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Décisions

Cass. com., 13 septembre 2017, n° 16-12.249

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Rémery

Avocat :

SCP Richard

Lyon, du 10 déc. 2015

10 décembre 2015

Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :

Vu les articles L. 622-21, L. 622-22, L. 624-2, L. 641-3 et L. 641-14 du code de commerce, dans leur rédaction issue de l'ordonnance du 12 mars 2014, et l'article R. 624-5 du même code ;

Attendu qu'en vertu du premier de ces textes, l'action en résolution ou résiliation d'un contrat pour inexécution d'une obligation autre qu'une obligation de payer une somme d'argent n'est ni interrompue ni interdite par le jugement d'ouverture de la procédure collective ; qu'il résulte des deuxième et troisième qu'en l'absence d'instance en cours à la date du jugement d'ouverture de la liquidation judiciaire du débiteur, le créancier, après avoir déclaré sa créance, ne peut en faire constater le principe et fixer le montant qu'en suivant la procédure de vérification des créances ; que, selon le dernier, seule une décision par laquelle le juge-commissaire se déclare incompétent ou constate son absence de pouvoir juridictionnel pour trancher une contestation relative à une créance déclarée et sursoit à statuer, en conséquence, sur son admission peut inviter les parties à saisir la juridiction compétente ; qu'il s'ensuit qu'après avoir déclaré sa créance, un créancier ne peut saisir directement le juge du fond d'une demande en fixation de cette créance et doit attendre la décision du juge-commissaire l'invitant à saisir le juge du fond compétent, lors même que la contestation ou la créance ne relèvent pas, a priori, du pouvoir juridictionnel du juge-commissaire ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, statuant en matière de contredit, et les productions, que la société Valmy a successivement acquis auprès de la société Mathec une machine de mise en boîte de masques de chirurgie, dont elle a intégralement payé le prix, puis une machine de production de couvre-chaussures ; que le 21 juillet 2014, la société Mathec a été mise en liquidation judiciaire ; que la société Valmy a déclaré sa créance au titre du prix de la première vente et de ses préjudices, puis assigné le liquidateur, au fond, devant un tribunal de commerce, aux fins de résolution du premier contrat de vente, en raison des dysfonctionnements affectant la machine, et de fixation de sa créance correspondant à la restitution du prix de cette vente et à ses préjudices liés aux dysfonctionnements des deux machines vendues ; que le liquidateur a soulevé "l'incompétence" du juge du fond, en invoquant l'absence d'instance en cours au jour du jugement d'ouverture ;

Attendu que, pour dire le juge du fond compétent pour statuer sur les demandes formées par la société Valmy, l'arrêt relève que cette dernière a déclaré au passif de la société Mathec une créance en rapport avec les dysfonctionnements des machines vendues et retient qu'en application de l'article L. 624-2 du code de commerce, le juge-commissaire n'a pas compétence pour trancher la contestation élevée au fond sur la formation du contrat ou son exécution fautive ;

Qu'en statuant ainsi, alors que, si la société Valmy avait saisi le juge du fond d'une demande tendant à la résolution du premier contrat de vente pour manquement du vendeur à ses obligations, et non pour défaut de paiement d'une somme d'argent, laquelle demande, échappant à l'interdiction des poursuites individuelles, relevait de la compétence du juge du fond, toutefois, cette société avait également saisi ce juge de demandes tendant à la fixation de ses créances aux titres de la restitution du prix de la vente résolue et de ses préjudices résultant de la mauvaise exécution des deux contrats, cependant que seul le juge-commissaire avait le pouvoir de statuer sur ce second chef de demandes, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare le tribunal de commerce de Roanne compétent pour statuer sur les demandes de la société Valmy tendant à la fixation de ses créances au titre de la restitution du prix de vente du contrat du 20 décembre 2012 et de ses préjudices en lien avec les deux contrats de vente, et en ce qu'elle évoque l'affaire de ces chefs, l'arrêt rendu le 10 décembre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon.