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Décisions

Cass. 1re civ., 1 juillet 2020, n° 19-11.119

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Défendeur :

Renault Retail Group (SA), Renault (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Batut

Rapporteur :

Mme Canas

Nîmes, 1re ch. civ., du 8 nov. 2018

8 novembre 2018

Faits et procédure  

1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 8 novembre 2018), le 21 novembre 2013, M. B. (l'acquéreur) a acquis de la société Renault Retail Group Nîmes (le vendeur) un véhicule neuf. En raison d'un bruit anormal émanant du véhicule, que les interventions du vendeur n'avaient pu régler, une expertise amiable a été effectuée. Par actes des 9 et 12 novembre 2015, M. B. a assigné le vendeur et la société Renault SAS (le constructeur) en résolution de la vente et restitution du prix, sur le fondement de la garantie des vices cachés, à titre principal, et sur celui d'un défaut de conformité, à titre subsidiaire.  

Examen des moyens  

Sur le premier moyen  

Enoncé du moyen  

2. L'acquéreur fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de résolution de la vente fondée sur la garantie des vices cachés, dirigée contre le vendeur et le constructeur, alors : « 1°) que le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus ; qu'en jugeant que le défaut affectant le véhicule acquis par l'acquéreur n'en compromettait pas l'usage normal, bien qu'elle ait constaté que ce vice, préexistant à la vente, affectait la qualité et le confort que l'acquéreur était en droit d'attendre d'un véhicule neuf, ce dont il résultait que l'acquéreur ne l'aurait pas acquis ou seulement à un prix moindre s'il l'avait connu, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a ainsi violé l'article 1641 du code civil ; 2°) que, dans ses conclusions d'appel, l'acquéreur faisait valoir qu'outre la gêne provoquée, pendant la conduite, par les bruits anormaux du véhicule, ces bruits en rendaient difficile, voire impossible, la revente ; qu'en jugeant que le défaut affectant le véhicule n'en compromettait pas l'usage normal sans répondre aux conclusions de l'acquéreur sur ce point, dont il s'évinçait que s'il avait connu le défaut affectant le véhicule il ne l'aurait acquis ou seulement à un prix moindre, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. »  

Réponse de la Cour  

3. L'arrêt relève que, si le véhicule présente depuis les premiers mois de son utilisation un bruit anormal émanant du tableau de bord dont l'origine n'a pas été élucidée et qui caractérise un défaut préexistant à la vente, ce défaut affecte la qualité et le confort que l'acheteur était en droit d'attendre sans pour autant compromettre un usage normal et sécurisé du véhicule.  

4. De ces constatations et énonciations souveraines, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a exactement déduit que la garantie du vendeur n'était pas due au titre des vices cachés.  

5. Le moyen n'est donc pas fondé.  

Mais sur le second moyen, pris en sa première branche  

Enoncé du moyen  

6. L'acquéreur fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande fondée sur la garantie légale de conformité, alors « que le consommateur qui exerce une action sur le fondement de la garantie légale de conformité du code de la consommation n'est pas privé du droit d'exercer l'action résultant des vices rédhibitoires et réciproquement ; qu'en retenant néanmoins, pour rejeter la demande de l'acquéreur fondée sur l’article L. 211-4, devenu L. 217-4, du code de la consommation, que les actions fondées sur le vice caché et le défaut de conformité ne pourraient être exercées simultanément, la cour d'appel a violé les articles L. 211-4, L. 211-5 et L. 211-13 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n 2016-301 du 14 mars 2016. »  

Réponse de la Cour  

Vu l'article L. 211-1, devenu L. 217-4 du code de la consommation et l'article L. 211-13, devenu L. 217-13 du même code :  

7. Aux termes du premier de ces textes, le vendeur est tenu de livrer un bien conforme au contrat et répond des défauts de conformité existant lors de la délivrance. Il résulte du second que l'action fondée sur la garantie légale de conformité ne prive pas l'acheteur du droit d'exercer l'action résultant des vices rédhibitoires telle qu'elle résulte des articles 1641 à 1649 du code civil ou toute autre action de nature contractuelle ou extracontractuelle qui lui est reconnue par la loi.  

8. Pour rejeter la demande de l'acquéreur sur le fondement de la garantie légale de conformité, l'arrêt retient que la demande subsidiaire formée sur le fondement de l'article L. 211-1, devenu L. 217-4 du code de la consommation ne peut prospérer, en vertu du principe de non-cumul des actions fondées sur le vice caché et le défaut de conformité.  

9. En statuant ainsi, alors que le choix d'invoquer la garantie des vices cachés ne prive pas l'acquéreur de la possibilité d'invoquer la garantie de conformité prévue par le code de la consommation, la cour d'appel a violé les textes susvisés.  

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du second moyen, la Cour :  

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il rejette les demandes formées par M. B. sur le fondement de la garantie des vices cachés, l'arrêt rendu le 8 novembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ;  

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;  

Condamne les sociétés Renault Retail Group SA et Renault SAS aux dépens ;  

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par les sociétés Renault Retail Group SA et Renault SAS, et les condamne à payer à M. B. la somme de 3 000 euros ;  

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé.