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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 2 décembre 2020, n° 20/00054

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Universal English (SAS)

Défendeur :

Wall Street Institute Caen (SAS), Wall Street Institute Rouen (SAS), Educational Programs Master France (SAS), Easy Learning (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Dallery

Conseillers :

M. Gilles, Mme Depelley

T. com. Paris, du 31 mai 2013

31 mai 2013

FAITS ET PROCÉDURE

La société Educational Programs Master France (la société EPMF) a pour activité l'enseignement et l'apprentissage de la langue anglaise et est titulaire des droits de Master franchise du réseau Wall Street Institute International.

Cette société a développé depuis 1998 un réseau de franchise en France permettant à ses franchises d'exploiter le concept Wall Street Institute (WSI) sur un territoire concédé en exclusivité par la signature de contrats conclus pour une durée initiale généralement de 10 ans et prévoyant un renouvellement de 5 ans à la demande du franchisé, en l'absence de manquement grave et comportant une clause de non-concurrence post-contractuelle d'une durée d'une année, limitée au territoire concédé.

Le 13 décembre 1999, la SAS Universal English a signé un contrat de franchise avec de la société EPMF.

A la suite d'un conflit l'opposant avec d'autres franchisés à la société EPMF, un avenant au contrat a été signé le 25 août 2005 par les parties, stipulant notamment (article 3) que « le franchisé est propriétaire de sa clientèle locale, avec laquelle il a traité ou avec laquelle il traitera à l'avenir ».

Un autre conflit a opposé la société Universal English avec d'autres franchisés à la société EPMF, relativement à l'éventuelle prise de participation de cette dernière dans le capital du franchisé à l'occasion du renouvellement du contrat de franchise et à une promesse de cession portant sur la totalité des titres que devrait consentir le franchisé au franchiseur à certaines conditions.

C'est dans ces conditions que le 3 août 2011, la société Universal English ainsi que d'autres franchisés ont assigné la société EPFM, notamment en renouvellement des contrats de franchise pour 10 ans et en nullité de la clause post-contractuelle de non-concurrence.

Par un jugement du 31 mai 2013, le tribunal de commerce de Paris a :

- Donné acte aux parties du fait que les sociétés Callioppée, Educational Programs Bordeaux 1, ABCD English, WSI Tours et Seven O'Clock se sont désistées de l'instance engagée, et que ces désistements ont été acceptés ;

- Déclaré recevables les exceptions soulevées par la SAS Educational Programs Master France (EPMF) ;

- S'est déclaré compétent pour statuer sur les demandes des sociétés Wall Street Institute Caen et Wall Street Institute Rouen, à l'exception de la demande visant au renouvellement des contrats de franchise ;

- Pris acte du fait que la SAS Educational Programs Master France (EPMF) a retiré les exceptions de connexité et de sursis à statuer concernant les sociétés Success Story et Success Story Le Mans ;

- Dit la société Glaform irrecevable à agir dans le cadre de la présente instance ;

- Rejeté l'exception de connexité soulevée par la SAS Educational Programs Master France (EPMF), concernant les sociétés Easy Learning et Eclade ;

- Déclaré recevables les sociétés 67 Street, Wall Street Institute Caen, Wall Street Institute Rouen, CPM Development, World Star International, Universal English, Main Street, Top learning, Easy Learning, Franchinvest, Cle anglaise, Success Story, Success Story Le Mans, Eclade Esole Educational System On Line For English, Esole Educational System On Line For English, Avignon English School, en leur action;

- Débouté les sociétés 67 Street, Wall Street Institute Caen, Wall Street Institute Rouen, CPM Development, World Star International, Universal English, Main Street, Top learning, Easy Learning, Franchinvest, Cle anglaise, Success Story, Success Story Le Mans, Eclade Esole Educational System On Line For English, Esole Educational System On Line For English, Avignon English School, de toutes leurs demandes à l'encontre de la société Wall Street Institute KFT;

- Débouté les sociétés 67 Street, Wall Street Institute Caen, Wall Street Institute Rouen, CPM Development, World Star International, Universal English, Main Street, Top learning, Easy Learning, Franchinvest, Cle anglaise, Success Story, Success Story Le Mans, Eclade Esole Educational System On Line For English, Esole Educational System On Line For English, Avignon English School, de leur demande visant à ordonner à la SAS Educational Programs Master France (EPMF) de renouveler les contrats de franchise pour 10 ans ;

- Débouté les sociétés 67 Street, Wall Street Institute Caen, Wall Street Institute Rouen, CPM Development, World Star International, Universal English, Main Street, Top learning, Easy Learning, Franchinvest, Cle anglaise, Success Story, Success Story Le Mans, Eclade Esole Educational System On Line For English, Esole Educational System On Line For English, Avignon English School, de leur demande visant à declarer nulle la clause de non concurrence contenue dans les contrats de franchise en cours d'exécution;

- Débouté les sociétés 67 Street, Wall Street Institute Caen, Wall Street Institute Rouen, CPM Development, World Star International, Universal English, Main Street, Top learning, Easy Learning, Franchinvest, Cle anglaise, Success Story, Success Story Le Mans, Eclade Esole Educational System On Line For English, Esole Educational System On Line For English, Avignon English School, de leur demande visant à dire que les sociétés franchisees ont droit, si elles le souhaitent, à la résiliation anticipée de leur contrat de franchise avec un préavis d'une année ;

- Débouté la SAS Educational Programs Master France (EPMF) de ses demandes à l'encontre de la société Avignon English School liées à l'utilisation, pendant quelques jours des signes distinctifs du réseau Wall Street Institute et pour non-respect de la clause de non-concurrence ;

- Condamné la SAS Educational Programs Master France (EPMF) à payer à la société Avignon English School la somme de 15 000 euros, à titre de dommages-intérêts, pour non-renouvellement du contrat de franchise pendant une durée de 5 ans ;

- Condamné la société Esole Educational System On Line For English à payer à la SAS Educational Programs Master France (EPMF) la somme de 18 720 euros, à titre de dommages-intérêts, pour manquement à son obligation de non-concurrence ;

- Fait interdiction à la société Esocle Educational System On Line For English d'exercer sur le territoire concédé, et cela jusqu'au 4 juin 2013, toute activité concurrente de celle du réseau Wall Street Institute ;

- Ordonné à la société Esole Educational System On Line For English de communiquer à la SAS Educational Programs Master France (EPMF) tous les éléments comptables, certifiés par expert-comptable, permettant le calcul du montant des encaissements afférents à des contrats de formation Wall Street Institute, reçus par elle, postérieurement au 3 juin 2012, sous astreinte de 50 € par jour de retard passé un délai de 30 jours à compter de la signification du présent jugement, passé lequel délai il sera à nouveau fait droit ;

- Condamné la société Esole Educational System On Line For English à payer à la SAS Educational Programs Master France (EPMF) une provision de 14 000 euros, à ce titre ;

- Condamné la société Cle Anglaise à verser à la SAS Educational Programs Master France (EPMF) la somme de 31 879 euros, à titre de dommages-intérêts, pour manquement à son obligation de non-concurrence ;

- Fait interdiction à la société Cle Anglaise d'exercer sur le territoire concédé, et cela jusqu'au 14 novembre 2013, toute activité concurrente de celle du réseau Wall Street Institute ;

- Ordonné à la société Cle Anglaise de communiquer à la SAS Educational Programs Master France (EPMF) tous les éléments comptables, certifiés par expert-comptable, permettant le calcul du montant des encaissements afférents à des contrats de formation Wall Street Institute, reçus par elle, postérieurement au 14 novembre 2012, sous astreinte de 50 € par jour de retard passé un délai de 30 jours à compter de la signification du présent jugement, passé lequel délai il sera fait à nouveau droit ;

- Condamné la société Cle Anglaise à payer à la SAS Educational Programs Master France (EPMF) une provision de 5 000 euros, à ce titre ;

- Débouté la SAS Educational Programs Master France (EPMF) de sa demande à l'encontre des sociétés 67 Street, Wall Street Institute Caen, Wall Street Institute Rouen, CPM Development, World Star International, Universal English, Main Street, Top learning, Easy Learning, Franchinvest, Cle anglaise, Success Story, Success Story Le Mans, Eclade Esole Educational System On Line For English, Esole Educational System On Line For English, Avignon English School, et Glaform, pour abus d'agir en justice;

- Condamné in solidum les sociétés 67 Street, Wall Street Institute Caen, Wall Street Institute Rouen, CPM Development, World Star International, Universal English, Main Street, Top learning, Easy Learning, Franchinvest, Cle anglaise, Success Story, Success Story Le Mans, Eclade Esole Educational System On Line For English, Esole Educational System On Line For English, Avignon English School, et Glaform à payer à la société Wall Street Institute KFT la somme globale de 2 000 euros, au titre de l'article 700 du Code de procedure civile;

- Condamné la société Esocle Educational System On Line For English à payer à la SAS Educational Programs Master France (EPMF) la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Condamné la société Cle Anglaise à payer à la SAS Educational Programs Master France (EPMF) la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Ordonné l'exécution provisoire ;

- Débouté les parties de toutes leurs demandes autres, plus amples ou contraires, y compris celles afférentes à l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Condamné in solidum les sociétés 67 Street, Wall Street Institute Caen, Wall Street Institute Rouen, CPM Development, World Star International, Universal English, Main Street, Top learning, Easy Learning, Franchinvest, Cle anglaise, Success Story, Success Story Le Mans, Eclade Esole Educational System On Line For English, Esole Educational System On Line For English, Avignon English School, et Glaform aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 114,82 € dont 18,60 € de TVA.

La société Universal English a interjeté appel de ce jugement par déclaration du 24 juin 2013.

Par jugement du 21 février 2017, le tribunal de commerce d'Albi a ouvert une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la société Universal English, et nommé la SCP X en la personne de Maître Y en qualité de mandataire judiciaire.

Par deux ordonnances du 18 avril 2017, la Cour d'appel de Paris a, d'une part, disjoint la procédure s'agissant de la société Universal English, et, d'autre part, prononcé la radiation de l'instance faute de régularisation de la procédure à l'égard de la société Universal English.

Par jugement du 17 juillet 2018, le tribunal de commerce d'Albi a arrêté un plan de redressement permettant la poursuite de l'activité de la société Universal English et nommé la SCP X en qualité de commissaire à l'exécution du plan.

L'affaire a été ensuite rétablie sous le numéro RG 20/00054.

Vu les dernières conclusions notifiées et déposées le 9 janvier 2020 par la SAS Universal English et la SCP X prise en la personne de Maître Y en qualité de commissaire à l'exécution du plan de continuation de la SAS Unviversal English selon jugement du tribunal de commerce d'Albi en date du 17 juillet 2018, par lesquelles il est demandé à la Cour de :

Vu les articles 101.1 et 101.3 du Traité sur le Fonctionnement de l'Union Européenne,

Vu le principe à valeur constitutionnelle de liberté d'entreprendre,

Vu le règlement communautaire n° 330/2010,

Vu la communication n° 2001/C 368/07 de la Commission européenne,

Vu les articles 1134 du code civil et L. 420-1 et suivants du code de commerce,

Vu la jurisprudence citée et notamment l'arrêt prononcé le 13 décembre 2017 par la Cour d'appel de PARIS (n° 13/12625),

Vu les pièces annexées,

- Accueillir l'intervention volontaire de la SCP X ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de continuation de la société Universal English ;

- Réformer le jugement du Tribunal de commerce de Paris rendu le 31 mai 2013, mais uniquement en ce qu'il a :

Débouté la société UNIVERSAL ENGLISH de sa demande visant à déclarer nulle la clause de non-concurrence contenue dans le contrat de franchise en cours d'exécution,

Ordonné l'exécution provisoire,

Débouté la société UNIVERSAL ENGLISH de ses demandes autres, plus amples ou contraires, y compris celle afférente à l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamné la société Universal English aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 114,82€ dont 18,60€ de TVA ;

Et, statuant à nouveau, de :

A titre principal,

- Dire et juger que les dispositions du droit communautaire sont applicables aux faits d'espèce ;

- Constater que la clause de non-concurrence litigieuse ne se limite pas aux seuls locaux et terrains à partir desquels la société Universal English a exercé ses activités pendant la durée du Contrat ;

- Dire et juger que la clause de non-concurrence litigieuse n'est pas indispensable à la protection du savoir-faire transféré par le franchiseur ;

En conséquence,

- Dire et juger que la clause de non-concurrence litigieuse ne remplit pas les conditions posées par le règlement communautaire n° 330/2010 ;

- Dire et juger que la clause de non-concurrence litigieuse est contraire au Traité sur le Fonctionnement de l'Union Européenne ;

- Prononcer la nullité de la clause de non-concurrence post-contractuelle contenues dans le Contrat ;

A titre subsidiaire,

- Dire et juger que la clause de non-concurrence litigieuse n'est pas proportionnée aux intérêts légitimes du franchiseur au regard de l'objet du contrat ;

- Dire et juger que la limitation territoriale de la clause de non-concurrence litigieuse est disproportionnée au regard de la fonction qu'elle remplit ;

En conséquence,

- Prononcer la nullité de la clause de non-concurrence post-contractuelle contenue dans le Contrat ;

En tout état de cause,

- Condamner EPMF à restituer à la société Universal English les sommes qu'elle a perçues au titre des dispositions contestées du jugement du tribunal de commerce de Paris rendu le 31 mai 2013, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la signification de l'arrêt à intervenir et sans conditions ;

- Condamner la société EPMF au paiement de la somme de 15 000,00 € à la société Universal English par application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ;

- Condamner la société EPMF aux entiers dépens de l'instance qui seront recouvrés, conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC, par Maître Z Avocat.

Vu les dernières conclusions notifiées et déposées le 12 septembre 2020 par la SAS Educational Programs Master France, par lesquelles il est demandé à la Cour de :

Vu les articles 1134, 1142 et 1145 anciens du code civil,

Vu le contrat de franchise,

Vu les articles 122 et 480 du code de procédure civile,

Débouter les appelants de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Universal English de sa demande visant à déclarer nulle la clause de non-concurrence post-contractuelle

Y ajoutant :

Fixer la créance de la société Educational Programs Master France au passif de la société Universal English à la somme de 142 497 € à titre de dommages et intérêts pour violation de la clause de non-concurrence post-contractuelle.

Fixer la créance de la société Educational Programs Master France à la somme de 10 000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Condamner in solidum les appelants aux entiers dépens de première instance et d'appel et pour ces derniers, autoriser Maître Anne-Sophie S. à faire usage de l'article 699 du Code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

Sur l'intervention volontaire de la SCP X en qualité de commissaire à l'exécution du plan de continuation de la société Universal English

Il convient d'accueillir la SCP X ès qualités en son intervention volontaire.

Sur la nullité de la clause de non-concurrence

- en droit européen de la concurrence

L'appelante soutient que la clause de non-concurrence est nulle sur le fondement de l'article 101.1 TFUE qui pose une interdiction de principe visant à empêcher, fausser ou restreindre le jeu de la concurrence, faisant valoir que l'exclusion de l'application de l'article 101.1 TFUE pour défaut d'effet sensible invoqué par EPMF ne vaut que sous certaines conditions, dont l'absence de restriction territoriale ou de clientèle.

Elle fait valoir qu'en l'espèce, la clause litigieuse relève d'une restriction caractérisée, n'est pas limitée aux locaux et aux terrains à partir desquels elle a exercé ses activités pendant la durée du contrat et n'est pas indispensable à la protection du savoir-faire qui lui a été transféré par le franchiseur. Elle en déduit que la clause de non-concurrence post-contractuelle en cause est nulle en vertu des articles 101.1 TFUE et 5.3 du règlement (UE) d'exemption catégorielle n° 330/2010.

L'intimée rétorque que les règles de concurrence communautaires ne peuvent être invoquées faute de démonstration que le commerce entre Etats membres est susceptible d'être affecté par les pratiques en cause, c'est à dire les échanges transfrontaliers ou la structure de la concurrence sur le marché communautaire et que cette affectation a un caractère sensible. Elle dit que les accords de nature locale ne sont pas en eux-mêmes susceptibles d'affecter sensiblement le commerce entre Etats membres, et, qu'en l'espèce, la clause n'interdit pas au franchisé d'exploiter une activité concurrente à celle développée par le réseau Wall Street dans un territoire autre que celui qui lui était concédé.

- en droit interne

L'appelante soutient que la clause litigieuse ne remplit ni la condition de limitation territoriale ni celle de proportion aux intérêts légitimes du franchiseur prévues en droit interne.

Elle soutient ainsi que :

- rien ne justifie en l'espèce que l'interdiction de concurrence soit étendue à tout le territoire contractuel, sauf à vouloir la dissuader de quitter le réseau et/ou freiner l'arrivée de concurrents dans les zones concédées et/ou vouloir imposer des conditions de renouvellement particulièrement déséquilibrées ;

- l'interdiction de concurrence n'est pas indispensable à la protection des intérêts légitimes du franchiseur, eu égard à la faible technicité et l'absence de spécificité et d'originalité du savoir-faire WSI autant que l'impossibilité d'utilisation de celui-ci postérieurement à la fin du contrat (restitution en fin de contrat, caractère obsolète), et ne vise en réalité qu'à la dissuader de quitter le réseau ainsi qu'à capter injustement sa clientèle.

L'intimée rétorque que :

- la clause est bien limitée dans l'espace (le pôle urbain de Toulouse) et le temps (un an à compter de la fin du contrat de franchise),

- aucune condition de technicité ou d'accessibilité n'est requise s'agissant du savoir-faire et qu'en l'espèce, les particularités, l'originalité et la valeur de ce dernier reposent sur un concept distinctif et original comprenant les méthodologies de gestion et les techniques d'enseignement de la langue anglaise élaborées par le franchiseur au terme d'une longue expérience et de longues et lourdes recherches ;

- les résultats des franchisés du réseau WSI, dont les encaissements ont augmenté en pleine crise, et dans un marché national de la formation à l'anglais en baisse, montrent la performance du système et sa parfaite maîtrise de la stratégie de développement dont elle a la responsabilité ;

- l'obligation post-contractuelle de non-concurrence est la contrepartie du savoir-faire concédé et de l'exclusivité consentie au franchisé sur le territoire concédé, pendant toute la durée du contrat.

En l'espèce, le contrat de franchise conclu entre les parties stipule en son article 24.6 :

- Le Franchisé et Animateurs Principaux s'interdisent, après l'expiration ou la résiliation du présent Contrat, directement ou indirectement :

(a) d'être employés, impliqués ou intéressés, directement ou indirectement, pendant une période de douze mois, dans toutes activités susceptibles de concurrencer les Activités Franchisées ou le réseau Wall Street Institute, et de participer directement ou indirectement dans le Territoire sur lequel le Franchisé exploitait ses activités à un réseau des activités similaires à celles du réseau Wall Street Institute et susceptible de le concurrencer, ni de commettre aucun acte de concurrence déloyale à l'encontre du Master ou du Réseau de Franchise Wall Street Institute, et notamment de débaucher l'un quelconque des membres du Personnel du Master ou d'un autre Centre.

(...)

La société EPMF est titulaire des droits de Master Franchise pour la France du réseau international Wall Street Institute qui compte 274 franchisés dans le monde selon le contrat de franchise. Elle est présente dans de nombreux Etats membres.

La clause de non-concurrence contenue dans l'ensemble des contrats de franchise EPMF, visant à éliminer un potentiel concurrent sur le marché intérieur, tend à cloisonner le marché, Cette pratique est, par nature, susceptible d'affecter le commerce entre Etats membres. En outre, la clause figurant dans tous les contrats de franchise EPMF couvrant le territoire national, cette pratique est susceptible d'affecter le commerce entre Etats membres de manière sensible.

Il y a lieu d'examiner la validité de cette clause au regard du droit européen de la concurrence.

Aux termes de l'article 101.1 TFUE, « sont incompatibles avec le marché intérieur et interdits tous accords entre entreprises, toutes décisions d'associations d'entreprises et toutes pratiques concertées qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre Etats membres et qui ont pour objet ou pour effet, d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du marché intérieur (...) ».

La clause de non-concurrence post-contractuelle est ainsi susceptible d'entrer dans le champ d'application de l'interdiction de principe posé par cet article.

Les accords de franchise et les clauses restrictives nécessaires à la protection du savoir-faire ou à la préservation de l'identité et de la réputation du réseau, n'ont pas d'objet anti-concurrentiel et ne sont pas anticoncurrentiels en soi (CJCE, 28 janvier 1986, Pronuptia, 161/84).

Ainsi, si les clauses de non-concurrence ou de non-affiliation peuvent être considérées comme inhérentes à la franchise dans la mesure où elles permettent notamment d'assurer la protection du savoir-faire transmis, c'est toutefois à la condition qu'elles restent proportionnées à l'objectif qu'elles poursuivent.

Or, en l'espèce, la clause de non-concurrence post-contractuelle insérée au contrat de franchise conclu avec la société Universal English n'est pas indispensable à la protection du savoir-faire du franchiseur, lequel consiste en une méthode de faible technicité ainsi qu'il résulte des pièces produites et qui, mise en œuvre principalement à travers des logiciels en ligne, n'est accessible que par des sites internet spécifiques dont les accès peuvent être bloqués à la cessation du contrat, étant observé que la restitution des « manuels supports du savoir-faire », « matériels didactiques » ou « toutes autres documentations confidentielles » est prévue en fin de contrat.

La clause est donc disproportionnée à son objectif et est contraire aux articles 101.1 TFUE et à l'article L 420-1 du code de commerce qui prohibe « même par l'intermédiaire direct ou indirect d'une société de groupe implantée hors de France, lorsqu'elles ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché, les actions concertées, conventions, ententes expresses ou tacites ou coalitions, notamment lorsqu'elles tendant à :

1° Limiter l'accès au marché ou le libre exercice de la concurrence par d'autres entreprises... »

En outre, l'appelante soutient à juste raison que le bénéfice de l'exemption prévue à l'article 5 b) du règlement 2790/1999 en faveur de telles clauses est réservée uniquement à celles d'une durée d'un an, qui sont limités aux locaux et aux terrains à partir desquels celui qui l'a souscrite a opéré pendant la durée du contrat et qui sont indispensables à la protection du savoir-faire qui lui a été transféré par son cocontractant.

De la même manière, elle invoque l'article 101.3 TFUE qui permet de contourner cette interdiction dans le cadre d'accords ou pratiques particuliers et le règlement (UE) d'exemption n°330/2010 qui permet en matière d'accords verticaux de conclure une « obligation directe ou indirecte interdisant à l'acheteur, à l'expiration de l'accord, de fabriquer, d'acheter, de vendre ou de revendre des biens ou services » notamment si l'obligation est limitée aux locaux et aux terrains à partir desquels l'acheteur a exercé ses activités pendant la durée du contrat et si l'obligation est indispensable à la protection d'un savoir-faire.

Or, en l'espèce, force est de constater que la clause de non-concurrence n'est pas limitée aux locaux et aux terrains à partir desquels celui qui l'a souscrite a opéré pendant la durée du contrat puisqu'elle s'étend à l'ensemble du territoire concédé, soit aux termes de l'annexe 1 du contrat au département de Haute-Garonne et est même illimitée territorialement, en ce qu'elle interdit « d'être employés, impliqués ou intéressés, directement ou indirectement, pendant une période de douze mois, dans toutes activités susceptibles de concurrencer les Activités Franchisées ou le réseau Wall Street Institute ».

Ainsi, la clause qui n'est pas proportionnée aux intérêts légitimes du franchiseur et qui ne peut bénéficier d'une exemption automatique, est nulle et le jugement entrepris doit être infirmé de ce chef.

Sur les conséquences de la nullité de la clause

La clause de non-concurrence étant nulle, EPMF est déboutée de sa demande de dommages-intérêts fondée sur le non-respect de celle-ci.

S'agissant de la demande de condamnation de EPMF à restituer à Universal English les sommes qu'elle a perçues au titre des dispositions contestées du jugement entrepris, il sera rappelé que le présent arrêt constitue un titre de restitution des fonds versés en application des dispositions infirmées du jugement assorti de l'exécution provisoire, assortis des intérêts au taux légal à compter de sa signification.

La demande de condamnation sous astreinte de 200 euros par jour de retard, non justifiée, est rejetée.

EPMF qui succombe, est déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, est condamnée aux dépens de première instance et d'appel et est condamnée à payer à Universal English la somme de 6 000 euros au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Reçoit la SCP X en qualité de commissaire à l'exécution du plan de continuation de la société Universal English en son intervention volontaire ;

Statuant dans les limites de l'appel,

Infirme le jugement en ce qu'il a :

- Débouté la société UNIVERSAL ENGLISH de sa demande visant à déclarer nulle la clause de non-concurrence contenue dans le contrat de franchise en cours d'exécution,

- Débouté la société UNIVERSAL ENGLISH de ses demandes autres, plus amples ou contraires, y compris celle afférente à l'article 700 du Code de procédure civile,

- Condamné la société Universal English aux dépens, dont ceux à recouvrer par le greffe, liquidés à la somme de 114,82€ dont 18.60€ de TVA ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés :

- Dit nulle la clause de non-concurrence post-contractuelle prévue au contrat de franchise conclu avec la société Universal English ;

- Dit que le présent arrêt constitue un titre de restitution des fonds versés en application des dispositions infirmées du jugement assorti de l'exécution provisoire, assortis des intérêts au taux légal à compter de sa signification ;

- Rejette la demande de condamnation sous astreinte ;

- Déboute la société EPMF de ses demandes ;

- Condamne la société EPMF aux dépens de première instance et d'appel avec droit de recouvrement direct dans les termes de l'article 699 du code de procédure civile et à payer à la société Universal English la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Rejette toute autre demande.