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Décisions

CA Amiens, ch. économique, 5 novembre 2020, n° 19/07201

AMIENS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Plastil Menuiserie Nord (SAS), Selarl Bally MJ (ès qual.)

Défendeur :

APMC (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Avocats :

Me Poilly, Me Hiest Noblet, Me Verfaillie, Me Boizard, Me Le Roy

T. com. Amiens, du 27 juin 2017

27 juin 2017

DECISION

La SAS Plastil menuiserie nord (PMN) spécialisée dans la fabrication d'éléments en matières plastiques et PVC et la SARL APMC spécialisée dans la vente de menuiseries et fermetures en bois, alu PVC et mixte ont passé à effet au 1er octobre 2011 un contrat à durée indéterminée d'agent commercial, la SAS PMN confiant à la SARL APMC sa représentation sur les départements 72, 49, 37 et la moitié du 61 moyennant commissions sur tous ordres transmis par cette dernière.

Par courrier recommandé du 3 décembre 2014 la société PMN a suspendu toute livraison en raison d'impayés sur des factures de 2014.

Par courrier recommandé du 9 décembre 2014, la société APMC a pris acte de la rupture définitive des relations entre les parties à l'initiative de la SAS PMN.

Par courrier recommandé du 18 mars 2015 la SARL APMC a mis en demeure la SAS PMN de lui régler une somme de 32 000 en réparation d'un préjudice matériel en lien avec la perte d'un client et la somme de 14 775,49 au titre de commissions et services après-vente.

Par courrier du 13 juillet 2015, la société PMN a demandé le paiement à la société APMC de factures à hauteur de 37 045,87 outre pénalités contractuelles et indemnité pour frais de recouvrement.

Se prévalant de ces impayés, la SAS PMN a par acte d'huissier du 29 septembre 2015 attrait en paiement la SARL APMC devant le tribunal de commerce d'Amiens, qui recevant la demande reconventionnelle de la SAS APMC en paiement de commissions et d'une indemnité de rupture, a par jugement du 27 juin 2017 après compensation des sommes réciproquement dues (37 045,47 à PMN pour factures, 7 214,14 et 48 000 à APMC pour commissions et indemnité de rupture) condamné la SAS PMN à payer à la SARL APMC la somme de 18 171,67 avec intérêts au taux légal à compter du jugement, 1 500 au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens.

La société PMN a relevé appel de cette décision par déclaration du 7 juillet 2017. Par jugement du 14 mai 2018 la SAS PMN a été mise en liquidation Maître X étant désigné en qualité de liquidateur.

Par ordonnance du 10 septembre 2018 l'affaire a été radiée du rôle et réinscrite le 2 octobre 2019.

Par conclusions d'intervention volontaire remises le 3 octobre 2019, auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé des moyens et prétentions la SELARL Bally MJ prise en la personne de Maître X liquidateur judiciaire de la société PMN demande à la cour de :

- donner acte de son intervention volontaire dans la présente procédure;

- donner acte à la SELARL Lexavoué Amiens Douai qu'elle se constitue par les présentes conclusions dans l'intérêt de la SELARL Bally MJ prise en la personne de Maître X es qualités de mandataire liquidateur de la société PMN et continue d'occuper sur les présentes et leurs suites et sollicite la réinscription de l'affaire au rôle ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société APMC à payer à la société PMN la somme de 37 045,47 au titre des factures et en ce qu'il a débouté la société APMC de ses demandes en règlement de la somme de 14 775,49 au titre des prestations de services après-vente et de la somme de 32 000 en dommages et intérêts au titre de la perte d'un client ;

- d'infirmer le jugement en ce qu'il a débouté la SAS PMN de la demande en paiement d'une facture du 23 décembre 2014 pour 11 628,66 , de la clause pénale des intérêts contractuels et de l'indemnité pour frais de recouvrement, de son indemnité de résiliation en l'absence de toute pièce justificative en application de l'article 9 du code de procédure civile, du chef de l'imputabilité de la résiliation du contrat d'agent commercial à la société PMN, des demandes d'indemnisation de la société PMN résultant de la perte de clients consécutive à la résiliation du contrat d'agent commercial ;

Statuant à nouveau, elle demande de :

- condamner la société APMC à payer à la société PMN la somme de 11 628,66 avec intérêts au taux contractuel majoré de 3 points prévu par l'article 8 des conditions générales de vente à compter de son échéance ;

- condamner la société APMC à payer à la société PMN la somme de 7 301,12 au titre de la clause pénale prévue par l'article 8 alinéa 2 des conditions générales de vente ;

- assortir le paiement des 12 factures impayées d'intérêts au taux légal majoré de 3 points prévus par l'article 8 des conditions générales de vente à compter de l'échéance de chacune des factures ;

- condamner la société APMC à payer à la société PMN la somme de 480 au titre de l'indemnité pour frais de recouvrement prévue par l'article L. 441-3 du code de commerce ;

- dire que la rupture du contrat d'agent commercial du 11 octobre 2011 prononcée par la société APMC seule n'est nullement imputable à la moindre faute commise par la société PMN ;

- débouter en conséquence la société APMC de sa demande au titre de l'indemnité de résiliation du contrat d'agent commercial ;

En toute hypothèse,

- débouter la société APMC de son appel incident ;

- condamner la société APMC à payer les sommes suivantes :

103 402 au titre de la perte du client ESB sur la base d'une marge annuelle de 51 600 ;

17 915 au titre de la perte du client Volseley consécutive à la résiliation du contrat APMC ;

10 441 au titre de la perte du client Picouleau consécutive à la résiliation du contrat APMC ;

7 804,72 TTC au titre des marchandises fabriquées par la société PMN mais refusées par ESB à raison d'erreur de commande de la société APMC ;

10 000 à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive au paiement des factures ;

15 000 à titre d'indemnité de procédure sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Aux entiers dépens de première instance comme d'appel dont recouvrement pour ces derniers au profit de la SELARL Lexavoué Amiens Douai en application de l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions remises le 27 janvier 2020, auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé des moyens et prétentions la société APMC demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a :

- déclaré la rupture du contrat d'agent commercial de la société APMC imputable à la société PMN ;

- condamné la société PMN à verser à la société APMC la somme de 7 217,14 au titre des commissions dues sur la période du mois de novembre 2014 au mois de janvier 2015,

- condamné la société APMC au paiement de la somme de 37 045,47 au titre des 12 factures émises par la société PMN entre le 19 mars et le 23 décembre 2014 ;

D’infirmer le jugement pour le surplus et statuant à nouveau de :

- condamner la société PMN au paiement :

De la somme de 96 000 au titre de l'indemnité compensatrice de rupture du contrat d'agent commercial ;

Des intérêts au taux légal sur la somme de 7 217,14 correspondants aux commissions dues à compter du 5 août 2015 ;

De la somme de 160 en application de l'article L. 441-3 du code de commerce ;

De la somme de 5 000 sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile > des entiers dépens de l'instance qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Une ordonnance de clôture de l'instruction a été rendue le 12 mars 2020.

Par une note en délibéré en date du 5 octobre 2020, tenant compte de ce que la SAS PMN a été mise en liquidation par jugement du 14 mai 2018 et que la SELARL Bally MJ a été désignée en qualité de liquidateur de cette dernière, la cour a invité la SARL APMC à produire en délibéré avant le 15 octobre 2020 la copie de la déclaration de créance faite à Maître X liquidateur de la société PMN et à conclure en cas de production ou de défaut de production de ce document sur le sort de la créance de la SARL APMC.

La SARL APMC n'a pas déféré à la demande de la cour.

La SELARL Bally agissant en qualité de liquidateur de la SAS PMN s'en tient à ses écritures.

SUR CE :

Sur l'intervention volontaire de la SELARL Bailly MJ prise en la personne de Maître X liquidateur judiciaire de la société PMN

Aux termes de l'article 325 du code de procédure civile, l'intervention n'est recevable que si elle se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant.

En l'espèce, la SAS PMN ayant été déclarée en liquidation judiciaire au cours de la présente instance, l'intervention volontaire de la SELARL Bailly MJ ès qualités de liquidateur judiciaire de la société, qui se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant, doit être déclarée recevable.

Sur les demandes en paiement de la SARL APMC à l'égard de la SAS PMN

Aux termes de l'article L. 622-21 du code de commerce :

I. Le jugement d'ouverture interrompt ou interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance n'est pas mentionnée au I de l'article L. 622-17 et tendant :

1° A la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d’argent ;

2° A la résolution d'un contrat pour défaut de paiement d'une somme d'argent.

II. Il arrête ou interdit également toute procédure d'exécution de la part de ces créanciers tant sur les meubles que sur les immeubles ainsi que toute procédure de distribution n'ayant pas produit un effet attributif avant le jugement d'ouverture.

En application de l'article L. 622-24 du code de commerce à partir de la publication du jugement, tous les créanciers dont la créance est née antérieurement au jugement d'ouverture, à l'exception des salariés, adressent la déclaration de leurs créances au mandataire judiciaire dans des délais fixés par décret en Conseil d'Etat.

Selon l'article L. 622-26 du même code, à défaut de déclaration dans des délais fixés par décret en Conseil d'Etat, les créanciers ne sont pas admis dans les répartitions.

La SARL APMC qui demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a, condamné la société PMN à lui payer la somme de 7 217,14 au titre des commissions dues sur la période du mois de novembre 2014 au mois de janvier 2015 et d'infirmer le jugement pour le surplus et en conséquence de condamner la société PMN au paiement de la somme de 96 000 au titre de l'indemnité compensatrice de rupture du contrat d'agent commercial, des intérêts au taux légal sur la somme de 7 217,14 correspondant aux commissions dues à compter du 5 août 2015, de la somme de 160 en application de l'article L. 441-3 du code de commerce, alors que la société PMN est en liquidation judiciaire et qu'il ne peut être prononcé de condamnation à son endroit en application de l'article L.622-21 du code de commerce est irrecevable en ses demandes.

Au surplus elle ne justifie pas avoir déclaré sa créance au moins à titre provisionnel ni avoir régularisé des conclusions par lesquelles elle demanderait la fixation de sa créance Dès lors l'éventuelle créance de la SARL APMC ne peut être fixée au passif de la société PMN.

Partant le jugement querellé ne peut être confirmé en ce qu'il a condamné la société PMN à payer à la société APMC la somme de 7 217,14 ni infirmé aux fins de voir condamner la société PMN au paiement de 96 000 au titre de l'indemnité compensatrice de rupture du contrat d'agent commercial, des intérêts au taux légal sur la somme de 7 217,14 correspondants aux commissions dues à compter du 5 août 2015, de la somme de 160 en application de l'article L. 441-3 du code de commerce.

Sur la demande en paiement des factures et accessoires de la société PMN

Les factures

Les parties s'entendent pour que le jugement querellé soit confirmé en ce qu'il a condamné la SARL APMC à payer à la SAS PMN la somme de 37 045,47 au titre de 11 factures, seul un différend persiste concernant la facture n° FF14120080 du 23 décembre 2014 d'un montant de 11 628,66.

L'appelante soutient que cette facture est due au motif qu'elle correspond à des pièces fabriquées sur mesure qu'elle a mis à disposition de la société APMC dans ses locaux.

L'intimée s'y oppose au motif que les termes du contrat n'ont pas été respectés et qu'elle a de ce fait rencontré d'importantes difficultés avec le client.

Il ressort des multiples échanges de courriels entre le 13 octobre 2014 et le 9 décembre 2014 que cette facture concerne une commande portant le nom de Y, que la SAS PMN s'était engagée à la livrer semaine 46/47, que durant la semaine 48 elle a informé la SAS APMC qu'elle ignorait la date possible de livraison finalement et qu'elle proposait au mieux une livraison semaine 51 (16 décembre). De ces courriels il est également établi que la SAS PMN a conditionné le 9 décembre 2014 la livraison de la commande au nom de Y au paiement des onze factures en instance et que c'est dans ces circonstances que les parties ont rompu toute relation commerciale.

En conditionnant l'envoi de la commande au paiement de onze factures en instance, alors que cette condition n'avait jamais été négociée lors de la conclusion du contrat, la SAS PMN a ajouté au contrat de vente unilatéralement une nouvelle condition qui ne peut s'imposer à la SARL APMC. A défaut d'avoir livré la commande dans les termes du contrat initial, la SAS PMN est mal venue à demander le paiement de la facture n ° FF14120080 au nom de Y, alors qu'elle a été défaillante à respecter les termes du contrat initial à savoir une livraison par elle semaine 46/47 et non une mise à disposition semaine 51 au mieux.

D'ailleurs dans l'assignation en paiement du 29 septembre 2015, la SAS PMN n'avait pas demandé le paiement de cette facture pourtant émise depuis le 23 décembre 2014 ni dans la demande en paiement préalable du 13 juillet 2015.

Partant le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté la SAS PMN de sa demande en paiement de la facture n° FF14120080 du 23 décembre 2014 d'un montant de 11 628,66.

Les accessoires

L'indemnité forfaitaire et les intérêts majorés

Concernant la demande en paiement de l'indemnité forfaitaire et des intérêts contractuels majorés de trois points l'appelante affirme que ces accessoires sont des modalités de paiement prévu à l'article 8 des conditions générales de vente et qu'elles s'imposent aux parties. Elle ajoute que l'indemnité pour frais de recouvrement prévue par la loi ne peut être écartée.

L'intimée s'y oppose au motif que les conditions d'application de l'article 8 des conditions générales de vente ne sont pas remplies et qu'elles sont par ailleurs confuses au point de devoir être interprétée en défaveur de la SAS PMN.

Aux termes de l'article 8 des conditions générales de vente de la société PMN intitulées 'modalités de paiement' sont ainsi rédigées : les factures sont payables à notre siège social. Les conditions de règlement de notre société sont : 30 jours fin de mois par LCR magnétique, date de la facture. Le paiement anticipé n'ouvre droit à aucun escompte. Tout défaut de paiement à l'échéance d'une seule de nos factures rend exigible le solde dû sur toutes les autres factures et entraîne de plein droit, à compter de la première interpellation adressée au client, un décompte d'intérêts moratoires au taux légal majoré de trois points.

Nonobstant de ce qui précède et sans préjudices d'éventuelles actions en réparation, l'exécution tardive par le client de son obligation de paiement, qu'elle qu'en soit la cause, donne lieu, sans mise en demeure préalable et conformément aux articles 1152, 1226 à 1233 du code civil, au versement d'une indemnité d'un montant forfaitaire égale à 15 % de la somme prépayée.

De ces conditions de règlement il se déduit que la société PMN accordait 30 jours de crédit à ses clients et qu'en contrepartie de cette facilité elle pouvait exiger en cas d'impayés le paiement d'intérêts majorés trois points et d'une indemnité forfaitaire de 15 % des sommes prépayées.

De l'aveu de la société PMN (page 10 des conclusions), la SARL APMC payait comptant par chèque et non à 30 jours par lettre de change. Néanmoins pour des raisons ignorées la SARL APMC a cessé de payer ses factures en 2014, les laissant impayées durant plus de trente jours à savoir en l'espèce durant plus d'une année.

Si la défaillance dans ses paiements de la société APMC est établie, l'indemnité forfaitaire de 15 % étant conditionnée à des prépaiements par lettre de change pour la calculer est en l'espèce mal fondée à défaut pour la société APMC d'avoir choisi ce mode de paiement en accord avec la société PMN depuis le début de leur relation contractuelle.

La demande de paiement d'une indemnité forfaitaire de 15 % des sommes pré payées est donc écartée.

En revanche, compte tenu de la durée des impayés le liquidateur de la société PMN est bien fondé à demander le paiement d'intérêts au taux légal majorés de trois points comme prévu à l'article 8 de façon claire mais seulement à compter du 13 juillet 2015 date de la première interpellation et non à compter de l'émission des factures comme demandé.

Partant le jugement est confirmé en ce qu'il a écarté la demande en paiement de l'indemnité forfaitaire de 15 % et infirmé en ce qu'il a écarté la demande en paiement des intérêts au taux légal majorés de trois points.

L'indemnité pour frais de recouvrement

La société PMN demande le paiement d'une indemnité forfaitaire de 40 par facture impayée en vertu de l'article L. 441-3 du code de commerce. La SARL APMC s'oppose à ce paiement à raison de la rupture fautive de cette dernière dans les relations contractuelles.

L'obligation de payer l'indemnité forfaitaire de 40 par facture impayée étant prévue depuis le 1 janvier 2013 en application de l'article L. 441-6 du code de commerce et D. 441-5 du même code et non de l'article L. 441-3 du code de commerce comme soutenu, il y sera fait droit pour 11 factures soit 440.

Partant le jugement est infirmé en ce qu'il a écarté la demande en paiement à ce titre.

Sur la rupture du contrat d'agent commercial

Sur l'imputabilité de la rupture

L'appelante soutient que la rupture du contrat d'agent commercial ne peut lui être imputée au motif qu'elle n'a commis aucune faute. Elle impute la rupture à la SARL APMC qui aurait cessé de passer toute commande à compter du 12 novembre 2014 et justifie la suspension de ses livraisons à raison d'importants impayés de factures.

L'intimée fait valoir que la société PMN est seule fautive dans la rupture des relations au motif qu'à raison des retards répétés dans les livraisons de commandes elle a rencontré d'importantes difficultés avec des clients à raison des retards pris dans les chantiers voir de leur annulation.

Aux termes de l'article L. 134-12 du code de commerce, en cas de cessation de ses relations avec le mandant, l'agent commercial a droit à une indemnité compensatrice en réparation du préjudice subi.

L'agent commercial perd le droit à réparation s'il n'a pas notifié au mandant, dans un délai d'un an à compter de la cessation du contrat, qu'il entend faire valoir ses droits.

Selon l'article L. 134-13 du même code, la réparation prévue à l'article L. 134-12 n'est pas due en cas de cessation du contrat provoquée par la faute grave de l'agent commercial.

Il appartient au mandant de rapporter la preuve de la faute qui se définit comme celle qui porte atteinte à la finalité commune du mandat d'intérêt commun et rend impossible le maintien du lien contractuel.

Il est admis que pour apprécier si les manquements de l'agent commercial à ses obligations sont suffisamment graves pour justifier la résiliation du contrat, les juges ont à prendre en compte toutes les circonstances de la cause intervenues jusqu'au jour de la décision.

Il s'évince également que l'agent commercial même s'il est à l'initiative de la rupture, a droit à l'indemnité compensatrice, à charge pour lui d'établir qu'elle est imputable au mandant et sauf à ce dernier à démontrer sa faute grave.

Dans ce cas la rupture est prononcée aux torts partagés.

Aux termes de l'article 4 du contrat passé entre les parties il est prévu que pendant la durée du contrat, la SARL APMC s'engage à consacrer ses meilleurs soins à la prospection de la clientèle pour le compte de la société PMN. En particulier il devra :

- se conformer aux conditions de vente et instructions données par la direction, les ordres ne devenant définitif qu'à la confirmation de PMN ;

- se conformer aux conditions générales de vente puis en matière d'ouverture de compte et de modalités de règlement ;

- effectuer en cas de difficultés avec la clientèle toute démarches appropriées pour leur règlement.

APMC organisera sa prospection à sa convenance. Afin d'assurer le suivi le plus efficace, APMC indiquera les éventuels envois de documentation ou échantillon à faire et communiquera à PMN.

Des pièces communiquées il est établi que la SARL APMC prospectait des clients notamment dans le département de la Sarthe, qu'elle leur vendait les produits de la société PMN que cette dernière lui facturait directement et non au client 'in fine'.

Si les parties s'entendent sur le fait que leurs relations commerciales ont cessé le 9 décembre 2014, il est observé qu’elles sont en désaccord sur l'imputabilité de la rupture

Il est également observé que la rupture a été consacrée par l'envoi d'un courrier recommandé par la société PMN à la SARL APMC la mettant en demeure de régler les 11 factures de 2014 et suspendant toute les livraisons et la réponse de la SARL APMC du 9 décembre 2014 par laquelle elle prend acte de la rupture des relations professionnelles aux torts de la société PMN en raison de son incapacité à communiquer avec les clients et plus particulièrement en raison du dossier Y pour lequel elle n'a pas pu garantir la semaine de livraison pour laquelle elle s'était engagée.

De multiples courriels échangés par les parties entre le 13 octobre 2014 et le 9 décembre 2014, il est établi que malgré des engagements fermes pris sur des dates de livraisons de fermetures pour des chantiers en cours dans le département de la Sarthe, la société PMN n'a pas tenu les délais au point de s'en excuser via son salarié Z dans un courriel du 12 novembre 2014 dans lequel ce dernier expose être désolé de ces désagréments. Ce courriel porte en référence les dossiers Y et ESB.

C'est dans ce contexte que pour tenter d'échapper à sa responsabilité contractuelle que PMN qui n'avait jamais conditionné l'acceptation des nouvelles commandes au paiement de certaines factures à raison du volant d'affaires apportées par la société APMC depuis au moins 2011 a suspendu sans prévenance le 3 décembre 2014 toutes les livraisons de commandes passées par cette dernière.

Cette suspension des livraisons par la société PMN du jour au lendemain et après plus de trois années de relations commerciales s'analyse en une rupture fautive par elle du contrat d'agent commercial.

S'il est établi, ce que ne conteste pas la SARL APMC, que durant plusieurs années elle payait comptant les livraisons, cette dernière ne s'explique pas sur le retard pris à régler les factures de l'année 2014 alors que dans le contrat d'agent commercial elle s'était engagée à respecter les conditions générales de vente à savoir un paiement au plus tard à 30 jours fin de mois. Ce retard inexpliqué dans les paiements est fautif mais dans une moindre mesure que la faute commise par la société PMN dans la mesure où ce retard affectait son droit propre à commission et est compensé pour la société PMN par l'allocation des intérêts légaux majorés de trois points.

En conséquence, la rupture est intervenue aux torts partagés des parties.

Partant le jugement est infirmé en ce qu'il a dit que la rupture du contrat d'agent commercial était due aux agissements de la société PMN.

> sur les conséquences de la rupture

Il est admis qu'en cas de rupture aux torts partagés des parties et du moment que les fautes imputables à l'agent commercial ne revêtent pas le caractère de gravité privatif d'indemnité, l'intéressé conserve son droit à indemnisation de la rupture.

Si le retard de la société APMC à payer les factures en cours est fautif, il n'est pas d'une gravité susceptible de priver la SARL APMC de l'indemnité prévue à l'article L. 134-12 du code de commerce comme susmentionné.

Il est de principe que le calcul du montant de l'indemnité n'est pas réglementé et qu'il convient donc de statuer en fonction des circonstances spécifiques de la cause. Il existe toutefois un usage reconnu qui consiste à accorder une indemnité compensatrice correspondant à deux années de commissions, lequel usage ne lie cependant pas la cour.

Si la demande de la SARL APMC au titre de l'allocation d'une indemnité est légitime, à défaut de rapporter la preuve qu'elle a déclaré une créance au moins provisionnelle au titre de l'indemnité compensatrice au passif de la SAS PMN, sa demande de condamnation n'est pas recevable comme susmentionnée.

Considérant que la rupture du contrat d'agent commercial est exclusivement fautive à l'endroit de la SARL APMC, la société PMN demande à être indemnisée du préjudice en lien avec cette rupture lié à la perte de clients comme suit :

103 402 au titre de la perte du client ESB sur la base d'une marge annuelle de 51 600 ;

17 915 au titre de la perte du client Volseley consécutive à la résiliation du contrat APMC ;

10 441 au titre de la perte du client Picouleau consécutive à la résiliation du contrat APMC ;

7 804,72 TTC au titre des marchandises fabriquées par la société PMN mais refusées par ESB à raison d'erreur de commande de la société APMC ;

Rappelant que le contrat a été rompu principalement en raison de la faute de la société PMN qui a suspendu sans prévenance les livraisons en direction de certains clients dont ESB, ne peut sérieusement soutenir qu'elle doit être indemnisée de la perte de ce client et d'autres clients. La rupture du contrat d'agent commercial ne pouvant de fait que générer la perte de clients dont elle est seule responsable.

Partant le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté la société PMN de sa demande d'indemnisation pour perte de clients.

Sur les demandes accessoires

L'exercice d'une action en justice ou la défense à une action constitue en principe un droit qui ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages et intérêts en application de l'article 1240 du code civil que lorsque la demande est faite dans l'intention de nuire.

En l'espèce le liquidateur de la société PMN qui ne caractérise pas un abus de la société APMN dans l'exercice de son droit à se défendre est déboutée de sa demande de dommages et intérêts pour résistances abusive.

Chaque partie succombant partiellement, elles supportent les dépens de première instance et d'appel par elles exposés. Il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais irrépétibles par chacune exposés en première instance et en appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt contradictoire, rendu par mise à disposition au greffe,

Déclare recevable l'intervention volontaire de la SELARL Bailly MJ prise en la personne de Maître X ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS PMN ;

Confirme le jugement du 27 juin 2017 rendu par le tribunal de commerce d'Amiens sauf en ce qu'il a condamné la SAS PMN à payer à la SARL APMC la somme de 7 217,14 de commissions, débouté la SAS PMN de sa demande d'allocation des intérêts au taux majoré de trois points sur la somme de 37 047,47 , en ce qu'il a écarté le paiement de l'indemnité forfaitaire de 40 , en ce qu'il a rompu le contrat d'agent commercial aux torts de la SAS PMN, en ce qu'il a condamné la SAS PMN à verser à la société APMC une indemnité de rupture de 48 000, 1 500 en application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens ;

Statuant des chefs infirmés ;

Dit irrecevable toutes les demandes en paiement de la SARL APMC à l'endroit de la SAS PMN ;

Dit que la somme de 37 047,47 à la charge de la SARL APMC sera assortie des intérêts au taux majoré de trois points à compter du 13 juillet 2015 ;

Condamner la SARL APMC à payer à la société PMN la somme de 440 au titre de l'indemnité pour frais de recouvrement ;

Prononce la rupture du contrat d'agent commercial aux torts partagés ;

Y ajoutant ;

Déboute la SELARL Bailly MJ ès qualité de liquidateur de la SAS PMN de sa demande de dommages et intérêts ;

Déboute les parties de leurs demandes en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Dit que chaque partie gardera la charge des dépens par elle exposés en première instance et en appel.