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Décisions

Cass. com., 12 novembre 2020, n° 17-31.713

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Défendeur :

Kaya (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Rémery

Rapporteur :

Mme Kass-Danno

Avocat général :

Mme Guinamant

Avocats :

SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel

Colmar, 2e ch. civ., sect. A, du 19 oct.…

19 octobre 2017

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Colmar, 19 octobre 2017), par deux actes du 31 août 2009, M. B... a cédé à la société Kaya un fonds de commerce de restauration rapide, au prix total de 120 000 euros, et il lui a consenti une sous-location des locaux dans lesquels le fonds de commerce était exploité. Se prévalant d'un dysfonctionnement du système d'évacuation des fumées de la cuisine, la société Kaya a assigné M. B... en résolution de la vente en raison d'un vice caché et en paiement de dommages-intérêts.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche, ci-après annexé

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui est irrecevable.

Sur le moyen, pris en ses deuxième et quatrième branches, ci-après annexé

3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur le moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

4. M. B... fait grief à l'arrêt de prononcer la résolution du contrat de cession de fonds de commerce et de le condamner à rembourser à la société Kaya la somme de 120 000 euros et celle de 2 910 euros, avec intérêts au taux légal et une somme de 7 500 euros à titre de dommages-intérêts, alors « que la mise en oeuvre de la garantie des vices cachés est subordonnée à la constatation d'un défaut inhérent à la chose vendue elle-même ; qu'il s'ensuit qu'en matière de vente du fonds de commerce la seule inexactitude de déclaration affectant l'immeuble objet du bail commercial dans lequel est exploité ledit fonds de commerce ne constitue pas un vice caché affectant le fonds de commerce ; qu'en l'espèce, M. B..., qui avait vendu à la société Kaya un fonds de commerce de restauration rapide, soutenait ne pas devoir sa garantie à raison d'un vice entachant le système d'évacuation des fumées de la cuisine qui n'était pas compris dans la vente du fonds de commerce en tant qu'il constituait un élément de l'immeuble dans lequel était exploité ledit fonds, immeuble qui faisait l'objet d'un contrat de sous-location distinct du contrat de cession du fonds de commerce ; qu'en considérant que la qualification d'immeuble par destination du système d'évacuation des fumées de la cuisine était indifférente dès lors qu'un tel élément était indispensable au fonds de commerce de restauration rapide vendue par M. B... à la société Kaya, cependant que si le vice était inhérent à l'immeuble il ne pouvait être inhérent au fonds de commerce vendu, la cour d'appel a violé l'article 1641 du code civil. »

Réponse de la Cour

5. Il résulte des articles 524 du code civil et L. 141-5 du code de commerce que le fonds de commerce comprend, au titre des biens corporels, le mobilier et le matériel servant à l'exploitation du fonds, sauf s'ils y ont été placés par le propriétaire de l'immeuble et que celui-ci est également le propriétaire du fonds de commerce. L'arrêt relève que la hotte de cuisine a été installée par M. B... et que ce dernier n'est pas propriétaire de l'immeuble, de sorte que la hotte n'est pas un immeuble par destination.

6. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, la décision déférée se trouve légalement justifiée.

7. Le moyen ne peut donc être accueilli.

Mais sur le moyen, pris en sa sixième branche

Enoncé du moyen

8. M. B... fait le même grief à l'arrêt, alors « que le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même ; que l'acheteur professionnel qui fait l'acquisition d'une chose dans et pour l'exercice de sa profession est présumé connaître le vice qui en affecte l'usage et ne peut renverser cette présomption qu'en démontrant qu'il était indécelable malgré sa qualité de professionnel ; qu'en se bornant à relever, pour considérer que la société Kaya n'avait pu avoir connaissance du vice avant la vente, qu'elle n'avait pas participé à l'exploitation du fonds avant sa cession et n'avait pu constater les caractéristiques du conduit de fumée sur lequel la hotte était branchée, cependant que de telles constatations étaient impropres à écarter le caractère indécelable pour la société Kaya du défaut affectant le système d'évacuation des fumées, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1644 du code civil. »

 

Réponse de la Cour

Vu l'article 1642 du code civil :

9. Aux termes de ce texte, le vendeur n'est pas tenu des vices apparents et dont l'acheteur a pu se convaincre lui-même.

10. Pour prononcer la résolution du contrat de cession de fonds de commerce et condamner M. B... à rembourser à la société Kaya diverses sommes, l'arrêt retient que, selon le rapport d'expertise judiciaire, le tirage de la hotte de cuisine est quasiment nul et l'évacuation des odeurs et des particules est inexistante. Il relève, encore, que, lors de sa seconde visite, l'expert a constaté, d'un côté, que la hotte n'était pas reliée à un circuit ou gaine d'extraction spécifique adapté à l'extraction des fumées de cuisine, mais à un conduit en boisseau de diamètre 80 non chemisé, de dimension minimale non conforme aux normes et règles en vigueur et ne dépassant pas le faîtage d'une hauteur suffisante pour assurer une évacuation satisfaisante, et, de l'autre, que ce conduit d'évacuation était un ensemble de branchements à coudes multiples, bouchés et obturés en grande partie. Il relève, en outre, que le système d'évacuation est impropre à sa destination du fait de la défaillance d'éléments constitutifs de l'ouvrage tenant à un conduit inapproprié et inadapté, une dimension insuffisante et des raccords factices. Il relève, enfin, que la société Kaya, qui n'avait pas participé à l'exploitation du fonds avant sa cession et qui n'avait pas pu constater les caractéristiques du conduit de fumée sur lequel la hotte était branchée, n'avait pas pu avoir connaissance du vice avant la vente.

11. En se déterminant ainsi, après avoir constaté que la société Kaya, société commerciale, avait acquis le fonds de commerce de restauration rapide en vue de son exploitation, de sorte qu'elle était un acquéreur professionnel de la même spécialité que le vendeur, sans rechercher si cette qualité n'était pas de nature à permettre à la société Kaya de se rendre compte de la faiblesse de tirage de la hotte, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour, CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 octobre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Metz.