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Décisions

Cass. com., 17 février 1998, n° 96-13.831

COUR DE CASSATION

Arrêt

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

M. Rémery

Avocat général :

M. Mourier

Avocats :

SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, M. Capron, M. Choucroy

Cass. com. n° 96-13.831

17 février 1998

Vu leur connexité, joint les pourvois n° 96-13.831, n° 97-15.462 et n° 97-15.463 ;
 
Attendu, selon les décisions attaquées (Paris, 9 février 1996, tribunal de commerce de Bobigny, 10 octobre et 7 novembre 1994, tribunal de commerce de Cannes, 23 juin 1994 et 9 février 1995, ordonnance du premier président de la Cour de Cassation, 11 juin 1996), que M. Y..., sur déclaration de cessation des paiements, a été mis en redressement judiciaire par le tribunal de commerce de Cannes suivant jugement du 23 juin 1994 ; que le même tribunal, par jugement du 9 février 1995, a prononcé sa liquidation judiciaire et désigné M. X... en qualité de liquidateur ; que, cependant, M. Y..., également associé de la société en nom collectif FDMF, à laquelle la procédure collective d'autres personnes avait été étendue le 10 octobre 1994 sur le fondement de la confusion des patrimoines, a été mis personnellement en liquidation judiciaire par application des dispositions de l'article 178 de la loi du 25 janvier 1985 suivant jugement du tribunal de commerce de Bobigny rendu le 7 novembre 1994 ; que, dans cette dernière procédure, M. Z... a été nommé liquidateur ; que, sur sa demande, le juge-commissaire désigné par le tribunal de commerce de Bobigny a ordonné la vente de gré à gré d'un fonds de commerce appartenant à M. Y... par une décision que M. X... a frappé d'un recours devant le tribunal, dont celui-ci l'a débouté ; que, par l'arrêt du 9 février 1996, l'appel-nullité interjeté par M. X... à l'encontre de ce jugement a été déclaré irrecevable par la cour d'appel de Paris ; qu'à l'encontre de cet arrêt, M. X... a formé le 9 avril 1996 un pourvoi en cassation portant le n° 96-13.831 ; que, par ailleurs, sur la demande du ministère public présentée sur le fondement des articles 7, alinéa 3, de la loi du 25 janvier 1985 et 3 du décret du 27 décembre 1985, le Premier président de la Cour de Cassation a, par ordonnance du 20 février 1996, désigné le tribunal de commerce de Cannes pour connaître de la liquidation judiciaire de M. Y... ; que, par une ordonnance du 11 juin 1996, il a rapporté sa précédente décision et désigné le tribunal de commerce de Bobigny pour suivre la procédure de liquidation judiciaire des différents associés de la société FDMF, dont M. Y... ; que cette seconde ordonnance a fait l'objet d'un pourvoi en cassation formé par M. X..., sous le n° 97-15.463 ; que M. X... s'est également pourvu en cassation, sous le n° 97-15.462, à l'encontre de l'ensemble des jugements d'ouverture, demandant, sur le fondement de l'article 618 du nouveau Code de procédure civile, l'annulation de ceux prononcés par le tribunal de commerce de Bobigny ;
 
Sur la recevabilité du pourvoi n° 97-15.463, contestée par la défense et dont l'examen est préalable :
 
Vu les articles 7, alinéa 3, de la loi du 25 janvier 1985 et 3 du décret du 27 décembre 1985, dans leur rédaction résultant de la loi du 10 juin 1994 et du décret du 21 octobre 1994 ;

Attendu que M. X..., à l'appui de la recevabilité de son pourvoi à l'encontre de l'ordonnance du 11 juin 1996, reproche à celle-ci d'avoir rapporté celle du 20 février précédent alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'une ordonnance rendue en application des textes susvisés est insusceptible de tout recours, y compris du recours en référé des articles 496 et 497 du nouveau Code de procédure civile ; que le Premier président de la Cour de Cassation, saisi au surplus par M. Z..., ès qualités de liquidateur désigné par le tribunal de commerce de Bobigny du " groupe Elalouf ", dépourvu de qualité à cette fin, ne pouvait, sans excéder les pouvoirs que lui confèrent ces règles d'ordre public régissant les voies de recours, rapporter sa précédente ordonnance ; alors, d'autre part, qu'en statuant de la sorte, sans communiquer la requête de M. Z... à M. X..., liquidateur désigné par le tribunal de commerce de Cannes, ni recueillir ses observations, le Premier président de la Cour de Cassation a méconnu le principe de la contradiction et violé l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ; et alors, enfin, que le Premier président ne pouvait faire application des dispositions précitées à la procédure de liquidation judiciaire de M. Y... ouverte le 23 juin 1994, avant l'entrée en vigueur de la loi du 10 juin 1994, à laquelle celle-ci n'était pas applicable sans méconnaître tant l'article 99 de celle-ci que l'étendue de ses pouvoirs ;

Mais attendu, en premier lieu, que le tribunal de commerce de Bobigny n'ayant ouvert une procédure collective personnelle à l'égard de M. Y... que par le jugement du 7 novembre 1994, soit postérieurement à l'entrée en vigueur de la nouvelle rédaction des articles 7, alinéa 3, de la loi du 25 janvier 1985 et 3 du décret du 27 décembre 1985, c'est à bon droit que le Premier président de la Cour de Cassation a usé des pouvoirs qu'il tient des textes ainsi modifiés pour faire cesser le conflit de compétences provoqué par l'existence de ce nouveau jugement d'ouverture en désignant la juridiction qui sera saisie de l'affaire ;

Attendu, en second lieu, qu'aux termes de l'article 3, alinéa 4, du décret du 27 décembre 1985, les décisions du premier président de la Cour de Cassation désignant la juridiction chargée de connaître de la procédure collective d'un débiteur sont des mesures d'administration judiciaire ; qu'elles ne sont ainsi sujettes, selon les dispositions générales de l'article 499 du nouveau Code de procédure civile, à aucune des règles applicables aux jugements, tel le respect du principe de la contradiction dans leur élaboration ; qu'elles ne sont susceptibles, par ailleurs, d'aucun recours ainsi qu'en disposent les articles 3, alinéa 4, du décret du 27 décembre 1985 et 537 du nouveau Code de procédure civile ; que, dès lors, si elles peuvent, en fonction d'informations nouvelles portées à sa connaissance, être librement modifiées par le Premier président de la Cour de Cassation, en vue d'une meilleure sauvegarde des intérêts en présence, sans qu'il en résulte que ce magistrat aurait ainsi accueilli une demande de rétractation en référé, leur nature exclut que les parties puissent exercer à leur encontre un pourvoi en cassation fût-ce en invoquant l'excès de pouvoir ; D'où il suit que le pourvoi est irrecevable ;

Sur le pourvoi n° 97-15.462 :

Attendu qu'aux termes de l'article 3, alinéa 4, du décret du 27 décembre 1985, la décision par laquelle le Premier président de la Cour de Cassation désigne la juridiction chargée de connaître de la procédure collective d'un débiteur s'impose à la juridiction désignée et aux parties ; qu'il en résulte que cette décision met fin, par elle-même, à la contrariété existant entre les différents jugements d'ouverture en emportant caducité de plein droit des décisions prononçant le redressement ou la liquidation judiciaires du même débiteur rendues par toutes juridictions autres que celle désignée par le Premier président ; que, dès lors, le pourvoi formé par M. X... sur le fondement des dispositions de l'article 618 du nouveau Code de procédure civile est sans objet ;

Et sur la recevabilité du pourvoi n° 96-13.831 :

Vu les articles 31, 609 et 629 du nouveau Code de procédure civile, ensemble les articles 7 de la loi du 25 janvier 1985 et 3, alinéa 4, du décret du 27 décembre 1985 ;

Attendu que lorsque le Premier président de la Cour de Cassation renvoie une affaire de redressement ou de liquidation judiciaires devant le tribunal compétent pour en connaître, sa décision s'impose aux parties et à la juridiction de renvoi ;

Attendu que, par suite de l'ordonnance du 11 juin 1996, il a été mis fin aux fonctions de M. X... ; qu'il s'ensuit que celui-ci n'a plus qualité pour agir en tant que liquidateur de la liquidation judiciaire de M. Y... au soutien du pourvoi qu'il avait formé à l'encontre de l'arrêt déclarant irrecevable son appel-nullité du jugement confirmant la cession de gré à gré d'un fonds de commerce du débiteur ; que son pourvoi a donc cessé d'être recevable ;

PAR CES MOTIFS :

DECLARE IRRECEVABLES le pourvoi n° 96-13.831 et le pourvoi n° 97-15.463 ;

DIT n'y avoir lieu de statuer sur le pourvoi n° 97-15.462.