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Décisions

Cass. com., 16 octobre 2012, n° 11-22.993

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Espel

Rapporteur :

Mme Jacques

Avocat général :

M. Le Mesle

Avocats :

Me Le Prado, Me Spinosi

T. com. Nanterre, ch. 4, du 28 nov. 2008…

28 novembre 2008

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 12 mai 2011, RG n° 09/06582), que la société Dragoon éditions (société Dragoon) qui avait conclu le 16 janvier 2002 avec la société Flammarion un contrat de diffusion et de distribution, a été mise en liquidation judiciaire le 20 avril 2006, la SCP Ouizille de Keating étant nommée liquidateur (le liquidateur) ; que ce dernier a assigné la société Flammarion en paiement de dommages-intérêts sur le fondement des articles 1382 du code civil et L. 650-1 du code de commerce ;

Sur le premier moyen :

Attendu que le liquidateur fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de ses demandes dirigées contre la société Flammarion, alors, selon le moyen, que ni l'octroi de délais de paiement par un créancier ni le mécanisme d'un paiement par compensation ne constituent des concours bancaires au sens de l'article L. 650-1 du code de commerce, de sorte que la responsabilité civile du créancier obéit, dans ces deux cas, aux règles de droit commun de l'article 1382 du code civil ; qu'en reprochant par motifs propres et adoptés des premiers juges à la SCP Ouizille de Keating, ès qualités, de ne pas rapporter la preuve de l'existence de l'immixtion ou de la fraude commise par la société Flammarion au détriment de son administrée, la cour d'appel a violé par fausse application l'article L. 650-1 du code de commerce et, par refus d'application, l'article 1382 du code civil ;

Mais attendu qu'après avoir énoncé que les termes génériques de "concours consentis" et de "créancier" de l'article L. 650-1 du code de commerce conduisent à ne pas limiter son application aux seuls établissements de crédit, la cour d'appel en a exactement déduit que des délais de paiement accordés par un cocontractant au débiteur constituaient des concours au sens de ce texte, de sorte qu'il était applicable à ce cocontractant ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu qu'il est fait le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen, que commet une fraude au sens de l'article L.. 650-1 du code de commerce, le créancier qui poursuit délibérément le service de ses intérêts au détriment de son débiteur dont il connaît la situation irrémédiablement compromise ; qu'en reprochant à la SCP Ouizille de Keating, ès qualités, de ne pas rapporter la preuve d'une fraude commise par la société Flammarion, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les délais de paiement accordés à la société Dragoon et les paiements par compensation effectués par le diffuseur, à partir de janvier 2005, ne traduisaient pas la volonté délibérée de ce créancier de protéger ses intérêts personnels au détriment de ceux de l'éditeur, qu'il savait dans une situation irrémédiablement compromise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 650-1 du code de commerce ;

Mais attendu qu'après avoir précisé que la fraude, en matière civile ou commerciale ne se démarque guère de la fraude pénale et qu'il s'agit d'un acte qui a été réalisé en utilisant des moyens déloyaux destinés à surprendre un consentement, à obtenir un avantage matériel ou moral indu ou réalisé avec l'intention d'échapper à l'application d'une loi impérative ou prohibitive, la cour d'appel, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de preuves qui lui étaient soumis et sans avoir à procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérantes, a pu retenir que les faits reprochés à la société Flammarion, à savoir la signature de l'avenant de novembre 2004, l'acceptation de traites parfaitement causées permettant ainsi indirectement l'octroi de délais de paiement, et un système de compensation, n'étaient manifestement pas de nature frauduleuse ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.