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Décisions

Cass. com., 27 septembre 2016, n° 14-22.372

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

Mme Schmidt

Avocat général :

Mme Beaudonnet

Avocat :

Me Blondel

Aix-en-Provence, du 3 avr. 2014

3 avril 2014

Sur le moyen unique, pris en ses première à cinquième branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 3 avril 2014), que les sociétés Europa hôtel et Le Vittier, ainsi que M. et Mme X... ont été mis en liquidation judiciaire le 27 avril 2006 ; que par une ordonnance du 9 juillet 2007, le juge-commissaire a autorisé le liquidateur à vendre de gré à gré à M. Y... un immeuble dépendant de l'actif de la liquidation et à lui céder le fonds de commerce qui y était exploité ; que le 10 avril 2008, le juge-commissaire a reporté au 15 avril 2008 la date limite pour la signature de l'acte de cession au profit de M. Y... ; que ce dernier ayant refusé de régulariser la vente, le liquidateur l'a assigné en résolution de la vente et en paiement de dommages-intérêts ; que M. Y... a acquiescé à la demande de résolution mais s'est opposé au paiement de dommages-intérêts et a demandé la restitution de l'acompte qu'il avait versé ; qu'au cours de l'instance, le liquidateur a été autorisé, par une ordonnance du juge-commissaire du 8 juillet 2011, à procéder à la vente de l'immeuble aux enchères publiques ;

Attendu que le liquidateur fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de dommages-intérêts alors, selon le moyen :

1°/ que la partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté a le choix, ou de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts ; qu'il s'ensuit que la renonciation du liquidateur à poursuivre l'exécution forcée de la vente résultant de l'ordonnance du juge-commissaire du 9 juillet 2007, pas plus que la remise en vente du bien mobilier litigieux une fois constatée la défaillance de M. Y..., n'étaient de nature à le priver de son droit à solliciter la réparation du préjudice subi par la liquidation judiciaire du fait de cette défaillance ; qu'en décidant le contraire, la cour viole les articles 1184, alinéa 2, et 1654 du code civil ;

2°/ que la gravité du comportement d'une partie à un contrat peut justifier que l'autre partie y mette fin de façon unilatérale à ses risques et périls, sans qu'il soit nécessairement besoin d'une décision de justice préalable ; qu'en faisant reproche au liquidateur de n'avoir pas attendu que la résolution de la vente litigieuse ne fût constatée par décision de justice, avant que de poursuivre la revente du bien immobilier à la faveur d'une nouvelle ordonnance du juge-commissaire du 8 juillet 2011, la cour viole derechef les articles 1184 et 1654 du code civil ;

3°/ qu'en ne recherchant pas, comme elle y était pourtant invitée, si M. Y... n'avait pas expressément acquiescé, par ses écritures du 19 novembre 2010, à la demande tendant à la résolution judiciaire formée par le liquidateur de sorte qu'il ne pouvait être fait grief à ce dernier d'avoir, postérieurement à cet acquiescement, tiré les conséquences d'une résolution d'ores et déjà acquise en procédant à la revente du bien litigieux, la cour prive son arrêt de base légale au regard des articles 1184 et 1654 du code civil, ensemble au regard de l'article 408 du code de procédure civile ;

4°/ qu'il appartient au seul juge-commissaire qui autorise la vente de gré à gré d'un immeuble relevant du périmètre de la liquidation judiciaire de fixer les conditions de la vente ; qu'aussi bien, en l'absence de toute mention, dans l'ordonnance d'autorisation, d'une condition suspensive relative à l'obtention d'un prêt, l'acquéreur ne peut invoquer à son profit le bénéfice d'une telle condition, en se fondant sur une convention non homologuée par le juge-commissaire et conclue directement entre le mandataire liquidateur et l'acquéreur ; qu'en l'espèce, il résulte des constatations de l'arrêt que l'ordonnance autorisant la vente litigieuse du 9 juillet 2007 n'avait nullement déterminé les modalités de paiement du prix de vente, ni a fortiori assorti la vente d'une quelconque condition suspensive relative à l'obtention d'un prêt, cependant que l'ordonnance postérieure du 10 avril 2008 s'était bornée à accorder un délai supplémentaire pour l'exécution de la vente litigieuse ; qu'en retenant néanmoins que Y... n'avait pas engagé sa responsabilité en refusant d'exécuter la vente résultant de ladite ordonnance du 9 juillet 2007, motif pris qu'il ressortait d'une convention directement conclue entre lui-même et le liquidateur le 11 juillet 2007 que la vente aurait été assortie d'une condition suspensive relative à l'obtention d'un prêt qui en l'occurrence avait défailli, la cour viole l'article L. 642-18 du code de commerce, ensemble les articles 1147 et 1654 du code civil ;

5°/ qu'en ne recherchant pas, comme elle y était pourtant invitée, si en réitérant sa volonté d'acquérir, et en sollicitant du juge-commissaire la prorogation du délai de réalisation de la vente, postérieurement à la date du 31 octobre 2007, date à laquelle la défaillance de la condition suspensive était acquise par application de la convention du 11 juillet 2007, M. Y... n'avait pas nécessairement renoncé au bénéfice de cette condition, à supposer que la vente en fût effectivement assortie, la cour prive à nouveau sa décision de toute base légale au regard des articles 1134, 1176 et 1147 du code civil ;

Mais attendu que l'acquéreur peut invoquer la condition suspensive dont il a assorti son offre d'achat, peu important que l'ordonnance du juge-commissaire autorisant la vente à son profit ne la mentionne pas expressément ; que l'arrêt relève, d'un côté, par des motifs non critiqués, qu'il résulte d'une convention signée par les parties le 11 juillet 2007 que l'octroi d'un prêt conditionnait la réalisation de la vente autorisée par le juge-commissaire par son ordonnance du 9 juillet 2007 et, de l'autre, que la prorogation accordée par l'ordonnance du juge-commissaire du 10 avril 2008 s'inscrivait dans le cadre de l'accord incluant une condition suspensive ayant trait au financement bancaire qui n'a pas été accordé à M. Y... ; que de ces seuls motifs, dont il résulte que l'exécution de l'ordonnance était subordonnée à la réalisation d'une condition suspensive, la cour d'appel a pu déduire, en effectuant la recherche invoquée par la cinquième branche, que le refus de M. Y... de régulariser la vente n'était pas fautif en l'absence de réalisation de cette condition ; que le moyen, inopérant en ses première, deuxième et troisième branches qui critiquent des motifs surabondants, n'est pas fondé pour le surplus ;

Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le moyen, pris en ses sixième et septième branches, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.