Cass. com., 29 septembre 2015, n° 14-18.135
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Avocats :
Me Occhipinti, SCP Thouin-Palat et Boucard
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Colmar, 26 mars 2014), que la SARL X... ingénierie et négoce (la société débitrice) ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 7 avril et 23 juin 2009, le liquidateur a assigné M. Y..., son gérant, en responsabilité pour insuffisance d'actif ;
Attendu que M. Y... fait grief à l'arrêt de le condamner à payer au liquidateur la somme de 350 000 euros à ce titre alors, selon le moyen :
1°/ que la faute de gestion de nature à entraîner une contribution du dirigeant social à l'insuffisance d'actif doit avoir été commise avant le jugement d'ouverture de la procédure collective ; que la cour d'appel se fonde sur l'attitude de M. Y... après l'ouverture de la procédure collective pour caractériser sa prétendue faute de gestion, lui reprochant en outre d'être par cette attitude à l'origine d'un aggravation du passif ; qu'elle a ainsi violé l'article L. 651-2 du code de commerce ;
2°/ que seule une faute de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif peut conduire à la condamnation du dirigeant social à supporter une partie de cette insuffisance ; qu'en ne montrant pas en quoi le prêt de la machine à découper avait effectivement empêché la société X... d'honorer des commandes et en se bornant à des considérations abstraites sur son activité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;
3°/ que l'insuffisance d'actif doit être déterminée à la date à laquelle le juge statue ; qu'en se fondant sur le passif déclaré en 2009, sans montrer en quoi il était identique au moment où elle statuait, la cour d'appel a violé l'article L. 651-2 du code de commerce ;
Mais attendu, d'une part, qu'ayant relevé que M. Y... avait conclu, avant de déclarer la cessation des paiements, un commodat portant sur une machine à découpe constituant le principal matériel de production de la société, en faveur d'une société en voie de constitution dont il était l'associé majoritaire, la cour d'appel a ainsi retenu une faute de gestion antérieure au jugement d'ouverture ;
Attendu, d'autre part, que l'arrêt retient que la société débitrice ne payait plus ses charges sociales depuis la fin de l'année 2008 et les salaires depuis le mois de février 2009, et que l'acte reproché à son gérant l'a privée sans contrepartie de l'usage d'une machine essentielle à son activité, ce qui ne pouvait que conduire à diminuer sa production et ses résultats ; que par ces constatations et appréciations, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
Attendu, enfin, qu'après avoir exactement énoncé que la vérification du passif n'est pas une condition de recevabilité de l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif, mais qu'il suffit que celle-ci soit certaine et d'un montant au moins égal à celui de la condamnation prononcée, la cour d'appel s'est fondée sur le montant du passif indiqué par M. Y... lui-même, sans que celui-ci prétende qu'il aurait évolué, et a procédé à une évaluation actualisée de l'actif ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.