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Décisions

Cass. com., 13 mai 2014, n° 13-14.660

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Espel

Avocats :

Me Bertrand, Me Le Prado, SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard et Poupot, SCP Bénabent et Jéhannin, SCP Hémery et Thomas-Raquin, SCP Piwnica et Molinié, SCP Rousseau et Tapie

Paris, du 17 janv. 2013

17 janvier 2013

Sur le moyen unique :

Attendu selon l'arrêt attaqué (Paris, 17 janvier 2013), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 10 janvier 2012, pourvoi n° 10-26. 682), que la société Chantiers X...(la société) a été mise en liquidation judiciaire immédiate sans poursuite d'activité, le 1er août 2007, la SCP BTSG étant nommée liquidateur judiciaire ; que l'arrêt confirmatif rendu le 16 septembre 2010 ayant été cassé, la société et sa dirigeante Mme X..., ont soutenu, devant la cour de renvoi, que le tribunal n'avait pas caractérisé l'impossibilité de redressement de la société ;

Attendu que la société et Mme X...font grief à l'arrêt d'avoir confirmé l'ouverture immédiate d'une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société et en conséquence déclaré sans objet les demandes en intervention forcée, alors, selon le moyen :

1°) que la procédure de liquidation judiciaire n'est ouverte qu'au débiteur en état de cessation des paiements et dont le redressement est manifestement impossible, ces deux conditions étant cumulatives et distinctes ; que l'impossibilité du débiteur de faire face au passif exigible grâce à l'actif disponible caractérise exclusivement l'état de cessation de paiements, et non l'impossibilité manifeste d'un redressement futur ; qu'en retenant en l'espèce que le compte provisionnel de trésorerie de la société, pour la période d'août à décembre 2007, faisait état d'une « impasse de trésorerie », soit un besoin de 998 000 euros, que l'actif disponible à cette date ne permettait pas d'autofinancer les charges d'exploitation courantes et que les liquidités en banque s'élevaient à un montant de 79 460, 07 euros seulement, la cour d'appel, qui a statué par des motifs exclusivement relatifs à la cessation des paiements de la société et impropres à établir que le redressement de celle-ci était manifestement impossible, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 640-1 du code de commerce ;

2°) que, les conclusions de Mme X...et de la société faisaient valoir que, dans le cadre de la résiliation de son objet social de holding, la société détenait, au jour du jugement d'ouverture, la totalité ou la quasi-totalité du capital social des sociétés Charbons Maulois, Thualagant et CCIF, qui étaient toutes in bonis à cette date, et le sont restées depuis, malgré leur cession à des tiers ; qu'en s'attachant aux seules difficultés conjoncturelles de trésorerie de la société, sans rechercher, ainsi qu'elle y était pourtant invitée, si ces participations dans le capital de sociétés in bonis n'était pas un élément déterminant de nature à démontrer que le redressement de la société exposante n'était pas manifestement impossible, la cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 640-1 du code de commerce ;

3°) que la cour d'appel a elle-même constaté que le recours à un partenaire ou repreneur était de nature à permettre à la société de poursuivre son activité dans le cadre d'un plan de continuation ou d'un plan de cession ; qu'il s'induisait nécessairement de cette constatation que le redressement de la société exposante n'était pas manifestement impossible ; qu'en retenant cependant le contraire, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article L. 640-1 du code de commerce ;

4°) que, et en tout état de cause, le fait de ne pas avoir trouvé, dès le jour du jugement d'ouverture de la procédure collective, le partenaire ou repreneur nécessaire pour soutenir la poursuite de l'activité n'est pas un élément qui, en lui-même, est de nature à établir que le redressement de l'entreprise est manifestement impossible ; qu'au contraire, l'ouverture d'un redressement judiciaire s'impose pour permettre à l'entreprise en cessation des paiements de rechercher un tel partenaire ou repreneur ; qu'en se fondant en l'espèce, pour décider que le redressement de la société était manifestement impossible, sur le seul « défaut de justification de la recherche sans délai d'un partenaire ou repreneur », la cour d'appel a statué par un motif inopérant et privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 640-1 du code de commerce ;

Mais attendu qu'après avoir relevé, analysant le rapport d'audit, établi le 18 juillet 2007 à la demande de la société, que le compte prévisionnel pour la période d'août à décembre suivant, faisait état d'une « impasse de trésorerie » de 998 000 euros, quand l'actif disponible des sociétés du groupe ne lui permettait pas d'autofinancer les charges d'exploitation courantes pendant cette période et que les liquidités en banque de ces sociétés n'excédaient pas 79 460, 07 euros, l'arrêt retient qu'il n'était pas démontré que la société avait des chances raisonnables de se redresser, dès lors qu'en l'absence de partenaire elle n'avait pas la possibilité de financer seule, l'activité de la période d'observation et le coût de la restructuration sociale préconisée par le rapport d'audit, sans créer un risque élevé de générer un passif nouveau très important dès les deux premiers mois de la période d'observation ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui a caractérisé l'impossibilité manifeste pour la société de se redresser, et n'était pas tenue de procéder à la recherche, inopérante, visée à la deuxième branche, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.