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Décisions

Cass. com., 22 février 2017, n° 15-15.942

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

Mme Schmidt

Avocat général :

Mme Guinamant

Avocats :

Me Le Prado, SCP Baraduc, Duhamel et Rameix

Lyon, du 26 févr. 2015

26 février 2015

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 26 février 2015) et les productions, que la société Lyonnaise de banque (la banque) a consenti un prêt à la société Parc thermal de Montrond-les-Bains (la débitrice) ; que cette dernière ayant été mise en sauvegarde le 6 avril 2011, la banque a déclaré une créance correspondant à l'intégralité du capital prêté à échoir, majoré d'une indemnité de recouvrement stipulée au contrat de prêt ; que cette indemnité ayant été contestée, la banque, sur invitation de la cour d'appel statuant en matière de vérification et d'admission des créances, a saisi le tribunal aux fins de fixer sa créance ;

Attendu que la banque fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande d'admission au titre de l'indemnité de recouvrement alors, selon le moyen :

1°) que le principe de l'égalité des créanciers ne s'oppose à la validité d'une clause convenue entre un créancier et un débiteur antérieurement à l'ouverture de la procédure collective du débiteur que lorsqu'il résulte de cette clause une majoration des obligations du débiteur envers le créancier en cas de prononcé d'une telle procédure ; qu'il résulte des énonciations de l'arrêt que la clause n° 10 prévoyait une indemnité de 5 % dans le cas où la banque serait obligée de recouvrer sa créance par voie judiciaire ou extra-judiciaire ou de produire celle-ci à un ordre judiciaire quelconque, notamment en cas de redressement judiciaire ; que cette clause, sanctionnant tout débiteur, qu'il fasse ou non l'objet d'une procédure collective n'aggrave donc pas la situation de celui faisant l'objet d'une telle procédure ; qu'en énonçant le contraire et en déclarant cette clause inopposable à la procédure de sauvegarde ouverte contre l'emprunteuse, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard de l'article 1152 du code civil et du principe de l'égalité des créanciers d'un débiteur faisant l'objet d'une procédure collective ;

2°) que les juges du fond ne peuvent méconnaître les termes du litige dont ils sont saisis, lequel, en appel est déterminé par les conclusions respectives des parties ; que pour dire la clause n° 10 du contrat de prêt inopposable à la procédure de sauvegarde ouverte à l'égard de l'emprunteuse, l'arrêt retient que cette stipulation est radicalement contraire à l'article L. 622-13 du code de commerce « dont les appelants excipent par l'intermédiaire de la référence au titre VI du code de commerce » ; qu'en statuant ainsi, quand le titre VI susvisé traite exclusivement de l'Autorité de la concurrence et qu'aucune des parties n'avait invoqué l'article L. 622-13 du code de commerce, lequel prohibe la résiliation d'un contrat en cours du seul fait de l'ouverture d'une procédure de sauvegarde d'un des contractants, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ;

3°) qu'en soulevant d'office et sans inviter les parties à s'expliquer sur cette procédure contraire à l'article L. 622-13 du code de commerce, la cour d'appel a méconnu le principe du contradictoire et violé l'article 16 du code de procédure civile ;

4°) qu'un contrat de prêt n'est pas un contrat « en cours » lorsque, comme en l'espèce, les fonds ont été remis à l'emprunteur avant l'ouverture de sa procédure de sauvegarde ; qu'en énonçant que la clause n° 10 du contrat de prêt était ouvertement contraire à l'article L. 622-13 du code de commerce – pourtant exclusivement applicable aux contrats en cours – pour dire celle-ci non écrite et inopposable à la procédure collective de l'emprunteuse ouverte le 6 avril 2011, bien que le prêt ait été souscrit le 6 mars 2009, la cour d'appel a violé, par fausse application, le texte susvisé et, par refus d'application, l'article 1134 du code civil ;

5°) que les juges du fond ne peuvent dénaturer les termes clairs et précis des actes qui leur sont soumis ; que pour reprocher à la banque d'avoir calculé le montant de l'indemnité de recouvrement sur l'intégralité du contrat et non sur d'éventuelles échéances impayées au jour de l'ouverture de la procédure de sauvegarde de l'emprunteuse, l'arrêt retient que «c ette stipulation suppose que l'ouverture d'une sauvegarde conduit à la résiliation » et que « la résiliation du contrat de prêt, seule de nature à rendre exigible le montant intégral de la créance n'est pas intervenue » ; qu'en statuant de la sorte quand, dans sa déclaration du 6 avril 2011, la banque avait porté le capital restant dû et le montant de l'indemnité litigieuse dans les créances « à échoir », la cour d'appel, qui a dénaturé cette déclaration, a violé l'article 1134 du code civil ;

Mais attendu que, saisie d'une demande de fixation d'une créance correspondant au capital prêté dans son intégralité et à échoir, ce dont il résultait que le prêt n'était pas exigible à la date du jugement d'ouverture de la procédure de sauvegarde de la débitrice et que cette dernière n'était pas défaillante dans l'exécution de ses obligations, la cour d'appel, après avoir relevé que, selon la clause litigieuse, l'indemnité de recouvrement de 5 % était due si la banque se trouvait dans la nécessité de recouvrer sa créance par les voies judiciaires ou autres, et également si la banque était tenue de produire à un ordre de distribution quelconque, notamment en cas de redressement judiciaire de l'emprunteur, en a exactement déduit qu'en l'espèce, une telle clause aggravait les obligations de la débitrice en mettant à sa charge des frais supplémentaires du seul fait de sa mise en sauvegarde ; que par ce seul motif, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les deuxième, troisième, quatrième et cinquième branches, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.