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Décisions

Cass. com., 21 novembre 2018, n° 17-21.624

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Rémery

Avocats :

Me Le Prado, SCP Didier et Pinet, SCP Foussard et Froger

Metz, du 18 mai 2017

18 mai 2017

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 8 octobre 2008, M. et Mme Y..., qui sont domiciliés dans le département de la Moselle, ont été mis en liquidation judiciaire ; qu'une ordonnance du juge-commissaire du 10 juin 2013 a ordonné la vente aux enchères de leur immeuble ; que M. B..., notaire commis, a établi le cahier des charges et informé les débiteurs de la date de la vente ; que M. et Mme Y... ont saisi le tribunal de l'exécution d'objections et observations, en demandant, à titre principal, que l'ordonnance du juge-commissaire soit déclarée non avenue et, subsidiairement, que le cahier des charges soit annulé ; qu'un jugement du 19 mars 2015, rendu « en présence de M. B... », a rejeté ces contestations ; que, statuant sur le pourvoi immédiat des débiteurs, le tribunal de l'exécution a, par un jugement du 5 juin 2015, maintenu la décision du 19 mars 2015 et renvoyé la procédure devant la cour d'appel ; que la Caisse de crédit mutuel Metz Serpenoise (le Crédit mutuel), créancier hypothécaire inscrit sur l'immeuble en cause, est intervenu volontairement en appel, afin de voir rejeter le recours de M. et Mme Y... et les voir condamner au paiement de dommages-intérêts pour recours abusif ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que M. et Mme Y... font grief à l'arrêt de déclarer irrecevables leurs objections et observations alors, selon le moyen :

1°) que le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens même de ceux qu'il a acquis à quelque titre que ce soit tant que la liquidation judiciaire n'est pas clôturée ; que les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur ; que, toutefois, le débiteur accomplit les actes et exerce les droits et actions qui ne sont pas compris dans la mission du liquidateur ou de l'administrateur lorsqu'il en a été désigné ; qu'à ce titre, il est recevable à demander que l'ordonnance du juge-commissaire prescrivant l'adjudication d'un immeuble soit déclarée non avenue pour une cause postérieure au prononcé de cette ordonnance ; qu'en déclarant pourtant irrecevable une telle demande présentée par M. et Mme Y..., par la considération inopérante qu'ils n'avaient pas formé de recours contre la décision du juge-commissaire ayant autorisé l'adjudication, la cour d'appel a violé l'article L. 641-9 du code de commerce dans sa rédaction applicable au litige ;

2°) que le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens même de ceux qu'il a acquis à quelque titre que ce soit tant que la liquidation judiciaire n'est pas clôturée ; que les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur ; que, toutefois, le débiteur accomplit les actes et exerce les droits et actions qui ne sont pas compris dans la mission du liquidateur ou de l'administrateur lorsqu'il en a été désigné ; qu'à ce titre, il est recevable à demander l'annulation du cahier des charges de l'adjudication à venir ; qu'en déclarant pourtant irrecevable une telle demande présentée par M. et Mme Y..., par la considération qu'ils avaient été dessaisis de l'administration et de la disposition de leurs biens, la cour d'appel a violé l'article L. 641-9 du code de commerce dans sa rédaction applicable au litige ;

3°) que le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens même de ceux qu'il a acquis à quelque titre que ce soit tant que la liquidation judiciaire n'est pas clôturée ; que les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur ; que, toutefois, le liquidateur ayant pour mission de conduire les opérations de réalisation de l'actif, le droit du débiteur d'accéder à un juge pour défendre ses intérêts implique la recevabilité de sa demande tendant à ce que l'ordonnance du juge-commissaire prescrivant l'adjudication d'un immeuble soit déclarée non avenue pour une cause postérieure au prononcé de cette ordonnance ; qu'en déclarant pourtant irrecevable une telle demande présentée par M. et Mme Y..., par la considération inopérante qu'ils n'avaient pas formé de recours contre la décision du juge-commissaire ayant autorisé la vente aux enchères, la cour d'appel a violé l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

4°) que le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens même de ceux qu'il a acquis à quelque titre que ce soit tant que la liquidation judiciaire n'est pas clôturée ; que, toutefois, le liquidateur ayant pour mission de conduire les opérations de réalisation de l'actif, le droit du débiteur d'accéder à un juge pour défendre ses intérêts implique la recevabilité de sa demande tendant à l'annulation du cahier des charges de l'adjudication à venir ; qu'en déclarant pourtant irrecevable une telle demande formulée par M. et Mme Y..., par la considération qu'ils avaient été dessaisis de l'administration et de la disposition de leurs biens, la cour d'appel a violé l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Mais attendu qu'ayant exactement énoncé qu'au titre de ses droits propres, le débiteur en liquidation judiciaire peut exercer les voies de recours prévues contre l'ordonnance du juge-commissaire ayant autorisé la vente aux enchères publiques de l'immeuble lui appartenant, mais que, si le débiteur n'a pas contesté cette ordonnance ou si sa contestation a été rejetée, le principe du dessaisissement s'oppose à ce qu'il puisse élever seul un incident de saisie, l'arrêt relève que M. et Mme Y... n'ont formé aucun recours contre l'ordonnance du juge-commissaire ayant autorisé la vente aux enchères et fixé la mise à prix ; que la cour d'appel en a déduit à bon droit, sans méconnaître le droit d'accès au juge, que le recours exercé par M. et Mme Y..., sous forme d'objections et observations soulevées à la suite de l'établissement du cahier des charges par le notaire, doit être déclaré irrecevable, seul le liquidateur ayant qualité pour former une telle contestation ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen :

Vu l'article 330 du code de procédure civile ;

Attendu que, pour déclarer recevable l'intervention de M. B..., l'arrêt retient qu'en sa qualité de notaire désigné par le juge-commissaire pour procéder à la vente forcée et de rédacteur du cahier des charges, il a intérêt et qualité pour intervenir dans la procédure de contestation du cahier des charges dont il est l'auteur, sur le fondement des articles 328 et suivants du code de procédure civile, et que, si son intervention n'est qu'accessoire en ce qu'il ne fait valoir aucune prétention personnelle, il est néanmoins intéressé à l'issue du litige, dès lors que la procédure d'adjudication forcée immobilière doit se poursuivre devant lui ;

Qu'en statuant ainsi, alors que, ne disposant pas d'un intérêt, pour la conservation de ses droits, à soutenir dans la procédure d'incident de saisie d'un immeuble appartenant à un débiteur en liquidation judiciaire, le notaire commis par le juge-commissaire n'est pas recevable à intervenir volontairement, à titre accessoire, à cette procédure, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Et sur le deuxième moyen, pris en sa seconde branche :

Vu les articles L. 622-20 et L. 641-4, alinéa 4, du code de commerce ;

Attendu que, pour déclarer recevable l'intervention du Crédit mutuel, l'arrêt retient que la banque est intéressée à l'issue de la procédure dont l'objet est la vente forcée de l'immeuble à son profit, en tant que créancier hypothécaire, et qu'elle justifie ainsi d'un intérêt à intervenir conformément aux exigences de l'article 554 du code de procédure civile ;

Qu'en statuant ainsi, alors que, le liquidateur ayant seul qualité pour agir au nom et dans l'intérêt collectif des créanciers, un créancier, fût-il titulaire d'une hypothèque inscrite sur l'immeuble en cause, n'a pas d'intérêt personnel à intervenir volontairement à la procédure d'incident de saisie immobilière, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile, après avertissement délivré aux parties ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare recevables les interventions de M. B... et de la Caisse de crédit mutuel de Metz Serpenoise, l'arrêt rendu le 18 mai 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Metz ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi.