Cass. com., 24 mai 2018, n° 16-29.116
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Avocats :
SCP Alain Bénabent, SCP François-Henri Briard
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Z..., dont M. et Mme I... E... (M. et Mme Z...) étaient les co-gérants et associés, a été mise en redressement judiciaire le 2 octobre 2013, la procédure étant convertie en liquidation judiciaire le 2 avril 2014 ; que le 15 septembre 2014, la société H... C... , en sa qualité de liquidateur de la société, a assigné M. et Mme Z... en responsabilité pour insuffisance d'actif ; qu'elle a également demandé le prononcé contre eux de mesures de faillite personnelle ou d'interdiction de gérer ;
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 651-2 du code de commerce, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 18 décembre 2008 ;
Attendu que pour condamner solidairement M. et Mme Z... à payer l'insuffisance d'actif de la société Z... à concurrence de la somme de 1 901 421, 98 euros, l'arrêt retient que l'état du passif établi le 18 juillet 2016 par le liquidateur fait apparaître l'admission définitive des créances à hauteur de 1 751 291,46 euros, pour un passif déclaré total évalué à 2 696 302,43 euros, et que pour apurer ce passif, l'actif détenu par le liquidateur s'élève à 129 545,63 euros de créances recouvrées ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations que l'insuffisance d'actif, égale à la différence entre le montant du passif admis et le montant de l'actif réalisé, s'élevait à 1 621 745,83 euros, montant que la condamnation des dirigeants ne pouvait excéder, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le second moyen, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 653-5, 5° et L. 653-8 du code de commerce ;
Attendu que pour condamner M. et Mme Z... à une interdiction de gérer d'une durée de cinq ans, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que des difficultés de coopération sont intervenues avec les organes de la procédure ;
Qu'en se déterminant par de tels motifs, impropres à établir que les dirigeants s'étaient volontairement abstenus de coopérer avec le mandataire judiciaire ou le liquidateur et que cette abstention avait fait obstacle au bon déroulement de la procédure, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
Et attendu que les interdictions de gérer ayant été prononcées en considération de plusieurs faits, la cassation encourue à raison de l'un d'eux entraîne, en application du principe de proportionnalité, la cassation de l'arrêt de ce chef ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que confirmant le jugement, il condamne M. et Mme I... E... à supporter solidairement l'insuffisance d'actif de la société Z..., sauf à porter le montant de la condamnation à ce titre à 1 901 421,98 euros, prononce une interdiction de gérer de cinq ans contre chacun des dirigeants et les condamne au paiement d'une indemnité de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens, l'arrêt rendu le 27 octobre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Bourges ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Riom.