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Décisions

Cass. com., 9 septembre 2020, n° 19-10.206

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

Mme Vallansan

Avocats :

SCP Foussard et Froger, SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret

Caen, du 11 sept. 2018

11 septembre 2018

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Caen, 11 septembre 2018), Mme L... a fait exécuter en 2009 par la société Leluan Map des travaux de bardage qui ont été réceptionnés avec réserves le 10 septembre 2010. La société Leluan Map a été mise en redressement judiciaire le 26 juillet 2012, M. H... étant désigné administrateur judiciaire et la société Bruno Cambon mandataire judiciaire. Un plan de redressement a été arrêté le 17 juillet 2013, M. H... devenant commissaire à l'exécution du plan.

2. Mme L..., qui n'avait déclaré aucune créance, a, au vu d'un rapport d'expertise, assigné, le 2 octobre 2013, la société Leluan Map ainsi que le mandataire judiciaire et le commissaire à l'exécution du plan en demandant en cause d'appel que la responsabilité de la société soit reconnue et sa créance d'indemnisation évaluée.

3. La société Leluan Map et son mandataire judiciaire ont opposé l'irrecevabilité de la demande.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner à la cassation.

Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche, et le second moyen, réunis

Enoncé du moyen

5. Mme L... fait grief à l'arrêt de déclarer sa demande irrecevable, alors :

« 1°) qu'eu égard à la généralité des termes de l'article 2241 du code civil, la demande en justice a un effet interruptif de prescription s'agissant de l'action tendant à faire constater l'existence et le quantum d'un créance, peu important que la créance soit inopposable au débiteur faisant l'objet d'une procédure collective à raison d'un défaut de déclaration dans les délais requis ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 4 et 30 du code de procédure civile, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.

2°) qu'une partie peut toujours saisir le juge pour faire statuer sur l'existence et le quantum d'une créance quand bien même elle ne pourrait pas être immédiatement invoquée ou quand bien elle serait conditionnelle ; qu'en statuant comme ils l'ont fait, tout en concédant qu'en cas de résolution du plan, Mme L... pourrait faire valoir sa créance, les juges du fond ont à tout le moins violé l'article 1er du Protocole additionnel n° 1 à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »

Réponse de la Cour

6. La cour d'appel a énoncé que Mme L..., qui n'a pas déclaré sa créance de dommages-intérêts pour malfaçons, de sorte qu'en application de l'article L. 622-26, alinéa 2, du code de commerce, cette créance est inopposable à la société Leluan Map pendant l'exécution du plan de redressement de celle-ci et après si les engagements pris ont été tenus, ne pourra recouvrer son droit de poursuite individuel qu'en cas de résolution du plan.

7. Dans ce cas, elle pourra agir en paiement de dommages-intérêts contre la société débitrice, sans que puisse lui être opposée la prescription de son action, dès lors que, jusqu'à la clôture de la procédure collective, cette prescription aura été suspendue par suite de l'impossibilité dans laquelle elle se sera trouvée, comme tout créancier, y compris celui qui n'a pas déclaré sa créance, de poursuivre son débiteur.

8. Il en résulte que Mme L... est sans intérêt à demander qu'il soit statué par anticipation au cours de l'exécution du plan sur le principe et le montant de sa créance de dommages-intérêts. En déclarant irrecevable cette demande, la cour d'appel n'a, par conséquent, pas porté atteinte au droit de Mme L... à un procès équitable, ni au droit au respect de ses biens.

9. Le moyen n'est donc pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi.