas rapportée alors que les demandeurs se fondent sur l'expertise justement critiquée par le tribunal et qu'en appel ils ne produisent qu'un simple avis de D C considèrent que M. Y a installé le chauffe-eau dans sa maison sous sa propre responsabilité.

Subsidiairement, elles demandent à la cour de retenir la responsabilité exclusive de la société Genvex, l'expert ayant constaté un défaut intrinsèque du chauffe-eau et une installation conforme aux préconisations du constructeur. Elles ajoutent que la société Prefa Elec ne pouvait connaître un vice caché de l'appareil.

La société Nouvelle Tresco conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il a débouté M. et Mme Y et la société Pacifica de leurs demandes à son égard, en demandant à la cour de constater qu'elle n'est que le distributeur du chauffe-eau vendu par la société Préfa Elec aux époux Y et qu'elle n'avait aucunement connaissance du vice dû à un défaut de fabrication, qu'elle n'est donc pas la débitrice de la garantie des vices cachés, et qu'elle ne peut non plus voir sa responsabilité recherchée du fait des produits défectueux.

La société Genvex demande la confirmation du jugement qui a rejeté la demande de M. et Mme Y et de leur assureur, elle reprend les motifs du jugement qui critiquant les conclusions de l'expert et les tenant pour inexactes a constaté qu'aucun litige ou procédure ne sont évoqués à propos d'un défaut de fabrication et qu'il n'est pas certain que la défaillance soit d'origine alors qu'elle ne s'est pas manifestée pendant trois ans et qu'il est plus probable qu'elle résulte d'une utilisation anormale ou accidentelle de l'appareil.

Elle reprend aussi les motifs du tribunal qui a affirmé que le chauffe-eau Tanéo produit par la société Genvex a été utilisé par les époux Y dans des conditions non conformes à l’usage auquel il était destiné.

Se prévalant de l'article 1386-13 devenu 1245-12 du code civil qui dispose que la responsabilité du producteur peut être réduite ou supprimée lorsque le dommage est causé conjointement par défaut du produit et faute de la victime, la société Genvex soutient que l'installation électrique a été réalisée par M. Y, amateur, et que l'attestation du B n'est pas une preuve de la conformité de l'installation, le contrôleur étant faillible.

Il résulte des constats et conclusions de l'expert dans son rapport définitif, comprenant de longues réponses circonstanciées et documentées aux dires des parties, en particulier à ceux de la société Genvex, que le départ du feu se situe à l'intérieur du chauffe-eau, qu'il n'y a eu aucun autre départ de feu dans la pièce, et que l'incendie provient d'un défaut intrinsèque au cumulus, l'importante fusion des cosses femelles en laiton aux bornes de la résistance chauffante ayant été générée par un effet joule au niveau de cette fusion.

L'expert a exclu les autres causes de dysfonctionnent électrique, court-circuit, arc électrique, et a constaté que l'installation électrique installée par M. Y dans sa maison est conforme.

À cet égard, l'avis du cabinet d'étude E, soumis au débat contradictoire par M. et Mme Y et la société Pacifica en appel, est un moyen de preuve admissible dès lors qu'il vient corroborer le rapport d'expertise judiciaire et a été rendu nécessaire pour critiquer l'analyse du premier juge qui dénigrant les conclusions expertales a élaboré des hypothèses et des avis techniques contraires à ceux de l'expert, M. X F, inscrit sur la liste des experts de la cour d'appel de Rennes, spécialisé en ingénierie et incendie.

Le tribunal, pour envisager le défaut de conformité de l'installation électrique comme cause probable de l'incendie, a incorrectement retenu que l'attestation de B a été établie par M. Y sans recours à un professionnel indépendant, alors que comme l'explique le cabinet d'études E, le Comité national pour la sécurité des usagers de l'électricité ( B) a vocation à délivrer des attestations de conformité des installations électriques à l'occasion des demandes préalables de raccordement sur le réseau public comme étant conformes à la norme en vigueur, soit en France la norme NFC15-100, que l'attestation de B, certes demandée par M. Y, a évidemment été instruite et délivrée par un technicien agréé du B.

Cette attestation du B atteste sans mise en doute possible, de la conformité et de la sécurité de l'installation électrique de la maison de M. et Mme Z

Par ailleurs, c'est aussi de façon circonstanciée et complète que l'expert judiciaire, dont les constats sont corroborés par l'avis technique du cabinet EUREXO, a écarté toute utilisation anormale du chauffe-eau par M. et Mme Y, et a exclu toute utilisation qui pourrait être à l'origine de l'apparition du vice interne à l'appareil, vice de fabrication.

Il est ainsi établi que le chauffe-eau vendu à M. et Mme Y était affecté d'un vice caché antérieur à la vente et que les vendeurs ne peuvent s'exonérer de leur responsabilité en invoquant une faute de la victime, laquelle de plus n'est pas établie, ou une cause exonératoire, étant encore observé que l'argument tiré par la société Genvex de l'absence d'autre sinistre ou procédure concernant le défaut de fabrication d'autres chauffe eaux produits par elle, est particulièrement inopérant.

En conséquence, M. et Mme Y et leur assureur sont fondés à rechercher la responsabilité des sociétés Prefa Elec et Tresco en leur qualité de vendeurs successifs du cumulus, en application de l'article 1641 du code civil, au titre de la garantie des vices cachés, et d'exercer à leur encontre l'action indemnitaire en réparation de tous les préjudices subis, les vendeurs professionnels étant présumés connaître les vices de l'appareil vendu, et alors que la mise en œuvre de la responsabilité d'un producteur en application des articles 1245 et suivants du code civil n'exclut pas le droit de l'acquéreur de rechercher, en même temps, la responsabilité du vendeur du produit sur le fondement de la garantie des vices cachés.

À l'encontre de la société Genvex, l'action de M. et Mme Y et de leur assureur est à bon droit fondée sur les dispositions régissant la responsabilité des produits défectueux du producteur qui, selon l'article 1386-1 devenu 1245 du code civil, est responsable du dommage causé par un défaut de son produit, qu'il soit ou non lié par un contrat avec la victime, l'article 1386-4 devenu 1245-3 du même code stipulant qu'un produit est défectueux lorsqu'il n'offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre, et alors que, ainsi qu'il l'a été jugé précédemment, il n'existe aucune faute de M. et Mme Y de nature à réduire ou supprimer la responsabilité de la société Genvex, en vertu des dispositions de l'article 1386-13 devenu 1245-12 du code civil.

Il y a lieu d'infirmer le jugement qui a débouté M. et Mme Y et la société Pacifica de leurs demandes, et de condamner in solidum la société Genvex, la société Nouvelle Tresco, la société Préfa Elec et la société Axa France de la totalité des préjudices par eux subis à la suite de l'incendie survenu au domicile des époux Y à Paulx le 15 mars 2012.

S'agissant de l'indemnisation, il convient d'abord de relever que la société Nouvelle Tresco soutient à tort que seul le prix de vente pourrait être restitué à M. et Mme Y et qu'ils ne sont pas fondés à solliciter l'indemnisation des conséquences résultant de l'incendie, alors qu'il est de principe que l'action en réparation du préjudice subi du fait d'un vice caché, indépendamment de toute action résolutoire ou estimatoire, peut être formée de manière autonome.

L'expert judiciaire a contradictoirement évalué les dommages à la somme totale de 347 116 euros, soit :

- dommages bâtiment : 276 514 euros

- dommages contenus 38 948 euros

- perte d'usage 31 674 euros

Il est justifié que la société Pacifica a versé à M. et Mme Y, selon quittance subrogative du 21 janvier 2013, la somme de 242 049 euros comprenant les dommages immobiliers vétusté déduite, les dommages au contenu et les garanties complémentaires, ainsi que la somme de 35 771,40 euros, soit la somme de 277 820, 40 euros, laquelle n'est pas contestée, et la société Préfa Elec et son assureur, la société Axa France, la société Tresco et la société Genvex seront condamnées in solidum à payer cette somme à la société Pacifica.

M. et Mme Y sollicitent, pour leur part, la somme de 69 315,59 euros correspondant à la différence entre la somme de 347 136 euros, montant total des préjudices évalués par l'expert judiciaire et celle de 277 820,41 euros reçus de leur assureur.

La société Tresco soutient que M. et Mme Y ne justifient pas des sommes correspondantes au compteur EDF photovoltaïque et à des frais paysagers pour les abords de leur habitation, et qu'ils doivent garder à leur charge la vétusté appliquée par les experts sur les postes bâtiment à hauteur de 10 108,00 euros et contenu à hauteur de 16 068,00 euros.

Mais, alors que la victime d'un dommage doit être rétablie dans la situation qui aurait été la sienne si le dommage n'avait pas eu lieu et ce, sans perte ni profit, que la déduction d'un coefficient de vétusté ne replace pas la victime dans cette situation, que les sommes demandées correspondent précisément aux évaluations de dommages immobiliers et mobiliers contradictoirement retenues par l'expert, il convient de faire droit à la demande de M. et Mme Y en paiement d'une somme de 69 315,59 euros.

Les condamnations prononcées ayant un caractère indemnitaire, elles porteront intérêts au taux légal à compter de la présente décision en application des dispositions légales, et par application de l'article 1343-2 du code civil, les intérêts sur les sommes dues pourront être capitalisés année par année.

Les demandes en garantie

Compte tenu de la chaîne de ventes successives, la société Prefa Elec et la société AXA demandent à bon droit que la société Nouvelle Tresco, fournisseur professionnel de l'appareil atteint d'un vice caché, et la société Genvex, fabricant, soient condamnées in solidum à les garantir de toutes les condamnations prononcées à leur encontre au profit de M. et Mme Y et de la société Pacifica.

De son côté, la société Tresco demande à bon droit à être garantie par la société Genvex responsable, également à son égard, des conséquences dommageables de la défectuosité du produit qu'elle lui a fourni.

Les dépens et les frais non taxables

Eu égard à l'issue de la procédure, les dispositions du jugement relatives à la charge des dépens et à la condamnation de M. et Mme Y au titre de l'article 700 du code de procédure civile seront infirmées.

Les sociétés Genvex, Nouvelle Tresco, Préfa Elec et Axa France seront condamnées in solidum aux dépens de première instance, comprenant les frais d'expertise, et aux dépens d'appel, et il sera fait application de l'article 700 du code de procédure civile selon les dispositions qui suivent.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et contradictoirement, par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement déféré ;

Statuant à nouveau,

Condamne in solidum la société Genvex, la société Nouvelle Tresco, la société Préfa Elec et la société Axa France à payer à la société Pacifica la somme de 277 820,41 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

Condamne in solidum la société Genvex, la société Nouvelle Tresco, la société Préfa Elec et la société Axa France à payer à M. A Y et à Mme G Y née H la somme de 69 315,59 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

Dit que les intérêts pourront être capitalisés selon les modalités prévues par l'article 1343-2 du code civil ;

Condamne in solidum la société Genvex, la société Nouvelle Tresco, la société Préfa Elec et la société Axa France à payer à la société Pacifica la somme de 5 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum la société Genvex et la société Nouvelle Tresco à garantir la société Préfa Elec et la société Axa France de toutes les condamnations prononcées à leur encontre ;

Condamne la société Genvex à garantir la société Nouvelle Tresco de toutes les condamnations prononcées à son encontre ;

Condamne la société Genvex à payer à la société Préfa Elec et à la société AXA France, ensemble, la somme de 2 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société Genvex à payer à la société Nouvelle Tresco la somme de 2 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum les sociétés Genvex, Nouvelle Tresco, Préfa Elec et Axa France aux dépens de première instance, comprenant les frais d'expertise et aux dépens d’appel ;

Rejette toute autre demande.