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Décisions

CA Versailles, 13e ch., 20 février 2018, n° 16/09049

VERSAILLES

Arrêt

Infirmation partielle

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Valay-Brière

Conseillers :

Mme Guillou, Mme Bois-Stevant

CA Versailles n° 16/09049

20 février 2018

 

FAITS ET PROCEDURE,

Le groupe Quinta industries, qui s'inscrit dans un groupe international constitué par M. X dans l'industrie du cinéma et qui opère dans le secteur des industries techniques du cinéma, est notamment composé depuis 2006 des sociétés suivantes :

* la société Quinta Industries (détenue à 17,50% par Technicolor et à 82,50% par Quinta communications)

* la société Quinta Communications

* les sociétés Duran (détenue à 98,63 % par Quinta Industries) et Duboi (détenue à 100% par Duran) en charge du traitement de l'image

* les sociétés Les auditoriums de Joinville (ci-après ADJ, détenue à 100% par Duran) et SIS (détenue à 100% par Quinta Industries) en charge du traitement du son

* la société Laboratoire des technologies de communication (ci-après LTC, détenue à 100% par Quinta Industries) en charge de la copie

* la société Scanlab (détenue à 100% par LTC), centre de développement des activités de restauration et de conservation des catalogues, pour le traitement des vidéos.

Ce groupe avait été créé en collaboration avec la société T. media services, devenue Technicolor aux fins de regroupement de l'ensemble des prestations techniques de post-production inhérentes à la fabrication d'un film dans le but de proposer une offre de 'guichet unique' des industries techniques du cinéma.

Selon ce concept, ces sociétés étaient en mesure d'effectuer pour un client l'intégralité des opérations de post-production d'un film : les sociétés Duran et Duboi étaient les points d'entrée des clients dans le modèle économique avec un faible tarif, ceux-ci utilisaient ensuite les compétences des sociétés SIS ou ADJ avant de confier le tirage des copies aux sociétés LTC et Scanlab qui généraient la marge pour l'ensemble du groupe.

La société Quinta industries exerçait une activité de holding et supportait les coûts de structure du groupe Quinta industries qu'elle facturait à ses filiales au prorata de leur chiffre d'affaires respectifs.

En 2010, ces sociétés ont rencontré des difficultés dans le cadre de la conversion au numérique, qui a supprimé le support et la duplication, étapes traitées par les sociétés LTC et Scanlab, qui réalisaient les marges redistribuées, conversion qui a été accélérée par les subventions publiques à l'équipement en matériel numérique des salles de cinéma.

Le 31 janvier 2011, à la demande de la société Quinta industries, le président du tribunal de commerce de Nanterre a désigné Me G., en qualité de conciliateur, pour examiner la possibilité d'un accord amiable avec les principaux créanciers. La période a été prolongée à plusieurs reprises jusqu'au 30 juin 2011.

Dans le cadre de cette procédure, des accords ont été conclus avec les principaux fournisseurs. De son côté, le CIRI a tenté de mettre en place avec l'actionnaire Quinta communications, le soutien des banques et l'accord des créanciers publics (Trésor public et URSSAF) un plan de restructuration du groupe. Ces efforts n'ont pas abouti.

Par ailleurs Technicolor, qui avait depuis de nombreuses années des discussions avec la société Quinta communications sur l'acquisition éventuelle des actifs du groupe Quinta industries, a démissionné de son poste d'administrateur de la société Quinta industries le 23 mars 2011 et annoncé en mai 2011 qu'elle n'était pas intéressée par la reprise des actifs du groupe.

Le 30 septembre 2011, les sociétés du groupe Quinta industries ont signé avec la société Quinta communications un protocole d'accord sur un ensemble de compensations de dettes et cessions de créances.

Le 28 octobre 2011, M. A a déposé la déclaration de cessation des paiements de la société Quinta industries, concomitamment avec les autres sociétés du groupe à l'exception de Quinta communications.

Par jugement en date du 3 novembre 2011, le tribunal de commerce de Nanterre a ouvert une procédure de redressement judiciaire de la société Quinta industries, désigné Me Francisque G. en qualité d'administrateur judiciaire, Me Patrick Legras de Grandcourt en qualité de mandataire judiciaire et fixé provisoirement la date de cessation des paiements au 1er septembre 2011.

Par jugement du 15 décembre 2011, le tribunal a prononcé la liquidation judiciaire de la société Quinta industries et désigné Me Patrick Legras de Grandcourt aux fonctions de liquidateur judiciaire.

Saisie par ce dernier, la même juridiction a, par jugement du 10 janvier 2013, devenu définitif en suite d'un arrêt de la Cour d'appel de Versailles en date du 18 juillet 2013, reporté la date de cessation des paiements au 1er juillet 2011.

Par ordonnance du 17 février 2012, le juge-commissaire a demandé au cabinet Exafi un rapport sur les flux financiers entre les différentes sociétés du groupe et les éventuelles fautes de gestion commises. De leur côté, la société Quinta communications a fait établir un rapport par M. Dominique L. et M. Z par la société BM&A.

Considérant que les opérations de la procédure collective avaient mis en évidence des fautes de gestion imputables aux dirigeants, Me Patrick Legras de Grandcourt ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Quinta ndustries, a saisi le tribunal de commerce de Nanterre, qui par jugement contradictoire en date du 16 décembre 2016, a :

- rejeté les demandes de renvoi et de sursis à statuer, débouté M. Y de sa demande de jonction, débouté M. W de ses demandes, débouté la SASU Quinta communications et M. X de leur demande concernant le rapport Exafi,

- dit que les défendeurs ont la qualité de dirigeants au sens de l'article L. 651-1 du code de commerce,

- dit que la SASU Quinta communications et M. X ont été les dirigeants de fait de la SA Quinta industries à compter du début de l'année 2011,

En application des articles L. 653-1 et suivants du code de commerce,

- prononcé à l'égard de M. X une interdiction de diriger, gérer, administrer, ou contrôler directement ou indirectement soit toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole, toute personne morale, soit une ou plusieurs de celles-ci pour une durée de 3 ans, et dit que cette condamnation ne s'appliquera pas aux mandats sociaux en cours à la date de prononcé du présent jugement,

- prononcé à l'égard de M. Y, une interdiction de diriger, gérer, administrer, ou contrôler directement ou indirectement soit toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole, toute personne morale, soit une ou plusieurs de celles-ci pour une durée de 3 ans, et dit que cette condamnation ne s'appliquera pas aux mandats sociaux en cours à la date de prononcé du présent jugement,

- prononcé à l'égard de M. Z, une interdiction de diriger, gérer, administrer, ou contrôler directement ou indirectement soit toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole, toute personne morale, soit une ou plusieurs de celles-ci pour une durée de 2 ans, et dit que cette condamnation ne s'appliquera pas aux mandats sociaux en cours à la date de prononcé du présent jugement,

En application de l'article L. 651-2 du code de commerce,

- dit n'y avoir lieu à appliquer les dispositions de l'article L. 651-2 du code de commerce à la SASU Ericsson broadcast services France (anciennement dénommée Technicolor network services France) et à M. W,

- condamné solidairement la SA Quinta communications, M. X, M. Y et M. Z à payer à Me Patrick Legras de Grandcourt ès qualités de liquidateur de la SA Quinta industries la somme de 3 500 000 €, dans la limite de 30 000 € pour M. Z, avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement et capitalisation en application des dispositions de l'article 1154 ancien du code civil,

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire pour les condamnations personnelles,

- ordonné l'exécution provisoire sur les condamnations prononcées au titre des dispositions de l'article L. 651-2 du code de commerce, les fonds étant déposés à la caisse des dépôts et consignations jusqu'à l'obtention d'une décision ayant autorité définitive de la chose jugée,

- condamné solidairement la SA Quinta communications, M. X, M. Y et M. Z à payer à Me Patrick Legras de Grandcourt, ès qualités de liquidateur de la société Quinta industries, la somme de 30 000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné solidairement la SA Quinta communications, M. X, M. A et M. Z aux dépens à l'exception des frais de greffe employés en frais privilégiés de la procédure collective.

Le 21 décembre 2016, la SA Quinta communications et M. X ont interjeté appel du jugement à l'encontre de Me Legras de Grandcourt ès qualités, de M. A et de M. G..

Me Patrick Legras de Grandcourt, ès qualités, a interjeté appel le 23 décembre 2016 à l'encontre de M. Z, M. W, M. X, M. A, Quinta communications et la SASU Ericsson broadcast services france.

M. A a interjeté appel le 6 janvier 2017 à l'encontre de M. Z, M. X, la SA Quinta communications, M. W, Me Legras de Grandcourt et la SASU Ericsson broadcast services France.

Le 22 décembre 2016, le ministère public a également interjeté appel de ce jugement à l'encontre de toutes les parties.

Vu les dernières conclusions (pages 1 à 85) remises au greffe et notifiées par RPVA le 21 septembre 2017 pour la SA Quinta communications aux termes desquelles elle demande à la cour, au visa des articles 16, 144, 232 et suivants, 378, 907 et 771 du code de procédure civile, 6§1 de la CESDH, L. 632-1, L. 651-1 à L. 651-4, L. 653-1 à L. 653-11 et L. 622-8 du code de commerce, 1290 du code civil, L. 141-1 et suivants du code de l'organisation judiciaire, de :

A titre liminaire,

- ordonner qu'il soit sursis à statuer dans l'attente de l'issue définitive de la procédure actuellement pendante devant le tribunal de commerce de Nanterre aux fins de dé-séquestration des documents saisis et de mise en jeu de la responsabilité de Technicolor dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice,

- ordonner qu'il soit sursis à statuer dans l'attente de l'issue définitive de la procédure pénale actuellement en cours devant le tribunal de grande instance de Nanterre,

- désigner tel expert judiciaire qu'il plaira avec pour mission de :

* se faire communiquer l'ensemble des documents utiles à sa mission,

* réunir les parties,

* entendre tous sachants,

* dire que l'expert pourra entendre toutes personnes qu'il estime nécessaire pour l'accomplissement de sa mission dont le CIRI et Me G.,

* prendre connaissance des rapports L. et Exafi,

* définir le périmètre du groupe Quinta industries, comprenant les sociétés Quinta industries, SIS, Scanlab, LTC, Duran/Duboi et ADJ,

* présenter les sociétés du groupe Quinta industries, leur fonctionnement et leur éventuelle complémentarité (concept du «one stop shopping »),

* prendre connaissance des éléments factuels relatifs à la direction des sociétés du groupe Quinta industries et déterminer les personnes physiques et/ou morales qui ont participé à ces décisions,

* déterminer le rôle et la participation du groupe Technicolor, incluant notamment mais non exclusivement Technicolor network services France (ci-après Tnsf), et son rôle, au sein des sociétés du groupe Quinta industries entre 2006 et 2011,

* déterminer le montant des créances intra-groupe,

* dire que l'expert adressera aux parties copie de ses pré-conclusions en impartissant un délai aux parties pour présenter leurs observations et qu'il prendra en considération les observations ou réclamations des parties formulées dans le délai imparti, en les joignant à son avis si celles-ci sont écrites et si les parties le demandent, conformément aux dispositions de l'article 276 du code de procédure civile,

* dire que l'expertise sera mise en oeuvre et que l'expert accomplira sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile et que, sauf conciliation des parties, il déposera son rapport au greffe de ce tribunal dans un délai de six mois à compter de sa saisine,

* dire qu'il en sera référé au juge en cas de difficultés,

* fixer la provision à consigner au greffe à titre d'avance sur les honoraires de l'expert, dans le délai qui sera imparti par le jugement à intervenir,

En toute hypothèse,

- enjoindre à Me Patrick Legras de Grandcourt, ès qualités, de communiquer aux défendeurs, au moyen d'une clef USB, l'ensemble des documents qui ont été consultés par Exafi pour l'élaboration de son rapport en date du 28 juin 2012,

A titre principal,

- infirmer le jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 16 décembre 2016 en toutes ses dispositions,

et statuant à nouveau,

- constater que Me Patrick Legras de Grandcourt, ès qualités, ne démontre pas qu'elle aurait la qualité de dirigeant de fait,

- constater que Me Patrick Legras de Grandcourt, ès qualités, ne démontre pas qu'agissant en qualité d'administrateur, elle aurait commis des fautes de gestion ayant contribué à la création ou à l'augmentation de l'insuffisance d'actif de la Société Quinta industries,

- constater que Me Patrick Legras de Grandcourt, ès qualités, ne rapporte pas la preuve de l'existence et du quantum du préjudice qu'il allègue,

- constater que des facteurs économiques et politiques imprévisibles ainsi que le comportement fautif du coactionnaire Ericsson Broadcast services France ont contribué à la création et à l'augmentation de l'insuffisance d'actif de la société Quinta industries,

- constater qu'elle s'est investie personnellement dans les démarches mises en oeuvre pour redresser le groupe Quinta industries dans son ensemble,

En conséquence,

- débouter Me Patrick Legras de Grandcourt, ès qualités, de l'intégralité de ses demandes,

A titre subsidiaire,

- constater que les responsabilités respectives de MM G., A, X et W ainsi que des sociétés Quinta communications et Ericsson broadcast services France diffèrent du fait de leurs qualités et comportements respectifs,

En conséquence,

- débouter Me Patrick Legras de Grandcourt, ès qualités, de sa demande visant à voir prononcer la solidarité de la condamnation éventuellement prononcée par la cour,

- fixer à un juste montant pour chacun des dirigeants mis en cause et à proportion des responsabilités respectives (sic),

En tout état de cause,

- condamner Me Patrick Legras de Grandcourt, ès qualités, à lui payer la somme de 20.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Vu les dernières conclusions (pages 1 à 110) remises au greffe et notifiées par RPVA le 19 septembre 2017 pour Me Patrick Legras de Grandcourt, ès qualités, aux termes desquelles il demande à la cour de :

- confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Nanterre le 16 décembre 2016 en ce qu'il a débouté M.Y et la société Quinta communications de leur demande de sursis à statuer et de leur demande concernant le rapport Exafi, retenu la qualité de dirigeant de fait de la société Quinta communications et de MM. A et X, retenu la responsabilité de M. Z, M. Y, M X et de la société Quinta communications, condamné solidairement la société Quinta communications, M X, M. Y et M. Z à lui payer la somme de 30.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamné M. Y, M. X et M. Z à des sanctions personnelles,

- l'infirmer pour le surplus, en conséquence,

- constater que, par jugement rendu le 15 décembre 2011, le tribunal de commerce de Nanterre a prononcé la liquidation judiciaire de la société Quinta industries,

- constater que l'insuffisance d'actif certaine s'élève à la somme de 45.253.233,90 €,

- débouter les défendeurs de leur demande de sursis à statuer et de jonction,

- constater que les sociétés Quinta communications et Ericson, MM. Y, Z, X, et Stephane W ont commis des fautes de gestion en omettant de déposer la déclaration de cessation des paiements dans le délai de quarante-cinq jours, en ne procédant pas au paiement des cotisations sociales et fiscales, en ayant poursuivi abusivement une activité déficitaire ayant rendu les capitaux propres négatifs, en ayant laissé une masse salariale extrêmement importante, en ayant financé de manière massive la société Duran au détriment des autres filiales et en ayant fait un usage des biens de la société Quinta industries contraire à l'intérêt social dans l'intérêt personnel de l'actionnaire majoritaire, la société Quinta communications,

- condamner solidairement les sociétés Quinta communications et Ericson, MM. Y, Z, X, et Stephane W à lui payer la somme de 45.253.233,90 € en application des dispositions de l'article L. 651-2 du code de commerce avec intérêts de droit conformément à l'article 1153-1 du code civil et capitalisation en application de l'article 1154 du code civil,

- faisant application des articles L.653-3 et suivants du code de commerce, de prononcer une mesure de faillite personnelle ou, à tout le moins, une mesure d'interdiction de diriger et gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement toute entreprise commerciale ou artisanale et toute exploitation agricole, ainsi que toute personne morale à l'encontre de Messieurs Y, Z et X,

- débouter les défendeurs de l'ensemble de leurs demandes,

- condamner solidairement les sociétés Quinta communications et Ericson, MM. Y, Z, X, et W à lui payer la somme de 25.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner solidairement les sociétés Quinta communications et Ericson, MM. Y, Z, X, et W aux entiers dépens avec droit de recouvrement au profit de Me Patricia M., avocat, pour les frais dont elle aurait fait l'avance, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions (pages 1 à 35) remises au greffe et notifiées par RPVA le 20 septembre 2017 pour M. X aux termes desquelles il demande à la cour, au visa des articles 16, 144, 232 et suivants, 378, 907 et 771 du code de procédure civile, 6§1 de la CESDH, L. 632-1, L. 651-1 à L. 651-4, L. 653-1 à L. 653-11 et L. 622-8 du code de commerce, 1290 du code civil, L. 141-1 et suivants du code de l'organisation judiciaire, de :

A titre liminaire,

- ordonner qu'il soit sursis à statuer dans l'attente de l'issue définitive de la procédure actuellement pendante devant le tribunal de commerce de Nanterre aux fins de dé-séquestration des documents saisis et de mise en jeu de la responsabilité de Technicolor dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice,

- ordonner qu'il soit sursis à statuer dans l'attente de l'issue définitive de la procédure pénale actuellement en cours devant le tribunal de grande instance de Nanterre,

- désigner tel expert judiciaire qu'il plaira avec la même mission que celle demandée par la société Quinta communications,

En toute hypothèse,

- enjoindre à Me Patrick Legras de Grandcourt, ès qualités, de communiquer aux défendeurs, au moyen d'une clef USB, l'ensemble des documents qui ont été consultés par Exafi pour l'élaboration de son rapport en date du 28 juin 2012,

A titre principal,

- infirmer le jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 16 décembre 2016 en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

- constater que Me Patrick Legras de Grandcourt, ès qualités, ne démontre pas qu'il aurait la qualité de dirigeant de fait,

- constater qu'en sa qualité de représentant permanent de Quinta communications au conseil d'administration de la société Quinta industries, il a agi au nom et pour le compte de la société Quinta communications et que Me Legras de Grandcourt, ès qualités, ne démontre pas qu'il aurait commis des fautes personnelles,

- constater que Me Patrick Legras de Grandcourt, ès qualités, ne rapporte pas la preuve de l'existence et du quantum du préjudice qu'il allègue,

- constater que des facteurs économiques et politiques imprévisibles ainsi que le comportement fautif du coactionnaire Ericsson Broadcast services France ont contribué à la création et à l'augmentation de l'insuffisance d'actif de la société Quinta industries,

- constater qu'en sa qualité de représentant et dirigeant de Quinta communications, il s'est investi dans les démarches mises en oeuvre pour redresser la société Quinta industries et le groupe Quinta industries dans son ensemble,

En conséquence,

- débouter Me Patrick Legras de Grandcourt, ès qualités, de l'intégralité de ses demandes,

A titre subsidiaire,

- constater que les responsabilités respectives de MM G., A, X et W ainsi que des sociétés Quinta communications et Ericsson broadcast services France diffèrent du fait de leurs qualités et comportements respectifs,

En conséquence,

- débouter Me Patrick Legras de Grandcourt, ès qualités, de sa demande visant à voir prononcer la solidarité de la condamnation éventuellement prononcée par la cour,

- débouter Me Legras de Grandcourt, ès qualités, de sa demande d'exécution provisoire,

- fixer à un juste montant, pour chacun des dirigeants mis en cause et à proportion des responsabilités respectives, les condamnations éventuellement prononcées,

En tout état de cause,

- constater que les conditions du prononcé à son encontre d'une mesure de faillite personnelle ou d'interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement toute entreprise commerciale ou artisanale et toute exploitation agricole, ainsi que toute personne morale, ne sont pas réunies en l'espèce,

En conséquence,

- débouter Me Legras de Grandcourt, ès qualités, de sa demande visant à voir prononcer à son encontre une mesure de faillite personnelle ou d'interdiction de gérer,

- condamner Me Patrick Legras de Grandcourt, ès qualités, à lui payer la somme de 20.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens dont distraction au profit de Me Bertrand W, avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions (pages 1 à 40) remises au greffe et notifiées par RPVA le 3 février et 20 avril 2017 pour M. Y aux termes desquelles il demande à la cour de :

in limine litis,

- surseoir à statuer dans l'attente de l'issue définitive de la procédure actuellement pendante devant le tribunal de commerce de Nanterre aux fins de dé-séquestration des documents saisis chez Technicolor dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice ;

- surseoir à statuer dans l'attente de l'issue définitive de la procédure pénale actuellement en cours devant le tribunal de grande instance de Nanterre ;

- ordonner une expertise avec la même mission que celle déjà demandée,

- enjoindre Me Legras de Grandcourt, ès qualités, de mandataire liquidateur, de communiquer à l'ensemble des intimés l'ensemble des documents consultés par le cabinet Exafi ayant permis l'établissement son rapport en date du 28 juin 2012 ;

A titre principal,

- infirmer le jugement du tribunal de commerce de Nanterre en toutes ses dispositions,

Et statuant à nouveau,

- constater que Me Legras de Grandcourt, ès qualités, ne démontre pas qu'agissant en qualité de président directeur général à compter du 24 juin 2011, il aurait commis des fautes de gestion ayant contribué à la création ou à l'augmentation de l'insuffisance d'actif de la société Quinta industries ;

- constater que Me Legras de Grandcourt, ès qualités, ne démontre pas qu'agissant en qualité de président du conseil d'administration, il aurait commis des fautes de gestion ayant contribué à la création ou à l'augmentation de l'insuffisance d'actif de la société Quinta industries ;

- constater que Me Legras de Grandcourt, ès qualités, ne rapporte pas la preuve de l'existence et du quantum du préjudice qu'il allègue ;

- constater que les facteurs économiques et politiques imprévisibles ainsi que le comportement fautif du coactionnaire Ericcsson Broadcast Services France ont contribué à la création et à l'augmentation de l'insuffisance d'actif de la société Quinta industries ;

En conséquence,

- débouter Me Legras de Grandcourt, ès qualités, de l'ensemble de ses demandes ;

A titre subsidiaire,

- constater que les responsabilités respectives des dirigeants diffèrent du fait de leurs qualités et comportements respectifs ;

- fixer à un juste montant pour chacun des dirigeants mis en cause et à proportion des responsabilités respectives (sic) ;

En tout état de cause,

- condamner Me Legras de Grandcourt, ès qualités, à lui payer la somme de 20.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens dont distraction pour ceux le concernant au profit de Maître P., sur le fondement de l'article 699 du

code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions (pages 1 à 30) remises au greffe et notifiées par RPVA le 20 septembre 2017 pour M. W aux termes desquelles il demande à la cour, au visa des articles L. 651-1 et suivants, L. 653-5 et L. 653-8 du code de commerce, 378 du code de procédure civile, et 4 du code de procédure pénale, de :

- dire que tant la plainte pénale pour escroquerie et abus de confiance engagée par Quinta

communications et M. X contre X, que l'affaire actuellement pendante devant le tribunal de commerce de Nanterre ne pourront avoir aucune influence sur la présente instance,

- rejeter la demande de sursis à statuer formulée la société Quinta communications et M. Y,

- prendre acte de ce qu'il s'en rapporte à la sagesse de la cour s'agissant de la demande d'expertise formulée par Quinta communications et Monsieur A,

- si un expert devait être nommé, modifier la mission proposée par Quinta communications pour en exclure la demande relative au rôle et à la participation du groupe Technicolor, incluant notamment mais non exclusivement Tnsf, au sein des sociétés du groupe Quinta industries entre 2006 et 2011,

Sur le fond, à titre principal de,

- prendre acte de ce que sa responsabilité n'est pas recherchée s'agissant des fautes de gestion suivantes : retard dans le dépôt de la déclaration de cessation des paiements, gestion contraire à l'intérêt social de la société Quinta industries et défaut de paiement des cotisations fiscales et sociales,

- dire qu'il n'a commis, en tant que représentant de Tnsf au conseil d'administration de Quinta industries entre le 18 janvier 2011 et le 22 mars 2011, aucune faute de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif de la société Quinta industries,

En conséquence,

- confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions à son égard,

- débouter Me Legras de Grandcourt, ès qualités, et le ministère public de l'ensemble de leurs demandes formulées à son encontre,

- condamner Me Legras de Grandcourt, ès qualités, aux entiers dépens de la présente instance ainsi qu'au paiement de la somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions (pages 1 à 74) remises au greffe et notifiées par RPVA le 8 septembre 2017 pour M. Z aux termes desquelles il demande à la cour :

A titre principal,

- d'infirmer le jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 16 décembre 2016 en toutes ses dispositions,

et statuant à nouveau de,

- constater que Me Legras de Grandcourt, ès qualités, ne démontre pas qu'en sa qualité de dirigeant légal, il aurait commis des fautes de gestion ayant contribué à la création ou à l'augmentation de l'insuffisance d'actif,

- constater que Me Legras de Grandcourt, ès qualités, ne rapporte pas la preuve de l'existence et du quantum du préjudice qu'il invoque,

en conséquence de quoi,

- débouter Me Legras de Grandcourt, ès qualités, de l'intégralité de ses demandes,

À titre subsidiaire, si par impossible la cour devait confirmer totalement ou partiellement le jugement querellé et entrer en voie de condamnation de,

- constater que sa responsabilité doit être tempérée, en raison des efforts significatifs qu'il a personnellement réalisés pour opérer le redressement de la société dans un environnement technologique en mutation et un environnement économique très dégradé, ainsi qu'en raison des comportements parasitaires et perturbateurs des dirigeants de fait,

- constater qu'il a accompli la quasi-totalité de sa vie professionnelle en qualité de cadre dirigeant ou dirigeant mais qu'à son âge, ses chances sont grandement obérées de trouver un emploi salarié,

en conséquence de quoi,

- fixer à une juste proportion le montant éventuellement mis à sa charge, en tenant compte de l'extrême modestie de ses facultés contributives,

- débouter Me Patrick Legras de Grandcourt, ès qualités, de sa demande au titre de l'interdiction de gérer,

En tout état de cause,

- condamner Me Patrick Legras de Grandcourt, ès qualités, aux entiers dépens qui pourront être recouvrés par la SELARL Lexavoué Paris-Versailles, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Vu les dernières conclusions (pages 1 à 57) remises au greffe et notifiées par RPVA le 20 septembre 2017 pour la SA Ericsson broadcast services France (anciennement dénommée Technicolor network services France), aux termes desquelles elle demande à la cour, au visa de l'article L. 652-1 du code de commerce :

A titre principal de :

- confirmer le jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 16 décembre 2016 en

toutes ses dispositions à son égard,

A titre subsidiaire de,

- dire que sa responsabilité, en sa qualité d'administrateur de la société Quinta industries, ne peut être recherchée que pendant la durée durant laquelle son représentant permanent attrait à la cause a exercé son mandat, soit entre le 18 janvier 2011 et le 22 mars 2011 ;

- constater que sa responsabilité n'est pas recherchée pour trois des fautes de gestion alléguées par Me Legras de Grandcourt, ès qualités, à savoir, le retard dans le dépôt de la déclaration de cessation de paiement, la gestion contraire à l'intérêt social de la société Quinta industries et le défaut de paiement des cotisations fiscales et sociales ;

- dire qu'en sa qualité d'administrateur de la société Quinta industries, elle n'a commis aucune faute de gestion par l'intermédiaire de son représentant permanent, M. W, ayant contribué à l'insuffisance d'actif de la société Quinta industries ;

En toute hypothèse de,

- dire que le liquidateur ne fournit pas les éléments permettant d'apprécier de manière certaine l'existence et le montant de l'insuffisance d'actif conditionnant la poursuite des dirigeants sur le fondement de l'article L.651-2 du code de commerce,

Par conséquent de,

- débouter Me Legras de Grandcourt, ès qualités, de l'ensemble de ses demandes à son encontre,

A titre infiniment subsidiaire de,

- dire que la faute prétendument commise par Technicolor network services France est d'une très faible gravité eu égard aux faits prétendument commis par la société Quinta communications et ses dirigeants, Technicolor network services France n'en ayant par ailleurs ni tiré ni tenté d'en tirer un quelconque profit,

Par conséquent de,

- débouter Me Legras de Grandcourt, ès qualités, de l'ensemble de ses demandes à son encontre et notamment de sa demande tendant à la condamnation solidaire de cette société avec ses co-défendeurs,

En tout état de cause,

- condamner Me Legras de Grandcourt, ès qualités, à lui payer la somme de 5.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner Me Legras de Grandcourt, ès qualités, aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de Maître Franck L., avocat, conformément aux dispositions de l'article 699 du CPC.

Vu les dernières conclusions notifiées par RPVA en date du 14 février 2017 pour le ministère public aux termes desquelles il demande à la cour de :

- dire recevable l'appel qu'il a interjeté,

- le dire bien fondé,

- réformer ce jugement et prononcer une mesure d'interdiction de gérer à l'encontre de MM. A, X et Z pour une durée de 5 ans et aggraver les sanctions patrimoniales prononcées à l'encontre de ces trois personnes et de la société Quinta communications,

- éventuellement prononcer une sanction personnelle et patrimoniale à l'encontre de M. W et de la SASU Ericson broadcast services France devenue Technicolor.

Il expose que son appel porte exclusivement sur le quantum des sanctions personnelles et patrimoniales prononcées, le tribunal ayant parfaitement caractérisé la gérance de fait de la socété Quinta communications et de M. X ainsi que les fautes de gestion. Il ajoute qu'il considère inopportun d'exclure les mandats sociaux en cours.

Selon arrêt du 13 juillet 2017, la présente cour a dit qu'il n'y avait pas lieu à transmission d'une question prioritaire de constitutionnalité soumise par la SA Quinta communications.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 16 octobre 2017.

Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE,

1- Sur les demandes de sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure de dé-séquestration de pièces et de mise en jeu de la responsabilité de Technicolor,

La société Quinta communications, M. A et M. X prétendent que la demande de sursis à statuer présentée in limine litis est recevable et que l'issue de la procédure en responsabilité, engagée sur la base des pièces saisies, aura une influence sur la présente instance en ce qu'elle démontrera les fautes commises par Technicolor à l'encontre des sociétés Quinta communications et Quinta industries et leurs conséquences sur le montant du passif voire la cessation des paiements de la société Quinta industries. La société Quinta communications précise qu'elle a assigné le liquidateur en intervention forcée aux fins de mise en oeuvre de l'action sociale ut singuli en réparation du préjudice subi par la société Quinta industries.

M. A prétend également que le jugement ne serait pas motivé sur ce point.

Me Legras de Grandcourt soutient que l'action engagée contre la société Technicolor est un conflit entre actionnaires ou futurs actionnaires qui ne concerne pas les créanciers des sociétés en liquidation ; que s'agissant d'une action en concurrence déloyale ou en responsabilité contractuelle elle se résoudra le cas échéant en dommages et intérêts au profit de la société Quinta communications mais pas des sociétés en liquidation ; que le refus de la société Technicolor de racheter les actions détenues par la société Quinta communications dans la société Quinta industries était connu des défendeurs dès le mois de mai 2011 et n'a pas d'incidence sur d'éventuelles fautes de gestion ; que la société Quinta communications et les dirigeants de droit qui étaient les interlocuteurs de la société Technicolor sont à même de produire les échanges intervenus entre eux ; que les éléments qui justifieraient, au regard des fautes commises par le groupe Technicolor, une demande de dommages et intérêts de 15 à 20 millions d'euros de la part de la société Quinta industries ne sont pas nouveaux ; qu'il n'est pas d'une bonne administration de la justice de différer une fois encore une procédure qui a été engagée il y a trois ans, sur une procédure collective ouverte il y a cinq ans et qui a pour but de régler des créanciers impayés depuis plusieurs années ; que la demande serait devenue sans objet puisque la société Quinta communications verserait désormais aux débats les documents litigieux ; que sa mise en cause forcée dans la procédure qui oppose la société Quinta industries à la société Technicolor n'est qu'un moyen artificiel pour retarder l'arrêt compte tenu de l'absence d'influence sur la présente procédure.

M. W s'oppose à la demande de sursis qu'il considère comme dilatoire et précise que la procédure aux fins de dé-séquestration est désormais aboutie ; que l'action publique est prescrite et que les griefs formulés par Quinta communications à l'encontre de Technicolor n'ont aucun lien avec les fautes de gestion qui sont reprochées aux dirigeants du groupe Quinta industries.

La SASU Ericsson s'en remet à la sagesse de la cour sur ce point.

Le grief de défaut de motivation sera écarté dès lors qu'il est inexact, le tribunal ayant motivé sa décision sur ce point (pages 14 et 15 du jugement) alors, au demeurant, qu'il n'y était pas tenu.

Dans le corps de ses écritures Me Legras de Grandcourt, ès qualités, demande à la cour d'infirmer la recevabilité des demandes de sursis mais n'en a toutefois pas saisi la cour dès lors que la demande ne figure pas dans le dispositif de ses conclusions. En l'absence de moyen susceptible d'être soulevé d'office, il n'y a pas lieu de statuer sur ce chef.

La société Quinta communications ayant fait pratiquer une saisie de documents dans les locaux de Technicolor, des procédures aux fins de dé-séquestration de ces documents puis en responsabilité ont été engagées depuis 2012 devant le tribunal de commerce de Nanterre.

Devant le tribunal, une demande de sursis dans l'attente de l'issue définitive de la procédure de dé-séquestration des documents saisis chez Technicolor avait été présentée. Cette procédure ayant depuis lors abouti, comme le démontre le jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 29 juillet 2016 et les pièces produites, la société Quinta communications, MM. A et X ont modifié leur demande de sursis jusqu'à l'issue de la procédure en responsabilité dans laquelle le liquidateur a été assigné en intervention forcée le 3 août 2017 aux fins de mise en oeuvre de l'action sociale ut singuli en réparation du préjudice subi par la société Quinta industries.

Bien que nouvelle, cette demande est recevable par application de l'article 565 du code de procédure civile en ce qu'elle tend aux mêmes fins que celle soumise au premier juge.

Il convient d'observer que si les deux procédures revêtent une nature indemnitaire, elles sont distinctes en ce que l'une a pour objectif initial et principal de caractériser des fautes à l'encontre de la société Technicolor à l'origine d'un préjudice subi par la SA Quinta communications et l'obtention par celle-ci de dommages et intérêts tandis que l'autre a pour objet la réparation du préjudice subi par la collectivité des créanciers de la société Quinta industries en contraignant les dirigeants de la personne morale à combler une éventuelle insuffisance d'actif sur leur patrimoine personnel.

L'extension par la société Quinta communications de son action au liquidateur de la société Quinta industries est tardive par rapport à l'assignation initiale du 3 octobre 2012 et la recevabilité de l'action n'est pas acquise à ce stade.

En outre, la société Quinta communications ne peut pas reprocher à la société Technicolor de s'être impliquée dans la gestion de la société Quinta industries ou de connaître le fonctionnement du groupe Quinta industries alors que c'est ce qui est attendu de la part d'un associé.

Enfin, elle allègue mais ne démontre pas que la société Technicolor aurait bénéficié de connivence avec certains organes de la procédure de liquidation judiciaire.

En conséquence, la solution de l'action en responsabilité engagée à l'encontre de la société Technicolor n'est pas de nature à avoir une incidence directe sur le présent litige. Les demandes de sursis à statuer seront donc rejetées et le jugement confirmé sur ce point.

2- Sur les demandes de sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure pénale

La société Quinta communications et M. X exposent qu'une plainte contre X a été déposée le 3 avril 2012 des chefs d'escroquerie et d'abus de confiance dans laquelle a été dénoncée la manoeuvre mise en place par Technicolor pour conduire le groupe Quinta industries à la liquidation en vue d'acquérir ses actifs à vil prix à la barre du tribunal ainsi que les conditions frauduleuses dans lesquelles sont intervenues ces cessions et prétendent que le résultat des investigations menées éclairera nécessairement sur les responsabilités respectives de chacun des dirigeants dans le cadre de la procédure en responsabilité pour insuffisance d'actif.

M. A soutient que l'ouverture d'une information judiciaire par le procureur constitue un commencement de preuve de l'escroquerie au jugement de cession dont se serait rendu coupable Technicolor et que le résultat des investigations entreprises permettra d'éclairer la cour d'appel sur les responsabilités effectives et respectives des dirigeants dans cette procédure.

Me Legras de Grandcourt rappelle que le tribunal a déjà statué et rejeté cette demande formée par les même parties, lesquelles n'apportent pas d'élément nouveau à l'exception de la mise sous témoin assisté et non en examen de la société Technicolor ; qu'aux termes de l'article 4 du code de procédure pénale il n'y a pas lieu à sursis dans le cadre d'une action commerciale ; que l'action publique en cours n'est pas de nature à exercer une quelconque influence sur la présente procédure alors qu'il n'est pas démontré que des éléments auraient été dissimulés au tribunal dans le cadre du rachat des actifs.

M. W s'oppose également à cette demande de sursis puisque le placement sous le statut de témoin assisté de la société Technicolor démontre l'absence d'indices graves et concordants de ce qu'elle aurait commis les délits qui lui sont reprochés par Quinta communications.

La SASU Ericsson s'en remet à la sagesse de la cour sur ce point.

Le 5 juillet 2013 le procureur de la République de Nanterre a requis l'ouverture d'une information judiciaire des chefs d'abus de confiance et d'escroqueries aux jugements de cession rendus les 20 janvier et 3 février 2012.

Alors que l'article 4 du code de procédure pénale précise que la mise en mouvement de l'action publique n'impose pas la suspension du jugement des affaires civiles, le placement de la société Technicolor sous le statut de témoin assisté tend à démontrer que la décision à intervenir au pénal n'est pas susceptible d'exercer directement ou indirectement une influence sur la solution de la présente instance.

Au demeurant, le tribunal a relevé de manière pertinente que la cession d'éléments d'actifs avait été opérée par des décisions judiciaires devenues définitives, non contestées par les dirigeants concernés et au regard d'une offre mieux disante que celle présentée par une filiale de la société Quinta communications.

Les demandes de sursis dans l'attente de l'issue de la procédure pénale seront donc également rejetées et le jugement confirmé sur ce point.

3- Sur les demandes d'expertise

Dans le corps de ses écritures Me Legras de Grandcourt, ès qualités, demande à la cour de déclarer les demandes d'expertise irrecevables mais n'en a toutefois pas saisi la cour dès lors que cela ne figure pas dans le dispositif de ses conclusions. En l'absence de moyen susceptible d'être soulevé d'office, il n'y a pas lieu de statuer de ce chef.

La société Quinta communications et M. X soutiennent qu'une nouvelle expertise judiciaire contradictoire est nécessaire dès lors que le rapport Exafi, sur lequel s'est appuyé le jugement, n'a pas pris en compte les spécificités de l'activité du groupe, notamment le concept de 'one stop shopping', et que les trois rapports qui ont été faits, Exafi à la demande du liquidateur judiciaire, L. à la demande de la société Quinta communications et BM&A à la demande de M. Z sont divergents.

Me Legras de Grandcourt prétend que cette demande est mal fondée puisque si la cour a à sa disposition trois rapports d'experts différents, il est faux de prétendre qu'il s'agit de rapports contradictoires et précise que le rapport Exafi a été communiqué dès l'origine dans son intégralité et avec toutes ses annexes.

M. A rappelle que le rapport Exafi a été établi sur ordonnance du juge commissaire, de façon non contradictoire et que le mandataire liquidateur s'appuie essentiellement sur les conclusions et les éléments chiffrés de ce rapport dans ses écritures alors que celui-ci raisonne par entité sans tenir compte du modèle économique du groupe et de la spécificité des industries cinématographiques techniques. Il précise que selon l'article 482 du code de procédure civile le jugement qui se borne dans son dispositif à ordonner une demande d'instruction n'a pas l'autorité de la chose jugée tout comme un jugement qui rejette une demande d'expertise. Il considère que la cour doit être éclairée, au moyen d'un rapport contradictoire, sur le montant des créances intra-groupe, la réalité des passifs retenus et l'insuffisance d'actif.

M. W s'en rapporte tout en sollicitant une modification de la mission dans l'hypothèse où elle serait ordonnée dès lors qu'elle ne saurait porter sur le rôle qu'aurait joué le groupe Technicolor qui n'est pas partie à l'actuelle procédure.

La SASU Ericsson s'en remet également à la sagesse de la cour sur ce point.

Pour trancher les demandes dont elle est saisie, la cour dispose, outre les très nombreuses pièces communiquées par les parties :

- du rapport établi par le cabinet d'expertise-comptable et commissaire aux comptes Exafi, désigné en qualité de technicien par le juge-commissaire, lequel avait notamment pour mission d'analyser les flux financiers anormaux intra-groupe, d'analyser les écritures portées dans les comptes courants détenus par Quinta communication et d'identifier les éventuelles fautes de gestion ayant eu pour conséquence de créer une insuffisance d'actif, et ses annexes,

- du rapport établi par M. L., expert-comptable et commissaire aux comptes, à la demande de M. X et de la société la société Quinta communications,

- du rapport dressé par le cabinet BM&A à la demande de MM. G. et Ali C.,

- du rapport intitulé 'Examen critique de la présentation du montant du passif tel qu'il apparaît dans les jugements du tribunal de commerce de Nanterre du 16 décembre 2016" établi par le cabinet M. à la demande de Me de L., conseil de la société Quinta communications.

Ces quatre rapports, bien qu'établis non contradictoirement, ont été communiqués et ont fait l'objet d'un débat contradictoire.

Le reproche qui est fait au rapport Exafi de n'avoir pas pris en compte les spécificités de l'activité du groupe, notamment le concept du guichet unique, ne peut justifier une nouvelle expertise dès lors que le rapport L. pallie l'absence alléguée en critiquant l'approche du rapport Exafi et en expliquant la notion de groupe et son modèle économique et que M. G. considère aux termes de ses écritures que le rapport BM&A 'vient combler les insuffisances d'Exafi' en ce qu'il 'restitue la dimension groupe...et apporte une analyse stratégique intégrée dans le contexte économique réel d'un secteur dévasté'.

Au demeurant la notion de groupe, son modèle économique et ses spécificités ainsi que la critique du passif pris en compte par le tribunal sont largement repris dans les écritures de MM. X, A et G. ainsi que dans celles de la société Quinta communications en sorte que la cour s'estime suffisamment éclairée sur ce point sans qu'il soit besoin d'ordonner une nouvelle mesure d'instruction.

Les demandes à ce titre seront donc rejetées.

4- Sur la demande de communication de pièces

La société Quinta communications, MM. X et A demandent à la cour d'enjoindre au liquidateur de communiquer sur une clé Usb l'ensemble des pièces remises à Exafi pour établir son rapport, considérant que la transmission de pièces au technicien, qui a établi un rapport en leur défaveur, qui leur est refusée constitue une rupture de l'égalité des armes sanctionnée par les juridictions européennes.

Me Legras de Grandcourt relève qu'il n'existe aucun fondement juridique à cette demande dont l'objet est de retarder la procédure et rappelle d'une part que l'intégralité du rapport et de ses annexes a été communiquée aux parties et d'autre part que l'accès au dossier de la procédure collective est strictement délimité par la loi.

La SASU Ericsson s'en remet à la sagesse de la cour sur ce point.

Il convient de rappeler que la désignation d'un technicien par le juge-commissaire en vue d'une mission qu'il détermine ne méconnaît pas par elle-même les droits de la défense, le principe de la contradiction ou celui de l'égalité des armes.

Les experts-comptables du cabinet Exafi précisent en page 1 de leur rapport que 'leurs travaux ont notamment consisté en l'analyse de la comptabilité des sociétés et de documents et/ou fichiers de la comptabilité que vous avez bien voulu nous communiquer' et les annexes sont listées et numérotées en fin de rapport.

Dès lors que les sociétés Quinta communications et Quinta industries sont présumées avoir en leur possession leur comptabilité, voire celle de leurs filiales, et qu'elles ne précisent pas les éléments auxquels le rapport Exafi ferait référence et non connus d'elles et que tant le rapport que ses annexes ont fait l'objet d'un débat contradictoire, la demande de communication de pièces sera rejetée en ce qu'elle n'est pas utile à la solution du litige et le jugement confirmé de ce chef.

5- Sur l'insuffisance d'actif

Me Legras de Grandcourt, ès qualités, indique d'une part que l'actif réalisé s'élève à la somme de 168 456,79 € correspondant pour l'essentiel au solde du compte bancaire (67 360,44 €), au recouvrement clients (18 483,74 €), au prix de cession du matériel (23 630 €) et à des recouvrements divers (21 131,63 € et 8 150, 98 € au titre du 1% logement), d'autre part que le passif définitif est de 45 421.690,69 € dont 32 251 148,91 € de passif intra-groupe, soit une insuffisance d'actif de 45 253 233,90 €.

La société Quinta communications et M. X prétendent que l'insuffisance d'actif est manifestement surestimée en ce qu'il convient d'en exclure le passif intra-groupe (67 millions d'euros) et de retraiter les créances garanties, les créances des actionnaires et des sociétés affiliées aux actionnaires ce qui ramène le passif externe hors groupe à 51,8 millions d'euros soit 33,7 millions d'euros après déduction des actifs réalisés et les sommes à percevoir des condamnations. Concernant la société Quinta industries, ils expliquent que le passif corrigé s'élève à 31,8 millions d'euros, le passif externe hors groupe actionnaires et parties liées à 9,4 millions d'euros et l'insuffisance d'actif calculée par rapport au passif externe à 8,7 millions d'euros.

M. A prétend que le liquidateur ne produit pas de pièces comptables justificatives permettant d'identifier l'actif disponible au moment de la cessation des paiements et que le tribunal a largement surestimé le montant de l'insuffisance d'actif de la société Quinta industries qui est de 8,7 millions d'euros par rapport au passif externe.

M. G. soutient que l'insuffisance d'actif alléguée est manifestement surestimée puisque le liquidateur s'est borné à cumuler les passifs de toutes les sociétés sans neutraliser d'une part le passif intra-groupe, d'autre part, le passif en doublon résultant de l'existence d'engagements de caution de diverses sociétés entre elles et de troisième part le passif résultant seulement de l'arrêt d'activité. Il ajoute que le liquidateur n'a fourni aucune information sur l'aggravation de l'insuffisance d'actif en relation avec chacune des fautes alléguées.

La société Ericsson argue du défaut de caractérisation de l'insuffisance d'actif alléguée à la date de cessation des fonctions de la société Tnsf, le 22 mars 2011, et critique le caractère incertain et exorbitant du montant de l'insuffisance d'actif retenu par le liquidateur.

L'insuffisance d'actif est égale à la différence entre le montant du passif antérieur admis définitivement et le montant de l'actif réalisé de la personne morale débitrice. Elle s'apprécie à la date à laquelle le juge statue.

En outre, l'insuffisance d'actif d'une société qui peut être mise à la charge d'un dirigeant s'apprécie au regard de son actif et de son passif propres sans référence aux comptes consolidés du groupe.

Il n'y a pas lieu dès lors de retraiter les cautions et les dettes intra-groupe contrairement à ce qu'indiquent notamment les rapports BM&A (p 10) et M. (p 10 à 15).

Depuis le jugement le passif a diminué en suite de l'extinction d'un cautionnement donné par la société Quinta industries.

Il convient de déduire du passif retenu par le liquidateur judiciaire la somme de 543 920,07 € due au titre du super privilège des salaires, née postérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective, en sorte que l'insuffisance d'actif s'élève désormais à la somme de 44 709 313,83 €.

L'existence de capitaux propres négatifs depuis 2006, le montant des dettes chiffrées (544 K€ de dettes fournisseurs, 176 352 € de dettes fiscales et sociales) par la société Quinta industries elle-même dans sa requête aux fins de conciliation du 28 janvier 2011, la comparaison entre le montant des dettes et celui de l'actif circulant figurant dans le bilan clos au 31 décembre 2010 (37 751 607 € / 7 784 682 €) suffisant à démontrer que cette insuffisance d'actif, distincte de la cessation des paiements, existait à la date à laquelle la société Tnsf a cessé ses fonctions, peu important le montant exact de celle-ci à la date de son départ.

6- Sur la direction de la société Quinta industries

Aux termes de l'article L651-1 du code de commerce, les dispositions relatives à la responsabilité pour insuffisance d'actif s'appliquent aux dirigeants d'une personne morale de droit privé soumise à une procédure collective ainsi qu'aux personnes physiques représentants permanents de ces dirigeants personnes morales.

* Les dirigeants de droit

Me Legras de Grandcourt rappelle que constitue une faute pour le dirigeant de droit de laisser s'exercer une gestion de fait et que ni la position dominante de la société Quinta communications ni le désintéressement par une personne de son mandat ou l'absence de diligences ne peuvent exonérer un administrateur de sa responsabilité.

M. A affirme qu'en sa qualité de président du conseil d'administration de la société Quinta industries et non de dirigeant opérationnel sa responsabilité est limitées au seul défaut de surveillance.

M. Z, les sociétés Quinta communications et Ericsson, MM. X et W ne contestent pas avoir été respectivement dirigeant, administrateurs ou représentants permanent d'un administrateur.

Selon les pièces produites, notamment l'extrait Kbis du 2 octobre 2011, la société Quinta industries est une société anonyme avec conseil d'administration composé de :

* M. Y, président du conseil d'administration et administrateur (et par ailleurs directeur général de la société Quinta communications, représentant permanent la société Quinta communications au conseil d'administration de la société Duran et président directeur général de la société ADJ),

* M. Z, directeur général et administrateur (et par ailleurs président des sociétés Duran, LTC, Scanlab et SIS, représentant permanent de la société Duran au conseil d'administration de la société ADJ )

* la société Quinta communications, représentée par Mme G. jusqu'au 15 février 2011 puis par M. X,

* la société Tnsf devenue Ericsson broadacast, représentée par M. W du 18 janvier 2011 au 22 mars 2011, date de la démission de la société de ses fonctions.

Il est constant que dans une société anonyme le directeur général et le président du conseil d'administration, même si ce dernier n'exerce pas de fonctions de direction générale comme c'est le cas en l'espèce, sont des dirigeants de droit au sens de l'article L651-1 du code de commerce.

Nonobstant le fait que M. G. ait été écarté de la gestion à partir de l'été 2011, comme il le prétend, il n'a pas été révoqué et n'a pas démissionné. Sa responsabilité est donc susceptible d'être engagée.

Bien qu'ils n'assument pas la direction générale de la société, les administrateurs ont également la qualité de dirigeants de droit.

Conformément à l'article L.225-20 du code de commerce, le représentant permanent d'une personne morale encourt la même responsabilité civile que s'il était administrateur en son nom propre, sans préjudice de la responsabilité solidaire de la personne morale qu'il représente. Au surplus l'article L.651-1 du code de commerce ne subordonne pas la condamnation au paiement de l'insuffisance d'actif du représentant de la personne morale à la condamnation de celle-ci.

La responsabilité de Tnsf peut donc être recherchée même pour la période antérieure à la désignation de M. W comme représentant permanent.

A la date de la démission de Tnsf, la conciliation était en cours. Toutefois la situation obérée qui a conduit à l'ouverture d'une procédure collective était effective puisque les résultats étaient déficitaires et les capitaux propres négatifs. L'insuffisance d'actif est donc caractérisée même si elle n'est pas exactement fixée à cette date en sorte que la responsabilité de la société Tnsf est susceptible d'être engagée et ce au delà des dates du mandat de son représentant permanent au conseil d'administration de la société Quinta industries également attrait en la cause.

* la direction de fait

Me Legras de Grandcourt soutient que la société Quinta communications, actionnaire majoritaire et administrateur, par le biais de MM. X et A, a eu un rôle prépondérant dans la direction de la société Quinta industries et s'est immiscée dans sa gestion, pouvoir que son mandat d'administrateur ne lui conférait pas, en étant l'interlocuteur des créanciers, des pouvoirs publics, du CIRI, M.X étant même l'interlocuteur exclusif de celui-ci, et de la Commission des chefs des services financiers pour le compte de sa filiale, sans même parfois que M. G. soit informé. Il explique qu'il y a eu une confusion des rôles entre le dirigeant et l'actionnaire, que les notions de dirigeant de fait et de co-employeur ne peuvent être confondues et que la société Quinta communications ne peut tenter de s'exonérer au prétexte qu'elle serait intervenue comme garant financier alors qu'elle n'a jamais donné de garantie financière en son nom. Il précise que M. X était tout à la fois dirigeant de fait et représentant permanent de la société Quinta communications, elle même dirigeante de fait et que le représentant permanent doit être condamné solidairement avec la société.

Il ajoute que Monsieur A a également eu la qualité de dirigeant de fait en ce que son rôle est allé bien au-delà de sa fonction de président du conseil d'administration et d'administrateur comme le démontre entre autres la déclaration de cessation des paiements qu'il a signée et déposée aux lieu et place de Monsieur G., directeur général.

La société Quinta communications et M. X contestent avoir été les dirigeants de fait de Quinta industries et s'être immiscés dans sa gestion opérationnelle et financière, M. X reconnaissant seulement avoir été dirigeant de droit en qualité de représentant permanent de la personne morale Quinta communications au conseil d'administration de la société Quinta industries, et prétendent que la société Quinta communications, représentée dans ses démarches auprès des interlocuteurs publics par une personne physique à savoir son dirigeant M. X, n'est intervenue qu'en qualité d'actionnaire et de garant financier pour tenter de sauver le groupe. Ils exposent que la direction départementale des finances publiques exigeait pour accorder un éventuel moratoire au groupe, une garantie financière de la maison-mère et que c'est donc uniquement dans ce cadre que M. X, dirigeant de la société Quinta communications, est intervenu dans les négociations. Ils ajoutent que le CIRI avait l'obligation de convoquer les actionnaires lors des négociations et que leur implication dans celle-ci ne peut s'analyser comme un indice de direction de fait. Ils affirment que la direction effective du groupe appartenait à M. Z, lequel a été le dirigeant exécutif de la plupart des sociétés du groupe depuis 1997.

La société Quinta communications rappelle enfin que s'agissant des autres sociétés du groupe la qualification de co-employeur n'a pas été retenue la concernant.

M. X indique également qu'il n'est jamais intervenu à titre personnel et que par conséquent sa responsabilité ne peut pas être engagée.

M. A indique s'être borné à son rôle de président du conseil d'administration.

M. G. prétend au contraire que la gestion de fait de la société Quinta communications, de MM X et A a eu un impact déterminant sur certaines fautes de gestion et l'a dépossédé de sa direction de droit.

La direction de fait d'une personne morale ou physique suppose de démontrer l'exercice en toute indépendance d'une activité positive de direction.

S'agissant de la société Quinta communications et de M. X, il est démontré par la lettre adressée le 9 février 2011 par la Direction générale des finances publiques à 'M. X, SA Quinta Communications, [...]' que celui-ci était l'interlocuteur de l'administration fiscale concernant la suspension des mesures d'exécution forcées prises à l'encontre des sociétés Quinta industries, Duran, Scanlab, ADJ, LTC et SIS, cette correspondance faisant au demeurant référence à l'engagement personnel de M. X vis à vis du CIRI quant à la reprise du paiement des cotisations sociales courantes depuis le mois de février 2011 et non à une quelconque garantie financière de la société Quinta communications en qualité d'actionnaire.

Les courriers du 2 et 9 août 2011 également envoyés par la Direction générale des finances publiques à 'M. X, SA Quinta Communications, [...]' lui indiquent que la Codechef exige le paiement à bonne date des cotisations sociales pour les six sociétés susvisées et donne son accord pour un engagement écrit de l'actionnaire Quinta communications de s'acquitter au 30 septembre 2011 de la somme de 807 000 € à défaut de financement, outre un accord de principe pour un plan de 36 mois à compter des premières recettes de numérisation pour les dettes antérieures au 1er janvier 2011.

Le 12 septembre 2011, M. X lui répond sur un papier en tête de la société Quinta communications que 'les dirigeants de Quinta Industries et moi-même souhaitons vous rencontrer au plus vite afin d'explorer toutes les voies possibles pour une sortie amiable de ce dossier'.

Il est également constant que les mails envoyés par Paul-Marie Dubée et Guillaume V., rapporteurs au CIRI, entre le 1er avril 2011 et le 8 septembre 2011 concernant l'objet 'Quinta Industries' l'ont été à titre principal à M. X ou à M. A, M. G. n'apparaissant pas systématiquement en copie (ex 1er avril 2011, 29 août 2011 et 8 septembre 2011) et que M. X a donné son accord de principe sur le paiement aux créanciers publics 'd'un montant à déterminer correspondant au paiement d'intérêts sur le passif fiscal et social' .

Si le CIRI est désormais obligé depuis 2015 d'inviter les actionnaires aux négociations cela ne doit toutefois pas se faire au détriment des dirigeants légaux comme en l'espèce.

Il ressort également de la lettre du 31 août 2011 adressée par le conseil de la société Hewlett-Packard à M. X, en sa qualité de président du conseil d'administration et directeur général de la société Quinta communications, avec copies à MM. G. et A, que celui-ci s'est engagé à honorer les mensualités impayées par la société Quinta industries.

Contrairement à ses affirmations, la société Quinta communications ne rapporte pas la preuve qu'elle serait intervenue auprès de la Codechef ou du CIRI en qualité de garante financière dès lors qu'elle ne produit aucune garantie prétendument apportée, notamment le nantissement sur ses actions évoqué dans le courrier du 12 avril 2011.

Il se déduit de ces éléments qu'en se présentant comme l'interlocutrice des créanciers publics et privés puis du CIRI, la société Quinta communications, par l'intermédiaire de son dirigeant M. X, a montré qu'elle détenait le pouvoir de décision quant aux échéances de remboursement mais également par rapport à la stratégie de l'entreprise, peu important qu'elle n'ait pas été reconnue devant les instances prud'homales comme co-employeur. Elle est donc allée au delà de son rôle d'actionnaire principal et s'est comportée à compter du début de l'année 2011 en dirigeant de fait de la société Quinta industries.

La responsabilité personnelle de M. X en tant que dirigeant de fait est recherchée par le liquidateur judiciaire, lequel ne démontre pas toutefois la commission par celui-ci d'actes personnels distincts de ceux accomplis en tant que dirigeant légal de la société Quinta communications et de représentant permanent de celle-ci au conseil d'administration de Quinta industries à compter du 15 février 2011. La qualité de dirigeant de fait ne sera donc pas retenue à son égard et aucune faute ne pourra lui être reprochée à ce titre.

S'agissant de M. A, il est établi par les pièces versées aux débats qu'il a signé la lettre du 12 octobre 2010 à en tête de la société Quinta industries adressée à la société Quinta communications par laquelle il informe celle-ci qu'aucun paiement en numéraires ne sera exigé de sa part avant le 31 décembre 2012 pour les travaux de post-production du film 'L'Or noir' d'un montant de 3 500 000 €, qu'il a signé pour le compte de Quinta industries le protocole du 30 septembre 2011 avec la société Quinta communications, qu'il a procédé au dépôt de la déclaration de cessation des paiements aux lieu et place du directeur général de la société Quinta industries, que la société Hewlett-Packard s'est adressée à lui ainsi qu'à M. G. pour obtenir le paiement des sommes qui lui étaient dues (cf. Lettres du 11 juillet 2011, 23 septembre 2011) et qu'en réponse il a lui-même adressé un règlement de 314 754 € le 5 septembre 2011 par chèque tiré sur le compte de la société Quinta industries, que par mails du 3 juin 2010 et 16 décembre 2010, dont copie à M. G., il a donné des instructions à Mme A, directrice des services comptables de Quinta industries, puis interdit à cette dernière d'émettre des chèques sans son autorisation, et que le 17 décembre 2010 il écrivait au cabinet KPMG en sa qualité de président du conseil d'administration de la société Quinta industries à propos des chèques relatifs aux échéances échues du moratoire accordé par le CCSF.

Ces actes qui excédent les pouvoirs accordés au président du conseil d'administration pour organiser les travaux de celui-ci, veiller au bon fonctionnement des organes de la société et s'assurer que les administrateurs sont en mesure de remplir leur mission, tels que prévus par l'article L.225-51 du code de commerce, constituent des actes positifs de gestion accomplis en toute indépendance caractéristiques d'une direction de fait que les agissements de l'actionnaire Technicolor ne peuvent expliquer.

7- Sur les fautes

L'article L. 651-2 du code de commerce, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 9 décembre 2010, dispose notamment que 'lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion. En cas de pluralité de dirigeants, le tribunal peut, par décision motivée, les déclarer solidairement responsables'.

Contrairement au liquidateur qui soutient qu'il convient de raisonner, comme l'a fait le rapport Exafi, entité par entité et non par groupe, lequel au demeurant est déficitaire depuis 2007, la société Quinta communications et MM A, G. et X prétendent qu'au regard du caractère inséparable et complémentaire des activités des différentes sociétés, les résultats des entités prises individuellement ne sont pas représentatifs de la réalité économique du groupe et qu'il faut raisonner sur un résultat économique d'ensemble du groupe Quinta industries. Ils considèrent également que la preuve des prétendues fautes de gestion commises par les dirigeants de ladite société et du lien de causalité entre celles-ci et la création ou l'aggravation de l'insuffisance d'actif n'est pas rapportée.

Cependant, en l'absence de notion juridique de groupe antérieure à l'ordonnance du 12 mars 2014, chaque faute de gestion doit être appréciée au regard de chacune des sociétés et non du groupe.

Il n'y a pas lieu en conséquence de répondre à tous les moyens fondés sur cette prémisse.

* Sur la déclaration tardive de cessation des paiements

Me Legras de Grandcourt expose que depuis 2007 la société Quinta industries enregistre des pertes d'exploitation cumulées de 21 289 000 € et que ses capitaux propres sont négatifs ; qu'une partie des difficultés provient des pertes de la société Duran à laquelle la société Quinta industries avait avancé la somme de 25 800 000 € au 31 décembre 2010 ; que le retard apporté au dépôt de la déclaration de cessation des paiements a contribué à augmenter l'insuffisance d'actif de 465 000 € en ce que les dettes de l'URSSAF, de Novalis, de l'AFDAS, et du bailleur ont augmenté à compter du mois de juillet 2011 ; que ce retard a permis à la société Quinta communications de se rembourser son compte courant sur l'année 2011; que l'échéancier du 2 août 2011, qui avait été accordé sous différentes conditions qui n'ont pas été respectées, n'est jamais entré en vigueur ; qu'il ne peut s'agir d'une simple négligence ; enfin, que cette faute de gestion est imputable à tous les dirigeants de droit et de fait.

La société Quinta communications considère que l'état de cessation des paiements de la société Quinta industries ayant été déclaré le 28 octobre 2011, seule l'éventuelle aggravation du passif entre le 15 août 2011 et le 28 octobre 2011 doit être prise en compte or le liquidateur, à qui incombe la charge de la preuve, n'apporte aucune preuve de l'aggravation du passif durant cette période. Elle précise qu'en juillet 2011 tous les intervenants y compris extérieurs croyaient encore en une possibilité de redressement en raison du plan de numérisation prévu par l'Etat ; que les mesures de conciliation englobaient toutes les sociétés du groupe ; enfin, qu'un moratoire était en cours jusqu'à sa dénonciation intervenue le 8 novembre 2011.

M. A demande la confirmation du jugement en ce qu'il a considéré qu'aucune faute ne pouvait être retenue contre lui s'agissant du retard dans la déclaration de cessation des paiements.

M. G. soutient que l'article L.651-2 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 9 décembre 2016, applicable aux procédures en cours, ne permet pas de sanctionner le dirigeant pour une simple négligence. Il considère au regard de la demande de conciliation ouverte en février soit avant la date de cessation des paiements qu'il n'a pas, par passivité ou mauvaise foi, décalé la déclaration de cessation des paiements mais qu'il a au contraire engagé la société dans un processus judiciairement contrôlé de traitement des difficultés, lequel n'a échoué que du fait du renoncement de la société Quinta communications. Il précise que la déclaration de cessation des paiements a été déposée deux jours après le constat de cet échec et que le liquidateur n'a donné aucun élément permettant d'identifier une aggravation de l'insuffisance d'actif entre l'échec de la conciliation et la date de cessation des paiements du fait du court délai écoulé. Il invoque également sa bonne foi.

M. W précise que cette faute ne lui est pas reprochée par le liquidateur, qu'en tout état de cause l'état de cessation des paiements est postérieur au terme de ses fonctions et qu'en outre c'est au cours du conseil d'administration auquel il a participé que la décision de demander l'ouverture d'une conciliation a été prise.

La société Ericsson prend acte que cette faute ne lui est pas reprochée par le liquidateur.

La date de cessation des paiements a été fixée de manière définitive au 1er juillet 2011. Il appartenait donc aux dirigeants de droit et/ou de fait de procéder à la déclaration de la cessation des paiements avant le 15 août 2011. La déclaration de cessation des paiements est intervenue le 28 octobre 2011.

Il est constant que le 28 janvier 2011, MM. G. et A ont sollicité du président du tribunal de commerce de Nanterre l'ouverture d'une conciliation au bénéfice de la société Quinta industries, demande à laquelle il a été fait droit le 31 janvier suivant pour une durée d'un mois. Par décision du 10 mars 2011, la mission du conciliateur a été prorogée jusqu'au 30 juin 2011, le conciliateur n'a toutefois dressé son rapport de fin de mission que le 9 septembre 2011 lequel concluait 'Sous réserve du respect des accords, du paiement des échéances moratoriées avec les créanciers et du paiement à bonne date des charges courantes, la société ne sera pas en état de cessation des paiements'.

Outre qu'aucun accord de conciliation n'a été constaté ou homologué, il ressort de la lettre susvisée du 12 septembre 2011 adressée par M. X à la direction générale des finances publiques que la société Quinta communications, actionnaire, n'a pas respecté l'engagement pris dans le cadre de la conciliation d'apporter les fonds nécessaires pour éviter la création d'un nouveau passif, ce que les dirigeants de la société Quinta industries ne pouvaient ignorer.

Toutefois l'ouverture d'une conciliation comme en l'espèce n'exonère pas les dirigeants de leur faute alors en outre que cette procédure ne les prive pas de l'exercice de leurs pouvoirs ni ne les dispense de leurs obligations.

Cette faute a contribué à l'insuffisance d'actif en ce que durant cette période le passif a augmenté de la manière suivante :

- l'Urssaf a déclaré une créance de 656 259 € au titre de cotisations impayées d'août à novembre 2011,

- Novalis a déclaré une créance de 24 300, 90 € au titre des cotisations dues pour les 3ème et 4ème trimestres 2011,

- l'AFDAS a déclaré une créance de 47 403,30 € pour l'année 2011,

- la SCI Saint Cloud Franay, bailleur, a déclaré une créance de 65 215,09 € correspondant aux loyers dus depuis le mois de juillet 2011,

sans augmentation corrélative de l'actif.

Elle est établie à l'encontre de la société Quinta communications et de M. A, en leur qualité de dirigeant de fait, de M. G., en sa qualité de dirigeant de droit.

Ce dernier tente de se prévaloir de la modification législative issue de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016, qui par le biais de son article 146, a complété l'article L.651-2 en insérant la phrase suivante : 'Toutefois, en cas de simple négligence du dirigeant de droit ou de fait dans la gestion de la société, sa responsabilité au titre de l'insuffisance d'actif ne peut être engagée'.

Cependant cette disposition n'est pas applicable en l'espèce en ce qu'elle est entrée en vigueur le 11 décembre 2016, soit postérieurement à l'ouverture de la procédure collective, et pour laquelle aucune disposition transitoire n'a été prévue, alors même qu'il ne s'agit ni d'une loi de procédure ou de compétence ni d'un texte interprétatif, ce qui reviendrait à appliquer rétroactivement une législation à une action en cours et à une procédure collective ouverte antérieurement à cette législation.

En tout état de cause, et même à supposer que cette disposition puisse trouver à s'appliquer, l'absence de déclaration de cessation des paiements pendant plus de deux mois ne peut s'analyser en une simple négligence eu égard aux difficultés financières et à l'endettement de la société connus de ses dirigeants.

En revanche, cette faute ne peut pas être reprochée aux administrateurs et à leur représentant permanent, alors au demeurant pour la société Tnsf que celle-ci avait démissionné le 22 mars 2011, en l'absence de production des procès-verbaux des assemblées générales justifiant de leur passivité.

Il n'est pas besoin de rechercher à ce stade si l'omission a été faite sciemment ou non.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu'il n'a pas retenu cette faute.

* Sur le non paiement des cotisations sociales et fiscales

Me Legras de Grandcourt explique que depuis 2010 la Société Quinta industries n'a pas procédé au règlement ni de la TVA, le privilège du Trésor public s'élevant à la somme de 1 188 909 €, ni des cotisations Urssaf, le privilège des caisses sociales s'élevant à une somme proche de 2 000 000 € et que cette faute, imputable aux dirigeants de droit et de fait, a préjudicié à l'intérêt des créanciers.

La société Quinta communications expose que le tribunal a écarté cette faute au motif qu'un conciliateur avait été nommé en janvier 2011 et que les dettes nées après cette date ne peuvent donc pas être retenues ; que seul le dirigeant exécutif est tenu de procéder aux règlements des cotisations ; qu'elle serait devenue dirigeant de fait à compter de janvier 2011, ce qui exclut toute faute liée au non-respect des cotisations antérieures ; enfin, qu'il ne peut lui être reproché simultanément d'avoir négocié des moratoires avec la DGFIP et de ne pas avoir réglé les cotisations.

M. A demande la confirmation du jugement en ce qu'il a considéré qu'aucune faute ne pouvait être retenue contre lui s'agissant du non-paiement des cotisations sociales et fiscales.

M. G. soutient que le défaut de paiement des cotisations sociales et fiscales n'est pas en l'espèce une faute de gestion compte tenu notamment de l'ouverture dans les délais légaux d'une procédure de conciliation et des suspensions d'exigibilité accordées successivement par les créanciers sociaux et fiscaux.

M. W précise qu'il n'est pas poursuivi à ce titre par le liquidateur mais qu'en tout état de cause les cotisations impayées sont antérieures à son entrée en fonction.

La société Ericsson prend acte que cette faute ne lui est pas reprochée par le liquidateur.

Il ressort notamment du rapport Exafi (p 26,27, Annexe 8.12), du rapport L. (p 16), de la lettre de la CCSF du 23 décembre 2010 dénonçant le plan d'étalement accordé, de la procédure d'alerte déclenchée le 10 décembre 2010 par les commissaires aux comptes de la société Quinta industries et du rapport de fin de mission du conciliateur (p 14) que les dettes fiscales et sociales de la société Quinta industries étaient de 789 262 € au 26 octobre 2010 et de 723 490 € au 31 décembre 2010.

Les bilans mentionnent par ailleurs des dettes fiscales et sociales de 3 672 209 € au 31 décembre 2009 et de 5 159 644 € au 31 décembre 2010.

Le non respect du plan d'apurement accordé le 10 septembre 2010 par l'administration fiscale ainsi que le non paiement des cotisations fiscales et sociales est une faute de gestion qui a nécessairement contribué à l'insuffisance d'actif alors au demeurant que l'actif n'a pas été renforcé dans le même temps.

Cette faute est imputable à M. G., dirigeant de droit, comme retenu par le tribunal, mais également à M. A, président du conseil d'administration et en tout état de cause dirigeant de fait, à la société Quinta communications, dirigeante de fait et administrateur, et à M. X, représentant permanent de la société Quinta communications au conseil d'administration de Quinta industries à compter du 15 février 2011 dès lors que les administrateurs ont approuvé chaque année les comptes en dépit de l'importance des dettes fiscales et sociales.

Elle ne l'est pas à la société Tnsf, administrateur, faute de reproche en ce sens de la part du liquidateur judiciaire ni à M. W dont le mandat a couru sur la seule période de conciliation et donc pendant la suspension d'exigibilité accordée.

Le jugement sera donc partiellement infirmé de ce chef.

* Sur la poursuite abusive d'une activité déficitaire ayant rendu négatifs les capitaux propres

Me Legras de Grandcourt rappelle que les pertes cumulées par la société Quinta industries entre 2007 et 2011 s'élèvent à la somme de 23 289 000 € ; que les capitaux propres sont négatifs depuis au moins 2006 et l'étaient à hauteur de 25 000 000 € en 2011 ; qu'ils n'ont pas été reconstitués ; que la conciliation qui a échoué n'empêchait pas les dirigeants de déclarer la cessation des paiements ; qu'il s'agit d'une faute de gestion qui a contribué à l'insuffisance d'actif et qui est imputable aux dirigeants de droit dont les administrateurs et aux dirigeants de fait.

La société Quinta communications explique que le résultat d'exploitation et le résultat net des sociétés du groupe Quinta industries se sont améliorés jusqu'à la fin de 2009 ; que les pertes ont diminué jusqu'en 2010 mais qu'ensuite le groupe a été confronté à un ensemble de facteurs politiques et économiques défavorables ; qu'elle a apporté 10,6 millions d'euros en capital pour les sociétés du groupe ; que du 16 août 2011 au 28 octobre 2011, il existait des perspectives de redressement ; qu'il ne peut pas être reproché aux dirigeants l'absence de reconstitution des capitaux propres qui ne constitue pas une faute de gestion dès lors qu'il s'agit d'une prérogative des actionnaires et non des dirigeants ou de dissolution de la société dès 2007. Elle critique la décision du tribunal qui a refusé de condamner Technicolor et de prendre en considération la notion de «groupe » et n'a pas accepté que les pertes d'ADJ soient financées par d'autres sociétés bénéficiaires telles que LTC ou Scanlab, au motif que le résultat d'exploitation cumulé des sociétés du groupe était, en tout état de cause, négatif alors que le résultat d'exploitation et le résultat net de la société Quinta industries se sont améliorés jusqu'à la fin de l'année 2009 comme ceux du groupe.

Elle précise également qu'elle ne peut être poursuivie pour des faits commis alors que Mme G., qui n'est pas dans la cause, la représentait.

M. X prétend que le tribunal, qui se contente de viser les dirigeants d'une manière générale, ne précise pas en quoi cette faute lui serait imputable alors qu'il n'a été considéré comme dirigeant de fait qu'en 2011 et que la prétendue faute daterait de 2006. Il expose également que la date de cessation des paiements ayant été fixée au 1er juillet 2011 il ne peut être reproché aux administrateurs une quelconque faute pour la période antérieure au 16 août 2011 et que seule la période du 16 août au 28 octobre 2011 pourrait alors être concernée par la poursuite déficitaire, mais qu'au cours de cette période il existait un projet de restructuration sous l'égide du CIRI.

M. A prétend qu'il n'est pas resté inactif et qu'il a engagé les mesures qui s'imposaient pour redresser la situation ; qu'au regard du contexte il ne peut lui être reproché d'avoir poursuivi une activité déficitaire alors que la société Quinta industries a été acquise en 2003 en situation structurelle déficitaire et a fait l'objet d'une réorganisation se traduisant par une amélioration des résultats ; enfin, qu'il n'a commis aucune faute dans l'organisation du groupe Quinta industries au regard de la politique d'interdépendance mise en place par ce groupe.

M. G. soutient que conformément à ses obligations de dirigeant il a réuni une assemblée générale extraordinaire dans les délais légaux et que les actionnaires ont rejeté la dissolution de la société mais qu'il ne saurait être condamné du fait de la non reconstitution des capitaux propres dès lors que cette dernière ne relève que des prérogatives de l'actionnaire. Il ajoute que la conciliation a échoué du fait de la société Quinta communications qui n'a pas apporté les garanties demandées et qu'on ne peut donc pas lui reprocher la poursuite d'une activité jusqu'au revirement de cette dernière.

M. W et la société Ericsson prétendent que la société Tnsf, actionnaire minoritaire, bien qu'administrateur de Quinta industries, n'avait que des pouvoirs limités dans la direction de cette dernière ; que M. W n'a représenté Tnsf au conseil d'administration de la société Quinta industries que du 15 février 2011 au 22 mars 2011, date de la démission de Tnsf, période durant laquelle les capitaux propres étaient déjà négatifs ; qu'ils n'étaient pas actionnaires et n'avaient donc pas l'obligation de recapitaliser ; que durant cette période des démarches concrètes ont été accomplies pour obtenir des moratoires et une conciliation ; qu'ils ont ainsi été diligents et ont procédé aux contrôles qui leur incombaient ; enfin, que le remboursement du compte courant de Quinta industries est postérieur à la fin du mandat de M. W.

La société Ericsson prétend en outre que sa responsabilité ne peut être recherchée que sur la période durant laquelle M. W a exercé son mandat, faute pour le liquidateur d'avoir mis en cause ses deux représentants précédents.

Comme cela a été rappelé à propos de l'insuffisance d'actif, l'analyse de l'activité d'une société s'effectue au regard de son actif et de son passif propres sans référence aux comptes consolidés du groupe. Il doit toutefois être tenu compte des conventions de trésorerie existant entre les sociétés (cf. 2006, 31 décembre 2009) et de l'activité de holding de la société Quinta industries, laquelle supportait l'intégralité des coûts de structure du groupe du même nom.

Il résulte des bilans communiqués que le résultat d'exploitation de la société Quinta industries était déficitaire depuis plusieurs années. Ainsi le déficit de la société Quinta industries s'élevait à 19 778 954 € au 31 décembre 2007 pour un chiffre d'affaires net de 6 640 211 €, à 1 097 828 € au 31 décembre 2008 pour un chiffre d'affaires net de 8 511 717 €, à 3 793 546 € au 31 décembre 2009 pour un chiffre d'affaires net de 7 093 680 €, et à 16 991 045 € au 31 décembre 2010 pour un chiffre d'affaires net de 6 651 266 €.

De même ces documents montrent que les capitaux propres étaient négatifs depuis 2007 à hauteur de 3 020 962 € au 31 décembre 2007, 4 118 790 euros au 31 décembre 2008, 7 912 336 au 31 décembre 2009 et 24 903 381 € au 31 décembre 2010.

Il n'est pas contesté que les actionnaires, notamment les sociétés Quinta communications et Tnsf, n'ont ni réduit le capital social ni reconstitué les capitaux propres nonobstant la décision prise de ne pas dissoudre la société lors de l'assemblée générale extraordinaire du 14 janvier 2009 et ce en violation des dispositions de l'article L.225-248 du code de commerce.

En outre il est ressort du rapport des commissaires aux comptes sur les comptes consolidés de la SA Quita industries, que la société Quinta communications a soutenu le groupe Quinta industries jusqu'au premier semestre 2011 mais que ce soutien n'a pas été formalisé par l'actionnaire pour l'exercice 2011, entraînant ainsi une incertitude sur la capacité de la société à poursuivre son activité.

Si la reconstitution des capitaux propres appartient aux actionnaires et non aux dirigeants, il appartient en revanche à ces derniers de tirer les conséquences d'un défaut de reconstitution, ce qui n'a pas été le cas en l'espèce sans que la légère amélioration des années 2008 et 2009 ne puisse les exonérer de leur responsabilité.

Cette faute imputable à MM G. et A, dirigeants de droit, et en tout état de cause dirigeant de fait pour ce dernier, l'est également à l'égard des administrateurs restés passifs : la société Tnsf, la société Quinta communications, par ailleurs dirigeant de fait, et son représentant à compter du 15 février 2011, M. X, peu important à cet égard que les représentants permanents des sociétés Quinta communications et Tnsf durant toute la période concernée n'aient pas été mis en cause.

Elle ne l'est pas à M. W dont le mandat a couru pendant la seule période de conciliation.

Elle a nécessairement contribué à l'insuffisance d'actif et diminué le gage des créanciers.

* Sur la gestion contraire à l'intérêt de la société Quinta industries dans l'intérêt de la société Quinta communications

Me Legras de Grandcourt soutient que la société Quinta communications, MM. X, G. et A ont entendu privilégier l'actionnaire majoritaire, la société Quinta communications, d'une part, en lui remboursant son compte courant d'associé sur l'année 2011 dans le cadre du protocole emportant cession de créances daté du 30 septembre 2011, lequel a notamment entraîné l'extinction par voie de compensation de la créance qu'elle détenait à l'encontre de la société Quinta industries, opération dont il a obtenu l'annulation selon arrêt du 26 juin 2014, et d'autre part dans le cadre de la post-production du film "L'or noir" considérant que la société Quinta communications a confié ces travaux d'un montant de plus de 3 000 000 € au groupe Quinta industries en connaissant la situation obérée de celui-ci et en décidant de procéder à un paiement par compensation uniquement alors que les factures de la société Quinta industries à ce titre s'élevaient à 1 193 000 €.

La société Quinta communications et M. X soutiennent que le protocole du 30 septembre 2011, dont l'objectif était de simplifier les flux financiers croisés entre les diverses entités du groupe dans le respect des conventions de trésorerie conclues, qui a permis l'apurement du compte courant de la société Quinta communications, n'a fait qu'entériner une compensation légale intervenue automatiquement auparavant sans contribuer à l'augmentation de l'insuffisance d'actif ou à une diminution de trésorerie. M. X précise qu'il a signé ce protocole en qualité de représentant de la société Quinta communications et non pas à titre personnel. S'agissant du financement du film 'L'or noir' par compensation, ils expliquent qu'il s'agissait du mode de fonctionnement habituel au sein du groupe dans un objectif de simplification et non d'un désengagement de la société Quinta communications.

La société Quinta communications ajoute qu'il convient de tenir compte de l'annulation des cessions de créance qui ne peuvent plus caractériser une faute de gestion.

M. G. soutient d'une part qu'il n'a aucune responsabilité relativement au film 'L'or noir' dès lors que c'est par un accord secret en date du 12 octobre 2010 que Monsieur A s'est engagé pour toutes les sociétés du groupe Quinta industries à consentir à la société Quinta communications un délai de paiement au 31 décembre 2012 ou un paiement par compensation avec les comptes courants et d'autre part qu'il n'a pas été en mesure de comprendre la portée des actes complexes de cession de créances et de compensation des comptes courants via le protocole du 30 septembre 2011.

M. A fait valoir que le protocole du 30 septembre 2011 avait pour objectif de simplifier les flux financiers entre les entités du groupe Quinta industries, lequel avait pour habitude de fonctionner par compensation de créances réciproques ; qu'en l'espèce il s'agissait de dettes réciproques, certaines, liquides et exigibles entre la société Quinta industries et le groupe Quinta industries ; que la compensation légale jouant de plein droit, le protocole du 30 septembre 2011 ne faisait qu'entériner une simple compensation intervenue automatiquement, ce que M. G. ne pouvait ignorer. Il ajoute que les cessions de créances qui ont été annulées ne peuvent plus servir de fondement pour caractériser une nouvelle faute de gestion.

S'agissant du film 'L'or noir', il affirme n'avoir fait, dans son courrier du 12 octobre 2010, que confirmer à un tiers ce mode de fonctionnement du groupe en indiquant que ces factures seraient réglées par compensation ou différées.

M. W précise qu'il n'est pas poursuivi à ce titre par le liquidateur, les faits étant soit antérieurs soit postérieurs à sa prise de fonction.

La société Ericsson prend acte que cette faute ne lui est pas reprochée par le liquidateur.

Le soutien financier de la société Quinta communications aux sociétés du groupe Quinta industries antérieurement à l'année 2011 est démontré notamment par le rapport L. et par les lettres de confort produites (ex lettre du 30 avril 2010 signée par M. A en sa qualité de directeur général délégué de la société Quinta communications) et au demeurant non contesté.

Toutefois, la société Quinta communications, qui avait pris des engagements de soutenir ses filiales, notamment les sociétés Quinta industries et Duran, jusqu'au 30 juin et 31 décembre 2011, est revenue sur ses engagements à compter du mois de septembre 2011 (p13 rapport BM&A).

Ainsi, le 30 septembre 2011, les sociétés Quinta communications, Quinta industries, Duran, ADJ, LTC, Scanlab et SIS ont régularisé un 'protocole d'accord' aux termes duquel ces sociétés ont décidé 'dans le cadre d'une réorganisation des créances intra-groupes au sein du groupe Quinta Communications' de 'compenser leurs créances réciproques par débit de leur compte respectif dans leurs livres à la date du 30 septembre 2011" et de se céder des créances par compensations de comptes courants. Pour la société Quinta industries, ce document a été signé par M. A et non par M. G.. Il en a résulté que la société Quinta communications a notamment cédé et payé par compensation des créances qu'elle détenait sur la société Quinta industries soit à LTC une créance d'un montant de 1 970 419,64 €, à Scanlab une créance d'un montant de 621 517,16 €, et à SIS une créance d'un montant de 54 701,61 €.

La lecture du grand livre de la société Quinta industries montre que le compte courant de la société Quinta communications qui était créditeur de 4 559 004,66 € au 31 décembre 2010 a de ce fait été ramené à 0 € le 30 septembre 2011.

Nonobstant le fonctionnement antérieur des sociétés du groupe Quinta industries quant aux compensations habituellement réalisées décrit dans le rapport M., ce protocole a permis à la société Quinta communications de 'compenser ses créances irrécouvrables sur les sociétés Duran et Quinta industries avec ses dettes commerciales à l'égard de LTC, Scanlab et SIS' (p16 BM&A) sans que leur connexité et leur exigibilité ne soient démontrées au regard de leur nature et de l'engagement de la société Quinta communications de bloquer son compte courant jusqu'au 30 septembre 2011, alors au surplus, que par mail du 15 septembre 2011 adressé à Mme A, directrice comptable de la société Quinta industries et à MM. A et X, Me S., avocat, leur indiquait la liste des informations et documents nécessaires à la préparation d'une déclaration de cessation des paiements démontrant par là leur connaissance de l'état de la société Quinta industries.

Contrairement à ce qui est vainement soutenu par les dirigeants de droit et de fait, les conventions de trésorerie existantes régissaient les mouvements de trésorerie entre les sociétés et la compensation entre créances réciproques mais ne prévoyaient pas de cession de créances entre les parties.

Ce protocole, qui a donc favorisé la société Quinta communications en ce qu'il lui a permis de réduire son exposition financière au détriment de ses filiales, constitue une faute de gestion. Le fait que le liquidateur ait demandé puis obtenu l'annulation judiciaire d'une partie de cette opération ne lui retire pas son caractère fautif. Cette faute a contribué à l'insuffisance d'actif de la société Quinta industries en la privant du recouvrement d'une créance sur la société Quinta communications de 1 980 334 € alors que sa situation financière était obérée et que ses dirigeants s'apprêtaient à procéder à une déclaration de cessation des paiements.

Cette faute, qui n'est pas reprochée à la société Tnsf car postérieure à sa démission, est imputable à M. A, en ses qualités de dirigeant de droit et de fait, et à la société Quinta communications, dirigeant de fait, à l'exclusion de M. G. qui n'a pas signé le protocole en qualité de dirigeant de droit de la société Quinta industries et de M. X, en sa qualité de représentant permanent de la société Quinta communications, dès lors que la consultation des administrateurs à ce sujet n'est pas démontrée.

S'agissant du film 'L'or noir', il est justifié que la société Quinta communications a commandé des prestations de post-production aux sociétés Duran, SIS, ADJ, Scanlab et LTC moyennant un prix de l'ordre de 3 500 000 €. Par courrier à en tête de la société Quinta industries, daté du 12 octobre 2010, M. A a écrit à la société Quinta communications pour lui confirmer à propos de ces travaux 'qu'aucun paiement en numéraire ne sera exigé avant le 31 décembre 2012" et que les facturations seront payées soit par compensation de comptes courants soit différées jusqu'au 31 décembre 2012.

Il ressort du rapport Exafi, lequel s'appuie notamment sur le mail daté du 23 septembre 2011 envoyé par Mme N. Clement-Colas, auditrice interne de la société Quinta industries, que cette société a facturé aux lieu et place des sociétés concernées et d'avance à la société Quinta communications les prestations pour ce film afin de permettre à ces factures établies pour des prestations non encore faites d'être compensées avec des dettes de la société Quinta communications dans le cadre du protocole susvisé (p 40 Exafi, annexe 8.17). Ce rapport précise, sans être critiqué sur ce point par MB&A, que le conseil d'administration de la société Quinta industries n'a pas été consulté sur cette décision et que les commissaires aux comptes n'en ont pas été informés.

Cette faute, commise au bénéfice de la société Quinta communications, a contribué à l'insuffisance d'actif de la société Quinta industries en ce qu'elle l'a privée du recouvrement de factures en numéraires alors que sa trésorerie ne lui permettait pas de faire face à ses obligations fiscales et sociales.

Elle est imputable à la société Quinta communications, dirigeant de fait, à M. A, dirigeant de droit et en tout état de cause dirigeant de fait, à M. G., dirigeant de droit, qui s'il n'est pas le signataire de la lettre du 12 octobre 2010 et a sans doute été écarté de certains courriels (p17 BM&A), a néanmoins laissé les dirigeants de fait agir sans s'assurer du paiement effectif par la société Quinta communications des prestations et achats réalisés comme l'y invitait le mail de Mme N. Clement-Colas du 5 octobre 2010 et ce alors que le directeur général d'une société anonyme dispose des pouvoirs les plus étendus par application de l'article L225-56 du code de commerce.

Elle ne l'est ni à M. X, représentant permanent de la société Quinta communications au conseil d'administration de Quinta industries dès lors que ce conseil n'a pas été consulté, ni à la société Tnsf qui avait démissionné préalablement.

* Sur l'absence de réorganisation et l'importance de la masse salariale

Me Legras de Grandcourt reproche aux dirigeants la politique salariale mise en place au sein du groupe en leur faisant grief de n'avoir pris aucune mesure en 2007 pour réduire la masse salariale de la société Quinta industries eu égard à la baisse du chiffre d'affaires. Il précise qu'il s'agit d'une faute de gestion imputable aux dirigeants de droit, en ce compris les administrateurs, et aux dirigeants de fait.

M. X prétend que des mesures ont été prises par les dirigeants pour modifier les causes structurelles des déficits notamment le rapprochement envisagé avec la société Eclair ou le rachat promis par Technicolor et que des décisions de réduction salariale ont été prises durant la période 2010 2011 au cours de laquelle le nombre de salariés a diminué de 20 % passant de 44 à 34.

M. A soutient que des mesures de restructuration, notamment des plans sociaux, ont été prises par les dirigeants mais qu'il ne peut lui être reproché de n'avoir pas engagé des mesures suffisantes.

M. G. explique que c'est la restructuration du groupe qui a nécessité le recrutement d'hommes clé aux salaires élevés et fait observer que sa rémunération a diminué.

M. W considère que le défaut de réorgarnisation alléguée est imputable à la direction générale et non au conseil d'administration.

La société Ericsson fait valoir qu'elle n'avait aucun droit de véto s'agissant des décisions liées aux ressources humaines de la société et qu'une baisse des rémunérations des dirigeants de la société Quinta industries a été enregistrée entre 2008 et 2010.

Il est constant que la société Quinta industries, qui n'avait qu'une activité de holding, supportait les frais de structure et refacturait à ses filiales des frais de gestion et de rémunération au prorata de leur chiffre d'affaires.

Il résulte du rapport BM&A 'qu'entre 2005 et 2007, la masse salariale de Quinta Industries a doublé, passant de 3,1 M€ à 6,3 M€ en raison de l'acquisition du sous groupe Duran et surtout des recrutements décidés par la société Quinta Communications', et des bilans et listes des rémunérations versés aux débats qu'en 2009 les salaires et traitements des 44 salariés s'élevaient à la somme de 3 812 000 €, hors charges, et en 2010 à 3 432 952 €, hors charges, que huit salariés avaient une rémunération mensuelle supérieure à 6 000 € et trois salariés une rémunération mensuelle supérieure à 15 000 € et que les frais de déplacement et de réception étaient très élevés au regard de la situation financière de la société.

Il est particulièrement démontré que la rémunération de M. G., approuvée par le conseil d'administration de la société Quinta Industries s'élevait jusqu'en 2009 à 20 000 euros brut par mois sur 13 mois, outre un bonus variable, soit 562 000 € en 2009 en ce compris des bonus au titre des années 2007 et 2008, à partir de 2009 à 27 000 € bruts mensuels et à 24 000 € brut par mois en 2011.Si la rémunération du dirigeant a effectivement diminué, elle était encore manifestement excessive eu égard à la situation financière déficitaire de la société.

Par ailleurs des licenciements sont intervenus dans les sociétés LTC, SIS, ADJ, Duran et Duboi entre 2006 et 2010 alors que l'effectif est resté stable chez Quinta Industries.

Il est ainsi démontré que nonobstant les démarches entreprises par les dirigeants pour restructurer le groupe, se rapprocher des sociétés Eclair et Technicolor, rechercher des solutions auprès des pouvoirs publics, la société Quinta Industries n'a pas diminué ses charges en proportion de la diminution de son chiffre d'affaires et de celui des sociétés qu'elle refacturait alors que le passage du photochimique au numérique était prévisible, annoncé et soutenu par les pouvoirs publics.

L'échec ou l'insuffisance des démarches engagées par ailleurs par les dirigeants ne peut les exonérer de leur responsabilité pour n'avoir pas dans le même temps diminué la masse salariale. Cette faute de gestion qui a appauvri la société a contribué à l'insuffisance d'actif sans que l'actif n'ait été renforcé.

Elle est imputable à la société Quinta Communications, en sa qualité de dirigeant de fait et d'administrateur, ainsi qu'à son représentant permanent M. X, MM A et G. mais également à l'administrateur Tnsf, et à son représentant permanent M. W, dès lors que la rémunération du président du conseil d'administration et du directeur général relève du conseil d'administration.

* Sur l'importance des comptes courants d'associés et le financement de la société Duran au détriment des sociétés LTC et Scanlab

Me Legras de Grandcourt explique qu'en 2006 la société Quinta communications a cédé la société Duran, en plan de continuation depuis 2003, à la société Quinta industries sans lui allouer de fonds pour permettre le respect du plan, la contraignant ainsi à puiser dans la trésorerie de ses filiales excédentaires, LTC et Scanlab, pour financer les pertes de la société Duran.

La société Quinta communications et M. A soutiennent qu'il ne saurait y avoir de faute de gestion dans l'organisation intrinsèque du groupe Quinta industries dès lors que toutes les sociétés étaient interdépendantes entre elles et qu'il ne peut pas être reproché tout à la fois à la société Quinta communications de ne pas soutenir sa filiale Duran et à la société Quinta industries de l'avoir soutenue.

M. G. expose que le financement de la société Duran par la société Quinta industries, via la remontée de bénéfices de sa filiale LTC, n'est pas une faute de gestion.

M. W et la société Ericsson exposent qu'ils ne peuvent pas se voir imputer des faits qui se sont déroulés entre 2006 et 2010, soit antérieurement au mandat de M. W.

En 2006, la société Quinta communications a cédé à la société Quinta industries 58,27 % du capital social de la société Duran au prix de 3 454 000 € qui n'a pas été payé mais a donné lieu à une augmentation de capital par incorporation de cette créance.

Or la société Duran, qui faisait l'objet d'un plan de redressement depuis 2003, avait un résultat net d'exploitation déficitaire et des capitaux propres négatifs depuis 2006.

Il est établi et non contesté que ces pertes ont été financées par la société Quinta industries grâce à la remontée des bénéfices des sociétés LTC et Scanlab, via le compte courant de la société Quinta industries dès lors que celle-ci ne générait pas de ressources propres. Le compte courant de la société Quinta industries dans les comptes de la société LTC est ainsi passé de 6 100 000 € en 2006 à 21 700 000 € en 2010 ( p18 à 21 Exafi).

Le rapport MB&A reconnaît que 'les comptes annuels de Quinta Industries au 31 décembre 2007 mettent en évidence qu'à cette date le groupe Duran avait bénéficié d'avances de trésorerie de 20 M€, principalement financées par LTC' (p14) et 'Au cours des exercices suivants, le système a toutefois perduré, LTC et Scanlab n'ont jamais reçu le remboursement de leurs avances en compte courant'.

Par ailleurs, la société Quinta communications n'a pas plus alloué à la société Quinta industries des fonds destinés au respect des engagements pris dans le plan de redressement de la société Duran.

Or dès le 28 février 2008, M. K., expert comptable, avait attiré l'attention de MM. A et G. sur les risques pour la société mère et les dirigeants et le caractère anormal de ces avances au regard des possibilités financières des sociétés LTC et Scanlab, précisant que les excédents de trésorerie de celles-ci pour un montant total de 18,5 M€ 'ont été prêtés à la société Quinta Industries qui les as redistribués aux sociétés Duran, ADJ, et Duboi en totalité' et 'qu'une question pourrait devenir fort embarrassante si l'une des sociétés filiales prêteuses se retrouvait en situation de difficultés financières (ce qui pour nous est le cas car des charges sociales et des impôts sont payés en retard...)'.

Les avances se sont néanmoins poursuivies comme l'explique le rapport L. qui indique 'qu'il n'est donc pas illogique que, dans l'intérêt du groupe, ces deux sociétés aient financé une partie de leurs sociétés soeurs intervenant en amont du processus de fabrication' (p 42).

La société Quinta communications a même accru ses 'avances/financements sur la première moitié de 2011" qui 's'élevaient au 30 juin 2011 à 6 565 K€' (p34 Exafi) avant de se désengager à compter du 30 septembre 2011.

Or le fait d'effectuer des avances qui conduisent à la ruine de la société holding et des filiales ayant effectué des apports constitue une faute de gestion qui en l'espèce a contribué à l'insuffisance d'actif en ce qu'au 31 décembre 2010, la société Quinta industries avait avancé 25 800 000 € au sous groupe Duran, se privant ainsi de trésorerie et privant également les sociétés LTC et Scanlab de la trésorerie nécessaire à leur conversion au numérique.

Elle est imputable aux sociétés Quinta communications, dirigeant de fait et administrateur, et Tnsf, administrateur, resté passifs, ainsi qu'à MM G. et A, dirigeants de droit et en tout état de cause dirigeant de fait pour ce dernier, à M. X, représentant permanent de la société Quinta communications, et à M. W représentant permanent de la société Tnsf à cette période.

Le jugement sera également confirmé de ce chef.

8- Sur les sanctions financières

Le nombre de fautes retenues à l'encontre de MM. X, A et G. et de la société Quinta communications ainsi que leur contribution à l'insuffisance d'actif justifient leur condamnation à supporter une partie de l'insuffisance d'actif.

M. G. fait état d'une situation financière difficile, indiquant ne pas être imposable et bénéficier du RSA et de la CMU de base ce dont il justifie.

Il sera toutefois relevé qu'il ne produit qu'un avis d'impôt 2015 sur les revenus 2014, lequel ne démontre ni le montant ni la nature de ses revenus et qu'il ne justifie pas de son patrimoine alors qu'il a perçu pendant de nombreuses années une rémunération élevée comme en témoignent les chiffres rappelés ci-dessus.

Il convient, dans ces conditions, de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Quinta communications, Messieurs X, A et G. à supporter une partie de l'insuffisance d'actif, de le confirmer sur le quantum mis à la charge des trois premiers à hauteur de 3 500 000 €, de l'infirmer sur le quantum mis à la charge de M. G. et de condamner ce dernier à contribuer à l'insuffisance d'actif à hauteur de 300 000 €, de l'infirmer en ce qu'il a débouté Me Legras de Grandcourt de sa demande à l'égard de la société Technicolor et de condamner celle-ci à la somme de 150 000 € au même titre.

Les fautes retenues n'étant pas les mêmes pour chacun des dirigeants de droit et de fait et leur niveau de responsabilité différent, il n'y a pas lieu de prévoir de solidarité entre eux.

En revanche, le représentant permanent, en cas de condamnation à contribuer au passif, est tenu solidairement avec la personne morale.

Nonobstant les fautes retenues à son encontre, il n'y a pas lieu enfin de prononcer de sanction financière à l'encontre de M. W compte tenu de la brièveté de son mandat.

9- Sur les sanctions personnelles

L'article L 653-1 du code de commerce dispose que lorsqu'une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire est ouverte, les dispositions de ce chapitre III, intitulé 'de la faillite personnelle et des autres mesures d'interdictions', sont notamment applicables aux personnes physiques, dirigeants de droit ou de fait de personnes morales, et aux personnes physiques, représentants permanents de personnes morales, dirigeant des personnes morales définies au 2°.

L'article L 653-8, alinéa 3, du code de commerce permet au tribunal de prononcer une interdiction de gérer une entreprise à l'encontre d'un dirigeant qui a omis de demander l'ouverture d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire dans le délai de quarante cinq jours à compter de la cessation des paiements, sans avoir, par ailleurs, demandé l'ouverture d'une procédure de conciliation.

M. G. soutient que la loi du 6 août 2015 ne permet pas de sanctionner le dirigeant qui n'a pas sciemment omis de procéder à la déclaration de cessation des paiements ou bien qui a choisi la voie de la conciliation et que le nouvel article L.653-8 du code de commerce est d'application immédiate aux procédures en cours.

Dès lors que par requête datée du 28 janvier 2011, MM. G. et A ont sollicité du président du tribunal de commerce de Nanterre l'ouverture d'une conciliation au bénéfice de la société Quinta industries, demande à laquelle il a été fait droit et le rapport n'ayant été déposé que 9 septembre 2011, le grief sera rejeté sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen relatif à l'application dans le temps de la loi du 6 août 2015 qui sanctionne désormais celui qui a omis 'sciemment' de demander l'ouverture d'une procédure collective dans le délai de 45 jours à compter de la cessation des paiements.

Aux termes des articles L.653-4, 3° et L.653-5, 4° du même code, une mesure d'interdiction de gérer peut également être prononcée pour avoir fait des biens ou du crédit de la personne morale un usage contraire à l'intérêt de celle-ci à des fins personnelles ou pour favoriser une autre personne morale ou entreprise dans laquelle il était intéressé directement ou indirectement, payé ou fait payer, après cessation des paiements et en connaissance de cause de celle-ci, un créancier au préjudice des autres créanciers.

MM. X et A, en leur qualité de dirigeant de droit de la société Quinta communications, et M. G. ont favorisé la société Quinta communications dans laquelle ils étaient intéressés en ce que les deux premiers la dirige et qu'il s'agit de l'actionnaire majoritaire de la société holding du groupe Quinta industries qui verse leur rémunération à MM. A et G..

Il sera rappelé enfin que le protocole du 30 septembre 2011 qui a permis de payer la société Quinta communications après la date de cessation des paiements a été régularisé alors que Me S., avocat, indiquait par mail du 15 septembre 2011 adressé à Mme A, directrice comptable du groupe Quinta industries et à MM. A et X, la liste des informations et documents nécessaires à la préparation d'une déclaration de cessation des paiements démontrant par là leur connaissance de l'état de cessation des paiements de la société Quinta industries.

Ces fautes sont également établies à l'encontre de MM. A et G..

Le jugement sera donc également confirmé en ce qu'il a prononcé une mesure d'interdiction de diriger, gérer, administrer, ou contrôler directement ou indirectement toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole, toute personne morale, d'une durée de trois années à l'égard MM. X et A et d'une durée de deux années à l'endroit de M. G..

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant contradictoirement,

Rejette les demandes de sursis à statuer dans l'attente de l'issue de la procédure de mise en jeu de la responsabilité de Technicolor ;

Rejette les demandes d'expertise ;

Infirme le jugement en ce qu'il a retenu la qualité de dirigeant de fait de M. X, fixé à 30 000 € la contribution de M. G. à l'insuffisance d'actif, débouté Me Legras de Grandcourt, ès qualités, de sa demande de sanction financière à l'égard de la SA Ericsson broadcast services France (anciennement dénommée Technicolor network services France), exclu de la mesure d'interdiction de gérer les mandats sociaux en cours, prononcé la solidarité des condamnations à supporter une partie de l'insuffisance d'actif à l'exception de celle prononcée entre la société Quinta communications et M. X, et à payer une indemnité procédurale ;

Statuant à nouveau de ces chefs,

Déboute Me Legras de Grandcourt ès qualités, de sa demande tendant à voir reconnaître la qualité de dirigeant de fait de la société Quinta Industries de M. X ;

Condamne M. Z à payer à Me Legras de Grandcourt, ès qualités, au titre de sa contribution à l'insuffisance d'actif la somme de 300 000 € ;

Dit que la SA Ericsson broadcast services France a commis des fautes de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif de la société Quinta industries ;

Condamne la SA Ericsson broadcast services France (anciennement dénommée Technicolor network services France) à payer à Me Legras de Grandcourt, ès qualités, au titre de sa contribution à l'insuffisance d'actif la somme de 150 000 € ;

Déboute Me Legras de Grandcourt, ès qualités, de sa demande de solidarité entre les dirigeants condamnés à supporter une partie de l'insuffisance d'actif ;

Dit n'y avoir lieu d'exclure les mandats sociaux en cours de la mesure d'interdiction de diriger, gérer, administrer, ou contrôler directement ou indirectement toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole, toute personne morale prononcée à l'encontre de MM. A et G. ;

Confirme le jugement pour le surplus notamment en ce qu'il a prononcé à l'égard de M. X, né le 12 juin 1949 à [...], de nationalité française, demeurant [...] (75016), M. Y, né le 18 janvier 1949 à [...], de nationalité française, demeurant [...] (75008) et M. Z, né le 13 avril 1959 à [...], de nationalité française, demeurant [...] une mesure d'interdiction de diriger, gérer, administrer, ou contrôler directement ou indirectement toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole, toute personne morale d'une durée de trois ans pour les deux premiers et de deux ans pour le dernier ;

Condamne la société Quinta communications à payer à Me Legras de Grandcourt, ès qualités, la somme de 15 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les instances de première instance et d'appel ;

Condamne M. X à payer à Me Legras de Grandcourt, ès qualités, la somme de 15 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les instances de première instance et d'appel ;

Condamne M. Z à payer à Me Legras de Grandcourt, ès qualités, la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les instances de première instance et d'appel ;

Condamne M. Y à payer à Me Legras de Grandcourt, ès qualités, la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les instances de première instance et d'appel ;

Condamne la SA Ericsson broadcast services France (anciennement dénommée Technicolor network services France) à payer à Me Legras de Grandcourt, ès qualités, la somme de 5 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour les instances de première instance et d'appel ;

Condamne in solidum la société Quinta communications, la SA Ericsson broadcast services France, MM. X, A et G. aux dépens de la procédure d'appel avec droit de recouvrement au profit des avocats qui y ont droit conformément à l'article 699 du code de procédure civile ;

Dit qu'en application des articles 768 et W69-9° du code de procédure pénale, la présente décision sera transmise par le greffier de la Cour d'appel au service du casier judiciaire après visa du ministère public.