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Décisions

CA Angers, ch. com. A, 10 novembre 2020, n° 16/01971

ANGERS

Arrêt

Infirmation partielle

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Van Gampelaere

Conseiller :

Mme Robveille

Avocats :

Me Menguy, Me Hery, Me Nosten

T. com. Le Mans, du 17 juin 2016

17 juin 2016

FAITS, PROCÉDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

La société (SARL) X est franchiseur d'un réseau de 36 magasins de vente de pièces détachées et d'accessoires pour motos sous l'enseigne « XX ».

La société (SARL) Y a été créée le 22 novembre 2000 à la suite de la reprise des actifs de la société liquidée Pro Services Pneus, en vue d'exploiter un fonds de commerce de négoce de motos, cycles et tous véhicules à deux roues, location, réparation, entretien, négoce d'accessoires, situé <adresse>.

La SARL X et la SARL Y ont signé le 15 novembre 2000 un contrat de franchise, modifié par avenant du 24 août 2004.

Estimant que des redevances étaient restées impayées, la SARL X a notifié le 31 mai 2010 à la SARL Y le non-renouvellement du contrat de franchise avec effet au 31 décembre 2010.

Par acte du 15 décembre 2010, la SARL X a fait assigner la SARL Y en référé devant le président du tribunal de commerce de Nanterre, afin d'obtenir sa condamnation au paiement, à titre provisionnel, de la somme totale de 31 572,82 euros au titre des redevances échues impayées arrêtées au 30 octobre 2010.

A l'audience à laquelle les débats ont eu lieu, la société X a complété ses demandes en y ajoutant notamment une demande subsidiaire d'expertise.

Par ordonnance de référé du 3 février 2011, le président du tribunal de commerce de Nanterre a rejeté la demande en paiement à titre provisionnel et a ordonné une expertise afin de faire les comptes entre les parties, confiée à M. Z.

L'expert judiciaire a déposé son rapport le 11 août 2011, concluant en un solde dû par la société Y à la société X d'un montant de 92 983 euros, sauf à déduire une somme de 11 720 euros dans l'hypothèse où il serait retenu que la société X ne justifie pas du bien fondé de la conservation de sommes au titre de commissions de Ducroire reçues des fournisseurs.

Par ordonnance en date du 29 mars 2012, le juge des référés du tribunal de commerce de Nanterre, saisi par la SARL Y, a débouté celle-ci de sa demande de nouvelle expertise et l'a condamnée à verser à la SARL X la somme de 81.263 euros à titre de provision.

Par arrêt du 13 février 2013, la cour d'appel de Versailles a infirmé cette décision, déboutant la SARL X de sa demande de provision.

Par jugement du 23 octobre 2012, le tribunal de commerce du Mans a ouvert une procédure de sauvegarde judiciaire à l'égard de la SARL X, en désignant Maître W en qualité de mandataire judiciaire.

Par jugement du 25 mars 2014, le tribunal de commerce du Mans a arrêté un plan de sauvegarde de 9 ans et nommé Maître A en qualité de commissaire à l'exécution du plan.

Par acte du 11 juin 2015, la SARL X et Maître A en qualité de commissaire à l'exécution du plan, ont fait assigner la SARL Y devant le tribunal de commerce du Mans aux fins la voir condamner, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

- à payer à la SARL X la somme de 33.088,83 euros au titre des redevances dues dans le cadre du contrat de franchise du 15 novembre 2000, avec intérêts au taux légal à compter de la décision à intervenir,

- à payer à la société X la somme de 64.705 euros au titre de l'avance en compte courant d'associés, avec intérêt au taux légal à compter de la décision à intervenir,

- à dépersonnaliser le fonds de commerce situé <adresse>, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard,

- à payer à la société X la somme de 100.000 euros au titre du préjudice subi du fait du parasitisme économique dont elle s'est rendue responsable,

- à payer à la société X la somme de 20.000 euros au titre de l'indemnisation du préjudice subi du fait de la violation de l'obligation post-contractuelle de non-concurrence dont elle s'est rendue responsable,

- à payer à la société X la somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et également aux entiers dépens de l'instance.

Par jugement du 17 juin 2016, le tribunal de commerce du Mans, au visa des articles 1134, 1142, 1315, 1316, 1382 et 1993 du code civil, a :

- débouté la SARL X de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- condamné la SARL X à payer à la SARL Y la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SARL X aux entiers dépens,

- débouté les parties de toutes leurs autres demandes, fins et conclusions.

Pour se déterminer ainsi, le tribunal a considéré que la SARL X avait manqué d'honnêteté envers son franchisé en facturant des redevances à 2,50 % alors que le contrat de franchise prévoyait une redevance égale à 1,50 %, en retenant au titre des commissions de Ducroire, une somme supérieure à 500.000 euros, soit environ 10 % des sommes collectées au titre des RFA, alors qu'aucune clause du contrat ne prévoyait ces commissions et en facturant des redevances au titre de « hébergement site internet et Okaz M... » non prévues par une clause dudit contrat.

Il a considéré en outre que la SARL X était défaillante à rapporter la preuve des sommes réclamées à la défenderesse, en précisant que le rapport d'expertise ne constituait pas une preuve certaine de cette créance et en retenant que la dette inscrite au passif du bilan de Y avait fait l'objet d'une compensation en vertu des dispositions de l'article 1290 du code civil et de l'admission définitive de la créance au passif de la procédure collective de la société X.

Il a par ailleurs constaté que la SARL Y avait immédiatement, après la fin du contrat de franchise, fait changer l'enseigne et ses moyens graphiques, en modifiant le nom de « XX » par « B... Express » et considéré que la SARL X ne démontrait pas qu'il puisse y avoir confusion entre les deux enseignes.

Enfin, il a considéré que la clause de non-concurrence prévue au contrat de franchise n'était pas recevable en application du règlement européen n° 2790/1999 du 22 décembre 1999.

Par déclaration reçue au greffe le 08 juillet 2016, la SARL X et Maître A ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde de la SARL X ont interjeté appel de cette décision, intimant la SARL Y.

La SARL X et Maître A ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde, d'une part, et la SARL Y, d'autre part, ont conclu.

Une ordonnance du 26 mars 2018 a clôturé l'instruction de l'affaire.

Par conclusions de procédure du 27 mars 2018, la SARL X a demandé au président de la cour d'appel d'Angers la révocation de l'ordonnance de clôture ou à défaut que les dernières écritures de la SARL Y et ses pièces 15 à 17, notifiées le 22 mars 2018, soient déclarées irrecevables.

Par ordonnance du 29 mars 2018, le président de la chambre commerciale a dit qu'il n'entrait pas dans ses pouvoirs de révoquer ladite ordonnance et de statuer sur la demande subsidiaire d'irrecevabilité.

Par arrêt avant dire droit du 27 novembre 2018, la cour a révoqué l'ordonnance de clôture du 26 mars 2018, ordonné la réouverture des débats afin de permettre à la SARL X de discuter des dernières conclusions et pièces de la SARL Y déposées le 22 mars 2018 et d'y répondre si elle l'estimait utile, a renvoyé l'affaire, a réservé le surplus des demandes et les dépens.

Une ordonnance du 4 novembre 2019 a clôturé l'instruction de l'affaire.

La SARL X et Maître A ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde demandent à la cour, au vu des articles 1134, 1142, 1156, 1161 et 1382 anciens du code civil, de l'article 700 du code de procédure civile et du contrat de franchise du 15 novembre 2000, de :

- recevoir la société X en son appel principal et la déclarer bien fondée,

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

statuant à nouveau,

* Sur les demandes de la société X

- condamner la SARL Y à lui payer la somme de 33.088,83 euros au titre des redevances dues dans le cadre du contrat du 15 novembre 2000, avec intérêt au taux légal à compter de la décision à intervenir,

- condamner la SARL Y à lui payer la somme de 64.705 euros au titre de l'avance en compte courant d'associé, avec intérêt au taux légal à compter de la décision à intervenir,

- juger que la SARL Y n'a pas respecté ses obligations post-contractuelles de dépersonnalisation et de non-concurrence et a commis des actes de parasitisme en continuant, pendant 5 ans à la suite de la rupture du contrat du 15 novembre 2000,

- condamner la SARL Y à lui payer la somme de 100.000 euros au titre de l'indemnisation du préjudice subi du fait du parasitisme économique dont la SARL Y s'est rendue responsable,

- vu le document de l'INPI versé en pièce 26, débouter la SARL Y des moyens de défense afférents à l'irrecevabilité prétendue, condamner la SARL Y à lui payer la somme de 20.000 euros, au titre de l'indemnisation du préjudice subi du fait de la violation de l'obligation post-contractuelle de non-concurrence dont la SARL Y s'est rendue responsable,

- juger qu'elle n'a pas commis un abus de droit d'agir en justice,

- débouter la SARL Y de sa demande en paiement à son encontre de la somme de 15.000 euros pour procédure abusive,

* Sur la créance déclarée au passif de la société X et les autres demandes de la société Y

- rejeter la créance de la SARL Y de 150.000 euros déclarée au passif de la SARL X et juger n'y avoir lieu à créance,

- subsidiairement, vu le rapport d'expertise, fixer au maximum à la somme de 4.951,53 euros la créance de la SARL Y au titre des RFA,

- juger que la SARL Y ne présente aucune demande, fin ou conclusion aux fins de fixation de sa créance déclarée,

- débouter la SARL Y de l'ensemble de ses demandes,

en tout état de cause,

- condamner la SARL Y à verser à la SARL X la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la SARL Y aux entiers dépens.

La SARL Y demande à la cour, sur le fondement des articles 1219, 1993 et 1353 du code civil, R. 624-3 du code de commerce, et au vu du contrat de franchise et du rapport d'expertise du 18 août 2011, de :

- confirmer, dans toutes ses dispositions, le jugement entrepris et y ajoutant,

en conséquence,

- débouter la SARL X de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

- constater l'admission de sa créance au passif de la SARL X sans contestation,

- condamner la SARL X à lui payer la somme de 150.000 euros dans les termes du plan de redressement judiciaire arrêté par le tribunal de commerce du Mans en date du 25 mars 2014,

- condamner la SARL X à lui verser la somme de 15.000 euros pour procédure abusive,

- condamner la SARL X à lui verser la somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la SARL X aux entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 954 du Code de procédure civile, à leurs dernières conclusions respectivement déposées au greffe :

- le 18 octobre 2019 pour la SARL X et Maître A ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de sauvegarde,

- le 13 mars 2019 pour la SARL Y.

MOTIFS DE LA DÉCISION

- Sur la demande en paiement par la société Y à la société X de la somme de 33 088,83 euros au titre des redevances restant dues

* Sur l'existence de l'obligation

La société X et Me A ès qualités soutiennent qu'ils sont fondés à solliciter la condamnation de la société Y à payer à la société X la somme de 33 088,83 euros correspondant aux redevances échues impayées à la date du 31 décembre 2010, en exécution du contrat de franchise conclu le 15 novembre 2000, tel que cela résulte des comptes entre les parties qui ont été vérifiés par l'expert judiciaire.

Si la société X admet avoir appliqué un taux de redevance erroné les premières années d'exécution du contrat de franchise, elle explique avoir imputé le trop-perçu au crédit de la société Y, sous forme d'abandon en 2007 d'une partie de sa créance au titre de son compte courant dans la société Y, auquel cette dernière a acquiescé, ainsi que cela a été confirmé par l'expert judiciaire.

S'agissant des sommes réclamées au titre des redevances forfaitaires facturées pour les services « hébergement site internet et Okaz M... », les appelants prétendent que ces prestations ont été intégrées au contrat, suivant avenant en date du 24 août 2004 qui prévoit que les prestations correspondantes seront facturées au franchisé en plus de la redevance proportionnelle.

Ils indiquent qu'au total les prestations ont été facturées à hauteur de 13 200 euros et précisent que dans son examen des sommes dues au titre des redevances, l'expert a exclu les facturations au titre des services liés aux sites internet.

Ils font également observer que s'il est vrai que la société X n'a pas été en mesure de fournir à L'expert tous les éléments comptables sollicités par lui, pour lui permettre de retrouver la trace de toutes les opérations de répartition entre les franchisés dépendant de son réseau des ristournes obtenues des fournisseurs, L'expert a eu tout ce qu'il lui fallait pour analyser la question des redevances dues par la société Y.

La société Y prétend que la société X ne rapporte pas la preuve de sa créance au vu des pièces versées aux débats, en soutenant qu'elle ne peut s'appuyer sur les conclusions du rapport d'expertise, alors que l'expert a lui-même exprimé des réserves importantes tenant au fait que la société X lui ait fourni des documents incomplets ou inexploitables qui ne lui ont pas permis de fournir une analyse avec la rigueur nécessaire.

Elle fait valoir en outre que la société X lui réclame des redevances facturées au titre des services « hébergement site internet » alors qu'aucune clause du contrat de franchise ne prévoit ces redevances, ni même l'avenant au contrat.

L'article 1315 du code civil dans sa version applicable au litige, soit celle antérieure à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 10 février 2016, dispose que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver.

En l'espèce, au soutien de sa demande en paiement, la société X verse notamment aux débats le contrat de franchise signé le 15 novembre 2000 et l'avenant en date du 24 août 2004, l'extrait du grand livre des tiers fournisseurs de la société Y pour la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2010 et le rapport d'expertise judiciaire.

Il apparaît que la somme de 33 088,83 euros réclamée est égale au montant inscrit dans les comptes de la société Y au titre du solde du compte fournisseur X arrêté à la date du 31 décembre 2010.

L'expert judiciaire, dont la mission incluait de faire le compte entre les parties en déterminant notamment les sommes dues par la société Y, a confirmé une dette de Y à l'égard de X, selon la comptabilité de la société Y au 31 décembre 2010, d'un montant de 33 088,83 euros.

Sur la base des dispositions du contrat de franchise signé le 15 novembre 2000 prévoyant que la redevance est égale à 1,5 % du chiffre d'affaires HT et des comptes annuels de la société Y qui lui ont permis de déterminer le montant du chiffre d'affaire HT, étant précisé qu'il a retenu la définition normée de la notion de chiffre d'affaire, l'expert judiciaire a arrêté le montant des redevances dues par la société Y à la société X sur l'ensemble de la période contractuelle, à 91 630,11 euros HT.

Par la consultation des grands livres de Y et particulièrement l'appréhension des montants figurant dans le compte 651000, déduction faite des facturations au titre des prestations liées aux sites internet que L'expert a évalué à 13 199,93 euros et de la somme de 36 923,59 euros correspondant à la rectification de l'erreur de calcul de la redevance sur les premières années, L'expert a arrêté le montant total des redevances facturées par la société X sur la même période, à 92 837,13 euros HT.

Pour déduire la somme de 36 923,59 euros, l'expert a pu vérifier les dires de la société X selon lesquels le calcul erroné des redevances des premières années sur la base d'un taux de 2,5 % au lieu de 1,5 %, a conduit à un trop perçu de redevance de 36 923,59 euros HT qui a néanmoins fait l'objet d'un abandon par la société X d'une créance en compte courant sur la société Y en 2007.

L'expert a expliqué avoir pu établir la réciprocité de cette opération de régularisation, en trouvant dans la comptabilité de la société X au compte 455600 un « remboursement de trop perçu » d'un montant de 44 160,54 euros (36 923,59 euros HT + TVA afférente) et dans la comptabilité de la société Y une écriture au compte 'produits sur exercice antérieur' d'un montant de 36 923,59 euros.

L'expert a établi une différence de 1 207,01 euros HT, soit 1 444 euros TTC entre les redevances contractuellement dues et les redevances facturées, montant qu'il a déduit des sommes dues par la société Y à la société X dans le compte final entre les parties figurant dans les conclusions de son rapport.

Les critiques formulées par la société Y à l'égard des conclusions de L'expert concernant le fait qu'il ait fondé ses conclusions sur des documents incomplets ou inexploitables communiqués par la société X ne sont pas pertinentes concernant sa mission de détermination des redevances dues par Y, dès lors que l'analyse de l'expert est claire et détaillée et s'appuie essentiellement sur des documents communiqués par la société Y.

Ainsi en définitive, il convient de considérer qu'au vu des pièces versées aux débats, la société X établit l'existence d'une créance à l'égard de la société Y au titre d'un solde restant sur les redevances égale à la somme de 31 644,83 euros (33 088,83 euros - 1 444 euros).

* Sur l'exception d'inexécution

La société Y s'estime fondée à opposer aux appelants l'exception d'inexécution, à raison d'un prétendu manquement grave de la SARL X à ses propres obligations contractuelles.

Elle soutient ainsi que la SARL X ne lui a pas retourné la totalité des ristournes accordées par les fournisseurs, en violation de l'article 6 du contrat de franchise.

Se prévalant d'un avis délivré au visa de l'article R. 623-3 du code de commerce, elle affirme que sa créance au titre de la restitution des RFA a été admise sans contestation au passif de la SARL X à hauteur de 150 000 euros, par décision du juge-commissaire.

Elle sollicite en conséquence de la cour qu'elle déboute la société X de sa demande de condamnation à lui régler le solde dû au titre des redevances.

La société X et Maître A en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société X soutiennent que la société Y ne peut se prévaloir de l'exception d'inexécution afin de se soustraire à son obligation de paiement des redevances, dès lors qu'elle n'établit pas que la société Y ait commis une inexécution grave de ses obligations contractuelles.

Ils font valoir que, contrairement à ce qui est soutenu par la société Y, la créance de 150 000 euros déclarée par la société Y à la procédure de sauvegarde au titre de prétendues RFA non réparties, n'a pas fait l'objet d'une admission définitive au passif de la société X.

Ils expliquent que la société X garantit à ses fournisseurs le paiement par ses franchisés des achats et qu'à ce titre elle perçoit une rémunération.

Ils considèrent que la part des ristournes de fin d'année rémunérant cette garantie n'a pas à être reversée aux franchisés.

Selon l'article 1184 du code civil, dans sa version applicable au litige, « la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où une des deux parties ne satisfera point à son engagement.

Dans ce cas, le contrat n'est point résolu de plein droit.

La partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté a le choix ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible ou d'en demander la résolution avec dommages intérêts. »

En application de ce texte, l'interdépendance des obligations réciproques résultant d'un contrat synallagmatique permet à l'une des parties poursuivie en exécution de ses obligations d'opposer à l'autre l'inexécution de ses obligations corrélatives.

L'inexécution par le cocontractant doit être suffisamment grave pour qu'elle puisse être de nature à affranchir celui qui s'en prévaut de ses obligations corrélatives.

L'exception d'inexécution opposée par une partie pour refuser de remplir ses obligations tant que son cocontractant n'aura pas fourni la contre prestation attendue, suspend mais n'éteint pas le rapport obligataire, à la différence de la compensation qui est un mode d'extinction de l'obligation à hauteur de la plus faible des deux dettes réciproques liant les mêmes parties.

En l'espèce, l'inexécution dont se prévaut la société Y envers la société X est issue du contrat de franchise conclu le 15 novembre 2000.

Il y a lieu de souligner que le contrat de franchise a pris fin à son terme le 31 décembre 2010, à défaut de renouvellement, de sorte qu'il n'était plus en cours au moment où l'action en paiement des redevances a été introduite par la société X devant le tribunal de commerce.

Il ne s'agit donc pas pour la société Y d'obtenir en invoquant l'exception d'inexécution, de faire en sorte que la société X exécute une contre prestation attendue dans le cadre de la poursuite du contrat de franchise, mais de s'opposer à la demande en paiement au motif que la société X n'aurait pas, dans le cadre des comptes entre les parties, réparti l'intégralité des ristournes accordées par les fournisseurs aux distributeurs et perçues pour son compte sur la période de 2003 à 2010, étant précisé qu'en cause d'appel, la société Y n'invoque pas la compensation.

La société Y reproche à la société X exclusivement la violation par celle-ci de l'article 6 du contrat de franchise traitant de la question de l'approvisionnement du franchisé et prévoyant (article 6.3) que « le franchisé donne mandat au franchiseur de percevoir pour son compte, les ristournes que les fournisseurs accorderaient aux distributeurs, à charge pour le franchiseur de les répartir intégralement entre les franchisés, au prorata de leurs achats respectifs auprès desdits fournisseurs ».

La société Y sur laquelle pèse la charge de la preuve de l'inexécution par la société X de ses obligations et de la gravité de celle-ci, se prévaut de l'admission définitive de sa créance à la procédure de sauvegarde de la société X, pour un montant de 150 000 euros, déclarée au titre de la cote part des RFA à reverser par la société X au franchisé en application des dispositions du contrat de franchise.

Au soutien de ses dires, elle verse aux débats un « avis d'admission de créance sans contestation » adressé le 22 mai 2013 par le greffe du tribunal de commerce du Mans à Me Nosten, avocat ayant déclaré pour le compte de la société Y le 4 décembre 2012, entre les mains de Me W, mandataire judiciaire, une créance d'un montant de 150 000 euros au titre de la cote part des RFA à reverser par la société X au franchisé.

L'examen de cet avis révèle néanmoins qu'après la mention aux termes de laquelle le greffier informe le destinataire que « le juge commissaire de la procédure de sauvegarde de la société X, a admis la créance de la SARL Y pour le montant et la qualification suivante : « il est indiqué les éléments suivants :

« - à titre chirographaire : 150 000 euros

- observations figurant sur la liste des créances : COTE PART DES RFA, PROCEDURE EN COURS. »

En outre, il ressort de la décision du juge commissaire visée dans l'avis d'admission adressé par le greffier le 22 mai 2013, en date du 16 mai 2013, versée aux débats par la société X, que le juge commissaire à la procédure de sauvegarde de la société X a constaté qu'une instance était en cours.

L'ordonnance du juge commissaire renvoie en effet expressément pour le contenu de ses décisions relatives à la vérification des créances, aux indications figurant dans l'état des créances annexé à l'ordonnance, lequel mentionne en page 8, créancier n°26, SARL Y, que la créance déclarée de 150 000 euros au titre de la cote part des RFA est admise à titre provisionnel comme faisant l'objet d'une procédure en cours.

La société Y ne produit par ailleurs aucune pièce de nature à justifier que l'état des créances aurait, conformément à l'article R. 624-9 du code de commerce, été complété ultérieurement par une décision rendue à son profit.

L'admission définitive d'une de la créance de la Y au passif de la procédure de sauvegarde de la société X à hauteur de 150 000 euros au titre de la cote part de RFA revenant à la société Y, n'est ainsi pas établie.

L'expert judiciaire a, à partir de l'examen des comptes de charges (609700 et 609710) et de produits (707000 et 707001) de la comptabilité de la société X, arrêté le montant global des RFA obtenues des fournisseurs par la société X pour l'ensemble des franchisés, pour la période d'exécution du contrat de franchise (2000/2010), à 5 757 015 euros HT.

Il a également retenu que le montant global des RFA reversé sur cette période à l'ensemble des franchisés, s'élève à 5 266 780 euros.

Il s'en dégage une différence de 490 237 euros HT dont la société X soutient qu'elle correspond à sa rémunération à compter de 2003 du service consistant à garantir aux fournisseurs le paiement par les franchisés de leurs achats (commissions Ducroire).

L'article 6 du contrat de franchise sus-rappelé prévoit expressément une répartition de l'intégralité des RFA accordés par les fournisseurs entre les franchisés.

Il n'a pas été modifié jusqu'à son terme.

La société X ne verse en outre aux débats aucune pièce concernant ses accords avec les fournisseurs tant sur le principe de la rémunération du service de garantie, que sur ses modalités d'application, ou qui établirait l'existence d'une information préalable et d'un accord des franchisés.

Le défaut de reversement des RFA perçus par la société X pouvant être reproché à cette dernière par la société Y ne peut néanmoins s'établir qu'à concurrence de la cote part due à cette dernière, fonction de son poids au regard des achats des franchisés aux fournisseurs.

La société Y ne produit aucun justificatif concernant la liquidation de sa créance de restitution de la cote part des RFA au montant de 150 000 euros qu'elle avance correspondant au montant déclaré à la procédure de sauvegarde et se contente d'affirmer que les conclusions du rapport d'expertise ne peuvent être retenues dès lors que L'expert lui-même a indiqué ne pas avoir pu se livrer avec toute la rigueur nécessaire à l'analyse de la question de la ventilation des RFA au profit de la société Y du fait des documents inexploitables et incomplets communiqués par la société X.

Si L'expert n'a pu effectivement calculer avec précision la part théorique qui devait revenir à la société Y sur les RFA accordées par les fournisseurs, il a néanmoins pu analyser sur toute la période considérée le poids que représentait la société Y dans l'ensemble des franchisés, soit en moyenne 2%, vérifier la cohérence de celui-ci avec le montant reversé à la société Y sur celui des RFA perçues qu'elle a cru devoir effectivement répartir entre franchisés et évaluer à partir de ces éléments la somme supplémentaire qui aurait dû revenir à la société Y au titre de la répartition de la totalité des RFA, à 11 720 euros TTC ( 2% x 490 337 euros HT + TVA), ce qui est plus de 10 fois moins que le montant de l'obligation de paiement alléguée par la société Y au soutien de son exception d'inexécution.

Par ailleurs, alors qu'il ressort de ce qui précède que la société Y n'a pas respecté son obligation contractuelle essentielle de paiement des redevances et qu'elle reste devoir à ce titre 31 644,83 euros, soit environ trois fois plus que l'évaluation par L'expert judiciaire du reliquat de RFA qui n'aurait pas été reversé à la société Y pendant la durée d'exécution du contrat, il n'est pas reproché à la société X d'autre violation contractuelle que le non-reversement de l'intégralité des RFA perçues.

La société Y ne prétend pas ne pas avoir bénéficié jusqu'au terme du contrat de franchise non renouvelé (31 décembre 2010) des prestations essentielles incombant au franchiseur en application du contrat, telles l'autorisation de faire usage de la marque « XX » en ses éléments dénominatifs et figuratifs, ainsi que la mise à disposition de son savoir-faire et de sa méthode de commercialisation d'une gamme de produits dans le domaine de la moto et des accessoires moto pour l'exploitation d'un magasin, de telle sorte qu'elle aurait été empêchée d'exercer normalement son activité.

Ainsi en définitive, au vu de l'ensemble de ces éléments, le non-reversement d'un reliquat de RFA par la société X à la société Y qui a été évalué par L'expert à 11 720 euros pour toute la période d'exécution du contrat, ne présente pas un caractère de gravité suffisant pour faire obstacle à la demande en paiement de la société X.

Par suite, le jugement critiqué sera infirmé en ce qu'il a rejeté la demande en paiement formé par la société X à l'encontre de la société Y et statuant à nouveau, la société Y sera condamnée à payer à la société X la somme de 31 644,83 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.

- Sur la demande en paiement par la société Y à la société X de la somme de 64 705 euros au titre de l'avance en compte courant d'associé

La société X et Me A ès qualités soutiennent que la SARL Y se trouve redevable à l'égard de la société X de la somme de 64.705 euros au titre du remboursement des avances en compte courant d'associé, telles qu'elles apparaissent sur les états financiers de l'intimée arrêtés au 31 décembre 2013.

Ils rappellent qu'en l'absence de convention particulière ou statutaire, le compte courant d'associé doit être remboursé à l'associé titulaire dès lors que celui-ci en fait la demande.

Au soutien de sa demande, la société X verse aux débats les statuts de la société Y, les comptes annuels de la société Y au 31 décembre 2009, au 31 décembre 2011 et au 31 décembre 2013 ainsi que le rapport d'expertise judiciaire.

Dans la comptabilité de Y, le compte courant X apparaît créditeur à hauteur de 64 705 euros.

De l'analyse néanmoins des comptes des deux sociétés effectuée par L'expert judiciaire, ce dernier retient que la créance de X sur Y au titre du compte courant s'établit à 61 339 euros, soit 68 575 euros apparaissant dans la comptabilité de X au 31 décembre 2010, dont à déduire 7 236 euros correspondant au montant de la TVA appliquée au montant HT des redevances facturées à tort à la société Y, régularisé en 2007 par un abandon de créance en compte courant calculé sur la base du montant HT des redevances perçues en trop.

Au vu des pièces versées aux débats, il y a lieu de considérer que la société X justifie d'une créance au titre de son compte courant dans la société Y d'un montant de 61 339 euros.

La décision critiquée sera dès lors infirmée en ce qu'elle a retenu que la société X ne justifiait pas de sa créance et statuant à nouveau, la société Y sera condamnée à payer à la société 100% la somme de 61 339 euros.

- Sur la demande de condamnation à paiement de la somme de 100 000 euros en réparation du préjudice subi du fait du parasitisme économique commis par la société Y

- Sur la prétendue irrecevabilité de la demande

La société Y conclut à l'irrecevabilité de la demande d'indemnisation du préjudice prétendument subi du fait des actes de parasitisme économique qui lui sont imputés par la SARL X, pour défaut d'intérêt à agir de cette dernière, au motif qu'il ressort des pièces versées aux débats, que la société 100% a cédé tous ses droits d'auteur, dont la marque figurative « XX » à une société tierce.

Elle souligne que la notice produite par l'appelante n'est pas à jour et que le site internet de l'INPI mentionne bien une société tierce en tant que déposant de ladite marque et demandeur à son enregistrement.

En réponse, la société X et Me A ès qualités affirment que la marque semi-figurative et non figurative visée par la demande au titre du parasitisme reproché à la société Y, enregistrée sous le n°3124365, appartient toujours à la société X, tel que cela résulte des pièces versées aux débats.

Ils font remarquer que les pièces versées récemment par la SARL Y renvoient à une autre marque semi-figurative n° 4241750.

Il y a lieu de relever que la demande indemnitaire tendant à de prétendus actes parasitaires de la société Y qui auraient été commis après la cessation du contrat de franchise, ne repose pas exclusivement sur une prétendue utilisation illicite de la marque semi-figurative « XX » ; les appelants alléguant également de l'utilisation par la société Y d'autres signes distinctifs, telle l'enseigne ou le nom commercial.

En outre, au soutien de son irrecevabilité de la demande pour défaut d'intérêt, la société Y verse aux débats une notice extraite des bases de données de l'INPI en date du 12 mars 2019 concernant le dépôt d'une marque semi-figurative « XX » le 19 janvier 2016 par la société Cycom International, ainsi que le justificatif de sa publication le 19 janvier 2016.

L'examen de ces documents révèle toutefois que la marque semi-figurative dont s'agit a été enregistrée sous le numéro 4241750.

Or, le contrat de franchise contient un exposé préalable dans lequel il est mentionné que la société X est propriétaire de la marque « XX » enregistrée à l'INPI sous le numéro 98 734215, ainsi que du logo et droits sur l'enseigne, dessins et modèles qui lui sont associés.

Et la société X et Me A ès qualités ont versé aux débats une notice extraite des bases de données de l'INPI en date du 15 janvier 2019 concernant le dépôt le 2 octobre 2001 d'une marque semi-figurative « XX » par la société X, enregistrée sous le n° 3124365, renouvelée sans limitation le 17 juin 2011, qu'ils visent dans leur demande.

La marque semi-figurative ainsi déposée par la société X reproduite en couleur sur la fiche, ne correspond pas à celle sur la fiche produite par la société Y.

Au vu des pièces versées aux débats, il n'est donc pas justifié que la société X aurait cédé ses droits sur la marque semi-figurative « XX » mentionnée dans le contrat de franchise ou visée par les conclusions des appelants.

Ainsi en définitive, l'exception d'irrecevabilité de la demande indemnitaire pour défaut d'intérêt de la société X sera rejetée.

- Au fond sur la demande :

La société X et Me A ès qualités prétendent rapporter la preuve d'agissements parasitaires commis par la SARL Y.

Ils expliquent qu'en application du contrat de franchise, la société Y avait adapté son fonds de commerce pour respecter les signes de ralliement propres au réseau XX.

Ils soutiennent qu'en dépit des prescriptions de l'article 11.2 du contrat de franchise, la société Y n'a pas procédé à la dépersonnalisation de son fonds de commerce dès après la fin du contrat de franchise.

S'appuyant sur des captures d'écran du site internet édité par la société Y, ils affirment en outre qu'il existe une confusion visuelle, phonétique et conceptuelle entre d'une part la marque et l'enseigne « XX » et d'autre part la marque et l'enseigne de « YY » exploitées par la société Y après la fin du contrat de franchise.

Ils considèrent que ces similarités sont telles qu'elles créent un risque de confusion entre le réseau XX et le fonds exploité par la société Y après le non-renouvellement du contrat de franchise.

Ils soutiennent que la société Y a délibérément entretenu cette confusion.

Ils affirment également en s'appuyant sur des captures d'écran de plusieurs sites internet, tels infogreffe, société.com et pagesjaunes.fr et sur la publication au BODAC d'une modification de la mention du nom commercial de la société Y, que ce n'est qu'en août 2015 que la société Y a cessé d'utiliser le nom commercial « XX » , tout en faisant observer que le 16 janvier 2019, sur le site société.com, la référence au réseau XX figurait encore sur la fiche relative à la société Y.

Ils soutiennent que la société Y s'est sciemment placée dans le sillage de la société X afin de tirer indûment profit des investissements consentis par celle-ci dans le cadre de l'exploitation du réseau XX et de sa notoriété.

Ils s'estiment en conséquence fondés à solliciter la condamnation de la SARL Y à verser une somme de 100.000 euros à titre de dommages intérêts.

La société Y s'oppose à la demande en affirmant avoir cessé toute utilisation de signes distinctifs de la franchise « XX » dès la fin du contrat de franchise.

Elle affirme ainsi avoir fait changer son enseigne posée sur le commerce dès décembre 2010, avoir demandé la modification de son enseigne commerciale auprès des pages jaunes en septembre 2011 et mis immédiatement à jour le site internet, de sorte qu'aucun lien ne puisse être fait entre la société Y et son ancienne franchise.

Elle estime qu'aucun risque de confusion entre la marque de l'appelante et la sienne déposée après la fin du contrat de franchise n'est caractérisé, pas plus qu'entre les enseignes.

Elle soutient que la SARL X ne prouve pas qu'elle se serait délibérément placée dans son sillage pour tirer indûment profit de ses investissements.

Elle ajoute que la SARL X ne justifie d'aucune perte de chiffre d'affaire provoquée par la confusion qu'elle allègue.

Elle conclut en conséquence au rejet de la demande adverse de dommages et intérêts pour actes de parasitisme économique.

Au terme convenu le 31 décembre 2010, le contrat de franchise conclu avec la société Y n'a pas été renouvelé.

En application des dispositions contractuelles, la société Y avait notamment pour obligation de « cesser immédiatement tout usage de la marque du savoir faire et des méthodes concédées ».

La société Y justifie avoir immédiatement après la fin du contrat fait changer son enseigne sur le magasin et avoir fait enregistrer une autre marque, à savoir « YY ».

La société X reproche à la société Y d'avoir sciemment enregistré une marque « YY » et utilisé une enseigne dont les similarités sur le plan visuel, phonétique et conceptuelle avec celles utilisées par le réseau exploité par la société X sont telles, qu'elles ont nécessairement créé auprès du consommateur d'attention moyenne, un risque de confusion entre les réseau XX et le fonds de commerce exploité par la société Y après sa sortie du réseau.

L'examen visuel comparatif des marques semi figuratives enregistrées par la société X (enregistrée sous le n°3124365) et postérieurement par Y révèle des différences notables concernant la forme (bandeau court en forme de flèche pour l'une, bandeau linéaire au milieu duquel est inséré un chronomètre pour l'autre), l'utilisation des couleurs (dominance de gris clair et jaune pour l'une, dominance de rouge et de gris foncé pour l'autre) et la présence pour la société Y d'un dessin représentant un chronomètre.

Sur le plan phonétique et conceptuel, les termes utilisés par la société Y se distinguent de ceux utilisés par X, en ce qu'ils renvoient à une rapidité du service plutôt qu'à l'expertise des intervenants, les 3 termes présents dans les deux marques ne renvoyant en outre à aucun concept original dans l'univers du commerce de pièces et accessoires de motos.

S'agissant de l'enseigne sur les magasins du réseau « XX » et sur celui exploité par la société Y, l'examen visuel comparatif révèle des différences notables concernant la forme (bandeau en forme de flèche comportant le nom « XX » sous lequel figure un slogan : « l'accessoire est essentiel » pour l'une, bandeau sur lequel figure juste le nom « YY » entouré à gauche du drapeau à damiers et à droite d'un dessin représentant un compteur pour l'autre), l'utilisation des couleurs (bandeau à dominance rouge et gris pour l'une, dominance de noir et blanc pour l'autre).

Ainsi, le risque de confusion entre les marques et les enseignes utilisées par le réseau XX et celles utilisées par la société Y pour l'exploitation du fonds n'est pas démontré.

La société X et Me A ès qualités allèguent par ailleurs d'actes de parasitisme commis par la société Y après la fin du contrat de franchise du fait de la présence de photographies sur le site internet de YY montrant le magasin tel qu'il se présentait lorsqu'il appartenait au réseau de franchisés, ainsi que de l'utilisation du nom commercial « XX » sur des sites internet de consultation d'informations sur la société Y.

Ils versent ainsi aux débats des captures d'écran effectuées le 20 mars 2015, soit près de 5 ans après la fin du contrat entre les parties, du site internet à l'adresse « www.YY.com », dont il ressort que sont effectivement présentes dans la rubrique « galeries photos » deux photos du magasin durant son exploitation sous la franchise « XX » sur lesquelles est clairement visible l'enseigne « XX ».

Les captures d'écran effectuées à cette même date des pages de résultats associées à la société Y sur les sites infogreffe.fr, société.com révèlent qu'il est mentionné en nom commercial : « XX- pro service pneu ».

La capture d'écran effectuée également à cette date de la page de résultat associée à la société Y, Colombes 92700 sur le site pagesjaunes.fr révèle que c'est le nom commercial « XX » qui apparaît avec l'adresse du fonds exploité par la société Y.

Neuf autres sites internet d'annuaires ou d'informations sur les horaires d'ouverture des commerces ou sur les commerces ayant trait aux motos, listés dans les conclusions de la société X, associent l'adresse du magasin exploité par la société Y au nom « XX ».

Ce n'est qu'en août 2015 que la société Y a fait supprimer le nom commercial de « XX » associé à sa raison sociale.

Une capture d'écran effectuée le 16 janvier 2019 du site société.com mentionne toutefois encore sous l'adresse la référence « XX ».

Il est ainsi établi que pendant 5 ans après le fin du contrat de franchise, la société Y a continué à faire usage du nom commercial « XX » dans des documents consultables par le public via internet et à afficher sur son site internet des photographies du magasin comportant les signes distinctifs visuels d'appartenance au réseau « XX », créant un risque de confusion dans l'esprit des internautes normalement attentifs effectuant une recherche sur la société Y, clients potentiels, qui pouvaient croire que cette société avait encore la qualité de franchisé du réseau.

Ces utilisations caractérisent des agissements parasitaires dans la mesure où par le risque de confusion dans l'esprit de la clientèle qu'elles ont créé, elles ont permis à la société Y de se placer dans le sillage du franchiseur et de profiter ainsi de la notoriété du réseau créé par lui auquel elle n'appartenait plus depuis fin 2010.

Elles sont nécessairement à l'origine d'un trouble commercial qui sera indemnisé au vu des éléments de la procédure, notamment au regard de la durée, par l'allocation d'une somme de 20 000 euros à titre de dommages intérêts.

La décision critiquée sera en conséquence infirmée et la société Y sera condamnée à payer à la société X la somme de 20 000 euros à titre de dommages intérêts.

- Sur la prétendue violation par la société Y de son obligation de non-concurrence post-contractuelle

La société X et Me A ès qualités sollicitent l'allocation d'une indemnité de 20.000 euros à raison de la prétendue violation par la société Y de son obligation de non-concurrence post-contractuelle prévu à l'article 12.2 du contrat de franchise.

En réponse à l'intimée, ils concluent à la validité de l'article 12.2, en faisant valoir qu'il prévoit une obligation de non-concurrence limitée à une durée d'un an à compter de l'expiration du contrat, à une zone déterminée correspondant à celle du territoire de la franchise et aux produits et services en concurrence avec ceux prévus dans le contrat.

Ils ajoutent que l'obligation de non-concurrence est justifiée par la nécessaire protection du savoir-faire confié par le franchiseur au franchisé et proportionnée à l'intérêt du franchiseur.

La société Y soutient que les appelants ne peuvent invoquer la clause de non-concurrence du contrat de franchise en ce que, faute d'être territorialement limitée comme l'impartit le règlement européen n° 2790/1999 du 22 décembre 1999, elle n'est pas valide.

Il est de principe que la validité d'une clause de non-concurrence post-contractuelle insérée dans un contrat de franchise n'est subordonnée qu'à la condition que cette clause soit limitée dans le temps et dans l'espace et qu'elle soit proportionnée aux intérêts légitimes du franchiseur au regard de l'objet du contrat.

En l'espèce, l'article 12 du contrat de franchise signé entre les parties prévoit que pendant la durée du contrat et l'année qui en suit le terme, à son expiration ou par anticipation, le franchisé s'interdit de s'intéresser directement ou indirectement à la distribution ou la vente de produits concurrents des produits de la franchise, c'est-à-dire qui leur soient identiques ou substituables dans l'esprit du consommateur.

La clause de non-concurrence insérée dans le contrat ainsi rappelée est certes limitée dans le temps (un an après le terme), mais elle ne remplit pas la condition cumulative de limitation dans l'espace, étant précisé qu'elle ne se réfère pas expressément au champ territorial protégé du franchisé défini dans l'annexe 1 du contrat (département Hauts de Seine).

C'est donc à juste titre que le tribunal de commerce du Mans a retenu que cette clause de non-concurrence post-contractuelle n'était pas valable et a rejeté en conséquence la demande de dommages intérêts formée par la société X pour violation de l'obligation de concurrence post-contractuelle.

- Sur la demande formée par la société Y de condamnation de la société X à lui payer la somme de 150 000 euros dans les termes du plan de redressement judiciaire arrêté par le tribunal de commerce du Mans en date du 25 mars 2014

La société Y fait valoir qu'elle a produit sa créance d'un montant de 150 000 euros à la procédure de sauvegarde de la société X et affirmant qu'il ressort des pièces qu'elle verse aux débats que sa créance a été admise sans contestation au passif de la société X par décision du juge commissaire, elle demande à la cour de constater cette admission de la créance sans contestation au passif de la société X et de condamner en conséquence la société X à lui payer l'intégralité de sa créance dans les termes du plan du 25 mars 2014.

La société X et Me A ès qualités contestent l'admission de manière définitive de la créance déclarée par la société Y et sollicitent en conséquence que la cour déboute cette dernière de sa demande.

Aux termes du dispositif de leurs conclusions, ils demandent également à la cour de juger que la société Y ne présente aucune demande de fixation de sa créance déclarée.

Ils demandent encore à la cour de rejeter la créance de la société Y de 150 000 euros déclarée au passif de la société X et de juger qu'elle n'a aucune créance ; subsidiairement de fixer au maximum à 4 951,53 euros la créance de la société Y.

Il résulte des pièces versées aux débats que le 4 décembre 2012, la société Y a déclaré entre les mains du mandataire judiciaire une créance de 150 000 euros au titre de la cote part des RFA restant à reverser au franchisé, née antérieurement à l'ouverture de la procédure de sauvegarde de la société X, en joignant l'ordonnance du 29 mars 2012 et les conclusions d'appel contre cette décision.

Par décision en date du 16 mai 2013, le juge commissaire à la procédure de sauvegarde de la société X a constaté qu'une instance était en cours, étant précisé qu'il ne pouvait s'agir de la procédure en paiement introduite en 2015 devant le tribunal de commerce du Mans par la société X, ayant donné lieu au jugement critiqué.

Dans ces conditions, la cour ne peut pas prononcer condamnation au profit de la société Y, de la société X à paiement de la somme de 150 000 euros au titre de la cote part des RFA restant à reverser au franchisé, dans les termes du plan de redressement du 25 mars 2014.

La demande de la société Y sera donc déclarée irrecevable.

La société Y n'a pas demandé que la cour fixe sa créance déclarée au passif de la procédure collective de la société X, considérant à tort qu'elle avait fait l'objet d'une admission sans contestation par le juge commissaire.

Par suite, la demande de rejet de la créance déclarée par la société Y est sans objet.

Au surplus, il n'appartient pas à la cour, dans le cadre d'une instance en paiement introduite par la société X, de rejeter une créance déclarée au passif de la procédure de redressement judiciaire de la société X relevant de la procédure de vérification des créances et pour laquelle il a été retenu par le juge commissaire l'existence d'une instance en cours qui n'est pas la présente instance.

- Sur la demande de dommages intérêts pour procédure abusive

Eu égard au sort réservé aux demandes des appelants, l'appel ne sera considéré comme ayant été formé de manière abusive par la société X et Me A ès qualités et la demande de dommages intérêts de la société Y sera en conséquence rejetée.

- Sur les dépens et frais irrépétibles

La décision critiquée sera infirmée en ses dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles.

Partie perdante, la société Y sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel et sera condamnée à payer à la société X une indemnité de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la demande de dommages intérêts formée par la société X au titre de l'indemnisation du préjudice subi du fait de la violation de l'obligation post contractuelle de non concurrence par la société Y ;

INFIRME le jugement entrepris pour le surplus des dispositions critiquées ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

CONDAMNE la société Y à payer à la société X la somme de 31 644,83 euros au titre des redevances échues impayées, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

CONDAMNE la société Y à payer à la société X la somme de 61 339 euros au titre de l'avance en compte courant d'associé, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

REJETTE l'exception d'irrecevabilité de la demande de dommages intérêts formée par la société X au titre de l'indemnisation du préjudice subi du fait du parasitisme économique, tirée du défaut d'intérêt à agir de la société X,

CONDAMNE la société Y à payer à la société X la somme de 20 000 euros à titre de dommages intérêts en réparation du préjudice subi du fait du parasitisme économique imputable à la société Y ;

DECLARE IRRECEVABLE la demande formée par la société Y de condamnation de la société X à lui payer la somme de 150 000 euros dans les termes du plan de redressement judiciaire arrêté par le tribunal de commerce du Mans en date du 25 mars 2014 ;

REJETTE la demande de la société Y de dommages intérêts pour procédure abusive ;

CONDAMNE la société Y aux dépens de première instance et d'appel ;

CONDAMNE la société Y à payer à la société X une indemnité de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.