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Décisions

Cass. crim., 6 décembre 1993, n° 93-81.475

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Tacchella

Rapporteur :

M. Hecquard

Avocat général :

M. Galand

Avocat :

SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez

Colmar, ch. corr., du 10 févr. 1993

10 février 1993

REJET des pourvois formés par X... André, Y... Claire, épouse X..., contre l'arrêt de la cour d'appel de Colmar, chambre correctionnelle, en date du 10 février 1993, qui, pour escroquerie, abus de biens sociaux et banqueroute, les a condamnés respectivement à 10 mois d'emprisonnement avec sursis et 20 000 francs d'amende, et à 2 mois d'emprisonnement avec sursis et 10 000 francs d'amende et a prononcé contre chacun d'eux l'interdiction de gérer toute autre entreprise commerciale pendant 10 ans.

LA COUR,

Joignant les pourvois en raison de la connexité ; 

Vu le mémoire produit commun aux deux demandeurs ;

Sur le premier moyen de cassation produit commun aux deux demandeurs : (sans intérêt) ;

Sur le deuxième moyen de cassation pris de la violation de l'article 197 de la loi du 25 janvier 1985, 509 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :

" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré les prévenus coupables de banqueroute ;

" aux motifs que " la comptabilité de l'entreprise était tenue par la S. A. Frigelor, cependant, l'insuffisance des documents produits ne permettait pas au cabinet comptable de tenir une comptabilité probante, ce délit n'est pas discuté, il doit être imputé aux deux prévenus ; " et aux motifs des premiers juges " les cessions de créances fictives constituaient des moyens ruineux (car entraîneraient des frais financiers) pour procurer des fonds à la société Renov'Services ;

" alors que, d'une part, la loi du 25 janvier 1985 ne contient aucune incrimination pénale pour des faits de tenue irrégulière de comptabilité d'une société, lesquels ne sauraient, en raison de l'interprétation stricte des lois pénales, être assimilés à une absence totale de toute comptabilité ; que la cour d'appel, qui pour retenir la culpabilité des prévenus de ce chef, reproche à la comptabilité tenue par un cabinet comptable son absence de caractère probant, a méconnu l'article 197 de la loi du 25 janvier 1985 ;

" alors que, d'autre part, l'appel interjeté sans restriction s'applique à tous les chefs de la prévention, à l'ensemble du jugement et à toutes ses dispositions, en s'abstenant de se prononcer tant dans les motifs que dans le dispositif de sa décision sur le chef de banqueroute par emploi de moyens ruineux retenus par le Tribunal par des motifs vagues et généraux, qui ne sauraient, à eux seuls, suffire à justifier légalement sa décision, la cour d'appel a méconnu l'étendue de sa saisine et violé l'article 593 du Code de procédure pénale " ;

Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme qu'André X...et Claire Y..., respectivement gérant de fait et de droit de la société Renov-Services en état de cessation des paiements depuis le 1er octobre 1987, sont poursuivis pour banqueroute pour avoir omis de tenir une quelconque comptabilité et pour avoir employé des moyens ruineux de se procurer des fonds dans l'intention de retarder l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire ;

Attendu que, pour déclarer les époux X...-Y... coupables de ces infractions, les juges du fond relèvent d'une part, qu'une comptabilité de factures et d'extraits de comptes n'est pas une comptabilité probante et qu'à défaut des documents nécessaires le bilan de la société n'a pu être établi par le cabinet comptable qui en avait été chargé ; et d'autre part, que les prévenus ont cédé, pour en obtenir l'escompte, avant et après la date de cessation des paiements, à la banque, sous forme de factures ou de traites, des créances qu'ils savaient fictives et que ces opérations ont entraîné des frais financiers ;

Attendu qu'en l'état de ces constatations et énonciations, la cour d'appel a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;

Qu'en effet, d'une part, en cas d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire, constitue le délit de banqueroute par abstention de tenue de toute comptabilité, le fait, par tout commerçant ou dirigeant d'une personne morale commerçante, de s'abstenir de procéder, au mépris des dispositions de l'article 8 du Code de commerce, à l'enregistrement chronologique des mouvements affectant le patrimoine de l'entreprise et à l'établissement de l'inventaire périodique des éléments actifs et passifs de ce patrimoine ;

D'autre part, constitue le délit de banqueroute par emploi de moyens ruineux pour se procurer des fonds, l'escompte de fausses factures et de traites de complaisance dont le coût ne peut qu'aggraver la situation financière de l'entreprise ;

Que le moyen, dès lors, ne peut qu'être rejeté ;

Sur le troisième moyen : (sans intérêt) ;

Sur le quatrième moyen de cassation : (sans intérêt) ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois.