Cass. com., 22 septembre 2015, n° 14-17.377
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Rapporteur :
Mme Terrier-Mareuil
Avocat général :
M. Le Mesle
Avocats :
SCP Boullez, SCP Delaporte, Briard et Trichet
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 mars 2014), que, par ordonnance du 20 avril 2007, le président d'un tribunal de commerce a désigné M. Y..., administrateur judiciaire, en qualité de mandataire ad hoc avec mission de négocier des délais de paiement entre la société Multiples et ses établissements de crédit, dont la société Crédit du Nord (la banque) qui lui avait consenti un découvert, garanti par le cautionnement de M. X...; qu'une procédure de redressement judiciaire ayant été ouverte à l'égard de la société Multiples le 8 septembre 2009, puis convertie en liquidation judiciaire le 12 mars 2011, la banque a assigné M. X...en paiement ;
Attendu que M. X...fait grief à l'arrêt de rejeter des débats l'attestation établie par M. Y...et de le condamner à payer à la banque une certaine somme alors, selon le moyen :
1°) que toute personne qui est appelée à la procédure de conciliation ou à un mandat ad hoc ou qui, par ses fonctions, en a connaissance est tenue à la confidentialité sans qu'elle soit astreinte à un secret professionnel ; qu'il s'ensuit que la confidentialité à laquelle est tenue le mandataire ad hoc peut être levée à la demande de l'entreprise bénéficiaire ou de la caution sans que le créancier puisse s'opposer à la production d'une attestation du mandataire ad hoc établie dans l'intérêt du débiteur principal et de la caution à l'occasion du litige qui l'oppose à une banque ; qu'en écartant des débats l'attestation que M. Y...avait établie dans l'accomplissement de son mandat ad hoc afin de rapporter la preuve que le Crédit du Nord s'était opposé à tort au moratoire qu'il avait proposé afin de permettre à la société Multiples d'apurer son passif, tandis que tous ses autres créanciers y avaient donné leur accord, et qu'il avait ainsi précipité la déconfiture de la société Multiples, après avoir affirmé que M. Y..., en agissant de la sorte, aurait enfreint tant la confidentialité attachée à la procédure de mandat ad hoc, et de conciliation énoncée par l'article L.611-15 du code de commerce, que le secret professionnel auquel il était tenu, ainsi que le Crédit du Nord l'avait soutenu, la cour d'appel a violé la disposition précitée ;
2°) que le créancier est tenu envers la caution d'un devoir de loyauté ; qu'en décidant, abstraction faite de l'attestation de M. Y...qu'elle avait écartée des débats, qu'aucune faute n'était imputable au Crédit du Nord qui était libre de refuser les propositions de M. Y...en vue du règlement du passif de la société Multiples dès lors qu'elles ne présentaient aucun caractère coercitif, sans rechercher si, en l'état de la proposition du mandataire ad hoc d'apurer le passif bancaire de la société Multiples par un premier acompte de 50 % de la créance assorti d'un moratoire sur le solde, la société Crédit du Nord n'avait pas fait dégénérer en abus son droit de refuser la renégociation du crédit consenti à la société cautionnée sous la forme d'une autorisation de découvert dès lors que les 17 autres créanciers de la société Multiples y avaient donné leur accord, en l'absence de tout abandon de créance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1143, alinéa 3, et 1147 du code civil ;
Mais attendu, d'une part, que c'est à bon droit que la cour d'appel a écarté des débats l'attestation remise à la caution de la société débitrice par le mandataire ad hoc de celle-ci, dans laquelle, au mépris de l'obligation de confidentialité qui le liait par application de l'article L.611-15 du code de commerce, il stigmatisait l'attitude de la banque lors des négociations ;
Et attendu, d'autre part, qu'un créancier appelé à négocier dans le cadre d'une procédure de mandat ad hoc n'est pas tenu d'accepter les propositions du mandataire ad hoc ; qu'en retenant que la banque pouvait, sans faute de sa part, refuser son accord, la cour d'appel, qui n'avait pas à effectuer la recherche inopérante invoquée par la seconde branche, a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.