Cass. 3e civ., 19 janvier 2005, n° 03-15.283
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Weber
Rapporteur :
M. Assié
Avocat général :
M. Guérin
Avocats :
SCP Célice, Blancpain et Soltner, Me Balat
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 10 février 2003), que, par acte du 1er novembre 1993, la société Grand Case Beach Club Management Association (société Grand Case) a consenti à Mme X... Y... une "convention d'occupation précaire" pour une durée de douze mois pour un local intégré dans un hôtel ; que, faisant valoir qu'elle s'était maintenue dans les lieux à l'issue du terme fixé par la convention, Mme X... Y... a assigné la société Grand Case pour voir dire qu'elle bénéficie d'un bail soumis au statut des baux commerciaux et déclarer nul et de nul effet le congé que lui a délivré le bailleur le 5 septembre 2000 ;
Attendu que la société Grand Case, assistée de M. Z... A..., ès qualités de commissaire à l'exécution du plan de continuation de cette société, fait grief à l'arrêt d'accueillir ces demandes alors, selon le moyen :
1°) que ne bénéficie pas d'un bail commercial le commerçant qui exploite un magasin situé dans un hôtel, s'il ne démontre pas qu'il dispose en permanence d'une clientèle propre qui est prédominante ;
qu'en jugeant que Mme X... Y..., qui exploitait la boutique située dans l'enceinte de l'hôtel Grand Case Beach Club, bénéficiait d'un bail commercial en se fondant, d'une part, sur des attestations affirmant que pendant la basse saison un grand nombre de clients provenaient de l'extérieur ou se bornant à mentionner l'existence de ces clients, et, d'autre part, sur un constat d'huissier de justice constatant que la boutique était accessible aux personnes étrangères à l'hôtel en dépit du système de sécurité mis en place, sans relever aucun élément permettant d'établir que la clientèle de Mme X... Y... était en permanence prédominante sur celle de l'hôtel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 145-5 et L. 145-9 du Code de commerce ;
2°) que le commerçant qui exploite un magasin situé dans un hôtel dont il suit les horaires d'ouverture, de fermeture et les conditions d'exploitation, ne dispose pas librement des lieux et ne bénéficie pas d'une autonomie de gestion, circonstances qui sont exclusives du statut des baux commerciaux ; qu'en l'espèce, la société à responsabilité limitée Grand Case Beach Club Management Association rappelait que Mme X... Y... exploitait la boutique de l'hôtel Grand Case Beach Club conformément au règlement intérieur de l'hôtel qui lui imposait non seulement les horaires d'ouverture et de fermeture de cette boutique mais également les prestations qu'elle devait fournir à la clientèle ; qu'en se bornant à dire que ces éléments ne constituaient pas une entrave effective à son activité commerciale, sans expliquer en quoi la locataire disposait néanmoins librement des lieux et gérait librement son activité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 145-5 et L. 145-9 du Code de commerce ;
Mais attendu que le statut des baux commerciaux s'applique aux baux de locaux stables et permanents dans lesquels est exploité un fonds de commerce ou un fonds artisanal, ces fonds se caractérisant par l'existence d'une clientèle propre au commerçant ou à l'artisan, que, toutefois, le bénéfice du statut peut être dénié si l'exploitant du fonds est soumis à des contraintes incompatibles avec le libre exercice de son activité ; qu'ayant relevé que la réalité de l'activité commerciale de Mme X... Y... et l'existence de marchandises offerte à la vente n'étaient pas contestées, que le magasin était accessible à une clientèle autre que celle de l'hôtel et que lui était adressée par des tiers une clientèle extérieure variée de touristes et de résidents Saint-Martinois et retenu que les contraintes imposées à Mme X... Y... par le règlement intérieur de l'hôtel ne constituaient pas une entrave effective à son activité commerciale, faisant ressortir ainsi l'absence de contraintes incompatibles avec le libre exercice de celle-ci, la cour d'appel, qui en a justement déduit que, Mme X... Y... était fondée à se prévaloir du bénéfice du statut des baux commerciaux, a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.