Livv
Décisions

Cass. crim., 18 juin 1998, n° 97-81.957

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gomez

Nancy, ch. corr., du 13 mars 1997

13 mars 1997

Statuant sur les pourvois formés par :

- A... Albert,

- B... Patricia, épouse A..., contre l'arrêt de la cour d'appel de NANCY, chambre correctionnelle, en date du 13 mars 1997, qui, pour banqueroute par détournement d'actif et recel, a condamné le premier à 5 mois d'emprisonnement avec sursis, 15 000 francs d'amende, à la faillite personnelle pendant 10 ans, la seconde à 2 mois d'emprisonnement avec sursis, et a prononcé sur les réparations civiles ;

Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu le mémoire ampliatif commun aux demandeurs et le mémoire en défense ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article 592 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué, qui ne mentionne pas l'audition du ministère public au cours de l'audience des débats est atteint d'une nullité d'ordre public en application de l'article 592, 2ème alinéa, du Code de procédure pénale" ;

Attendu que l'arrêt attaqué mentionne qu'à l'audience des débats, à laquelle était présente Mme Y..., substitut général, "les parties ont toutes eu la parole dans l'ordre prévu par l'article 513 du Code de procédure pénale" ;

Attendu qu'une telle mention implique que le ministère public a été entendu en ses réquisitions ; Que, dès lors, le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 197-2° de la loi du 27 janvier 1985, des articles 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, défaut de réponse à conclusions, manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a déclaré Albert A... coupable du délit de banqueroute et Patricia A... coupable de recel de ce délit, et les a condamnés pénalement et civilement ;

"aux motifs propres que par des motifs pertinents que la Cour adopte, le tribunal a exactement apprécié les faits reprochés aux prévenus, les a déclarés établis et leur a donné juste qualification pénale; qu'il y a lieu de confirmer le jugement tant sur le principe de la culpabilité que sur les peines ;

"et aux motifs adoptés que, sur la situation financière de l'entreprise, il résulte des éléments figurant au rapport de Me C..., mandataire-liquidateur, qu'au 31 décembre 1991 et au 31 mars 1992 la lecture des bilans faisait apparaître la situation suivante : - au 31 décembre 1991 : chiffre d'affaire : 26 160 000 francs résultat d'exploitation : moins 51 000 francs résultat final : moins 371 000 francs - au 31 décembre 1992 : chiffre d'affaire : 5 682 000 francs résultat d'exploitation : 1 081 000 francs résultat final : moins 1 237 000 francs que ces résultats, joints à l'état des factures impayées et des inscriptions sur le registre du tribunal de commerce, doivent être interprétés à la lumière des observations d'un rapport de Me C... qui fait apparaître un "déficit de fonds de roulement important"; qu'il en résulte que dès l'année 1991, l'entreprise était en état de cessation de paiement puisqu'elle ne parvenait plus à régler ni ses créanciers ordinaires ni le Trésor; que, sur les détournements, les pièces jointes au dossier font apparaître que pour lui-même Albert A... a perçu, à titre de salaires : - en 1991, 430 861 francs - en 1992, 453 537 francs et qu'il a versé à son épouse à titre de salaires : 255 740 francs en 1991, 161 141 francs en 1992; qu'à l'aide des documents recueillis au sein de la comptabilité de la société, il a été établi que : en 1991 le prévenu avait reçu 430 861 francs à titre de salaires; son fils gérant de droit 97 411 francs; son épouse 270 623 francs; Z... Gaultier qui exerçait des fonctions identiques à celles de Patricia A..., 152 416 francs; qu'en 1992, le prévenu avait reçu 430 861 francs; son fils 97 740 francs; Patricia A..., 255 740 francs; Mme X..., 142 876 francs; que si l'on compare les évolutions des émoluments des deux prévenus (Albert A... et Patricia B..., épouse A...) aux résultats financiers dégagés par l'activité de la société, on constate que les sommes versées sur la seule initiative d'Albert A... ne pouvaient que contribuer à dégrader la situation de l'entreprise déjà compromise; que Patricia B..., épouse A... ne pouvait, compte tenu de sa situation personnelle et de ses fonctions dans l'entreprise ignorer l'état de la société et le caractère excessif de sa rémunération; que le délit de recel est établi à son encontre; que l'importance des détournements justifie le prononcé à l'encontre d'Albert A... d'une peine d'emprisonnement avec sursis, d'une peine d'amende et de 10 ans de faillite personnelle ;

"alors que, la Cour, qui, par adoption de motifs, a confirmé les peines et la déclaration de culpabilité, fondée uniquement sur des augmentations de salaires des demandeurs en 1991 et 1992, décidées par le seul Albert A... et jugées excessives en regard des résultats de l'entreprise, sans répondre aux écritures des demandeurs rappelant que, contrairement aux énonciations erronées du jugement, leurs salaires avaient été baissés lorsque Albert A... avait connu les mauvais résultats de l'entreprise - ce que d'ailleurs établissait la prévention, au moins pour le salaire de Patricia A... - de sorte que l'élément intentionnel de l'infraction n'était pas constitué, a entaché sa décision d'un défaut de réponse à une articulation essentielle des conclusions des demandeurs, la privant de base légale" ;

Attendu qu'en prononçant par les motifs repris au moyen, et dès lors que le caractère excessif des rémunérations que s'étaient octroyées les prévenus au regard de la situation financière de la société, relève d'une appréciation souveraine des juges du fond, la cour d'appel qui n'était pas tenue d'entrer dans le détail de l'argumentation de ces derniers, a caractérisé en tous leurs éléments constitutifs, tant matériels qu'intentionnel, les délits de banqueroute par détournement d'actif et recel dont elle les a déclarés coupables ;

D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois.