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Décisions

Cass. com., 8 juillet 2014, n° 12-26.703

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Espel

Avocats :

SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Gatineau et Fattaccini

Bordeaux, du 26 juin 2012

26 juin 2012

Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 21 septembre 2010, pourvoi n° 09-69. 109), et les productions, que le 23 janvier 1993, le GFA des Domaines de la barrière (le GFA) a consenti à M. Yann Y...un bail sur des terres que ce dernier a ensuite mises à disposition de l'EARL Yann Y...(l'EARL), constituée le 24 mars 1993 entre lui-même et son épouse ; que par jugements des 16 décembre 2005 et 7 décembre 2006, l'EARL et M. Yann Y...ont été mis en liquidation judiciaire, M. C...étant nommé liquidateur ; que le 10 octobre 2007, le liquidateur a assigné le GFA pour que lui soient étendues ces deux procédures ; que le tribunal a accueilli sa demande ; que l'arrêt du 16 juin 2009 ayant déclaré le GFA recevable en son appel et rejeté la demande d'extension a été cassé en toutes ses dispositions ; que devant la cour de renvoi, le liquidateur a soutenu que le GFA ne pouvait interjeter appel du jugement d'extension sans le concours d'un mandataire ad hoc et, à titre subsidiaire, maintenu ses demandes d'extension ; Sur le premier moyen :


Attendu que l'EARL, M. Yann Y...et leurs liquidateurs font grief à l'arrêt d'avoir déclaré le GFA recevable en son appel, alors, selon le moyen, que l'ordonnance du premier président qui arrête l'exécution provisoire ne produit d'effet que pour l'avenir ; qu'elle n'a pas d'effet rétroactif ; qu'en l'espèce, si l'ordonnance du magistrat délégué par le premier président de la cour d'appel de Bordeaux en date du 5 février 2009, prononçant l'arrêt de l'exécution provisoire de droit résultant du jugement du tribunal de grande instance d'Angoulême du 9 octobre 2008, ayant prononcé l'extension au GFA, pour confusion des patrimoines, des procédures de liquidation judiciaire de l'EARL et de M. Yann Y..., a eu pour effet de rétablir l'existence de la personne morale du GFA, ce rétablissement ne valait que pour l'avenir ; qu'il ne pouvait entraîner de manière rétroactive la validation des actes effectués par le représentant légal de cette personne morale durant la période où celui-ci ne disposait plus d'aucune qualité pour les accomplir en raison de la liquidation intervenue ayant eu, notamment, pour effet de transférer au liquidateur l'exercice de ses droits et actions concernant son patrimoine en application de l'article L. 622-9, ancien, du code de commerce ; que l'appel par le seul gérant du GFA, non représenté par son liquidateur, M. C...ou par un mandataire ad hoc, à l'encontre de ce jugement du 9 octobre 2008 ayant été formé le 21 octobre 2008, soit antérieurement à l'arrêt de l'exécution provisoire de ce jugement par l'ordonnance du 5 février 2009, cet appel était entaché de nullité et devait donc être déclaré irrecevable ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles R. 661-1 du code de commerce, L. 622-9 du code de commerce, dans sa rédaction alors applicable, antérieure à la loi du 26 juillet 2005, 524 du code de procédure civile et 1844-7, 7°, du code civil ;


Mais attendu que l'arrêt relève que le GFA, représenté par son gérant, a relevé appel le 21 octobre 2008 du jugement du 9 octobre précédent qui lui a étendu les liquidations judiciaires de l'EARL et de M. Yann Y...; que subordonner la recevabilité de ce recours à son exercice par l'intermédiaire d'un liquidateur amiable ou d'un mandataire ad hoc, tandis que le GFA disposait, pour le former, d'un délai de dix jours à compter de la notification du jugement ayant eu pour effet de priver son gérant de ses pouvoirs de représentation, entraînerait une limitation excessive du droit d'accès à un tribunal garanti par l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que par ce motif de pur droit, suggéré par la défense, substitué à ceux justement critiqués, l'arrêt se trouve légalement justifié ; que le moyen ne peut être accueilli ;  Mais sur le second moyen, pris en sa deuxième branche : Vu l'article L. 621-5 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises ;

Attendu que pour rejeter la demande d'extension fondée sur la confusion des patrimoines, l'arrêt retient que les créances réciproques détenues par le GFA à l'égard de M. Yann Y...et de l'EARL, au titre des loyers dus depuis 1996 en vertu du bail rural du 23 janvier 1993, et par l'EARL à l'égard du GFA, au titre des travaux d'amélioration réalisés sur les terres données à bail, ne sont pas de nature à créer une confusion des patrimoines, même s'il résulte de la compensation opérée au profit du GFA un avantage au détriment des autres créanciers de la liquidation judiciaire de l'EARL, dès lors que l'actif et le passif des deux entités demeurent distincts et déterminables, ce qui est contraire au critère de l'imbrication ; qu'il retient encore que, pour ce même motif, ne permet pas de caractériser la confusion des patrimoines, la circonstance que M. Jean-Noël Y..., gérant du GFA, a été autorisé à utiliser pour le stockage des récoltes de ce GFA les chais faisant partie des parcelles données à bail à son fils qui les a mises à la disposition de l'EARL ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à établir l'absence de relations financières anormales caractérisant une confusion des patrimoines, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;


PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a donné acte à la société Francis D...et à M. Z...de ce qu'ils interviennent à l'instance en qualité d'administrateurs provisoires de l'étude de M. C..., l'arrêt rendu le 26 juin 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse.