TUE, 7e ch., 16 décembre 2020, n° T-515/18
TRIBUNAL DE L'UNION EUROPÉENNE
Arrêt
Rejet
PARTIES
Demandeur :
Fakro sp. z o.o., République de Pologne
Défendeur :
Commission européenne
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. da Silva Passos (rapporteur)
Juges :
M. Valančius, M. Sampol Pucurull
Avocats :
Me Radkowiak-Macuda, Me Kiedacz
LE TRIBUNAL (septième chambre),
Antécédents du litige
1 La requérante, Fakro sp. z o.o., est une société polonaise qui fabrique des fenêtres et des accessoires de toiture.
2 En juillet 2006, la requérante a déposé une plainte formelle auprès de l’Urząd Ochrony Konkurencji i Konsumentów (Office de la protection de la concurrence et des consommateurs, Pologne, ci-après l’« UOKiK »), qui, après avoir constaté que les irrégularités dénoncées dans la plainte avaient une portée européenne, s’est déclaré incompétent et a transmis une notification à la Commission européenne.
3 Le 30 avril 2007, la Commission a ouvert d’office une enquête sur le marché de l’Union européenne des fenêtres de toit (affaire AT.39451 – Velux) (ci-après l’« enquête ouverte d’office »), principalement sur le fondement des allégations et des informations provenant de la requérante, transmises à la Commission par l’UOKiK. Cette enquête visait différentes pratiques prétendument mises en œuvre par un autre fabricant de fenêtres et d’accessoires de toiture, à savoir VKR Holding A/S et ses filiales.
4 En janvier 2009, la Commission a conclu que les preuves recueillies dans le cadre de l’enquête ouverte d’office n’indiquaient pas l’existence d’un comportement anticoncurrentiel de la part de ces sociétés et a clos cette enquête.
5 Le 12 juillet 2012, la requérante a déposé une plainte formelle auprès de la Commission. Dans cette plainte, la requérante a dénoncé un abus de position dominante au sens de l’article 102 TFUE commis par « VKR Holding A/S, VELUX A/S, RoofLITE A/S et toutes les sociétés appartenant au groupe VELUX et RoofLITE » (ci-après, prises ensemble, « Velux »), depuis 2001, sur le marché de l’Union européenne, de la Suisse, de la Norvège, de la Russie et de l’Ukraine des fenêtres de toit et des brides.
6 Le 17 septembre 2012 et le 18 juin 2014, la requérante a transmis à la Commission des compléments de plainte comprenant de nouveaux éléments de preuve.
7 Le 26 septembre 2012, le 28 août 2013 et le 29 août 2014, Velux a soumis à la Commission ses réponses aux versions non confidentielles de la plainte et des compléments visés au point 6 ci-dessus. Des informations supplémentaires ont été fournies par Velux le 28 novembre 2014.
8 Le 12 novembre 2012, le 28 juin 2013, les 6 mars et 24 juin 2015, des rencontres ont eu lieu entre la requérante et la Commission.
9 Le 29 novembre 2012 et le 28 juin 2013, des rencontres ont eu lieu entre Velux et la Commission.
10 Les 25 janvier, 12 juillet, 28 août, 20, 24, 26 et 30 septembre, les 2 octobre et 25 novembre 2013 ainsi que le 22 janvier 2014, Velux a envoyé des informations complémentaires à la Commission en réponse à des questions posées par cette dernière.
11 Les 13 juin et 19 novembre 2013 et le 24 janvier 2014, la requérante a soumis des informations complémentaires à la Commission en réponse à des questions de celle-ci.
12 Le 18 avril 2014, la requérante a transmis ses observations sur les réponses de Velux du 26 septembre 2012 et du 28 août 2013.
13 Par lettre du 21 décembre 2015, la Commission a, en application de l’article 7, paragraphe 1, de son règlement (CE) no 773/2004, du 7 avril 2004, relatif aux procédures mises en œuvre par la Commission en application des articles [101] et [102 TFUE] (JO 2004, L 123, p. 18), informé la requérante de son intention de rejeter la plainte (ci-après l’« appréciation provisoire »).
14 Le 24 janvier 2016, la requérante a adressé deux lettres à la Commission. Dans la première lettre, elle a soumis ses observations sur l’appréciation provisoire. Par la seconde lettre, la requérante a soumis un nouveau complément de plainte.
15 Le 31 mai 2016, les 28 avril et 26 juillet 2017 et le 5 janvier 2018, la requérante a transmis à la Commission d’autres compléments de plainte.
16 Le 24 novembre 2016, Velux a répondu à la version non confidentielle des observations de la requérante sur l’appréciation provisoire mentionnée au point 14 ci-dessus.
17 Le 19 décembre 2016, la requérante a communiqué à la Commission ses observations concernant la version non confidentielle des réponses de Velux du 24 novembre 2016.
18 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 16 mai 2017, la requérante a introduit un recours fondé sur l’article 265 TFUE et tendant à faire constater que la Commission s’était illégalement abstenue de prendre position sur sa plainte du 12 juillet 2012. L’affaire a été enregistrée sous le numéro T‑293/17.
19 Les 18 juillet et 12 octobre 2017, des rencontres ont eu lieu entre la requérante et la Commission.
20 Le 2 mars 2018, Velux a soumis sa réponse sur la version non confidentielle du complément de plainte du 5 janvier 2018.
21 Le 6 avril 2018, la requérante a, d’une part, soumis ses observations sur la version non confidentielle de la réponse visée au point 20 ci-dessus et, d’autre part, soumis un complément de plainte.
22 Le 14 juin 2018, la Commission a adopté la décision C(2018) 3864 final (affaire AT.40026 – Velux) (ci-après la « décision attaquée »), par laquelle elle a rejeté la plainte de la requérante sur le fondement de l’article 7, paragraphe 2, du règlement no 773/2004, au motif qu’il n’existait pas un intérêt suffisant de l’Union à poursuivre l’examen des questions soulevées dans ladite plainte, compte tenu de la probabilité limitée de constater une violation de l’article 102 TFUE et du caractère disproportionné de toute enquête plus approfondie.
23 Tout d’abord, la Commission a rappelé la délimitation du marché de produits avancée par la requérante, d’une part, et par Velux, d’autre part, dont il résultait une divergence d’analyse quant à la question de savoir si d’autres produits que les fenêtres de toit et les brides devaient être pris en compte. À ce sujet, la Commission a conclu que cette question pouvait rester ouverte dans la mesure où l’appréciation de la probabilité de pouvoir établir l’existence d’un abus était la même dans les deux hypothèses. En ce qui concerne le marché géographique, il ressort de la décision attaquée que les analyses des deux parties en cause divergeaient également. La Commission ayant constaté l’absence de précédent, elle a procédé à l’analyse de l’existence d’une position dominante tant sur les marchés nationaux que sur le « grand marché européen », composé de l’ensemble des États membres de l’Union, de la Suisse et de la Norvège. À cet égard, la Commission a conclu qu’il ne pouvait pas être exclu que Velux détînt une position dominante sur un ou plusieurs marchés pertinents. Elle a dès lors précisé que son analyse avait été effectuée sur le fondement d’une présomption de position dominante détenue par Velux sur l’un ou plusieurs des marchés susvisés.
24 Ensuite, la Commission a procédé à l’analyse des cinq catégories d’infractions qui ressortaient de la plainte de la requérante. En premier lieu, elle a examiné les allégations concernant la politique tarifaire de Velux, et notamment celles concernant la discrimination par les prix, les rabais abusifs, la pratique de prix prédateurs et les promotions de vente à long terme. En deuxième lieu, elle a analysé les allégations de la requérante selon lesquelles les marques RoofLITE, DAKEA et BALIO avaient été introduites comme « marques de combat » dans le seul but d’éliminer la concurrence. En troisième lieu, la Commission a vérifié la probabilité de pouvoir établir l’existence d’autres pratiques discriminatoires prétendument mises en œuvre par Velux, telles qu’une discrimination en ce qui concerne les dépenses publicitaires, le nombre de représentants commerciaux et les délais de livraison en fonction des liens qu’entretenaient les distributeurs et les clients avec la requérante. En quatrième lieu, la Commission a examiné les allégations concernant une stratégie de dépôts de demandes de brevets injustifiées et l’introduction par Velux d’actions en justice non fondées à l’encontre de la requérante. En cinquième lieu, la Commission a analysé une prétendue pratique de contrats d’exclusivité conclus par Velux avec des fournisseurs et d’autres partenaires commerciaux visant à les empêcher de collaborer avec la requérante.
25 À la suite de l’adoption de la décision attaquée, le Tribunal a constaté que le recours en carence mentionné au point 18 ci-dessus était devenu sans objet et qu’il n’y avait plus lieu de statuer (ordonnance du 23 octobre 2018, Fakro/Commission, T‑293/17, non publiée, EU:T:2018:733).
Procédure et conclusions des parties
26 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 29 août 2018, la requérante a introduit le présent recours.
27 Par acte déposé au greffe du Tribunal le 17 janvier 2019, la République de Pologne a demandé à intervenir dans la présente affaire au soutien des conclusions de la requérante. Par décision du président de la cinquième chambre du 1er mars 2019, cet État membre a été admis à intervenir au soutien des conclusions de la requérante.
28 Le 3 juillet 2019, le président du Tribunal, en application de l’article 27, paragraphe 1, du règlement de procédure du Tribunal, a attribué la présente affaire à un nouveau juge rapporteur.
29 La composition des chambres du Tribunal ayant été modifiée, le juge rapporteur a été affecté à la septième chambre, à laquelle la présente affaire a, par conséquent, été attribuée, conformément à l’article 27, paragraphe 5, du règlement de procédure.
30 Le 11 février 2020, dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure prévues à l’article 89 de son règlement de procédure, le Tribunal a posé des questions écrites aux parties. Les parties ont déféré à cette demande dans le délai imparti.
31 L’audience de plaidoiries initialement prévue le 14 mai 2020 ayant été reportée, les parties ont été entendues en leurs plaidoiries et en leurs réponses aux questions orales posées par le Tribunal lors de l’audience du 7 juillet 2020.
32 La requérante, soutenue par la République de Pologne, conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– annuler la décision attaquée ;
– condamner la Commission aux dépens.
33 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– rejeter le recours ;
– condamner la requérante aux dépens.
En droit
34 À l’appui de son recours, la requérante invoque trois moyens, tirés, le premier, d’une erreur manifeste d’appréciation et d’une insuffisance de motivation en ce qui concerne la conclusion de la Commission relative à l’absence d’intérêt de l’Union à poursuivre la procédure, le deuxième, d’une violation du principe de bonne administration consacré à l’article 41 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et, le troisième, d’une violation du droit d’accès au dossier visé à l’article 8, paragraphe 1, du règlement no 773/2004.
35 En l’espèce, il convient de traiter successivement, d’abord, le troisième moyen, puis le deuxième et, enfin, le premier.
Sur le troisième moyen, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 1, du règlement no 773/2004
36 Dans le cadre de son troisième moyen, la requérante indique qu’elle a demandé à la Commission, par lettre du 29 janvier 2013, l’accès aux clarifications et aux documents fournis par Velux lors de l’enquête ouverte d’office et, par demande du 6 février 2013, l’accès « au rapport final ou au document […] sur lesquels la Commission s’[était] fondée pour clore la procédure dans l’affaire COMP/E1/39451 – Velux » (voir points 3 et 4 ci-dessus). La requérante soutient par ailleurs que la Commission, dans la décision attaquée, ne s’est pas limitée à mentionner les circonstances et les documents de l’enquête ouverte d’office uniquement aux fins de la présentation des antécédents de la plainte en cause, mais qu’elle a également fondé son appréciation sur ces éléments. Elle en conclut, en substance, que, en ne lui communiquant pas ces documents afférents à l’enquête ouverte d’office, la Commission a enfreint ses droits procéduraux garantis aux plaignants par l’article 8, paragraphe 1, du règlement no 773/2004. En outre, la requérante remet en question l’étendue et la fiabilité de l’appréciation de la Commission dans la décision attaquée concernant l’application des rabais et des primes par Velux dans le cadre de la conclusion relative à la probabilité limitée d’établir une violation de l’article 102 TFUE. À cet égard, la requérante fait notamment valoir que la Commission a conclu, dans le cadre de l’enquête ouverte d’office, que Velux appliquait des rabais rétroactivement. Selon la requérante, en substance, la Commission ne s’est pas acquittée de son obligation de vérifier si les effets anticoncurrentiels de l’application rétroactive des rabais par Velux persistaient et, le cas échéant, de vérifier si la gravité de cette pratique ou la persistance de ses effets n’étaient pas de nature à conférer à sa plainte un intérêt pour l’Union.
37 La Commission conteste les arguments de la requérante.
38 À titre liminaire, il convient de constater que le grief tiré d’une appréciation erronée des rabais et des primes appliqués rétroactivement relève du fond et sera examiné dans le cadre du premier moyen.
39 Il y a lieu de relever qu’il ressort de la lettre du 2 juillet 2013, par laquelle la Commission a refusé l’accès au dossier de l’enquête ouverte d’office à la requérante, que celle-ci n’a pas fondé sa demande d’accès sur les dispositions du règlement (CE) no 1049/2001 du Parlement européen et du Conseil, du 30 mai 2001, relatif à l’accès du public aux documents du Parlement européen, du Conseil et de la Commission (JO 2001, L 145, p. 43). Dès lors, il convient d’examiner les griefs invoqués par la requérante uniquement à la lumière des dispositions du règlement no 773/2004, qui, selon une jurisprudence constante, définit les droits procéduraux des plaignants dont la Commission envisage de rejeter la plainte (voir arrêt du 11 janvier 2017, Topps Europe/Commission, T‑699/14, non publié, EU:T:2017:2, point 30 et jurisprudence citée).
40 Selon la jurisprudence, l’accès au dossier, dans les affaires de concurrence, a notamment pour objet de permettre aux destinataires de la communication des griefs de prendre connaissance des éléments de preuve figurant dans le dossier de la Commission, afin qu’ils puissent se prononcer utilement sur les conclusions auxquelles la Commission est parvenue dans sa communication des griefs sur la base de ces éléments (voir arrêt du 14 mai 2020, NKT Verwaltung et NKT/Commission, C‑607/18 P, non publié, EU:C:2020:385, point 261 et jurisprudence citée). Ainsi, le droit d’accès au dossier constitue le corollaire du principe du respect des droits de la défense dans le cadre d’une procédure ouverte à l’encontre d’une personne et susceptible d’aboutir à un acte faisant grief (voir, en ce sens, arrêts du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C‑204/00 P, C‑205/00 P, C‑211/00 P, C‑213/00 P, C‑217/00 P et C‑219/00 P, EU:C:2004:6, point 68, et du 13 septembre 2018, UBS Europe e.a., C‑358/16, EU:C:2018:715, points 60 et 61).
41 Il importe néanmoins de souligner que la procédure ouverte à la suite d’une plainte ne constitue pas une procédure contradictoire entre les entreprises intéressées, mais une procédure engagée par la Commission, à la suite d’une demande, dans l’exercice de sa mission qui consiste à veiller au respect des règles de concurrence. Il s’ensuit que les entreprises contre lesquelles la procédure est engagée et celles qui ont introduit une plainte ne se trouvent pas dans la même situation procédurale et que ces dernières ne peuvent pas se prévaloir des droits de la défense. En revanche, ces plaignants doivent être mis en mesure de sauvegarder leurs intérêts légitimes dans le cadre de la procédure engagée par la Commission et être ainsi étroitement associés à ladite procédure, même si les droits procéduraux des plaignants ne sont pas aussi étendus que les droits de la défense des entreprises contre lesquelles la Commission dirige son enquête (voir arrêt du 11 janvier 2017, Topps Europe/Commission, T‑699/14, non publié, EU:T:2017:2, point 29 et jurisprudence citée).
42 L’article 8, paragraphe 1, du règlement no 773/2004 dispose que, « [l]orsque la Commission a informé le plaignant de son intention de rejeter la plainte en application de l’article 7, paragraphe 1, le plaignant peut demander l’accès aux documents sur lesquels la Commission fonde son appréciation provisoire. À cet effet, le plaignant ne peut cependant pas avoir accès aux secrets d’affaires et autres informations confidentielles appartenant à d’autres parties à la procédure ».
43 Il découle du libellé de cette disposition et d’une jurisprudence bien établie que le droit d’accès des plaignants ne revêt pas la même portée que le droit d’accès au dossier de la Commission reconnu aux personnes, aux entreprises et aux associations d’entreprises auxquelles la Commission a adressé une communication des griefs, qui vise l’ensemble des documents obtenus, produits ou assemblés par la direction générale de la Commission lors de l’enquête, mais se limite aux seuls documents sur lesquels la Commission fonde son appréciation provisoire (voir arrêt du 11 janvier 2017, Topps Europe/Commission, T‑699/14, non publié, EU:T:2017:2, point 30 et jurisprudence citée).
44 En l’espèce, tout d’abord, il convient de relever que les demandes d’accès au dossier, déposées en janvier et en février 2013, concernent le dossier de l’enquête ouverte d’office à laquelle la requérante n’était pas partie et qui a été close en janvier 2009. D’ailleurs, dans la requête par laquelle elle a introduit son recours en carence, que la requérante a produit en tant qu’annexe de la requête dans la présente affaire, la requérante reconnaît qu’elle « ne bénéficiait pas du droit à la preuve, ni du droit d’accès au dossier », dans l’enquête ouverte d’office.
45 Il y a également lieu de constater que lesdites demandes d’accès ont été formulées par la requérante à une date à laquelle la Commission ne lui avait pas encore communiqué son appréciation provisoire relative à la plainte ayant conduit à l’adoption de la décision attaquée. En effet, la Commission a informé la requérante de son intention de rejeter la plainte par lettre datée du 21 décembre 2015.
46 Or, il résulte du libellé de l’article 8, paragraphe 1, du règlement no 773/2004 que le droit d’accès du plaignant concerne les informations sur lesquelles la Commission fonde son appréciation provisoire. À cet égard, la communication de la Commission relative aux règles d’accès au dossier de la Commission dans les affaires relevant des articles [101] et [102 TFUE], des articles 53, 54 et 57 de l’Accord EEE et du règlement (CE) no 139/2004 du Conseil (JO 2005, C 325, p. 7) indique, au paragraphe 31, que « [l]e plaignant aura accès à ces documents une seule fois, après avoir reçu la lettre l’informant de l’intention de la Commission de rejeter sa plainte ».
47 Il s’ensuit que le refus de la Commission d’octroyer à la requérante un accès au dossier de l’enquête ouverte d’office, en juillet 2013, c’est-à-dire deux ans et demi avant la communication de l’appréciation provisoire, ne constitue pas une violation des droits procéduraux de la requérante dans le cadre de l’affaire faisant l’objet de son recours.
48 Ensuite, il convient d’examiner l’argument de la requérante selon lequel, en substance, aucun des documents fournis par la Commission en annexe à la lettre du 21 décembre 2015 ne provenait de l’enquête ouverte d’office, alors que la Commission a fondé son appréciation provisoire, ainsi que ses conclusions dans la décision attaquée concernant les rabais et les primes appliqués par Velux, sur les documents produits et les conclusions formulées dans le cadre de cette enquête. À l’appui de son argument, la requérante fait valoir que la Commission se réfère, aux points 6 à 12, 43, 44 et 96 de l’appréciation provisoire et aux considérants 24 et 55 à 57 de la décision attaquée, à l’enquête ouverte d’office sans se limiter à établir les faits et à présenter le contexte de l’affaire en cause.
49 À cet égard, premièrement, il convient de relever que les points 6 à 12 de la lettre informant la requérante de l’intention de rejeter sa plainte font partie de la section afférente à la description de la procédure et, plus précisément, apportent des précisions au sujet de l’enquête ouverte d’office. Il est vrai que, dans ce rappel des faits qui ont précédé le dépôt de la plainte de la requérante, la Commission mentionne notamment les conclusions auxquelles elle a abouti dans le cadre de la procédure ouverte d’office, qui a été close en janvier 2009, au sujet des rabais et des primes appliqués par Velux. Toutefois, rien ne permet de déduire de ce simple rappel des conclusions auxquelles la Commission avait abouti à l’époque qu’elle ait fondé son appréciation provisoire dans la présente affaire, qui figure dans la lettre du 21 décembre 2015, sur lesdites conclusions.
50 Deuxièmement, il y a lieu de constater que, au point 43 de l’appréciation provisoire, la Commission s’est limitée à rappeler le contexte de l’enquête ouverte d’office, à fournir une brève description des rabais appliqués par Velux à cette époque et à préciser qu’il avait été décidé de ne pas poursuivre l’enquête d’office sur ce point. Le fait que ces précisions servaient uniquement à contextualiser les paragraphes suivants de l’appréciation provisoire ressort clairement de la première phrase du point 44 de celle-ci, qui indique que la Commission a « maintenant analysé les conditions commerciales actuellement appliquées par Velux dans de nombreux États membres ». S’il est vrai que le point 44 de l’appréciation provisoire indique ensuite que les « conditions commerciales actuellement appliquées par Velux […] reposent sur les mêmes fondements » et que Velux « propose, en substance, les mêmes rabais et primes que ceux décrits ci-dessus […], c’est-à-dire des remises s’appliquant de manière identique à tous les distributeurs et qui reflètent les économies de coûts ou d’efforts commerciaux de certains distributeurs […] », ces références ne peuvent pas être comprises comme indiquant que la Commission s’est nécessairement fondée sur les seules conclusions de l’enquête ouverte d’office pour arriver à ses conclusions dans son appréciation provisoire. Au contraire, il ressort des points 44 et 45 de celle-ci que la Commission a procédé à une nouvelle évaluation des rabais et des primes appliqués par Velux.
51 Troisièmement, le point 96 de l’appréciation provisoire constitue le sixième et dernier point de la section de la lettre du 21 décembre 2015 dans laquelle la Commission précise l’étendue des mesures d’investigation qu’elle estime être nécessaires pour poursuivre la procédure. Ainsi, c’est après avoir exposé les différentes analyses, enquêtes, demandes d’informations et inspections dans les locaux de certaines entreprises qu’elle serait contrainte d’effectuer que la Commission conclut « qu’il serait disproportionné de poursuivre la procédure en raison de la probabilité limitée de constater l’existence d’une infraction, notamment parce que, dans les années 2007 à 2009, [elle] avait déjà mené une procédure d’examen complète, incluant des contrôles et de nombreuses demandes d’informations, laquelle ne lui avait pas permis de conclure à l’existence d’une quelconque violation du droit de la concurrence par [Velux] ». La Commission fait valoir que cette mention de l’enquête ouverte d’office visait uniquement à démontrer qu’elle avait conscience de l’ampleur d’une éventuelle procédure d’enquête. Or, la requérante ne fournit aucun élément qui permettrait d’infirmer cette affirmation de la Commission.
52 Quatrièmement, il suffit de constater que la dernière phrase du considérant 24 de la décision attaquée reprend, en substance, les conclusions du point 96 de l’appréciation provisoire (voir point 51 ci-dessus) concernant la prise en compte de l’expérience antérieure de la Commission dans son évaluation de l’ampleur des mesures d’instruction estimées nécessaires dans l’hypothèse d’une poursuite de la procédure.
53 Cinquièmement, la requérante soutient que deux lettres de Velux, citées en tant que preuves à l’appui des conclusions figurant aux considérants 55 à 57 de la décision attaquée, font référence aux pratiques examinées dans l’enquête ouverte d’office. Elle en déduit que la Commission a également fondé son appréciation provisoire sur les conclusions auxquelles elle était parvenue dans le cadre de l’enquête ouverte d’office et sur les preuves recueillies au cours de cette dernière.
54 Toutefois, il y a lieu de relever que la requérante a obtenu accès à des versions non confidentielles de certains documents provenant de l’enquête ouverte d’office, et notamment des deux documents visés par elle, qui ont été de nouveau soumis par Velux dans la procédure ayant conduit à l’adoption de la décision attaquée. À cet égard, il y a lieu de rappeler que, conformément à l’article 8, paragraphe 1, du règlement no 773/2004, le droit d’accès aux documents sur lesquels la Commission fonde son appréciation provisoire ne permet pas au plaignant d’avoir accès aux secrets d’affaires et aux autres informations confidentielles appartenant à d’autres parties à la procédure. En outre, la Commission, sans être contredite par la requérante, fait valoir que cette dernière a même eu accès à la version intégrale de l’un des deux documents en cause.
55 Ainsi, à supposer que la Commission ait fondé son appréciation provisoire et les conclusions qui figurent aux considérants 55 à 57 de la décision attaquée sur des éléments qui avaient déjà été soumis dans le cadre de l’enquête ouverte d’office, il est constant que la requérante a eu accès aux documents en cause, du moins dans une version non confidentielle, dans le cadre de la procédure administrative ayant conduit à l’adoption de la décision attaquée.
56 Enfin, il y a lieu de relever que la lettre du 21 décembre 2015 informant la requérante de l’intention de la Commission de rejeter sa plainte était accompagnée d’un certain nombre de documents sur lesquels la Commission avait indiqué avoir fondé son appréciation provisoire. D’ailleurs, dans ses observations sur cette appréciation provisoire, la requérante a fait valoir la difficulté d’analyser, dans le délai imparti, le grand volume de documents transmis par la Commission en annexe à sa lettre.
57 En outre, il ressort du dossier de l’affaire devant le Tribunal que Velux, dans le cadre de la procédure ayant conduit à l’adoption de la décision attaquée, a transmis à la Commission une nouvelle fois les informations pertinentes qu’elle avait précédemment communiquées dans le cadre de l’enquête ouverte d’office. En effet, les listes des annexes des observations de Velux sur la plainte de la requérante et de ses réponses aux questions de la Commission produites devant le Tribunal montrent que Velux a fourni, sous forme d’annexes, plusieurs documents qui avaient initialement été soumis dans le cadre de l’enquête ouverte d’office.
58 De plus, si la requérante avait estimé que la Commission avait fondé son appréciation provisoire sur des informations qui n’étaient pas annexées à la lettre du 21 décembre 2015, elle disposait du droit de soumettre une demande d’accès auxdites informations conformément à l’article 8, paragraphe 1, du règlement no 773/2004.
59 D’ailleurs, il y a lieu de souligner que, après avoir reçu la lettre du 21 décembre 2015, la requérante a complété sa plainte initiale par le dépôt de mémoires supplémentaires, ce qui a suscité des échanges d’informations complémentaires avec la Commission, et, dans ce contexte, la requérante a obtenu des informations supplémentaires fournies par Velux. Dans le cadre de ces échanges, la requérante aurait pu faire valoir son droit d’accès aux informations en cause.
60 Or, en réponse à une mesure d’organisation de la procédure, la requérante a confirmé qu’elle n’avait pas formulé de demande d’accès au dossier après la réception de la lettre du 21 décembre 2015 qui comportait l’appréciation provisoire de la Commission.
61 Il résulte de tout ce qui précède que la requérante n’a pas établi que la Commission avait méconnu son droit d’accès aux documents sur lesquels cette dernière avait fondé son appréciation provisoire, laquelle a été reprise dans la décision attaquée.
62 Par conséquent, le moyen tiré de la violation de l’article 8, paragraphe 1, du règlement no 773/2004 doit être rejeté comme étant non fondé.
Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation du principe de bonne administration consacré à l’article 41 de la charte des droits fondamentaux
63 Dans le cadre de son deuxième moyen, la requérante, soutenue par la République de Pologne, fait valoir que la durée de 71 mois de la procédure administrative ayant conduit à l’adoption de la décision attaquée est excessive. La requérante ajoute que cette durée, combinée à l’absence de décision statuant sur le fond, a eu une incidence sur la possibilité de saisir les autorités de concurrence nationales et a eu pour conséquence l’expiration des délais de prescription des pratiques dénoncées dans la plainte, la privant d’un recours juridictionnel. En outre, elle soutient, en substance, que le large pouvoir discrétionnaire de la Commission dans le traitement de la plainte en cause a porté atteinte à ses droits fondamentaux. À cet égard, la République de Pologne fait valoir que la durée excessive de l’examen de la plainte, conjuguée au pouvoir discrétionnaire excessif dont dispose la Commission pour constater l’absence d’intérêt de l’Union, prive de fait les petites et moyennes entreprises originaires des pays d’Europe centrale, ou y opérant principalement, de la possibilité d’exercer leurs droits de manière efficace.
64 La Commission conteste ces arguments.
65 En l’espèce, il convient d’abord de traiter les griefs tirés du pouvoir discrétionnaire de la Commission, avant de vérifier si, au regard des circonstances propres au cas d’espèce, la durée de la procédure administrative a été déraisonnable et si cette durée, combinée avec l’absence de décision finale, a eu une incidence sur la possibilité pour la requérante de faire valoir ses droits.
Sur les griefs tirés d’un pouvoir discrétionnaire excessif de la Commission
66 À titre liminaire, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la Commission, investie par l’article 105, paragraphe 1, TFUE de la mission de veiller à l’application des articles 101 et 102 TFUE, est appelée à définir et à mettre en œuvre la politique de la concurrence de l’Union et dispose à cet effet d’un pouvoir discrétionnaire dans le traitement des plaintes (arrêts du 26 janvier 2005, Piau/Commission, T‑193/02, EU:T:2005:22, point 80 ; du 12 juillet 2007, AEPI/Commission, T‑229/05, non publié, EU:T:2007:224, point 38, et du 15 décembre 2010, CEAHR/Commission, T‑427/08, EU:T:2010:517, point 26). Afin de s’acquitter efficacement de cette tâche, elle est ainsi en droit d’accorder des degrés de priorité différents aux plaintes dont elle est saisie (voir arrêt du 4 mars 1999, Ufex e.a./Commission, C‑119/97 P, EU:C:1999:116, point 88 et jurisprudence citée ; arrêt du 16 mai 2017, Agria Polska e.a./Commission, T‑480/15, EU:T:2017:339, point 34).
67 Lorsque, en exerçant ce pouvoir discrétionnaire, la Commission décide d’accorder des degrés de priorité différents aux plaintes dont elle est saisie, elle peut non seulement arrêter l’ordre dans lequel les plaintes seront examinées, mais également rejeter une plainte pour défaut d’intérêt suffisant de l’Union à poursuivre l’examen de l’affaire (arrêts du 24 janvier 1995, Tremblay e.a./Commission, T‑5/93, EU:T:1995:12, point 60, et du 14 février 2001, Sodima/Commission, T‑62/99, EU:T:2001:53, point 36). Étant donné que l’évaluation de l’intérêt pour l’Union que présente une plainte en matière de concurrence dépend des circonstances factuelles et juridiques de chaque espèce (arrêt du 12 juillet 2007, AEPI/Commission, T‑229/05, non publié, EU:T:2007:224, point 38), il ne convient ni de limiter le nombre de critères d’appréciation auxquels la Commission peut se référer, ni, à l’inverse, de lui imposer le recours exclusif à certains critères (arrêts du 17 mai 2001, IECC/Commission, C‑450/98 P, EU:C:2001:276, point 58 ; du 16 janvier 2008, Scippacercola et Terezakis/Commission, T‑306/05, non publié, EU:T:2008:9, point 189, et du 16 mai 2017, Agria Polska e.a./Commission, T‑480/15, EU:T:2017:339, point 35).
68 Le pouvoir discrétionnaire de la Commission n’est toutefois pas sans limites (arrêt du 4 mars 1999, Ufex e.a./Commission, C‑119/97 P, EU:C:1999:116, point 89). En effet, elle doit prendre en considération, en les examinant attentivement, tous les éléments de fait et de droit pertinents portés à sa connaissance par le plaignant afin de décider de la suite à donner à une plainte (voir arrêt du 17 mai 2001, IECC/Commission, C‑450/98 P, EU:C:2001:276, point 57 et jurisprudence citée ; arrêt du 16 mai 2017, Agria Polska e.a./Commission, T‑480/15, EU:T:2017:339, point 36).
69 Lorsque la Commission décide, comme en l’espèce, de ne pas ouvrir une enquête, elle n’est pas tenue d’établir l’absence d’infraction au soutien d’une telle décision (arrêt du 16 mai 2017, Agria Polska e.a./Commission, T‑480/15, EU:T:2017:339, point 37).
70 Ainsi, dans une telle situation, il appartient au Tribunal de vérifier non si le plaignant avait, dans sa plainte, fourni suffisamment d’éléments permettant de constater une violation du droit de la concurrence, mais s’il ressort de la décision attaquée que la Commission a mis en balance l’importance de l’atteinte que l’infraction alléguée est susceptible de porter au fonctionnement du marché intérieur, la probabilité de pouvoir établir son existence et l’étendue des mesures d’instruction nécessaires, en vue de remplir, dans les meilleures conditions, sa mission de veiller au respect des articles 101 et 102 TFUE (arrêts du 18 septembre 1992, Automec/Commission, T‑24/90, EU:T:1992:97, point 86 ; du 24 janvier 1995, Tremblay e.a./Commission, T‑5/93, EU:T:1995:12, point 62, et du 12 juillet 2007, AEPI/Commission, T‑229/05, non publié, EU:T:2007:224, point 41). Par ailleurs, le contrôle du juge de l’Union ne doit pas le conduire à substituer son appréciation de l’intérêt de l’Union à celle de la Commission, mais vise à vérifier que la décision litigieuse ne repose pas sur des faits matériellement inexacts et qu’elle n’est entachée d’aucune erreur de droit ni d’aucune erreur manifeste d’appréciation ou de détournement de pouvoir (voir arrêt du 11 janvier 2017, Topps Europe/Commission, T‑699/14, non publié, EU:T:2017:2, point 66 et jurisprudence citée).
71 Afin de permettre au Tribunal d’exercer un contrôle effectif sur l’exercice par la Commission de son pouvoir discrétionnaire de définir des priorités, cette institution est toutefois astreinte à une obligation de motivation lorsqu’elle refuse de poursuivre l’examen d’une plainte, cette motivation devant être suffisamment précise et détaillée (arrêts du 4 mars 1999, Ufex e.a./Commission, C‑119/97 P, EU:C:1999:116, points 90 et 91 ; du 14 février 2001, Sodima/Commission, T‑62/99, EU:T:2001:53, point 42, et du 16 mai 2017, Agria Polska e.a./Commission, T‑480/15, EU:T:2017:339, point 39).
72 S’agissant, en l’espèce, du grief tiré de l’étendue du pouvoir discrétionnaire de la Commission, il convient d’abord de rappeler que, conformément aux principes énoncés au point 66 ci-dessus, la Commission est en droit d’accorder des degrés de priorité différents aux plaintes dont elle est saisie et dispose à cet effet d’un pouvoir discrétionnaire.
73 Contrairement à ce qu’invoque, en substance, la requérante, le pouvoir discrétionnaire dont dispose la Commission à cet égard n’est cependant pas sans limites, puisqu’elle est tenue de prendre en considération, en les examinant attentivement, l’ensemble des éléments de fait et de droit pertinents qui sont portés à sa connaissance par les plaignants (voir point 68 ci-dessus). En outre, il lui appartient, après avoir évalué, avec toute l’attention requise, les éléments de fait et de droit avancés par la partie plaignante, de mettre en balance l’importance de l’infraction alléguée pour le fonctionnement du marché intérieur, la probabilité de pouvoir établir son existence et l’étendue des mesures d’investigation nécessaires, en vue de remplir, dans les meilleures conditions, sa mission de surveillance du respect des articles 101 et 102 TFUE [voir arrêt du 17 décembre 2014, Si.mobil/Commission, T‑201/11, EU:T:2014:1096, point 83 (non publié) et jurisprudence citée].
74 Toutefois, étant donné que l’évaluation de l’intérêt qu’une plainte présente pour l’Union est fonction des circonstances de chaque espèce, il ne convient ni de limiter le nombre des critères d’appréciation auxquels la Commission peut se référer, ni, à l’inverse, de lui imposer le recours exclusif à certains critères (voir point 67 ci-dessus). Compte tenu du fait que, dans un domaine tel que celui du droit de la concurrence, le contexte factuel et juridique peut varier considérablement d’une affaire à l’autre, il est possible d’appliquer des critères qui n’avaient pas été envisagés jusqu’alors ou de donner la priorité à un seul critère pour évaluer cet intérêt de l’Union (voir arrêt du 20 septembre 2018, Agria Polska e.a./Commission, C‑373/17 P, EU:C:2018:756, point 61 et jurisprudence citée).
75 En l’espèce, la requérante et la République de Pologne font notamment valoir que, lors de l’appréciation de l’existence d’un intérêt pour l’Union, la Commission aurait dû prendre en compte le fonctionnement efficace du marché intérieur et tout particulièrement les possibilités de développement des petites et moyennes entreprises originaires de ou opérant majoritairement dans les États membres qui ont adhéré à l’Union après 2004.
76 Cette argumentation ne saurait être accueillie.
77 En effet, il ressort de la jurisprudence rappelée au point 70 ci-dessus qu’il n’appartient pas au Tribunal de substituer son appréciation de l’intérêt de l’Union à celle de la Commission en vérifiant si d’autres critères que ceux retenus par la Commission dans la décision attaquée auraient dû conduire cette dernière à retenir l’existence d’un intérêt de l’Union à ce qu’elle poursuive l’examen de l’affaire [arrêt du 17 décembre 2014, Si.mobil/Commission, T‑201/11, EU:T:2014:1096, point 89 (non publié)].
78 En ce qui concerne le grief invoqué par la République de Pologne selon lequel, en substance, la Commission n’aurait pas fait preuve d’impartialité en rejetant la plainte de la requérante pour défaut d’intérêt de l’Union à poursuivre la procédure, il convient de constater que ni la requête ni la réplique ne comportent des arguments en ce sens. La requérante fait valoir ces allégations devant le Tribunal pour la première fois dans ses observations sur le mémoire en intervention. En l’espèce, il n’est nécessaire ni de se prononcer sur la question de savoir si la République de Pologne pouvait invoquer ce grief en sa qualité d’intervenante, ni d’examiner si les allégations de la requérante pourraient constituer une ampliation de son deuxième moyen. En effet, il y a lieu de constater que les seules preuves invoquées à l’appui du prétendu défaut d’impartialité de la part de la Commission figurent en annexe aux observations sur le mémoire en intervention de la requérante, sans que celle-ci ait justifié le retard dans la production desdites preuves. Ainsi, ces preuves doivent être rejetées comme irrecevables, conformément à l’article 85, paragraphe 3, du règlement de procédure. En tout état de cause, il y a lieu de relever que ces preuves, à les supposer recevables, ne comportent pas d’éléments relatifs à la procédure en cause qui permettraient au Tribunal, dans le cadre du recours dont il est saisi, de conclure à un manque d’impartialité de la Commission en l’espèce. En conséquence, il convient de constater que le prétendu manque d’impartialité de la Commission dans la procédure faisant l’objet du présent litige n’a pas été étayé par le moindre commencement de preuve pertinent, ni de la part de la requérante ni de la part de la République de Pologne.
79 Ainsi, les griefs tirés du pouvoir discrétionnaire de la Commission doivent être rejetés.
Sur le grief tiré d’une durée excessive de la procédure administrative ayant conduit à l’adoption de la décision attaquée
80 S’agissant de la durée de la procédure en cause, il convient de rappeler que l’observation d’un délai raisonnable dans la conduite des procédures administratives en matière de politique de la concurrence constitue un principe général de droit de l’Union dont les juridictions de l’Union assurent le respect (voir arrêt du 19 décembre 2012, Heineken Nederland et Heineken/Commission, C‑452/11 P, non publié, EU:C:2012:829, point 97 et jurisprudence citée).
81 Le caractère raisonnable de la durée de la procédure doit s’apprécier en fonction des circonstances propres de chaque affaire et, notamment, du contexte de celle-ci, de la conduite des parties au cours de la procédure, de l’enjeu de l’affaire pour les différentes entreprises intéressées et de son degré de complexité ainsi que, le cas échéant, d’informations ou de justifications que la Commission est susceptible d’apporter quant aux actes d’enquête diligentés au cours de la procédure administrative (arrêt du 15 juillet 2015, HIT Groep/Commission, T‑436/10, EU:T:2015:514, point 240).
82 En outre, il a été jugé que, lorsque la Commission décide de procéder à l’instruction d’une plainte dont elle est saisie, elle doit, sauf motivation dûment circonstanciée, le faire avec la diligence, le soin et le sérieux requis, aux fins d’être en mesure d’apprécier en pleine connaissance de cause les éléments de fait et de droit soumis à son appréciation par les plaignants (arrêts du 29 juin 1993, Asia Motor France e.a./Commission, T‑7/92, EU:T:1993:52, point 36, et du 27 septembre 2006, Haladjian Frères/Commission, T‑204/03, EU:T:2006:273, point 29).
83 En l’espèce, certes, la durée de 71 mois qui s’est écoulée entre le dépôt de la plainte et l’adoption de la décision attaquée est particulièrement longue. Cette longueur de la procédure est accentuée par le fait que, comme les parties principales l’ont confirmé lors de l’audience, la requérante a dénoncé l’ensemble des pratiques en cause dès le dépôt de sa plainte le 12 juillet 2012.
84 Toutefois, la requérante a avancé dans sa plainte un grand nombre d’allégations concernant des catégories d’infractions complexes. En effet, les allégations avancées dans la plainte concernent, premièrement, la politique tarifaire de Velux, et en particulier une discrimination par les prix, des rabais abusifs, une pratique de prix prédateurs et des promotions de vente à long terme, deuxièmement, l’introduction de « marques de combat », troisièmement, d’autres pratiques discriminatoires, telles qu’une discrimination en ce qui concerne les dépenses publicitaires, le nombre de représentants commerciaux et les délais de livraison en fonction des liens qu’entretiennent les distributeurs et les clients avec la requérante, quatrièmement, une stratégie de dépôts de demandes de brevets injustifiées et l’introduction par Velux d’actions en justice non fondées à l’encontre de la requérante et, cinquièmement, une prétendue pratique de contrats d’exclusivité conclus par Velux avec des fournisseurs et d’autres partenaires commerciaux visant à les empêcher de collaborer avec la requérante.
85 Conformément aux principes rappelés au point 68 ci-dessus, la Commission était tenue de considérer, en les examinant attentivement, tous les éléments de fait et de droit pertinents portés à sa connaissance par la requérante afin de décider de la suite à donner à la plainte en cause. Ainsi, eu égard au nombre et à la complexité des pratiques dénoncées par la requérante, l’examen qui incombait à la Commission était nécessairement plus long que dans l’hypothèse d’une plainte qui porterait sur un faible nombre de pratiques peu complexes.
86 De plus, il convient également de souligner que la requérante a contribué par son propre comportement à la longueur de la procédure, dans la mesure où elle a complété sa plainte à plusieurs reprises pendant toute la durée de la procédure, en fournissant de nombreux éléments de preuve supplémentaires (voir points 6, 11, 14, 15 et 21 ci-dessus).
87 À cet égard, la requérante fait valoir qu’elle a déposé des preuves supplémentaires uniquement dans les compléments de plainte de septembre 2012, de juin 2014, de janvier 2016 et d’avril 2017. Cependant, même à supposer que seuls les compléments de plainte visés par la requérante aient nécessité une analyse approfondie de la part de la Commission, il convient de relever qu’elle a déposé des compléments de plainte également après la réception de la lettre l’informant de l’intention de rejeter la plainte ainsi qu’après l’introduction du recours en carence visé au point 18 ci-dessus (voir points 15 et 21 ci-dessus). Par ailleurs, outre l’examen diligent de tous les éléments pertinents fournis par la requérante, la durée de la procédure englobe également le temps de rédaction de l’appréciation provisoire et de la décision attaquée.
88 Ainsi, même si la durée globale de 71 mois de la procédure administrative portant sur l’examen de la plainte en cause est particulièrement longue, elle s’explique par les circonstances propres de l’affaire, en particulier par le volume de la plainte, par le nombre et le degré de complexité des pratiques alléguées, par le comportement de la requérante, par l’obligation pour la Commission d’examiner attentivement l’ensemble des éléments fournis par la requérante et de respecter les différentes étapes procédurales ainsi que par les démarches diligentées par celle-ci dans le cadre du traitement de la plainte.
89 Dans ce contexte, il convient aussi de tenir compte du fait que la Commission n’est pas restée inactive pendant la procédure administrative. En effet, elle a non seulement analysé la plainte, les différents mémoires et preuves ampliatifs fournis par la requérante tout au long de la procédure ainsi que les informations fournies par Velux, mais elle a également demandé à plusieurs reprises des renseignements à cette dernière et à la requérante (voir points 10 et 11 ci-dessus). En outre, la Commission a tenu plusieurs réunions avec les entreprises intéressées (voir points 8, 9 et 19 ci-dessus).
90 Par ailleurs, l’argument de la requérante et de la République de Pologne selon lequel la plainte en cause aurait dû pouvoir être traitée plus rapidement, puisque la Commission avait déjà procédé à l’enquête ouverte d’office, ne peut pas prospérer. En effet, l’enquête ouverte d’office a été close en janvier 2009, alors que la requérante a déposé sa plainte en juillet 2012. Dans ses observations sur la lettre du 21 décembre 2015, mentionnées au point 14 ci-dessus, la requérante met elle-même en exergue le fait que sa plainte de 2012 dénonce des griefs et des pratiques entièrement nouveaux. En outre, la requérante souligne que, s’agissant d’un secteur très dynamique, les pratiques commerciales changent régulièrement. À cet égard, il est constant que de très nombreuses preuves fournies par la requérante au cours de la procédure administrative sont postérieures à la clôture de l’enquête ouverte d’office. De même, dans ses réponses et observations, Velux a fourni à la Commission des informations concernant des périodes postérieures à la clôture de l’enquête ouverte d’office. En outre, en dépit d’une certaine expérience dans le secteur concerné du fait de l’enquête ouverte d’office, comme il est rappelé au point 88 ci-dessus, la Commission était tenue d’examiner avec diligence les pratiques dénoncées dans la plainte en cause et d’analyser attentivement l’ensemble des éléments fournis par la requérante tout au long de la procédure ainsi que de respecter les droits de la défense dont bénéficiait Velux et un certain nombre d’étapes procédurales.
91 En tout état de cause, comme le souligne à juste titre la Commission, ce n’est que lorsque la violation du délai raisonnable a eu une incidence sur l’issue de la procédure qu’une telle violation est de nature à entraîner l’annulation de la décision attaquée (voir arrêt du 15 juillet 2015, HIT Groep/Commission, T‑436/10, EU:T:2015:514, point 243 et jurisprudence citée).
92 Or, dans le cadre de la phase écrite de la procédure devant le Tribunal, la requérante n’a ni invoqué ni a fortiori démontré que la solution retenue par la Commission dans la décision attaquée aurait été affectée par la durée de traitement de la plainte. Il est vrai que, lors de l’audience, elle a indiqué que la durée de traitement de sa plainte a eu une incidence sur l’issue de la procédure. Toutefois, elle n’a pas soutenu qu’il s’agissait d’une ampliation de son deuxième moyen. Par ailleurs, les observations qu’elle a présentées lors de l’audience ne se fondent pas sur des éléments de droit ou de fait qui se seraient révélés pendant la procédure. Ainsi, comme l’a fait valoir la Commission, en application de l’article 84 du règlement de procédure, qui interdit la production de moyens nouveaux en cours d’instance, l’argumentation avancée par la partie requérante pour la première fois lors de l’audience doit être rejetée comme irrecevable.
93 En tout état de cause, bien que, pour étayer son argumentation, la requérante ait mentionné les rabais rétroactifs pratiqués par Velux, elle n’a pas démontré que la décision de la Commission aurait pu être différente si elle avait été adoptée plus rapidement. À cet égard, les parties principales ont d’ailleurs confirmé, lors de l’audience, que cette pratique avait cessé en 2008, ce dont il a été pris acte au procès-verbal de l’audience. Ainsi, il est constant que la pratique des rabais rétroactifs a cessé avant l’adoption de la décision qui a clos l’enquête ouverte d’office au motif que les preuves recueillies à l’époque n’indiquaient pas l’existence d’un comportement anticoncurrentiel (voir point 4 ci-dessus). En outre, dans le cadre de la présente procédure devant le Tribunal, la requérante n’a ni produit le moindre élément de preuve pour étayer l’allégation selon laquelle ladite pratique des rabais rétroactifs, qui a cessé en 2008, continuait à produire des effets au moment de l’introduction de sa plainte en 2012, ni allégué que cette pratique aurait de nouveau été mise en œuvre à une date ultérieure.
94 Enfin, il a également été jugé que, en ce qui concerne l’application des règles de concurrence, le dépassement du délai raisonnable ne peut constituer un motif d’annulation que de décisions constatant des infractions, et à la condition qu’il ait été établi que la violation de ce principe a porté atteinte aux droits de la défense des entreprises concernées. En dehors de cette hypothèse spécifique, le non-respect de l’obligation de statuer dans un délai raisonnable est sans incidence sur la validité de la procédure administrative au titre du règlement (CE) no 1/2003 du Conseil, du 16 décembre 2002, relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 et 82 [CE] (JO 2003, L 1, p. 1) (voir arrêt du 15 juillet 2015, HIT Groep/Commission, T‑436/10, EU:T:2015:514, point 244 et jurisprudence citée).
95 Il ressort de tout ce qui précède que, d’une part, même si la durée de la procédure ayant conduit à l’adoption de la décision attaquée est particulièrement longue, elle peut s’expliquer par les circonstances propres de l’espèce et, d’autre part, et en tout état de cause, compte tenu de l’absence d’incidence de cette durée sur l’issue de la procédure administrative en cause, elle ne pourrait être prise en compte, à elle seule, dans le cadre d’un recours en annulation. À cet égard, il convient par ailleurs de constater que la requérante n’a pas formulé de conclusions indemnitaires dans la requête introductive d’instance. Dans ces circonstances, le grief tiré d’une durée excessive de la procédure administrative ayant conduit à l’adoption de la décision attaquée doit être rejeté.
Sur les griefs tirés de l’incidence de la durée de la procédure administrative sur la possibilité pour la requérante de faire valoir ses droits
96 Selon la requérante, la durée de la procédure administrative ayant conduit à l’adoption de la décision attaquée la priverait de la possibilité de faire valoir ses droits devant les autorités de concurrence des États membres, et ce d’autant plus que la Commission n’a pas adopté de décision finale.
97 En premier lieu, s’agissant du grief selon lequel, en substance, l’adoption tardive d’une décision rejetant la plainte porterait atteinte au droit de la requérante à une protection juridictionnelle effective, il convient de rappeler que les personnes physiques ou morales qui sont habilitées à introduire une plainte au titre de l’article 7 du règlement no 1/2003 disposent d’une voie de recours destinée à protéger leurs intérêts légitimes s’il n’est pas fait droit, en tout ou partie, à leur plainte (voir arrêt du 16 mai 2017, Agria Polska e.a./Commission, T‑480/15, EU:T:2017:339, point 93 et jurisprudence citée). Or, en l’espèce, la requérante a précisément fait usage de cette voie de droit en introduisant le présent recours au titre de l’article 263 TFUE.
98 En deuxième lieu, s’agissant du grief tiré de l’absence d’adoption d’une décision statuant sur le fond, il y a lieu de rappeler que ni l’article 7 du règlement no 1/2003, ni l’article 7 du règlement no 773/2004 ne confère au plaignant le droit d’exiger de la Commission une décision définitive quant à l’existence ou à l’inexistence de l’infraction alléguée ni n’oblige la Commission à poursuivre en tout état de cause la procédure jusqu’au stade d’une décision finale [voir, en ce sens, arrêts du 20 septembre 2018, Agria Polska e.a./Commission, C‑373/17 P, EU:C:2018:756, point 97, et du 17 décembre 2014, Si.mobil/Commission, T‑201/11, EU:T:2014:1096, point 80 (non publié) et jurisprudence citée]. Il ressort également de la jurisprudence qu’aucune disposition ne confère au plaignant le droit d’obliger la Commission à poursuivre la procédure jusqu’au stade d’une décision finale, et ainsi à rechercher les éléments de preuve relatifs à l’existence ou non de ladite infraction, quand bien même une instruction a été menée (voir, en ce sens, arrêt du 11 juillet 2013, Spira/Commission, T‑108/07 et T‑354/08, non publié, EU:T:2013:367, point 115 et jurisprudence citée).
99 Par ailleurs, il y a lieu de relever que dans le cadre de la procédure devant le Tribunal, la requérante n’a pas produit d’élément qui indiquerait que la Commission lui avait fourni des assurances précises que cette dernière poursuivrait la procédure jusqu’à l’adoption d’une décision finale. Au contraire, la requérante était informée au moment de la réception de la lettre de la Commission du 21 décembre 2015 de l’intention de cette dernière de rejeter sa plainte.
100 En outre, au regard notamment des droits de la défense dont dispose la partie qui fait l’objet d’une procédure en vue d’adopter une décision en application du chapitre III du règlement no 1/2003, il y a lieu de relever qu’il est exclu que la Commission ait mené une « procédure formelle cachée » comme le soutient la requérante.
101 Il résulte de ce qui précède que la requérante ne disposait d’aucune assurance que la Commission donnerait suite à sa plainte.
102 En troisième lieu, la requérante fait valoir que, en raison de la portée territoriale des agissements en cause, la Commission est la seule autorité compétente pour statuer sur ces derniers. Elle ajoute que la Commission dispose de ressources humaines et financières bien plus importantes que les autorités de concurrence nationales.
103 Il y a lieu de relever que ces arguments se heurtent à la jurisprudence citée au point 67 ci-dessus. En effet, ces arguments reviennent, en substance, à affirmer que, dès lors que l’enquête sollicitée couvrirait le territoire de plusieurs États membres et nécessiterait des ressources importantes, la Commission serait tenue d’ouvrir une enquête sans avoir égard à toutes les circonstances du cas d’espèce, et notamment à la faible probabilité de constater une infraction aux règles du droit de la concurrence de l’Union. Lesdits arguments plaident donc pour que l’étendue territoriale et le coût de l’enquête soient érigés en critères décisifs pour constater l’intérêt de l’Union à ouvrir une enquête en méconnaissance de ladite jurisprudence (arrêt du 20 septembre 2018, Agria Polska e.a./Commission, C‑373/17 P, EU:C:2018:756, point 65). Partant, il convient de rejeter ces arguments comme non fondés.
104 En outre, ces arguments reviendraient à établir une règle de répartition des compétences entre la Commission et les autorités des États membres. À cet égard, il y a lieu de relever que, en vertu du règlement no 1/2003, la Commission et les États membres disposent de compétences parallèles pour l’application des articles 101 et 102 TFUE et l’économie dudit règlement repose sur une étroite coopération entre ceux-ci (voir, en ce sens, arrêt du 17 décembre 2014, Si.mobil/Commission, T‑201/11, EU:T:2014:1096, point 36). Toutefois, ni le règlement no 1/2003 ni la communication de la Commission relative à la coopération au sein du réseau des autorités de concurrence (JO 2004, C 101, p. 43) ne prévoit une règle de répartition des compétences entre la Commission et les autorités de concurrence des États membres (arrêt du 17 décembre 2014, Si.mobil/Commission, T‑201/11, EU:T:2014:1096, points 37 à 39).
105 De plus, il ressort également de la jurisprudence que ni le règlement no 1/2003 ni la communication mentionnée au point 104 ci-dessus ne crée de droits ni d’attentes pour une entreprise pour ce qui concerne le traitement de son affaire par une autorité de concurrence donnée (voir arrêt du 17 décembre 2014, Si.mobil/Commission, T‑201/11, EU:T:2014:1096, point 39 et jurisprudence citée).
106 Ainsi, même à supposer que la Commission ait été particulièrement bien placée pour traiter l’affaire et qu’une autorité de concurrence d’un État membre n’ait pas été bien placée pour le faire, la requérante ne disposait d’aucun droit à voir l’affaire traitée par la Commission (voir, en ce sens, arrêt du 17 décembre 2014, Si.mobil/Commission, T‑201/11, EU:T:2014:1096, point 40). De plus, comme cela ressort du point 99 ci-dessus, la Commission n’avait pas fourni à la requérante des assurances précises qu’elle donnerait suite à sa plainte.
107 En quatrième lieu, la requérante fait valoir que les autorités de concurrence des États membres seraient réticentes à ouvrir des enquêtes alors que la Commission examine une plainte ayant le même objet. Pour étayer ce grief, elle produit une lettre de l’UOKiK du 17 novembre 2017.
108 À cet égard, tout d’abord, il convient de relever que, en l’espèce, aucune disposition du règlement no 1/2003 ne contraindrait une autorité de concurrence d’un État membre à suspendre la procédure qu’elle a ouverte ou à rejeter une plainte dont elle est saisie au motif que la Commission examinerait une plainte portant sur les mêmes pratiques.
109 En effet, tel que cela a été rappelé au point 104 ci-dessus, ni le règlement no 1/2003 ni la communication relative à la coopération au sein du réseau des autorités de concurrence ne prévoit de règle de répartition des compétences entre la Commission et les autorités de concurrence des États membres. Conformément à l’article 11, paragraphe 6, du règlement no 1/2003, auquel se réfère la Commission, les autorités de concurrence nationales sont dessaisies de leurs compétences d’appliquer les articles 101 et 102 TFUE uniquement dans l’hypothèse où la Commission ouvre une procédure en vue de l’adoption d’une décision en application du chapitre III de ce règlement. Comme le souligne à juste titre la Commission, étant donné qu’elle n’avait pas ouvert de procédure formelle, cette disposition n’était pas applicable en l’espèce.
110 Ensuite, lors de l’audience, la République de Pologne a confirmé que, conformément au droit polonais, le président de l’UOKiK disposait de la possibilité d’ouvrir une enquête portant sur les pratiques en cause alors que la Commission examinait ces pratiques dans le cadre du traitement de la plainte dont elle était saisie.
111 La requérante fait néanmoins valoir que, malgré cette possibilité en droit polonais et le libellé de l’article 11, paragraphe 6, du règlement no 1/2003, le président de l’UOKiK a refusé d’ouvrir une enquête, et ce en dépit du fait qu’il avait reçu les informations relatives aux pratiques dénoncées.
112 Il convient de relever que la lettre de l’UOKiK produite par la requérante afin d’étayer son grief répond à une plainte introduite en septembre 2017 par une association professionnelle dont la requérante est membre. S’il est vrai que cette lettre indique que, au regard de la procédure en cours devant la Commission, il serait précoce pour l’UOKiK d’engager des démarches, il ressort très clairement de cette lettre qu’il ne s’agit pas du seul motif pour lequel cette autorité a décidé, en novembre 2017, de ne pas agir. En effet, il y est notamment précisé que les allégations avancées n’étaient pas suffisamment étayées, que, en principe, les autorités de concurrence d’autres États membres seraient compétentes pour connaître des allégations d’abus de position dominante sur leur territoire et pour infliger d’éventuelles sanctions et que certaines preuves soulevaient des doutes et se rapportaient à une période pour laquelle les délais de prescription nationaux avaient déjà expiré avant la saisine de l’UOKiK. Ainsi, il ressort de cette lettre que la décision de l’UOKiK de ne pas ouvrir une enquête s’expliquait également par d’autres motifs que l’examen par la Commission de la plainte de la requérante.
113 En cinquième lieu, la requérante fait valoir que la lettre de l’UOKiK démontre également que la durée de l’examen de sa plainte par la Commission a eu pour conséquence l’expiration des délais de prescription, qui rend impossible la saisine d’autorités de concurrence nationales.
114 Il est vrai que la lettre de l’UOKiK mentionne que certaines preuves se rapportent à des faits pour lesquels les délais de prescription nationaux ont expiré. En outre, la République de Pologne a indiqué que le droit polonais applicable en l’espèce ne prévoyait pas la suspension des délais de prescription des infractions et des recours en indemnité du fait de l’examen d’une plainte par la Commission.
115 À cet égard, il y a lieu de relever que la requérante avait été informée par la lettre du 21 décembre 2015 de l’intention de la Commission de rejeter sa plainte. Cependant, ni dans ses observations sur ladite lettre de la Commission, mentionnées au point 14 ci-dessus, ni dans la requête par laquelle elle a introduit son recours en carence, que la requérante a produit en tant qu’annexe de la requête dans la présente affaire, la requérante n’a indiqué que la durée de l’examen de sa plainte par la Commission pourrait avoir des conséquences sur sa possibilité de faire valoir ses droits devant les autorités nationales en raison de l’expiration des délais de prescription, alors que la requérante ne pouvait pas ignorer ce risque. En dépit du risque lié à l’expiration des délais de prescription en droit national, il est constant que la requérante a complété sa plainte à de nombreuses reprises pendant toute la durée de la procédure, et notamment après la réception de l’appréciation provisoire, à la fin de l’année 2015, ainsi qu’après l’introduction d’un recours en carence devant le Tribunal. Comme cela ressort du point 86 ci-dessus, la durée de la procédure administrative ayant conduit à l’adoption de la décision attaquée est donc, en partie, due au comportement de la requérante. Il en résulte que l’argument de la requérante selon lequel la lenteur d’action excessive de la Commission l’aurait privée de la possibilité de faire valoir ses droits devant les autorités de concurrence des États membres en raison de l’expiration des délais de prescription en droit national ne saurait prospérer.
116 Par ailleurs, il a été jugé que la décision de la part de l’UOKiK de ne pas instruire une plainte nationale en raison des règles de prescription prévues en droit polonais, qui ne contient aucune appréciation relative à la méconnaissance ou non des articles 101 et 102 TFUE, ne saurait avoir pour effet de contraindre la Commission à ouvrir une enquête (voir arrêt du 16 mai 2017, Agria Polska e.a./Commission, T‑480/15, EU:T:2017:339, point 77 et jurisprudence citée).
117 Ainsi, le fait que l’UOKiK a refusé d’agir sur la base des éléments que la requérante lui a fait parvenir à partir de janvier 2016 ainsi qu’après la saisine, en septembre 2017, par l’association professionnelle dont la requérante est membre n’est ni imputable à la Commission ni ne saurait avoir pour effet de contraindre celle-ci à poursuivre la procédure jusqu’à l’adoption d’une décision finale.
118 En outre, la requérante a confirmé, en réponse à une question du Tribunal, qu’elle n’avait pas saisi une autorité de concurrence d’un autre État membre afin d’obtenir le respect de l’article 102 TFUE avant l’expiration alléguée des délais de prescription. À cet égard, elle a expliqué que le fait de ne pas avoir déposé une plainte auprès d’une autorité de concurrence d’un autre État membre s’expliquait par sa décision de compléter à plusieurs reprises la plainte auprès de la Commission, qui était, selon elle, la mieux placée pour connaître de la plainte.
119 Il y a lieu de relever qu’il a été jugé que le fait que des comportements dénoncés dans une plainte aient eu lieu dans plusieurs États membres ne pourrait constituer qu’un indice du fait qu’une action à l’échelle de l’Union puisse être plus efficace que de multiples actions à l’échelle nationale. Or, un tel indice ne suffirait pas non plus, en tant que tel, pour justifier l’ouverture d’une enquête par la Commission (voir arrêt du 16 mai 2017, Agria Polska e.a./Commission, T‑480/15, EU:T:2017:339, point 63 et jurisprudence citée). Ainsi, comme il a été rappelé au point 103 ci-dessus, l’étendue territoriale et le coût de l’enquête ne sauraient être érigés en critères décisifs pour constater l’intérêt de l’Union à ouvrir une enquête.
120 Enfin, conformément à une jurisprudence constante, la requérante avait la possibilité d’engager devant les juridictions nationales des actions en réparation des préjudices prétendument subis du fait des comportements faisant l’objet de la plainte afin d’obtenir le respect de l’article 102 TFUE et de faire valoir les droits qu’elle tire de cette disposition devant une juridiction nationale, particulièrement lorsque la Commission décide de ne pas donner une suite favorable à sa plainte (voir, en ce sens, arrêt du 20 septembre 2018, Agria Polska e.a./Commission, C‑373/17 P, EU:C:2018:756, point 83).
121 D’ailleurs, comme le prévoit l’article 19, paragraphe 1, second alinéa, TUE, il incombe aux États membres d’établir les voies de recours nécessaires pour assurer aux justiciables le respect de leur droit à une protection juridictionnelle effective dans les domaines couverts par le droit de l’Union, et non pas à la Commission de pallier, par l’ouverture d’une enquête nécessitant des ressources importantes alors que la probabilité de constater une infraction aux articles 101 et 102 TFUE est faible, les éventuelles insuffisances de la protection juridictionnelle au niveau national (arrêt du 20 septembre 2018, Agria Polska e.a./Commission, C‑373/17 P, EU:C:2018:756, point 87).
122 Or, il importe de constater que la requérante n’a introduit aucune action en ce sens devant une juridiction d’un État membre.
123 Il s’ensuit que la requérante n’a, en tout état de cause, pas démontré en quoi il lui était impossible d’obtenir le respect de l’article 102 TFUE devant les autorités de concurrence ou les juridictions nationales. Dès lors, l’argument de la requérante selon lequel l’impossibilité de faire valoir ses droits devant ces instances résulterait de la longueur de la procédure ayant conduit à l’adoption de la décision attaquée doit être rejeté.
124 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, le deuxième moyen doit être rejeté.
Sur le premier moyen, tiré d’une erreur manifeste d’appréciation et d’une insuffisance de motivation
125 Le premier moyen comporte deux branches. Dans le cadre de la première branche, la requérante soutient que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation et n’a pas suffisamment motivé la décision attaquée lorsqu’elle a conclu à l’absence d’intérêt suffisant de l’Union à poursuivre la procédure au motif que la probabilité d’établir une violation de l’article 102 TFUE était limitée. La seconde branche du premier moyen est tirée d’une erreur manifeste d’appréciation en ce que la Commission a conclu que l’étendue des investigations nécessaires serait probablement disproportionnée au regard de cette probabilité limitée.
126 Lors de l’audience, en réponse à une question du Tribunal, la requérante a confirmé que l’étendue du premier moyen se limitait aux pratiques des prix prédateurs, des « marques de combat », des rabais d’investissement et des contrats d’exclusivité. Dans ces circonstances, la Commission a renoncé à la fin de non-recevoir selon laquelle les griefs concernant les autres pratiques examinées dans le cadre de la procédure administrative ayant conduit à l’adoption de la décision attaquée ne répondaient pas aux exigences minimales définies à l’article 21 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et à l’article 76 du règlement de procédure. Il a été pris acte de ces déclarations dans le procès-verbal de l’audience.
Sur la première branche du premier moyen, tirée d’une erreur manifeste d’appréciation et d’une motivation insuffisante en ce qui concerne la conclusion d’une probabilité limitée d’établir une violation de l’article 102 TFUE
127 Dans le cadre de la première branche du premier moyen, la requérante conteste, en substance, d’une part, l’appréciation effectuée par la Commission quant à la probabilité limitée d’établir que les pratiques des prix prédateurs, des « marques de combat », des rabais d’investissement et des contrats d’exclusivité sont répréhensibles au titre de l’article 102 TFUE et, d’autre part, le caractère suffisant de la motivation fournie à cet égard.
– Sur le grief tiré d’une appréciation manifestement erronée en fait et en droit de la pratique des prix prédateurs
128 La requérante considère, en substance, que l’ampleur de la différence des prix de vente des produits de Velux dans les différents pays de l’Union ne peut pas uniquement s’expliquer par les spécificités des marchés nationaux, mais témoigne d’une pratique de prix prédateurs dans certains pays. Dans ce contexte, elle invoque un rapport établi par un cabinet d’audit et de conseil (ci-après le « rapport d’expert »), qui analyse certaines pratiques de prix de Velux entre 2005 et 2011. Selon la requérante, il ressort du rapport d’expert qu’il existe des éléments sérieux justifiant l’examen par la Commission des politiques de prix pratiquées par Velux sous l’angle des prix prédateurs. À cet égard, la requérante fait valoir que la Commission a repris, sans aucune analyse critique, les analyses fournies par Velux, et ce en dépit des erreurs de méthodologie manifestes soulevées par la requérante dans le cadre de la procédure administrative, telles que l’omission de certaines catégories de coûts dans les calculs présentés par Velux. En outre, la majorité des éléments fournis par Velux n’ayant pas été divulguée à la requérante pour des questions de confidentialité, celle-ci n’aurait pas été en mesure d’y répondre. Par ailleurs, la requérante soutient que la pratique de prix prédateurs est dissimulée par une pratique de prix de transfert qui permet aux différentes sociétés appartenant au groupe Velux d’afficher un niveau de bénéfices fictif positif. Enfin, la requérante fait valoir qu’elle a fourni l’ensemble des preuves qu’un concurrent est susceptible de produire pour étayer une pratique de prix prédateurs et qu’il ne pourrait pas être exigé qu’un plaignant démontre de manière incontestable l’existence d’une telle pratique pour que sa plainte puisse aboutir.
129 La Commission conteste les arguments de la requérante.
130 Premièrement, s’agissant des réserves émises dans la décision attaquée concernant la valeur probante du rapport d’expert, il y a lieu de constater qu’il s’agit de l’appréciation par la Commission de ce rapport fondée notamment sur le contenu de celui-ci et sur les observations de Velux concernant ce rapport. Or, il est tout à fait loisible à la Commission d’apprécier la valeur probante d’éléments de preuve de façon autonome (arrêt du 11 janvier 2017, Topps Europe/Commission, T‑699/14, non publié, EU:T:2017:2, point 52).
131 En tout état de cause, il ressort du rapport d’expert que l’accès à des données publiques était insuffisant et que les analyses qui y sont reflétées sont fondées sur un certain nombre d’estimations, ce qui a nécessairement un impact sur leur fiabilité.
132 Par ailleurs, comme le souligne la Commission, ce rapport comporte également un scénario fondé sur des hypothèses plus prudentes, selon lesquelles uniquement les prix pratiqués dans un État tiers, à savoir en Ukraine, seraient inférieurs aux coûts moyens variables. Selon ce scénario, les prix pratiqués dans l’Espace économique européen n’étaient donc pas inférieurs aux coûts moyens variables. À cet égard, il y a lieu de rappeler que des prix inférieurs aux coûts moyens variables doivent être considérés comme abusifs, alors que des prix inférieurs aux coûts moyens totaux, mais supérieurs aux coûts moyens variables, sont abusifs lorsqu’ils sont fixés dans le cadre d’un plan ayant pour but d’éliminer un concurrent (voir, en ce sens, arrêt du 3 juillet 1991, AKZO/Commission, C‑62/86, EU:C:1991:286, points 71 et 72). Or, la requérante n’allègue pas que le rapport d’expertise comporte des conclusions selon lesquelles Velux mettrait en œuvre un plan ayant pour but d’éliminer un concurrent. Par conséquent, la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en considérant que la fiabilité des conclusions figurant dans le rapport d’expert était très limitée et que ce dernier ne démontrait pas une pratique prédatrice dans un marché géographique qui relève de sa compétence.
133 Deuxièmement, s’agissant de l’allégation de la requérante selon laquelle, en substance, Velux aurait fourni à la Commission des informations inexactes en vue de dissimuler la pratique de prix prédateurs, il y a lieu de rappeler que la communication d’un renseignement inexact ou dénaturé en réponse à une demande de renseignement de la Commission est passible d’une amende pouvant s’élever jusqu’à 1 % du chiffre d’affaires total réalisé au cours de l’exercice social précédent.
134 En outre, il est indiqué dans la décision attaquée que l’omission alléguée de certains coûts dans les données fournies par Velux ne résultait pas d’erreurs de calcul, mais de l’application d’une autre méthodologie, utilisant des indicateurs plus stricts, que celle invoquée par la requérante. De plus, en réponse aux observations de celle-ci, Velux a fourni des calculs fondés sur une autre méthodologie, incorporant les coûts en cause. Or, même en adaptant ainsi les analyses, les marges étaient positives pour tous les produits de Velux concernés dans les pays en cause. Le Tribunal considère que les arguments de la requérante qui, en substance, consistent à critiquer le fait que la méthodologie utilisée par Velux diverge de celle communément utilisée par la Commission et par le rapport d’expert ne permettent pas de mettre en doute les conclusions de la décision attaquée.
135 La requérante soutient également que la Commission n’a pas vérifié lesdites analyses de coûts fournies par Velux de manière critique. À cet égard, il convient de relever que la requérante indique elle-même que la Commission a également procédé à une analyse de rapports financiers de différentes sociétés du groupe Velux. Ainsi, la Commission n’a pas limité son analyse aux seuls calculs présentés par Velux, mais a pris également en compte d’autres données provenant de Velux ainsi que le rapport d’expert produit par la requérante (voir points 130 à 132 ci-dessus). D’ailleurs, il ressort du rapport d’expert produit par la requérante qu’il est possible que les coûts moyens variables de Velux aient été couverts dans tous les pays, à l’exception de l’Ukraine (voir point 132 ci-dessus). Ainsi, la requérante n’a pas produit d’éléments qui permettent de conclure que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation dans l’analyse des coûts de Velux.
136 Quant à l’argument tiré, en substance, de l’impossibilité pour la requérante de pouvoir émettre des observations sur l’ensemble des données produites par Velux au cours de la procédure administrative en raison de la confidentialité d’un certain nombre de données, il y a lieu de rappeler que la procédure ouverte à la suite d’une plainte ne constitue pas une procédure contradictoire entre les entreprises intéressées (voir point 41 ci-dessus). Par ailleurs, à supposer que la requérante ait contesté l’étendue de la confidentialité invoquée par Velux lors de la procédure administrative, il est constant qu’aucun élément n’a été produit devant le Tribunal pour étayer ce grief. Par conséquent, cet argument ne peut pas prospérer.
137 Troisièmement, s’agissant des allégations liées à la politique de prix de transfert au sein du groupe Velux, il convient de constater qu’il ressort de la décision attaquée que celles-ci sont fondées sur des estimations de prix, de rabais et de marges. Il ressort également de la décision attaquée que, lors de la procédure administrative, la Commission a analysé différentes données fournies par Velux, et notamment des documents afférents à la politique interne du groupe en matière de prix de transfert et des rapports établis par des autorités fiscales à l’issue de contrôles de certaines sociétés du groupe.
138 Or, au cours de la phase écrite de la procédure devant le Tribunal, la requérante a simplement indiqué qu’elle « soupçon[ait] » que les prix de cession internes fussent artificiels, sans fournir d’éléments qui permettraient de remettre en cause les conclusions qui figurent dans la décision attaquée à cet égard.
139 Quatrièmement, la requérante estime avoir apporté toute preuve qu’un concurrent est en mesure d’apporter en matière de prédation. Elle en déduit que, si les preuves qu’elle a fournies en l’espèce sont jugées insuffisantes, il est en pratique impossible pour des plaignants de faire valoir une telle pratique. Or, il convient de rappeler, d’une part, que la décision de rejeter une plainte résulte de l’exercice du pouvoir d’appréciation de la Commission quant à l’établissement de ses priorités (voir points 66 et 67 ci-dessus) et, d’autre part, que ledit pouvoir d’appréciation n’est pas sans limites (voir point 68 ci-dessus).
140 Or, en l’espèce, il ressort des points 130 à 138 ci-dessus que l’évaluation de la probabilité d’établir une pratique de prix prédateurs résulte d’une analyse et d’une mise en balance des preuves fournies par la requérante d’une part, et par Velux d’autre part. À cet égard, il résulte du point 131 ci-dessus que l’appréciation, par la Commission, de la valeur probante du rapport d’expert n’est pas manifestement erronée. Partant, ce grief ne peut pas prospérer.
141 Compte tenu de l’ensemble de ce qui précède, la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation lorsqu’elle a conclu que la probabilité d’établir une pratique de prix prédateurs était faible. Ce grief doit donc être rejeté.
– Sur le grief tiré d’une appréciation manifestement erronée en fait et en droit et insuffisamment motivée de l’introduction des « marques de combat »
142 La requérante fait, en substance, valoir que la création de gammes de produits « bon marché », plus spécifiquement les produits commercialisés sous les marques RoofLITE, DAKEA et BALIO, a pour seul objet d’éliminer la concurrence, et non de participer à une concurrence normale et libre dans ce segment de marché. Ces allégations seraient notamment prouvées par le fait que ces gammes de produits ne sont pas offertes dans tous les pays ainsi que par les pertes financières affichées par la société qui les commercialise. À cet égard, la requérante considère que l’appréciation, par la Commission, des preuves fournies dans la plainte et relatives à l’intention anticoncurrentielle est manifestement erronée et insuffisamment motivée. Enfin, la requérante avance que l’effet anticoncurrentiel de la pratique des « marques de combat » s’est déjà matérialisé.
143 La Commission conteste ces arguments.
144 Premièrement, s’agissant de la prétendue absence de motivation, il y a lieu de rappeler que la motivation doit être adaptée à la nature de l’acte en cause et doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement de l’institution, auteur de l’acte, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle (voir arrêt du 29 septembre 2011, Elf Aquitaine/Commission, C‑521/09 P, EU:C:2011:620, point 147 et jurisprudence citée). Toutefois, dans une décision de rejet de plainte, la Commission n’est pas tenue de prendre position sur tous les arguments que les intéressés invoquent à l’appui de leur plainte. Il suffit qu’elle expose les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision (voir arrêts du 24 janvier 1995, BEMIM/Commission, T‑114/92, EU:T:1995:11, point 41 et jurisprudence citée, et du 27 septembre 2012, Applied Microengineering/Commission, T‑387/09, EU:T:2012:501, point 66 et jurisprudence citée).
145 En l’espèce, la requérante soutient que les motifs énoncés au considérant 111 de la décision attaquée sont très laconiques et ne se réfèrent pas expressément aux éléments de preuve produits.
146 Or, force est de constater qu’il ressort clairement dudit considérant que la Commission a estimé que les documents produits par la requérante démontraient que la marque RoofLITE a été lancée afin de viser un autre segment du marché que celui occupé par la marque Velux, et ce de manière concurrentielle. Par ailleurs, selon ce considérant, il ne ressort de ces documents ni que Velux ait eu l’intention de sacrifier la rentabilité ou la croissance de la marque pour évincer la requérante du marché ou de vendre ses produits en dessous des coûts, ni que des pratiques sélectives et orientées, non justifiées par des considérations économiques, aient été prévues, ni que cette marque ait été utilisée pour verrouiller l’accès au marché aux concurrents. C’est en s’appuyant sur ces motifs que la Commission a conclu qu’il ne résultait pas des documents produits par la requérante que les marques « bon marché » de Velux étaient anticoncurrentielles.
147 Ainsi, la Commission a exposé de façon claire le raisonnement l’ayant conduite à sa conclusion. De plus, il ressort du considérant 111 de la décision attaquée signifiée à la requérante que la Commission s’est prononcée sur les documents produits par la requérante et a répondu aux arguments que cette dernière en a tirés. La requérante ne peut donc pas utilement faire valoir que la Commission n’a pas analysé ces documents.
148 La requérante invoque encore une motivation insuffisante en raison du fait que la Commission se réfère dans le considérant 111 au « contexte approprié » des documents pour conclure qu’ils n’attestent pas de l’infraction dénoncée, sans indiquer de quel contexte il s’agit. Or, à supposer que cette expression puisse être trop laconique, rien n’indique qu’une telle imprécision ait empêché la requérante de comprendre l’analyse desdits documents effectuée par la Commission, ainsi que les motifs de la décision attaquée, et de les contester devant le Tribunal.
149 Ainsi, la motivation qui figure au considérant 111 de la décision attaquée a permis à la requérante de comprendre l’appréciation faite par la Commission des documents en cause et permet au Tribunal d’exercer son contrôle à cet égard. Il y a donc lieu de considérer que la décision attaquée est motivée à suffisance de droit.
150 Deuxièmement, la requérante allègue que la marque RoofLITE est proposée de manière sélective sur des marchés sélectionnés en fonction des parts de marchés des concurrents de Velux, de leur comportement et de leurs capacités de développement. À cet égard, la Commission précise, sans être contredite par la requérante, qu’il ressort des informations de la plainte de la requérante que ladite marque a été introduite dans 19 pays différents entre 2001 et 2005. En l’absence de développements et de preuves précis à ce sujet dans le cadre de la procédure devant le Tribunal, la requérante n’a pas démontré une erreur manifeste d’appréciation de la part de la Commission en ce qui concerne la prétendue sélectivité des « marques de combat ».
151 Troisièmement, la requérante soutient, en substance, que les pertes financières de la société qui commercialise les produits des marques RoofLITE, DAKEA et BALIO s’expliquent par la vente à perte de ces produits.
152 Dans la décision attaquée, la Commission indique que les informations financières fournies par Velux démontrent notamment que la société en cause couvrait ses coûts variables pour chaque année de la période 2005-2015. Par ailleurs, la Commission a relevé que la gamme de produits RoofLITE était rentable depuis 2008, alors que les gammes de produits DAKEA et BALIO n’auraient été lancées qu’à partir de 2012. En outre, la Commission a estimé que les justifications apportées par Velux au sujet de certaines pertes encourues par cette société, qui pourraient suggérer qu’elle n’a pas toujours couvert ses coûts moyens totaux, étaient convaincantes. Partant, la Commission a conclu que les preuves recueillies n’indiquaient pas que ces marques avaient un objet anticoncurrentiel.
153 À cet égard, il y a lieu de rappeler que la Commission a pu valablement se fonder sur les informations qu’elle avait reçues de la part de Velux (voir points 133 et 134 ci-dessus). De plus, dans le cadre de la procédure devant le Tribunal, la requérante n’a pas contesté les conclusions selon lesquelles les coûts moyens variables de la société concernée avaient été couverts pendant la période concernée. Ainsi, conformément aux principes rappelés au point 132 ci-dessus, afin de pouvoir conclure à un abus en l’espèce, l’hypothèse d’un plan ayant pour but d’éliminer un concurrent aurait dû être vérifiée, notamment en procédant à une analyse approfondie des différentes lignes de produits, des coûts des différentes entreprises concernées et des prix pratiqués.
154 En outre, la décision attaquée mentionne plusieurs explications pour les pertes encourues, à savoir le lancement de nouvelles gammes de produits, y compris de produits autres que des fenêtres de toit et des brides, et l’impact de la crise financière de 2008 sur le secteur de la construction. Il convient de relever que la requérante se contente d’affirmer que les données comptables internes de la société en cause seraient moins fiables que les données publiques dont elle se prévaut. Toutefois, elle ne produit aucun élément qui permettrait de mettre en doute l’exactitude des explications fournies dans la décision attaquée, et notamment, d’une part, le fait que de nouvelles gammes de produits avaient été lancées pendant la période en cause et, d’autre part, le fait que le secteur des fenêtres de toit et des brides a ressenti l’impact de la crise financière de l’année 2008. D’ailleurs, il ressort du considérant 48 de la décision attaquée, et la requérante ne le conteste pas, que cette dernière a admis que cette crise a eu pour effet une stagnation du marché de la construction.
155 Quant à l’argument de la requérante selon lequel elle n’a pas eu accès aux données financières de la société concernée en raison de leur traitement confidentiel au cours de la procédure administrative, il convient de le rejeter pour les motifs exposés au point 136 ci-dessus.
156 Quatrièmement, la requérante fait valoir que la Commission aurait apprécié de manière manifestement erronée les éléments découlant des documents internes de Velux en concluant qu’ils ne démontraient pas l’intention anticoncurrentielle de l’introduction des gammes de produits « bon marché ».
157 À cet égard, il ressort notamment de la décision attaquée que la création des gammes de produits en cause visait à répondre à une demande du marché et ne constituait pas en tant que telle une indication d’une violation de l’article 102 TFUE. Selon la Commission, les preuves réunies dans l’affaire peuvent même constituer un indice de l’intensité de la concurrence entre Velux et d’autres fabricants de fenêtres de toit. D’ailleurs, il y a lieu de relever que la requérante ne conteste pas qu’elle a également lancé une gamme de fenêtres de toit à moindre prix en 2012.
158 De plus, contrairement à ce qu’allègue la requérante, les annexes A.12 et A.13 de la requête ne permettent pas de conclure que la création de la marque RoofLITE avait pour seul objectif de marginaliser les concurrents et d’entraver leurs possibilités de développement. En effet, ces documents font notamment état de certaines réticences au sein du groupe Velux quant à la création de nouvelles gammes de produits qui pourraient concurrencer ses produits phares.
159 Quant aux arguments concernant les offres ciblées et attrayantes faites par Velux aux distributeurs et aux clients de la requérante au moment du lancement des gammes de produits en cause, le Tribunal considère que, eu égard aux éléments du dossier, c’est également sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation que la Commission a considéré qu’il était peu probable que ces offres constituent une infraction à l’article 102 TFUE.
160 Enfin, en ce qui concerne l’argument de la requérante selon lequel l’effet anticoncurrentiel de la pratique des « marques de combat » s’est déjà matérialisé, il convient de relever que la requérante ne l’a ni développé ni étayé dans le cadre de la phase écrite de la procédure devant le Tribunal.
161 Or, en vertu de l’article 21, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, applicable à la procédure devant le Tribunal en vertu de l’article 53, premier alinéa, du même statut et de l’article 76, sous d), du règlement de procédure, toute requête doit indiquer l’objet du litige, les moyens et arguments invoqués ainsi qu’un exposé sommaire desdits moyens. Selon une jurisprudence constante, cette indication doit être suffisamment claire et précise pour permettre à la partie défenderesse de préparer sa défense et au Tribunal de statuer sur le recours, le cas échéant, sans autres informations à l’appui. Afin de garantir la sécurité juridique et une bonne administration de la justice, il faut, pour qu’un recours soit recevable, que les éléments essentiels de fait et de droit sur lesquels celui-ci se fonde ressortent, à tout le moins sommairement, mais d’une façon cohérente et compréhensible, du texte de la requête elle-même (voir arrêt du 25 janvier 2018, BSCA/Commission, T‑818/14, EU:T:2018:33, points 94 et 95 et jurisprudence citée).
162 Ainsi, l’argument de la requérante ne peut pas prospérer.
163 Il résulte de tout ce qui précède que le grief tiré d’une appréciation insuffisamment motivée et manifestement erronée en fait et en droit de l’introduction des « marques de combat » doit être rejeté.
– Sur les griefs tirés d’un défaut de motivation et d’une appréciation manifestement erronée en fait et en droit des rabais d’investissement et des rabais rétroactifs
164 Tout d’abord, la requérante fait valoir que la distribution des fenêtres de toit s’effectue exclusivement par le biais des magasins de matériaux de construction, d’une part, et des distributeurs de fenêtres de toit dans le cadre du commerce professionnel, d’autre part. La requérante distingue encore, au sein du commerce professionnel, le « marché d’investissement », dans lequel des investisseurs, tels que des promoteurs et des sociétés de construction, procèdent par des appels d’offres auprès des distributeurs de fenêtres de toit. Elle souligne toutefois qu’il ne s’agit pas d’un marché pertinent distinct plus restreint. Ensuite, la requérante soutient que la Commission a commis des erreurs manifestes d’appréciation concernant le système de rabais mis en œuvre par Velux sur le « marché d’investissement ». Premièrement, la Commission aurait conclu à tort que les spécificités de ce marché permettaient à Velux de fixer des conditions de vente distinctes pour ce canal de distribution. Deuxièmement, la conclusion de la Commission selon laquelle les rabais d’investissement offerts par Velux sont dépourvus de caractère sélectif serait manifestement erronée. Troisièmement, la Commission aurait effectué une appréciation manifestement erronée en ce qui concerne la corrélation entre le niveau des rabais d’investissement offerts par Velux et l’implication de la requérante dans un projet d’investissement spécifique. Quatrièmement, la Commission aurait commis une erreur manifeste d’appréciation en concluant que les rabais d’investissement offerts par Velux n’étaient pas discriminatoires à l’égard des distributeurs. Selon la requérante, la décision attaquée n’est pas motivée de manière suffisante sur ce point dans la mesure où la Commission a omis de justifier le rejet de trois griefs de discrimination avancés dans la plainte. Cinquièmement, à titre subsidiaire, la Commission aurait commis une erreur manifeste d’appréciation en considérant que les rabais d’investissement ne constituaient pas des rabais d’exclusivité.
165 La Commission conteste les arguments de la requérante.
166 À titre liminaire, il convient de rappeler que, conformément à l’article 102, premier alinéa et second alinéa, sous c), TFUE, il est interdit aux entreprises ayant une position dominante sur le marché intérieur ou dans une partie substantielle de celui-ci d’appliquer à l’égard de partenaires commerciaux des conditions inégales à des prestations équivalentes, en leur infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence, dans la mesure où le commerce entre États membres est susceptible d’en être affecté.
167 En l’espèce, il y a tout d’abord lieu de constater que la Commission fait valoir qu’elle a analysé le système des rabais d’investissement en prenant en compte les particularités de ce type de vente, mais qu’elle n’a pas délimité le « marché des ventes aux investisseurs » comme un marché pertinent distinct plus restreint.
168 À cet égard, le Tribunal considère que la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste en considérant que les ventes d’investissement, qui concernent des commandes uniques pour un projet spécifique et qui prennent le plus souvent la forme d’un appel d’offres, se différenciaient des ventes « classiques » aux distributeurs. En effet, la requérante ne peut pas utilement contester le fait que chaque offre d’investissement est unique et reçoit un traitement différent, que les rabais sont proposés à différentes étapes du processus de soumission des offres et que c’est le contractant ou l’investisseur qui sélectionne, selon des critères qu’il définit librement, l’offre et le distributeur pour son projet. Or, une prise en compte des particularités de différents segments de marché ou canaux de distribution pour en déduire qu’il ne s’agit pas de prestations équivalentes ne constitue pas à elle seule une délimitation d’un marché pertinent distinct. Ainsi, les arguments de la requérante qui concernent la délimitation erronée d’un marché pertinent distinct des ventes aux investisseurs doivent être rejetés.
169 Contrairement à ce qu’allègue la requérante, la Commission n’a, par l’adoption de la décision attaquée, pas exempté les ventes d’investissement de toute application de l’article 102 TFUE. En effet, la Commission s’est contentée de conclure que les différences entre les ventes d’investissement et les ventes « classiques » aux distributeurs pouvaient expliquer des divergences quant aux conditions de vente appliquées. Compte tenu des différences entre ces deux types de vente, rappelées au point 168 ci-dessus, le Tribunal considère que la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste en concluant à une faible probabilité de pouvoir établir une discrimination entre les distributeurs.
170 Ensuite, s’agissant du prétendu caractère sélectif des rabais d’investissement, qui auraient pour objectif d’assurer la loyauté des distributeurs, il y a lieu de relever que la décision attaquée a conclu que ces allégations n’étaient pas suffisamment étayées par les preuves examinées. Or, dans le cadre de la procédure devant le Tribunal, la requérante n’invoque aucun argument tiré d’une appréciation erronée, dans la décision attaquée, des preuves fournies dans le cadre de la procédure administrative, qui n’ont pas été produites devant le Tribunal. Dans ces circonstances, une erreur manifeste d’appréciation de la part de la Commission n’est pas établie.
171 Par ailleurs, la requérante fait valoir que la Commission a conclu de manière erronée qu’il n’existait pas de corrélation entre le niveau des rabais offerts par Velux et la participation de la requérante au processus de soumission de l’offre d’investissement. Pour étayer cet argument, elle produit une liste d’offres pour des projets d’investissement en Autriche. Or, contrairement à ce qu’elle allègue, cette liste ne démontre pas que la différence de niveau de rabais offerts par Velux est nécessairement liée au fait que la requérante ait soumis une offre. En effet, comme le fait valoir à juste titre la Commission, les différences de niveau de rabais peuvent dépendre de nombreux facteurs, tels que l’étape du processus à laquelle le rabais est accordé, la taille du projet et l’intensité de la concurrence. En particulier, la liste d’offres produite par la requérante ne permet pas d’apprécier si d’autres concurrents ont également participé au processus de soumission. Ainsi, c’est sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation que la Commission a considéré que la corrélation entre le niveau des rabais offerts par Velux et la participation de la requérante au processus de soumission de l’offre d’investissement n’était pas suffisamment étayée pour établir un abus.
172 En outre, la requérante invoque quatre formes de discrimination entre distributeurs, à savoir, premièrement, une discrimination des distributeurs qui ne sont pas informés de l’existence des rabais d’investissement, deuxièmement, une discrimination des distributeurs qui souhaiteraient participer à une procédure de soumission pour un projet d’investissement en utilisant des produits acquis selon une vente « classique », troisièmement, une discrimination entre distributeurs en raison de l’application de conditions inégales à des prestations équivalentes dans le cadre de projets d’investissement distincts et, quatrièmement, une discrimination entre distributeurs en raison de l’application de conditions inégales à des prestations équivalentes dans le cadre d’un même projet d’investissement. S’agissant des trois premières formes de discrimination, la requérante fait valoir que la décision attaquée est entachée d’un défaut de motivation en ce que la Commission n’aurait pas justifié leur rejet.
173 À cet égard, il convient de rappeler que la Commission n’est pas tenue de prendre position sur tous les arguments invoqués dès lors qu’elle expose les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de sa décision (voir point 144 ci-dessus). En outre, il a été jugé que la Commission ne violait pas son obligation de motivation si elle n’incluait pas, dans sa décision, de motivation précise quant à l’appréciation d’un certain nombre d’aspects qui lui semblent manifestement hors de propos, dépourvus de signification ou clairement secondaires pour son appréciation (voir, en ce sens, arrêt du 10 juillet 2008, Bertelsmann et Sony Corporation of America/Impala, C‑413/06 P, EU:C:2008:392, point 167).
174 Certes, les trois premières formes de discrimination dénoncées par la requérante, rappelées au point 172 ci-dessus, ne font pas l’objet d’une analyse précise dans la décision attaquée. Toutefois, la requérante indique dans sa requête que la Commission a rejeté, dans la décision attaquée, tous les griefs tirés de la discrimination des partenaires commerciaux. La Commission ajoute que les allégations liées aux trois premières formes de discrimination des distributeurs constituent des aspects secondaires qui ne présentent pas d’intérêt pour son appréciation et que la requérante n’a pas fourni de preuves suffisantes pour les étayer. À cet égard, il convient de relever que la requérante s’est bornée, devant le Tribunal, à mentionner de manière très générale ces prétendues discriminations, sans fournir de quelconques détails ou preuves. Dans ces circonstances, le Tribunal estime que la requérante n’a pas présenté d’éléments qui permettent de conclure que les griefs tirés de ces trois formes de discrimination entre distributeurs revêtent une importance essentielle dans l’économie de la décision attaquée. Par conséquent, le Tribunal considère que le grief tiré de l’absence de motivation doit être rejeté.
175 S’agissant de la prétendue discrimination entre distributeurs bénéficiant de rabais d’investissement différents pour le même projet, il convient de relever qu’il ressort de la décision attaquée que la Commission a analysé les règles internes de Velux relatives aux rabais d’investissement ainsi que des exemples concrets fournis par la requérante et par Velux. Elle en a conclu que, certes, les niveaux de rabais pouvaient varier entre les différentes étapes du processus de soumission, mais que, à chacune de ces étapes, les mêmes niveaux de rabais étaient offerts à tous les distributeurs ou investisseurs. Dans ses écritures devant le Tribunal, la requérante se limite, à cet égard, à contester que le « marché d’investissement » constitue un marché pertinent distinct. Toutefois, la Commission n’a pas délimité un marché pertinent distinct (voir point 168 ci-dessus). En particulier, rien n’indique que la Commission ait considéré chaque étape du processus de soumission comme étant un marché pertinent distinct. La comparaison des niveaux de rabais offerts dans le cadre de la même étape du processus de soumission a permis à la Commission de vérifier si des situations similaires n’avaient pas été traitées de manière différente (voir point 166 ci-dessus). La requérante ne conteste d’ailleurs pas que les mêmes niveaux de rabais ont été offerts dans le cadre de la même étape du processus de soumission. Par ailleurs, dans la mesure où différentes étapes d’un processus de soumission ne sont pas nécessairement similaires (voir point 168 ci-dessus), l’offre de niveaux de rabais différents à différentes étapes d’un processus de soumission ne constitue pas à elle seule une discrimination.
176 Il résulte de ce qui précède que la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en concluant qu’il était peu probable que les distributeurs risquent de subir un désavantage concurrentiel en raison des rabais d’investissement.
177 À titre subsidiaire, la requérante soutient que la Commission a omis de considérer que les rabais d’investissement constituaient des rabais d’exclusivité traduisant un abus de position dominante. À cet égard, il convient de rappeler que les offres d’investissement concernent des transactions uniques (voir point 168 ci-dessus) et qu’il revient à l’investisseur ou au contractant de définir les critères de sélection des offres. Si, comme le soutient la requérante, il n’est pas exclu qu’un investisseur souhaite sélectionner deux soumissionnaires proposant des produits substituables pour un même projet, cette hypothèse n’est pas la plus réaliste. En tout état de cause, il y a lieu de relever que la requérante n’a produit devant le Tribunal aucune preuve qui permette d’étayer ses allégations selon lesquelles Velux imposerait une telle exclusivité aux investisseurs.
178 Enfin, tel qu’il est indiqué au point 36 ci-dessus, dans le cadre du troisième moyen, la requérante fait valoir, en substance, que la Commission s’est erronément abstenue de vérifier si des effets anticoncurrentiels de l’application rétroactive des rabais et des primes accordés par Velux persistaient et, le cas échéant, de vérifier si la gravité de cette pratique ou la persistance de ses effets n’était pas de nature à conférer un intérêt pour l’Union au traitement de la plainte par la Commission.
179 Certes, selon une jurisprudence constante, la Commission ne peut se fonder sur le seul fait que de prétendues pratiques contraires au traité ont cessé pour décider de classer sans suite pour défaut d’intérêt de l’Union suffisant une plainte dénonçant ces pratiques, sans avoir vérifié que des effets anticoncurrentiels ne persistaient pas et que, le cas échéant, la gravité des atteintes alléguées à la concurrence ou la persistance de leurs effets n’étaient pas de nature à conférer à cette plainte un intérêt pour l’Union (arrêt du 4 mars 1999, Ufex e.a./Commission, C‑119/97 P, EU:C:1999:116, point 95). Toutefois, cette jurisprudence s’applique seulement dans le cas où la Commission se fonde, pour adopter sa décision, sur la cessation des pratiques prétendument anticoncurrentielles (arrêts du 12 septembre 2007, UFEX e.a./Commission, T‑60/05, EU:T:2007:269, point 74, et du 11 juillet 2013, Spira/Commission, T‑108/07 et T‑354/08, non publié, EU:T:2013:367, point 178).
180 Lors de l’audience, les parties principales ont confirmé que Velux avait cessé la pratique de rabais rétroactifs en 2008, ce dont il a été pris acte dans le procès-verbal de l’audience. Ainsi, il est constant que cette pratique a cessé avant la clôture, en 2009, de l’enquête ouverte d’office et près de quatre ans avant le dépôt de la plainte de la requérante auprès de la Commission.
181 Or, la Commission n’a pas fondé son appréciation de l’absence d’intérêt de l’Union à poursuivre l’examen de l’affaire sur le fait que les pratiques avaient cessé, mais sur la faible probabilité de pouvoir établir une infraction. Partant, il ne saurait lui être reproché de ne pas avoir pris en considération la prétendue persistance des effets anticoncurrentiels desdits rabais et primes.
182 Il résulte de tout ce qui précède que c’est sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation que la Commission a conclu, au sujet des rabais d’investissement et des rabais rétroactifs, à la faible probabilité de pouvoir établir une infraction.
183 Par conséquent, les griefs tirés d’un défaut de motivation et d’une appréciation manifestement erronée en fait et en droit des rabais d’investissement et des rabais rétroactifs doivent être rejetés.
– Sur le grief tiré d’une appréciation manifestement erronée en fait des contrats d’exclusivité
184 La requérante fait valoir que la Commission a apprécié de manière manifestement erronée les éléments de fait en accordant plus de valeur aux contrats fournis par Velux qu’aux preuves fournies par la requérante, desquelles ressortait de manière irréfutable l’existence d’un lien d’exclusivité entre Velux et un fournisseur de verre.
185 La Commission conteste les arguments de la requérante.
186 Tout d’abord, la Commission fait valoir, à juste titre, que l’exclusivité en cause concerne les relations avec des fournisseurs de certains composants ou matières premières, et non une exclusivité dans le cadre de laquelle une entreprise dominante obligerait ses clients à s’approvisionner exclusivement auprès d’elle, verrouillant ainsi l’accès au marché aux concurrents.
187 Or, la requérante a confirmé lors de l’audience que, à partir de 2008, elle a pu se procurer auprès d’autres fournisseurs des composants et des matières premières conformes à la réglementation française entrée en vigueur en 2007. Ainsi, la Commission pouvait conclure que, même dans l’hypothèse où une éventuelle exclusivité aurait existé pendant une période limitée entre un fournisseur de verre particulier et Velux, celle-ci n’avait pas empêché la requérante d’entrer efficacement en concurrence avec Velux.
188 Cette conclusion n’est pas remise en cause par les arguments de la requérante.
189 Contrairement à ce qu’allègue la requérante, les preuves produites devant le Tribunal n’infirment pas l’indication selon laquelle les contrats fournis par Velux qui concernent la période du prétendu abus, et notamment l’année 2007, ne comportent pas de clauses d’exclusivité.
190 À cet égard, en réponse à une mesure d’organisation de la procédure, la Commission a fourni la version confidentielle du contrat visé par la requérante. Or, il est constant que ce contrat ne comporte pas de clause d’exclusivité.
191 Ensuite, il y a lieu de relever que la clause du contrat de licence non exclusive reproduite à l’annexe B.9 du mémoire en défense est issue d’un contrat autre que celui visé par le grief de la requérante. En effet, le contrat dans lequel figure ladite clause est conclu avec une autre entité du groupe de société auquel appartient le fournisseur, a pour objet d’autres produits que ceux visés par la requérante et est postérieur à la période du prétendu abus. De plus, malgré le fait que ladite clause aurait pu être plus précise, elle n’établit pas en elle-même une pratique liée à des clauses d’exclusivité anticoncurrentielles dans la mesure où elle interdit seulement au fournisseur d’accorder à des tiers des licences ayant pour objet les modèles de Velux, et non tout modèle de fenêtre de toit.
192 Ainsi, eu égard aux éléments du dossier, il ne peut être déduit que la Commission ait commis une erreur manifeste d’appréciation quant à la probabilité limitée d’établir une infraction à l’article 102 TFUE en ce qui concerne le prétendu abus lié aux clauses d’exclusivité.
193 Par ailleurs, en ce qui concerne une éventuelle exclusivité de fait, il y a lieu de relever qu’il ne ressort pas de l’échange de courriels produits en tant qu’annexe A.25 de la requête que le fabricant concerné ait effectivement refusé de vendre les produits en cause à la requérante en raison d’un contrat d’exclusivité. Il est seulement indiqué que des vérifications en ce sens étaient en cours. De plus, la Commission soutient sans commettre d’erreur manifeste que ces affirmations d’un employé du fournisseur ne sont pas suffisantes à elles seules pour conclure à l’existence effective d’une exclusivité anticoncurrentielle.
194 Ainsi, la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation en considérant que la probabilité d’établir une infraction était limitée, et, en conséquence, ce grief doit être rejeté.
195 Dès lors que l’ensemble des griefs invoqués dans le cadre de la première branche du premier moyen sont rejetés, il y a, par voie de conséquence, lieu de considérer que la Commission n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation au sujet du prétendu effet cumulatif de ces pratiques.
196 Il résulte de tout ce qui précède que la première branche du premier moyen doit être rejetée dans sa totalité.
Sur la seconde branche du premier moyen, tirée d’une erreur manifeste d’appréciation en ce qui concerne la conclusion selon laquelle une procédure d’examen approfondie nécessiterait des ressources considérables et serait disproportionnée
197 Dans le cadre de la seconde branche du premier moyen, la requérante soutient que la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en considérant qu’une procédure d’examen approfondie nécessiterait des ressources considérables et serait disproportionnée en raison de la faible probabilité de conclure à l’existence d’une infraction. À cet égard, la requérante considère que la Commission aurait pu se limiter à un examen minutieux des éléments fournis dans le cadre de la plainte et interroger de manière ciblée des entreprises spécifiques sur le fondement des preuves qu’elle avait apportées, sans devoir recourir à des études de marché à grande échelle.
198 La Commission conteste ces arguments.
199 À titre liminaire, il y a lieu de rappeler que la Commission a rejeté la plainte de la requérante en raison, d’une part, de la faible probabilité de constater une violation de l’article 102 TFUE et, d’autre part, du caractère disproportionné de toute enquête plus approfondie au regard de cette probabilité limitée.
200 Or, il résulte des points 130 à 196 ci-dessus que la Commission a conclu, sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation, à la faible probabilité d’établir une infraction à l’article 102 TFUE en ce qui concerne les allégations de la requérante relatives aux prix prédateurs, aux « marques de combat », aux rabais et aux contrats d’exclusivité.
201 Ainsi, c’est à la lumière de la faible probabilité de pouvoir établir une infraction qu’il convient de vérifier si la Commission a commis une erreur manifeste d’appréciation en concluant qu’une procédure d’examen nécessiterait des ressources considérables et serait disproportionnée.
202 À cet égard, tout d’abord, il convient de rappeler que, afin de poursuivre la procédure, la Commission aurait dû délimiter les marchés de produits et géographiques pertinents avant d’établir la position dominante de Velux sur le marché ainsi délimité. Or, le Tribunal constate que l’analyse de la détermination du marché géographique des parties diverge et que même les preuves présentées par la requérante comportent des incohérences à cet égard. Quant au marché de produits, le Tribunal rappelle que les sociétés en cause ont présenté une délimitation différente (voir point 23 ci-dessus). En outre, c’est sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation que la Commission a considéré que, afin de déterminer les parts de marchés de Velux sur le marché pertinent, des analyses importantes auraient été requises. Ainsi, c’est sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation que la Commission a considéré que la délimitation du marché pertinent et la détermination de la position dominante de Velux nécessiteraient des ressources importantes.
203 Ensuite, s’agissant de la pratique des prix prédateurs, il ressort des points 130 à 141 ci-dessus que la Commission n’a commis aucune erreur manifeste d’appréciation en concluant que, afin d’évaluer si Velux pratiquait des prix prédateurs sur certains marchés, elle aurait dû effectuer une appréciation autonome et complète de l’éventuelle prédation, compte tenu des lacunes du rapport d’expert fourni par la requérante, d’une part, et des données provenant de Velux, qui indiquent que les coûts variables étaient toujours couverts, d’autre part. En outre, la Commission a, sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation, considéré que les allégations liées à la politique de prix de transfert rendaient cette analyse encore plus complexe et auraient exigé davantage de mesures d’investigation de sa part.
204 Par ailleurs, il résulte des points 153 à 159 ci-dessus que la requérante ne peut utilement remettre en cause la conclusion selon laquelle la Commission aurait dû trouver des preuves de l’existence d’un plan anticoncurrentiel en ce qui concerne les prix supérieurs aux coûts moyens variables, mais inférieurs aux coûts moyens totaux. En particulier, une analyse approfondie des différentes lignes de produits « bon marché », des coûts des sociétés qui les produisent et les commercialisent ainsi que des prix pratiqués aurait été requise afin de déterminer l’existence de ventes à perte des produits commercialisés sous les marques RoofLITE, DAKEA et BALIO. Il en va de même en ce qui concerne les allégations concernant une pratique de prédation qui aurait prétendument résulté des rabais d’investissement.
205 En ce qui concerne les allégations de discrimination, de sélectivité et d’exclusivité liées aux rabais d’investissement, la Commission était également fondée à considérer qu’une analyse détaillée et comparative de nombreuses offres aurait été requise afin de déterminer l’existence ou non d’infractions (voir points 170 à 182 ci-dessus).
206 Enfin, en ce qui concerne les allégations liées à l’exclusivité avec des fournisseurs, la Commission aurait dû déterminer non seulement si le prétendu refus de vente des composants et des matières premières visé au point 193 ci-dessus était effectivement dû à une exclusivité de fait, mais également si d’autres cas d’exclusivité, contractuelle ou de fait, existaient.
207 Dès lors, le Tribunal considère que la Commission a valablement pu estimer que d’importantes mesures d’investigation supplémentaires auraient été nécessaires pour conclure à l’existence, ou non, des pratiques alléguées.
208 Or, il convient de rappeler qu’il est de jurisprudence constante que, si la Commission n’a pas l’obligation de se prononcer sur l’existence ou non d’une infraction, elle ne saurait être contrainte de mener une instruction, puisque cette dernière ne pourrait avoir d’autre objet que de rechercher les éléments de preuve relatifs à l’existence ou non d’une infraction qu’elle n’est pas tenue de constater (arrêts du 18 septembre 1992, Automec/Commission, T‑24/90, EU:T:1992:97, point 76 ; du 16 octobre 2013, Vivendi/Commission, T‑432/10, non publié, EU:T:2013:538, point 68, et du 23 octobre 2017, CEAHR/Commission, T‑712/14, EU:T:2017:748, point 61).
209 En l’espèce, il ne saurait donc être reproché à la Commission de ne pas avoir procédé aux mesures susvisées.
210 En outre, force est de constater que la Commission pouvait évaluer de manière particulièrement informée l’importance des ressources requises pour l’accomplissement des mesures d’instruction, puisque, dans le cadre de l’enquête ouverte d’office, elle avait déjà diligenté un certain nombre d’actes d’enquête (voir point 89 ci-dessus).
211 Par conséquent, le Tribunal considère que c’est sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation que la Commission a considéré que la poursuite de l’examen de l’affaire aurait nécessité des ressources considérables et aurait été disproportionnée au regard de la faible probabilité d’établir une infraction à l’article 102 TFUE.
212 Ainsi, la seconde branche du premier moyen doit être rejetée et, partant, le premier moyen dans son ensemble.
213 Partant, le recours doit être rejeté dans son intégralité.
Sur les dépens
214 Aux termes de l’article 134, paragraphe 1, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Toutefois, aux termes de l’article 135, paragraphe 1, du règlement de procédure, lorsque l’équité l’exige, le Tribunal peut décider qu’une partie qui succombe supporte, outre ses propres dépens, uniquement une fraction des dépens de l’autre partie, voire qu’elle ne doit pas être condamnée à ce titre.
215 En l’espèce, la requérante a succombé en ses conclusions et la Commission a expressément conclu à ce qu’elle soit condamnée aux dépens. Cependant, eu égard aux circonstances de l’espèce, et en particulier à la durée particulièrement longue de la procédure ayant conduit à l’adoption de la décision attaquée, l’équité exige, conformément à l’article 135, paragraphe 1, du règlement de procédure, que chaque partie principale supporte ses propres dépens.
216 Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, les États membres qui sont intervenus au litige supportent leurs propres dépens. Partant, la République de Pologne supportera ses propres dépens.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (septième chambre)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) Fakro sp. z o.o., la Commission européenne et la République de Pologne supporteront chacune leurs propres dépens.