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Décisions

Cass. com., 27 mars 2012, n° 11-13.536

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Favre

Avocat :

Me Le Prado

Versailles, du 20 janv. 2011

20 janvier 2011

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que les 8 novembre 2005 et 4 mai 2006, la banque Banco Popular France, devenue ultérieurement la banque CIC Iberbanco (la banque) a accordé à la société Pierrefitoise (la société) deux prêts ; que le 9 novembre 2006, M. X..., gérant de la société et Mme Y... (les cautions) se sont rendus cautions solidaires à concurrence de 189 600 euros pour une durée de 13 mois ; que le 14 novembre 2006, la banque a accordé à la société une autorisation de découvert pour une durée d'un mois et d'un montant de 158 000 euros ; que les 14 juin et 13 décembre 2007, la société a été mise en redressement puis liquidation judiciaires ; qu'ayant été assignées en paiement par la banque, les cautions ont formé une demande reconventionnelle de dommages-intérêts en invoquant son comportement frauduleux ;

Sur le second moyen :

Attendu que la banque fait grief à l'arrêt d'avoir dit que les condamnations des cautions à lui verser les sommes en principal de 169 528,80 euros et de 995,94 euros sont assorties des intérêts au taux légal à compter du 3 mai 2007 alors, selon le moyen :

1°) que, pour contester la demande des appelants en déchéance des intérêts au taux conventionnel, la société soulignait dans ses écritures d'intimé, preuves à l'appui, que « la banque a adressé les lettres d'information aux consorts X... et Y... pour l'année 2006 en ce qui concerne l'engagement de caution à hauteur de 189.600 euros » et « qu'en l'espèce la fourniture des cautions n'a pas été la condition du prêt de 20 500 euros puisque les cautionnements ont été signés le 9 novembre 2006 soit postérieurement au prêt du 4 mai 2006 » ; qu'en retenant cependant « que le CIC Iberbanco, dans le dernier état de ses conclusions, sollicite la confirmation des condamnations prononcées à l'encontre de M. X... et de Mme Y... aux sommes de 169 438,26 euros et 8 945,40 euros mais assorties des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 3 mai 2007 », quand la demande malencontreuse de condamnation des cautions avec intérêts « au taux légal », ne pouvait, au regard des motifs développés, qu'être purement subsidiaire, la cour d'appel a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

2°) qu'il résulte des propres énonciations de l'arrêt attaqué « qu'il est justifié par le CIC Iberbanco que la Banco Popular France a respecté l'obligation annuelle d'information des cautions en leur adressant le 20 mars 2007 une lettre recommandée avec avis de réception précisant qu'à cette date l'obligation garantie restant due était de 163 604,68 euros en principal, frais et intérêts » et « que cette information n'était pas due en ce qui concerne le prêt de 20 500 euros dont l'engagement de caution est postérieur à la cour d'appel » ; qu'en prononçant cependant la déchéance des intérêts au taux contractuel, la cour d'appel a violé par fausse application l'article L.313-22 du code monétaire et financier ;

Mais attendu que dans ses conclusions du 12 novembre 2010, que la cour d'appel n'a pas dénaturées, la banque a demandé la confirmation des condamnations prononcées à l'encontre des cautions aux sommes des 169 438,26 euros et 945,40 euros mais assorties des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure ; qu'ainsi, le moyen, contraire aux écritures d'appel, est irrecevable ;

Mais sur le premier moyen :

Vu l'article L. 650-1 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 18 décembre 2008 ;

Attendu que pour décider que la banque a commis une fraude, l'arrêt retient que la situation de la société était irrémédiablement compromise lors de l'octroi, le 14 novembre 2006, de l'autorisation de découvert d'un montant de 158 000 euros pour une durée d'un mois, que cette autorisation ne pouvait avoir aucun retentissement favorable sur l'activité et la pérennité de la société et n'a eu pour effet que de retarder sa déclaration de cessation des paiements ; que l'arrêt retient encore que cette autorisation de découvert revêtait, compte tenu de ces circonstances, un caractère frauduleux dans la mesure où elle a constitué la contrepartie de l'obtention de l'engagement des cautions et que la banque, en agissant dans le seul but d'obtenir une sûreté personnelle, a rompu l'égalité entre les créanciers de la société à son profit ;

Attendu qu'en se déterminant par ces motifs, impropres à caractériser l'intention frauduleuse de la banque, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;


PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société CIC Iberbanco à payer à M. X... et Mme Y..., les sommes de 169 528,80 euros et de 995,94 euros, et ordonné la compensation légale, l'arrêt rendu le 20 janvier 2011 par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée.