Cass. 2e civ., 7 janvier 2016, n° 14-24.508
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Liénard
Avocats :
SCP Boullez, SCP Foussard et Froger
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 26 juin 2014), que se fondant sur un jugement du 21 janvier 2010 ayant prononcé la liquidation judiciaire de M. X..., M. Y..., désigné en qualité de liquidateur, a saisi un tribunal d'instance d'une requête aux fins de saisie des rémunérations de M. X...; que M. Y..., ès qualités, a interjeté appel du jugement rejetant la requête ;
Sur la recevabilité du pourvoi, contestée par la défense :
Attendu que M. Y..., ès qualités, conteste l'intérêt de M. X...à former un pourvoi, au motif, d'une part, que la portion saisissable des salaires de M. X...est de plein droit appréhendée par la procédure collective et, d'autre part, que celle-ci ayant pour objet l'apurement du passif, le liquidateur agit nécessairement dans le sens des intérêts du débiteur ;
Mais attendu que le débiteur a un droit propre et un intérêt à former un pourvoi contre l'arrêt rendu à l'occasion d'une action exercée contre lui par le liquidateur ayant accueilli la requête de ce dernier aux fins de saisie de ses rémunérations ;
D'où il suit que le pourvoi est recevable ;
Sur le moyen unique, après avis de la chambre commerciale pris en application de l'article 1015-1 du code de procédure civile :
Vu les articles R. 3251-1 du code du travail et L. 111-2 du code des procédures civiles d'exécution ;
Attendu que seul le créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut faire procéder à la saisie des rémunérations de son débiteur ;
Attendu que pour autoriser la saisie des rémunérations de M. X..., la cour d'appel retient qu'en application de l'article L. 641-1 du code de commerce, le jugement qui ouvre une procédure de liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l'administration et de la disposition de ses biens même ceux qu'il a acquis à quelque titre que ce soit tant que la liquidation judiciaire n'est pas clôturée, que ce dessaisissement atteint les revenus que le débiteur a pu se procurer à raison d'une activité professionnelle nouvelle postérieure à sa mise en liquidation, seule la portion insaisissable des salaires étant exclue du dessaisissement, que dès lors l'allégation que le jugement de liquidation ne constituerait pas un titre exécutoire est inopérante, la saisie de la portion saisissable des revenus du travail de M. X...étant réalisée par l'effet de la procédure de liquidation collective et du constat d'un état des créances, qui n'est pas contesté et révèle un passif de 3 626 752 euros ; que M. Y..., ès qualités, doit, pour appréhender la part saisissable des salaires de M. X..., mettre en oeuvre la procédure de saisie des rémunérations, seule applicable ;
Qu'en statuant ainsi, alors que le liquidateur judiciaire ne peut, sur le seul fondement du jugement ouvrant ou prononçant la liquidation judiciaire, qui ne constitue pas un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible, faire procéder à la saisie des rémunérations du débiteur, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et attendu que la cassation n'impliquant pas qu'il soit à nouveau statué, il y a lieu de faire application de l'article 627 du code de procédure civile, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du même code ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 juin 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi.