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Décisions

Cass. 1re civ., 9 septembre 2020, n° 19-11.882

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

PARTIES

Demandeur :

Carrefour Hypermarchés (SAS), Zurich Insurance Public Limited Company (Sté)

Défendeur :

Caisse primaire d'assurance maladie de La Loire

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Batut

Rapporteur :

Mme Canas

Lyon, 1ch. B, du 11 déc. 2018

11 décembre 2018

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 11 décembre 2018), Mme N. a été victime d'une chute au sein d'un magasin exploité par la société Carrefour hypermarchés (la société Carrefour), après avoir trébuché sur un panneau publicitaire métallique.

2. Elle a obtenu en référé la désignation d'un expert, puis a assigné en responsabilité et indemnisation la société Carrefour, ainsi que son assureur, la société Zurich Insurance Public Limited Company, et mis en cause la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire (la CPAM), qui a demandé le remboursement de ses débours.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. La société Carrefour et son assureur font grief à l'arrêt de les condamner solidairement à payer différentes sommes à Mme N. en réparation de son préjudice corporel et à la CPAM au titre de ses débours, alors « que l'arrêt a constaté, en fait, que Mme N. s'était fracturé le poignet en trébuchant sur un panneau publicitaire métallique dans l'hypermarché Carrefour de Mably ; que la responsabilité de l'exploitant d'un magasin en libre-service ne peut être recherchée, par une personne ayant fait une chute dans le magasin, que sur le fondement de la responsabilité civile délictuelle et non sur celui de l'article L. 221-1, devenu l'article L. 421-3 du code de la consommation, ainsi que l'a indiqué l'arrêt isolé et non publié rendu par la première chambre civile de la Cour de cassation le 20 septembre 2017 ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a écarté la responsabilité délictuelle de la société Carrefour hypermarchés en l'absence de preuve du positionnement anormal du panneau ; que dès lors, en retenant néanmoins sa responsabilité sur le fondement du principe posé par l'arrêt du 20 septembre 2017 précité, la cour d'appel a violé l'article L. 221-1, devenu l'article L. 421-3 du code de la consommation, par fausse application. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 1384, alinéa 1, devenu 1242, alinéa 1, du code civil et L. 221-1, alinéa 1, devenu L. 421-3 du code de la consommation :

4. La responsabilité de l'exploitant d'un magasin dont l'entrée est libre ne peut être engagée, à l'égard de la victime d'une chute survenue dans ce magasin et dont une chose inerte serait à l'origine, que sur le fondement du premier des textes susvisés, à charge pour la victime de démontrer que cette chose, placée dans une position anormale ou en mauvais état, a été l'instrument du dommage.

5. Si le second de ces textes édicte au profit des consommateurs une obligation générale de sécurité des produits et services, il ne soumet pas l'exploitant d'un tel magasin à une obligation de sécurité de résultat à l'égard de la clientèle, contrairement à ce qui a été jugé (1 Civ., 20 septembre 2017, pourvoi n 16-19.109).

6. Pour accueillir les demandes de Mme N. et de la CPAM, après avoir estimé que la preuve du positionnement anormal du panneau publicitaire litigieux n'était pas rapportée et en avoir déduit que la responsabilité de la société Carrefour ne pouvait pas être engagée sur le fondement de l'article 1384, alinéa 1, devenu 1242, alinéa 1, du code civil, l'arrêt énonce que, conformément à l'article L. 221-1, devenu L. 421-3 du code de la consommation, cette dernière est débitrice d'une obligation générale de sécurité de résultat et que le fait que Mme N. ait été blessée suffit à retenir sa responsabilité sur ce fondement.

7. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

8. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

9. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

10. Les demandes formées par Mme N. à l'encontre de la société Carrefour, sur le fondement de l'article L. 221-1, alinéa 1, devenu L. 421-3 du code de la consommation, doivent être rejetées, ainsi que la demande en remboursement de ses débours formée par la CPAM.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen, la Cour : CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il rejette la demande formée par Mme N. sur le fondement de l'article 1384, alinéa 1, devenu 1242, alinéa 1, du code civil, l'arrêt rendu le 11 décembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ; REJETTE les demandes formées à l'encontre de la société Carrefour hypermarchés par Mme N. sur le fondement de l'article L. 221-1, devenu L. 421-3 du code de la consommation ; REJETTE la demande formée à l'encontre de la société Carrefour hypermarchés par la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire.