CA Nîmes, 4e ch. com., 26 novembre 2020, n° 18/04442
NÎMES
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Gothaer Allgemeine Versicherung AG (Sté)
Défendeur :
Bosch Rexroth AG (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Gagnaux
Conseillers :
Mme Granier, Mme Ougier
Avocat :
Selarl Lexavoue Nimes
EXPOSÉ :
Vu l'appel interjeté le 13 décembre 2018 par la société de droit étranger Gothaer Allgemeine Versicherung ag à l'encontre du jugement prononcé le 6 novembre 2018 par le tribunal de commerce de Aubenas dans l'instance RG n° 2017J00127.
Vu les dernières conclusions déposées 6 mars 2019 par l'appelante et le bordereau de pièces qui y est annexé.
Vu les dernières conclusions déposées le 29 juillet 2019 par la société de droit allemand Bosch Rexroth ag, intimée, et le bordereau de pièces qui y est annexé.
Vu l'ordonnance de clôture intervenue le 10 décembre 2019 à effet différé au 24 septembre 2020.
La sas Boralex Massif central est propriétaire d'un parc éolien « Cham longe » situé sur la commune de Saint-Etienne de Lugdares (Ardèche) mis en service en 2006 et constitué de 12 éoliennes.
La société de droit étranger Gothaer Allgemeine Versicherung ag est l'assureur « bris de machines » et « pertes d'exploitation » du parc éolien « Cham longe ».
Les éoliennes du parc « Cham longe » ont été construites par la société Ge Wind energy, fabricant d'éoliennes, et équipées de multiplicateurs fournis par la société Bosch Rexroth, fabricante des multiplicateurs équipant les éoliennes ; Elles ont été livrées courant 2005 avec un délai de garantie expirant au 31 décembre 2010.
Le 2 avril 2011, un sinistre est survenu sur l'éolienne E07, exploitée par la société Boralex Bel air, et tenant l'existence de dommages au niveau d'un roulement du multiplicateur, son remplacement a été effectué par Ge Wind energy en juin 2011.
Le 12 avril 2012 deux autres sinistres ont eu lieu sur les éoliennes E02 et E06, exploitée par la société Boralex le courbil, en l'état d'une rupture d'une dent de pignon des multiplicateurs nécessitant le remplacement des multiplicateurs intervenu en septembre 2012.
Le 6 novembre 2012, une réunion contradictoire après démontage des multiplicateurs a eu lieu.
La sas Boralex Massif central a déclaré les sinistres auprès de son assureur, la société de droit étranger Gothaer Allgemeine Versicherung ag, qui lui a versé la somme de 655.106 € au titre des frais de remplacement des trois multiplicateurs et des pertes d'exploitation (vétusté et franchise déduites).
Conformément au contrat existant entre le propriétaire du parc éolien (Boralex) et le fabricant d'éoliennes (Ge wind energy) deux réunions se sont tenues en Allemagne, dans les locaux d'un sous-traitant du fabricant des multiplicateurs (Bosch Rexroth), afin d'analyser les pièces litigieuses étant précisé que le propriétaire du parc (Boralex) a conservé les deux dents rompues des pignons des éoliennes E02 et E06.
Le fabricant des multiplicateurs (Bosch Rexroth) a fait mettre les pièces détenues, à savoir les deux pignons endommagés, au rebut par son sous-traitant courant 2013, sans qu'un rapport d'analyse n'ait vu le jour.
Par courrier du 12 août 2013, le conseil de Gothaer a mis en demeure la société Ge wind energy et la société Bosch Rexroth de remettre les expertises et rapports en leur possession sous quinzaine.
Par courrier du 13 septembre 2013, le fabricant des éoliennes Ge Wind énergie a indiqué n'être en possession d'aucun rapport suite à l'inspection des multiplicateurs remplacés, n'ayant aucune obligation contractuelle de conservation.
Par actes d'huissier du 6 mars 2014, le propriétaire du parc éolien (Boralex) et son assureur (Gothaer) ont assigné en référé le fabricant d'éoliennes (Ge Wind énergie), le fabricant des multiplicateurs (Bosch Rexroth) et son sous-traitant (Heintze) aux fins de désignation d'un expert devant le président du tribunal de commerce de Boulogne-sur-Mer qui a fait droit à la demande par ordonnance du 2 juillet 2014.
L'expert judiciaire, M. S., a déposé son rapport le 26 juillet 2016.
Par acte d'huissier du 6 septembre 2017, l'assureur du propriétaire du parc éolien, la société de droit étranger Gothaer Allgemeine Versicherung ag, a assigné le fabricant des multiplicateurs, la société de droit allemand Bosch Rexroth, se disant subrogée dans les droits de son assurée en vue d'être indemnisé du remplacement des multiplicateurs devant le tribunal de commerce d'Aubenas, lequel par jugement du 6 novembre 2018, a :
- débouté la société de droit étranger Gothaer Allgemeine Versicherung ag de ses demandes, fins et prétention
- fait reste de droit à la société de droit allemand Bosch Rexroth ag, en condamnant la société de droit étranger Gothaer Allgemeine Versicherung ag à lui verser la somme de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- condamné la société de droit étranger Gothaer Allgemeine Versicherung ag aux entiers dépens d'instance, en ce compris les frais d'expertise, dont frais de greffe liquidée en entête du présent jugement ;
La société de droit étranger Gothaer Allgemeine Versicherung ag a interjeté appel pour voir :
Vu les articles 1240 et 1245-1 et suivants du Code civil,
Vu l'article L. 121-12 du code des assurances,
- accueillir l'appel, le dire recevable et bien fondé
- infirmer le jugement en toutes ces dispositions
et statuant à nouveau :
- dire et juger que la responsabilité du fait des produits défectueux, et à titre subsidiaire la responsabilité délictuelle de droit commun de la société Bosch Rexroth est engagée en raison du défaut d'assemblage des multiplicateurs litigieux,
- dire et juger que la responsabilité délictuelle de la société Bosch Rexroth est engagée au titre de la destruction fautive des pièces endommagées et de la perte de chance consécutive d'identifier rigoureusement la cause de l'avarie subie et le tiers en supportant la responsabilité
- constater que le préjudice subi par la société Boralex du fait des sinistres ayant affecté les éoliennes E02, E02, E06 et E07 a été fixé à la somme de 749 669 € hors-taxes et que la compagnie Gothaer est subrogée dans ses droits à hauteur de 655 106 €
- condamner en conséquence la société Bosch Rexroth à verser à la compagnie Gothaer la somme de 655 106 € hors-taxes
- condamner la même à lui verser une indemnité de 5000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens comprenant les frais d''expertise judiciaire taxés à la somme de 22 173,12 euros ;
La société de droit allemand Bosch Rexroth ag a conclu pour voir :
Vu l'article 1240 et 1245 et suivants et 1315 du Code civil,
- confirmer le jugement en toutes ses dispositions
- rejeter toute demande de condamnation sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux ainsi que sur le fondement de la responsabilité délictuelle
- débouter la société de droit étranger Gothaer Allgemeine Versicherung ag de toutes ses demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires
- condamner la société de droit étranger Gothaer Allgemeine Versicherung ag à lui payer la somme de 20 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile
- condamner la société de droit étranger Gothaer Allgemeine Versicherung ag aux entiers dépens en ce compris les frais d'expertise ;
Pour un plus ample exposé il convient de se référer à la décision déférée et aux conclusions visées supra.
DISCUSSION :
Sur le fond :
L'assureur, la société de droit étranger Gothaer Allgemeine Versicherung ag (Gothaer), qui a payé des indemnités d'assurance, selon quittances subrogatives versées au débat pour la somme totale de 655.106 euros à la sas Borales et la sas Boralex le courbil, justifie être subrogée, jusqu'à concurrence desdites indemnités dans les droits et actions des sociétés Boralex contre les tiers qui, par leur fait, ont causé le dommage ayant donné lieu à la responsabilité de l'assureur conformément à l'article L. 121-12 du code des assurances.
Il est constant que le recours ne peut s'exercer que contre un tiers responsable du sinistre étant désormais titulaire des droits et actions du subrogeant.
Le jugement contesté a relevé qu'il n'était pas clairement démontré que les multiplicateurs étaient entachés d'un défaut, que l'assureur de la société Boralex était défaillant dans l'administration de la preuve d'une faute à l'encontre du fabricant des multiplicateurs, qu'il n'y avait jamais eu de demande officielle adressée à Bosch Rexroth lui demandant de conserver les éléments démontés sur les multiplicateurs, que le sinistre est survenu après la période de garantie et que l'expert judiciaire, qui a déposé son rapport deux ans plus tard, a considéré qu'il n'était plus possible de vérifier si les pignons et les roues étaient conformes aux plans ni si les portées des dentures étaient conformes aux instructions du constructeur.
La société de droit étranger Gothaer Allgemeine Versicherung ag objecte que le défaut des multiplicateurs ayant équipé les éoliennes E2, E6 et E7 est relevée par des présomptions graves précises et concordantes du fait d'une panne identique dans un temps très court et provenant de la même série de fabrication, du fait d'une rupture qui est la conséquence d'un mécanisme de fissuration progressive en fatigue comme l'a constaté l'expert judiciaire qui a privilégié l'hypothèse la plus pertinente comme étant une non-conformité de la portée de dentures aux instructions du constructeur et aux règles de l'art. Elle fait état des observations de l'expert Stockl, qui a examiné les multiplicateurs des éoliennes E2 et E6 en avril 2012, ayant retenu comme origine des désordres une technique incorrecte de rectification lors de la fabrication. Elle relève que cette défectuosité a causé une atteinte à un bien autre que les multiplicateurs litigieux à savoir les éoliennes. Subsidiairement, elle fait état de deux fautes dont l'une est imputable au titre de la livraison de multiplicateurs affectés d'un défaut à la société Ge Wind energy dont elle était le sous-traitant, cette faute contractuelle pouvant être invoquée délictuellement tenant le dommage qu'en a subi la société Boralex résultant de l'indisponibilité des éoliennes. Elle impute l'autre faute au titre de la destruction des multiplicateurs litigieux qui ne peut s'expliquer que par une volonté délibérée de détruire les preuves d'un défaut de fabrication, l'expert judiciaire ayant regretté ne pas avoir à disposition les pignons, qu'elle a agi avec une incroyable légèreté détruisant unilatéralement et sans le moindre avis préalable les pièces endommagées alors qu'elle en était dépositaire, qu'elle s'est soustraite, étant organisme certifié, aux obligations édictées par la norme ISO 9001 sur la mise en œuvre de dispositions efficaces pour communiquer avec les clients à propos des retours d'information et des réclamations. Elle a donc fait perdre une chance d'identifier rigoureusement le responsable des sinistres. Enfin, son préjudice est celui subi par son assuré, la société Boralex, à hauteur du montant versé pour lequel elle est subrogée.
La société de droit allemand Bosch Rexroth ag fait valoir que l'appelante ne démontre aucun défaut de sécurité des multiplicateurs, l'expert judiciaire n'ayant nullement relevé ce point, et que la simple imputabilité du dommage aux produits incriminés ne suffit pas à établir son défaut ni le lien de causalité entre ce défaut et le dommage. Elle rappelle qu'elle n'a pas réalisé la mise en service du multiplicateur mais uniquement livré son contractant la société Ge Wind energy en Allemagne qui, elle, s'est déplacée sur site pour l'installation et la mise en service. L'expert judiciaire s'est adjoint l'institut de soudure qui a relevé l'absence de tout défaut de matière des dentures de sorte qu'il est établi que la métallurgie de la denture n'est en rien causale avec l'origine de la survenance de la rupture des dentures. L'expert judiciaire exclu lui-même un problème de conception tenant les autres multiplicateurs qui fonctionnent normalement sur le site. Il est possible que des conditions particulières d'exploitation ou des perturbations survenues en cours d'exploitation ou un graissage insuffisant dans le cadre de la maintenance et cette hypothèse n'a pas été exclue par l'expert. Elle relève que le rapport de Monsieur Stockl a été effectué avant les désordres sur E2 et E6 et qu'il fait état de probabilités et non de certitude, qu'il doit être relevé que ce rapport n'a jamais été communiqué à l'expert judiciaire. Selon elle, la cause du sinistre est toujours inconnue et aucun autre bien matériel que les multiplicateurs, n'a été endommagé, la responsabilité du fait des produits défectueux ne peut être actionnée. Elle n'est pas non plus à l'origine d'un manquement contractuel ayant vendu ses multiplicateurs parfaitement conformes aux spécifications contractuelles et libres de tout vice à la Ge Wind energy et il n'est d'ailleurs soutenu aucune faute délictuelle détachable du prétendu manquement contractuel. S'agissant d'une destruction fautive des multiplicateurs, elle relève que ces derniers n'étaient plus sous garantie, et que l'inspection a eu lieu en présence de Boralex et de Ge Wind energy leur étant contractuellement imposée et est restée sans nouvelles ni instruction quelconque. Elle justifie que la certification ISO 9001 est totalement inapplicable et n'a aucune valeur contractuelle vis-à-vis d'un tiers et considère que cette destruction résulte de l'incurie et la négligence de son assuré dans la préservation des preuves.
Il est invoqué à l'encontre du fabricant des multiplicateurs d'éolienne E2, E6 et E7, la société de droit allemand Bosch Rexroth ag (Bosch), à titre principal, sa responsabilité du fait des produits défectueux et subsidiairement sa responsabilité délictuelle.
Il ne fait pas débat que l'assuré de la société de droit étranger Gothaer Allgemeine Versicherung ag (Gothaer) n'a eu aucun lien contractuel avec la Br.
1°) la responsabilité du fait des produits défectueux
L'article 1245 du Code civil prévoit que le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son produit, qu'il soit ou non lié par un contrat avec la victime. L'article 1245-3 du même code définit le produit défectueux comme étant celui qui n'offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre cette appréciation tenant compte de toutes les circonstances et notamment de la présentation du produit, de l'usage qui peut en être raisonnablement attendu et du moment de sa mise en circulation.
La Br est le sous-traitant incorporateur du bien meuble, à savoir le multiplicateur, dans l'éolienne fabriquée par la Ge Wind energy.
Si la mise en jeu de cette responsabilité n'impose pas la démonstration d'une faute, encore faut-il qu'un défaut de sécurité affectant le multiplicateur soit constaté.
Or, à aucun moment, il n'est fait état d'un défaut de sécurité. En effet, le rapport définitif de l'expert de l'assureur Gothaer établi le 12 décembre 2011 fait état, sur l'éolienne E7 du parc, d'un dommage au niveau d'un roulement du multiplicateur ayant contraint l'arrêt de l'éolienne du 11 avril 2011 au 16 juin 2011. Les rapports du même expert établis les 31 janvier 2013 (éolienne E2 maintenue en opération) et 4 février 2013 (éolienne E6 maintenue en opération) parlent exclusivement d'un défaut de fabrication. L'expert judiciaire, M. S. dans son rapport du 26 juillet 2016 n'a jamais fait état d'un défaut de sécurité.
Ainsi, et sans qu'il soit nécessaire d'analyser le préjudice, la responsabilité du fait des produits défectueux ne peut trouver à s'appliquer à l'espèce, étant de plus rappelé, qu'en tout état de cause, la simple éventuelle imputabilité du dommage au produit incriminé ne suffirait pas à établir son défaut ni le lien de causalité entre ce défaut et le dommage.
En conséquence, la société de droit étranger Gothaer Allgemeine Versicherung ag est déboutée de ses demandes à ce titre.
2°) la responsabilité délictuelle
- le défaut affectant le multiplicateur :
Il est constant qu'un manquement contractuel peut être invoqué par le tiers à un contrat dès lors que ce manquement lui a créé un dommage.
Il est invoqué le défaut de fabrication des multiplicateurs livrés par Bosch à Ge wind energy ayant causé un dommage à Boralex aux droits de qui se trouve Gothaer.
Les sinistres sont intervenus le 2 avril 2011 sur l'éolienne E7, le 12 avril 2012 sur les éoliennes E6 et E2.
Le rapport définitif de l'expert de l'assureur Gothaer établi le 12 décembre 2011 portant sur l'éolienne E7 envisage plusieurs hypothèses. D'une part une défaillance accidentelle en raison de la présence d'un corps étranger (particule ou petit copeau) entre le rouleau et la bague provoquant un marquage et d'autre part un défaut de fabrication ; Il ne partage pas l'analyse de M. Stockl.
Les rapports du même expert établis les 31 janvier 2013 (éolienne E2 maintenue en opération) et 4 février 2013 (éolienne E6 maintenue en opération) parlent d'un défaut de fabrication.
M. Stockl, intervenu à la demande de Boralex, des suites de la fin d'un contrat de maintenance et avant la reprise d'un nouveau contrat, a fait un audit le 15 novembre 2010 sans anomalies mais a envisagé néanmoins l'hypothèse d'une faute de maintenance, ayant relevé dans certains roulements des éoliennes du parc dont celles endommagées par la suite, que l'analyse de la graisse permettant le roulement contenait un excès de fer et de cuivre pouvant entraîner une diminution importante de la durée de vie. Il est établi par le rapport du 12 décembre 2011 précité que la maintenance du site se fait avec des sociétés tierces. Intervenu à nouveau en avril 2012, il suspecte un défaut de rectification lors de la fabrication.
Tenant la contradiction des analyses, une expertise judiciaire a été ordonnée. Le rapport déposé le 26 juillet 2016, après analyse confiée à l'institut de soudure, conclut qu'une dent du pignon s'est cassée en extrémité par fatigue, phénomène qui peut se produire lorsque la portée se fait sur l'extrémité des dents et non sur les flancs qui ne sont pas parfaitement alignés. L'expert indique que du fait que les multiplicateurs ont été soit reconditionnés, soit mis à la décharge, il n'est pas possible de vérifier la conformité de la livraison au plan, ni la conformité aux instructions du constructeur. L'expert n'a pas relevé de sous dimensionnement des multiplicateurs ni de mise en surcharge.
L'expert a d'ailleurs alerté les parties, en page 15 de son rapport, sur la particularité de l'espèce dont la perte d'informations pertinentes rend la recherche de la cause du sinistre incertaine.
Force est de constater que 4 ou 5 ans après les sinistres, l'expert judiciaire émet donc une hypothèse qui ne permet pas de caractériser la faute de Bosch.
Dès lors, il ne peut être fait droit à la demande de Gothaer.
- la faute de négligence de ne pas avoir conservé les multiplicateurs litigieux :
Il résulte de l'examen des pièces qu'aucun élément n'a été conservé du premier sinistre le 2 avril 2011 sur l'éolienne E7. Les deux multiplicateurs récupérés, lors du 2ème sinistre du 12 avril 2012 sur les éoliennes E6 et E2, ont été démontés dans les locaux de la société Heintze (sous-traitant de Bosch) lors d'une réunion s'étant tenue le 6 novembre 2012 dans ses locaux au contradictoire de Bosch, Ge wind energy et Boralex. Boralex a conservé les deux fragments de dents de pignon ayant rompu sur le 2ème sinistre (une dent s'étant par ailleurs cassée lors d'investigations contradictoires) et les multiplicateurs, pignons et roues ont été conservés par Heintze qui les a restitués à Bosch courant décembre 2012 et janvier 2013. Bosch a mis à la décharge les pignons dont une dent était cassée et a réutilisé pour d'autres clients les multiplicateurs.
Il n'est pas contesté que les multiplicateurs des éoliennes E6 et E2 et donc les éléments qui les composent, exceptées les dents de pignons endommagées, ont été restitués à Bosch maximum en janvier 2013 et Borales a été informée de la destruction des éléments par courrier du 24 avril 2013.
Le rapport du 4 février 2013 établi par l'expert de Gothaer indique que des analyses complémentaires pourraient être effectuées sur le pignon qui est toujours stocké chez Heintze. Pour autant, ni Boralex, ni Gothaer son assureur ne vont solliciter la remise des éléments litigieux.
Ce n'est que le 12 aout 2013 que le conseil de Boralex et Gothaer va s'émouvoir, dans une correspondance adressée tant à Ge wind energy qu'à Bosch de la destruction dudit matériel.
Il n'y a aucune demande de restitution du matériel entre le 6 novembre 2012 et le 24 avril 2013.
La première procédure judiciaire est l'assignation en référé du mars 2014 aux fins d'expertise.
Dès lors, Bosch ne peut avoir détruit des pièces aux fins de servir sa cause dans une procédure judiciaire de sorte qu'aucune négligence ne peut lui être reprochée.
Enfin, sur l'obligation de conserver des pièces en matière de réclamations imposée par la norme Iso 9001 à laquelle aurait adhéré Bosch, d'une part le document est en allemand non traduit, d'autre part le certificat est valable du 24 mars 2016 pour expirer le 23 mars 2019. Il ne concerne aucunement les sinistres de l'espèce.
Ainsi, la faute de négligence de Bosch dans la destruction des multiplicateurs n'est pas établie.
Le jugement contesté est, en conséquence, confirmé dans son intégralité.
Sur les frais de l'instance :
La société de droit étranger Gothaer Allgemeine Versicherung ag, qui succombe, devra supporter les dépens de l'instance et payer à la société de droit allemand Bosch Rexroth ag une somme équitablement arbitrée à 4.000 € à la société de droit allemand Bosch Rexroth ag en application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Confirme le jugement contesté en toutes ses dispositions.
Et statuant à nouveau :
Condamne la société de droit étranger Gothaer Allgemeine Versicherung ag à payer à la société de droit allemand Bosch Rexroth ag la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Condamne la société de droit étranger Gothaer Allgemeine Versicherung ag aux dépens.