CEDH, sect. 5, 5 novembre 2020, n° 47499/12
COUR EUROPÉENNE DES DROITS DE L'HOMME
Décision
PARTIES
Demandeur :
Syndicat national des Fabricants d’isolants en laines minérales manufacturées
Défendeur :
France
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Présidente :
Mme Yudkivska
Juge :
Mme Jelić
Juge :
M. Bårdsen
Avocat :
Me Ferla
FAITS ET PROCÉDURE
Les informations détaillées concernant le syndicat requérant se trouvent dans le tableau joint en annexe.
Le syndicat requérant a été représenté devant la Cour par Me R. Ferla, avocat exerçant à Paris.
Le grief que le syndicat requérant tirait de l’article 6 § 1 de la Convention, portant sur l’absence de recours effectif contre les décisions du rapporteur général adjoint de l’Autorité de la concurrence de refuser ou de lever pour certains documents le secret des affaires, a été communiqué au gouvernement français (« le Gouvernement »).
EN DROIT
À l’issue de négociations en vue d’un règlement amiable qui se sont révélées infructueuses, le Gouvernement a avisé la Cour qu’il proposait de prononcer une déclaration unilatérale en vue de régler les questions soulevées par ces griefs. Il a en outre invité la Cour à rayer la requête du rôle conformément à l’article 37 de la Convention.
Le Gouvernement reconnaît qu’en l’espèce, le syndicat requérant n’a, à l’époque des faits, pas bénéficié d’un recours effectif contre les décisions du rapporteur général adjoint de l’Autorité de la concurrence de refuser ou de lever pour certains documents le secret des affaires, ce qui était contraire aux exigences de l’article 6 § 1 de la Convention. Il offre de verser au syndicat requérant la somme reproduite dans le tableau joint en annexe et il invite la Cour à rayer la requête du rôle conformément à l’article 37 § 1 c) de la Convention. Cette somme sera payable dans un délai de trois mois à compter de la date de la notification de la décision de la Cour. Si elle n’était pas versée dans ce délai, le Gouvernement s’engage à la majorer, à compter de l’expiration du délai et jusqu’au règlement, d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage.
Le paiement vaudra règlement définitif de l’affaire.
Les termes d’une déclaration unilatérale ont été transmis au syndicat requérant plusieurs semaines avant la date de cette décision. La Cour a reçu une réponse du syndicat requérant indiquant qu’il n’acceptait pas les termes de la déclaration.
La Cour rappelle que l’article 37 § 1 c) de la Convention lui permet de rayer une affaire du rôle si :
« (...) pour tout autre motif dont [elle] constate l’existence, il ne se justifie plus de poursuivre l’examen de la requête ».
Ainsi, en vertu de cette disposition, la Cour peut rayer des requêtes du rôle sur le fondement d’une déclaration unilatérale du gouvernement défendeur, même si les requérants souhaitent que l’examen de leur affaire se poursuive (voir, en particulier, l’arrêt Tahsin Acar c. Turquie (question préliminaire) [GC], n° 26307/95, §§ 75-77, CEDH 2003-VI).
La jurisprudence de la Cour en matière d’absence de recours effectif dans des circonstances similaires à celles de la présente affaire est claire et abondante (voir, par exemple, Société Canal Plus et autres c. France, no 29408/08, 21 décembre 2010, Compagnie des gaz de pétrole Primagaz c. France, n° 29613/08, 21 décembre 2010, et Vinci Construction et GTM Génie Civil et Services c. France, nos 63629/10 et 60567/10, 2 avril 2015).
Eu égard aux concessions que renferme la déclaration du Gouvernement, ainsi qu’au montant de l’indemnisation proposée (montant qui est conforme à ceux alloués dans des affaires similaires), la Cour estime qu’il ne se justifie plus de poursuivre l’examen de la requête (article 37 § 1 c)).
En outre, à la lumière des considérations qui précèdent, la Cour estime que le respect des droits de l’homme garantis par la Convention et ses Protocoles n’exige pas par ailleurs qu’elle poursuive l’examen de la requête (article 37 § 1 in fine).
Enfin, la Cour souligne que, dans le cas où le Gouvernement ne respecterait pas les termes de sa déclaration unilatérale, la requête pourrait être réinscrite au rôle en vertu de l’article 37 § 2 de la Convention (voir Josipović c. Serbie (déc.), nº 18369/07, 4 mars 2008).
Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de rayer cette requête du rôle.
Par ces motifs, la Cour, à l’unanimité,
Prend acte des termes de la déclaration du gouvernement défendeur et des modalités prévues pour assurer le respect des engagements ainsi pris ;
Décide de rayer la requête du rôle en vertu de l’article 37 § 1 c) de la Convention.
ANNEXE
Requête concernant des griefs tirés de l’article 6 § 1 de la Convention
Numéro et date d’introduction de la requête | Nom du requérant | Nom et ville du représentant | Date de réception de la déclaration du Gouvernement | Date de réception de la lettre du requérant | Montant alloué pour dommage matériel et moral et frais et dépens (en euros)1 |
47499/12 15/06/2012 | Syndicat National des Fabricants d’Isolants en Laines Minérales Manufacturées | Me Romain Ferla Paris | 16/04/2020 | 02/06/2020 | 13 000 |
1 Plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt par la partie requérante.