Cass. com., 3 mai 2016, n° 14-24.586
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Rapporteur :
Mme Vallansan
Avocat général :
M. Le Mesle
Avocats :
SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin
Donne acte à la société Phoenix Pharma du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société AJ Partenaires, en sa qualité d'administrateur judiciaire de la société Grande Pharmacie du centre commercial Rive Sud ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 7 janvier 2014), que la société Grande Pharmacie du centre commercial Rive Sud a été mise en redressement judiciaire par un jugement du 28 avril 2010 ; que la société Phoenix Pharma, son fournisseur de médicaments, a déclaré une créance de 1 707 419, 52 euros et, se fondant sur une clause de réserve de propriété assortissant ses ventes, a, par une lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 8 juin 2010, adressé à l'administrateur judiciaire une demande de revendication des marchandises en stocks ; que l'administrateur lui a répondu par une lettre du 1er juillet 2010, reçue le 5 suivant ; que la société Phoenix Pharma a saisi le juge-commissaire de sa demande de revendication par une requête du 20 octobre 2010 ;
Attendu que la société Phoenix Pharma fait grief à l'arrêt de déclarer sa demande irrecevable alors, selon le moyen :
1°) qu'en cas d'acquiescement à la demande de revendication par l'administrateur, le créancier n'est pas tenu de saisir dans un délai d'un mois le juge-commissaire ; que la lettre par laquelle l'administrateur indique qu'il considère la clause de réserve de propriété valable et opposable à la procédure collective, sans réserve ni contestation du montant de la créance, constitue un acquiescement, quand bien même l'administrateur indiquerait que les stocks sur lesquels la réserve de propriété peut s'exercer sont, matériellement, d'une valeur inférieure au montant des biens revendiqués ; qu'au cas présent, la société Phoenix Pharma a déclaré une créance pour des marchandises livrées et non payées pour un montant de 1 707 419, 52 euros et adressé à l'administrateur une demande de revendication des marchandises livrées, assorties d'une clause de réserve de propriété, subsistant en nature dans le stock ; que l'administrateur a répondu qu'il considérait la clause de réserve de propriété valable et opposable à la procédure collective ; qu'il a, alors, indiqué que le stock existant en nature s'élevait à 4 847 euros ; qu'une telle réponse constitue un acquiescement, quand bien même le montant du stock indiqué, de manière au demeurant erronée, était inférieur au montant total des marchandises livrées sous réserve de propriété ; que, pour déclarer la société Phoenix Pharma forclose, la cour d'appel a considéré que, dans la mesure où le stock indiqué par l'administrateur était d'un montant inférieur au total de la créance, la réponse de l'administrateur devrait être assimilée à un défaut d'acquiescement ; qu'en statuant ainsi, cependant que l'administrateur avait admis la validité et l'opposabilité de la clause de réserve de propriété, et n'avait émis aucune réserve, la cour d'appel a violé l'article R. 624-13 du code de commerce ;
2°) que l'acquiescement envisagé par l'article R. 624-13 du code de commerce est l'acquiescement de l'administrateur à la demande de revendication, et non l'acquiescement du créancier revendiquant à la réponse de l'administrateur ; qu'au cas présent, pour considérer qu'il n'y avait pas eu d'acquiescement, la cour d'appel a relevé que l'administrateur avait accepté la demande de revendication et indiqué que les stocks s'élevaient à 4 847 euros et que « si la société Phoenix était, comme elle l'a été, en désaccord avec ce montant (…), il lui appartenait de saisir le juge-commissaire » ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a confondu l'acquiescement de l'administrateur à la demande de revendication, et l'acquiescement du créancier revendiquant à la réponse de l'administrateur, en violation de l'article R. 624-13 du code de commerce ;
Mais attendu que l'arrêt retient que, par sa lettre du 1er juillet 2010, l'administrateur, s'il a reconnu que la clause de réserve de propriété invoquée par la société Phoenix Pharma était opposable à la procédure collective, avait aussi précisé que la valeur des marchandises en stock était seulement de 4 847 euros et qu'il se proposait de régler cette somme au revendiquant, lequel avait fait valoir, dans sa demande, qu'il disposait d'une clause de réserve de propriété pour le montant déclaré de 1 707 419, 52 euros ; que la cour d'appel en a exactement déduit, sans faire la confusion invoquée par la seconde branche, que la réponse de l'administrateur ne constituait pas, en raison du désaccord constaté, un acquiescement à la demande de revendication, dispensant le créancier de saisir le juge-commissaire dans le délai fixé par l'article R. 624-13 du code de commerce ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.