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Décisions

Cass. com., 29 avril 2014, n° 13-11.798

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Espel

Avocats :

SCP Gadiou et Chevallier, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin

Nîmes, du 22 nov. 2012

22 novembre 2012

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 22 novembre 2012), que la société SJN (la société), dont M. X... était le principal associé et le gérant, a été mise en liquidation judiciaire le 10 février 2010, la date de cessation des paiements étant fixée au 1er octobre 2008 ; que, sur requête du liquidateur, le tribunal a condamné M. X... à supporter l'insuffisance d'actif de la société à concurrence de 116 865, 09 euros ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé sa condamnation à payer cette somme au liquidateur au titre de l'insuffisance d'actif, alors, selon le moyen :

1°/ que le juge doit observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, le liquidateur avait invoqué des fautes de gestion ayant consisté en une insuffisance de fonds propres, en la poursuite d'une exploitation déficitaire, en l'absence de déclaration des paiements dans le délai légal et dans le fait de ne pas avoir tiré les conséquences de la perte des capitaux propres de la société ; qu'en conséquence, en relevant que les fautes de M. X... résultaient de l'imprudence voire de la malhonnêteté de se présenter vis-à-vis de tiers comme une société ayant une certaine importance ou crédibilité, de payer des sommes importantes à son revendeur sans garantie financière et de l'absence de toute comptabilité pour l'année 2009, la cour d'appel a relevé un moyen d'office sans avoir préalablement invité les parties à s'en expliquer et a violé l'article 16 du code de procédure civile ;

2°/ que l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif ne peut prospérer que si le passif avéré trouve son origine dans la faute de gestion commise par le dirigeant ; que le juge ne peut toutefois déduire de la seule importance du passif la réalité de la faute de gestion du dirigeant ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté, d'une part, que M. X... avait, malgré les difficultés rencontrées au début de l'année 2009, poursuivi l'activité de la société et, d'autre part, que la poursuite de cette activité avait généré des commissions d'au moins 31 000 euros ; qu'il résultait de ces constatations que la poursuite de l'activité n'avait pas été déficitaire de sorte que l'insuffisance d'actif constatée était sans lien causal avec la poursuite de l'activité de la société au cours de l'année 2009 ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article L. 651-2 du code de commerce ;

3°/ que le dirigeant d'une personne morale ne peut être condamné au comblement du passif si les difficultés financières de la société ont pour origine des circonstances extérieures, tels que l'échec d'un projet ou la défaillance d'un partenaire ; qu'en l'espèce, M. X... avait fait valoir que seule la défaillance de la société Rizqi était à l'origine des difficultés rencontrées par la société dès lors que si elle avait honoré la commande, la société Mougarbel n'aurait pas assigné la société en paiement et, en l'absence de toute condamnation à son encontre, la société n'aurait pas été contrainte de déclarer la cessation des paiements ; qu'après avoir admis « la défaillance de son vendeur singapourien », la cour d'appel a pourtant retenu que « la faute commise par l'invraisemblable déloyauté et imprudence » de M. X... est à l'origine de l'insuffisance d'actif dont il doit répondre ; qu'en statuant ainsi sans rechercher, comme elle y avait été invitée, si en l'absence de toute défaillance de la société Rizqi, la société n'aurait pas pu poursuivre normalement son activité, la cour d'appel a en toute hypothèse privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ;

Mais attendu, en premier lieu, que les juges du fond n'ont pas retenu que l'imprudence, voire la malhonnêteté de M. X..., et l'absence de tenue de la comptabilité pour l'exercice 2009 étaient constitutifs d'une faute de gestion ;

Attendu, en second lieu, que l'arrêt relève, par motifs propres et adoptés, que M. X... avait repris son apport quand le capital social de la société était, dès l'origine, insuffisant à financer son activité, que malgré la perte de la moitié du capital social, il n'avait pas reconstitué les fonds propres de la société, qu'il avait poursuivi, pendant trois exercices, une activité déficitaire, sans prendre de mesures de restructuration, et avait procédé tardivement à la déclaration de la cessation des paiements ; qu'il relève encore qu'au cours de l'année 2009, la société avait laissé impayée une dette très importante, émettant au profit du créancier quatre lettres de change d'un montant de plus de 100 000 euros non approvisionnées ; qu'il relève encore que, confronté aux graves problèmes résultant de la défaillance irréversible du « vendeur » singapourien dès le début de l'année 2009, M. X... avait poursuivi pendant près d'un an l'activité de la société quand les relevés de son compte bancaire révélaient un découvert quasi permanent ou un solde dérisoire en 2008 et 2009 ; que par ces appréciations, la cour d'appel, procédant à la recherche prétendument omise visée à la troisième branche, a caractérisé les fautes de gestion reprochées à M. X... et le lien de causalité entre celles-ci et l'insuffisance d'actif, et ainsi légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.