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Décisions

Cass. com., 11 mai 1999, n° 96-21.172

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Cass. com. n° 96-21.172

11 mai 1999

Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 13 septembre 1996), que, par acte sous seing privé du 15 juillet 1993, M. Z... a donné son fonds de commerce en location-gérance pour une durée de deux ans à l'EURL JCM qui s'est engagée à acquérir le fonds, la vente étant subordonnée "à la capacité par M. Z... de céder le présent fonds de commerce en garantissant l'EURL JCM ou toute autre personne morale qu'elle entendrait se substituer, de ce que le terrain faisant l'objet d'un bail emphytéotique sera cédé conformément à l'engagement de la commune d'Hyères ou, tout au moins, reconduit pour une période qui ne soit pas inférieure à trente-cinq ans", une clause de l'acte précisant que dans l'hypothèse où les garanties ne pourraient pas être fournies, les parties pourraient décider d'un nouveau contrat de location-gérance, que dans le cas où la vente ne pourrait être formalisée à la date convenue, soit au 30 juin 1995, les parties si elles ne convenaient pas d'un nouveau contrat de location-gérance, reprendraient leur liberté ; que M. Z... a été mis en redressement judiciaire le 27 juin 1994, M. X... étant nommé représentant des créanciers et qu'un plan de continuation a été arrêté par le Tribunal ; que par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 21 juin 1995, l'EURL JCM a manifesté sa volonté d'acquérir le fonds de commerce à M. Z... qui lui a opposé un refus ; qu'elle a assigné M. Z... et le représentant des créanciers afin de faire juger qu'elle était propriétaire du fonds de commerce et qu'elle était prête à s'acquitter du prix convenu ;

Attendu que le liquidateur de l'EURL JCM fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande, alors, selon le pourvoi, d'une part, que la condition est réputée accomplie lorsque c'est le débiteur obligé sous cette condition qui en a empêché l'accomplissement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que, bien que la réalisation de la condition fût possible, puisque la cession du bail emphythéotique du terrain d'implantation avait effectivement eu lieu au bénéfice de la société Photophore, le 20 juin 1995, M. Z... avait "délibérément choisi d'(en) empêcher l'accomplissement" ; qu'il en résultait nécessairement que, déjà à cette date et en tout cas au 30 juin 1995, la condition stipulée était réputée accomplie et que M. Z... n'était plus en droit de s'opposer à l'exécution de la promesse de vente, acceptée par l'EURL JCM bénéficiaire ; qu'en omettant de tirer à cet égard les conséquences légales de ses propres constatations, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 1178 du Code civil ;

alors, de deuxième part, qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée par ses conclusions, si le fait que les effets de l'acte unique du 15 juillet 1993, inclus dans la durée du plan de redressement arrêté, sur sept ans, aient perduré, sans contestation, jusqu'au 30 juin 1995, date à laquelle la condition stipulée devait être réputée acquise, n'obligeait pas M. Z... à l'exécution de l'acte tout entier nonobstant les dispositions de l'article 37 de la loi du 25 janvier 1985, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de ces dernières dispositions ;

alors, de troisième part, qu'en relevant d'office et sans provoquer à cet égard les observations des parties, le caractère distinct des contrats inclus dans l'acte du 15 juillet 1993, la cour d'appel a violé ensemble les articles 3 et 16 du nouveau Code de procédure civile ;

et alors, enfin, que l'obligation reste indivisible, quelque divisible que soit son objet, si le rapport sous lequel elle est considérée dans l'obligation ne la rend pas susceptible d'exécution partielle ; qu'en ne recherchant pas si l'imputabilité à M. Z... de la défaillance de la condition stipulée, dont résultait définitivement l'accomplissement de cette condition, ne rendait pas nécessairement indivisible l'exécution des deux contrats contenus dans l'acte litigieux , la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 1134, 1178 et 1218 du Code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt retient que le contrat de location-gérance et la promesse de vente sous condition suspensive étaient des contrats en cours lors de l'ouverture de la procédure simplifiée de redressement judiciaire à l'égard de M. Z... et que si ce dernier a choisi de ne pas accomplir la condition suspensive, cette inexécution ne pouvait donner naissance, en vertu des dispositions d'ordre public de l'article 37 de la loi du 25 janvier 1985, qu'à une créance de dommages-intérêts à déclarer au passif du débiteur en redressement judiciaire ;

Attendu, en second lieu, que, sans relever un moyen d'office, la cour d'appel procédant à l'analyse de la convention litigieuse a considéré, dans l'exercice de son pouvoir souverain, que le contrat de location-gérance et la promesse de vente sous condition suspensive inclus dans cette convention étaient deux contrats distincts, la promesse de vente étant subordonnée à une condition qui, si elle n'était pas réalisée, donnait aux parties la possibilité de conclure un nouveau contrat de gérance ou de reprendre leur liberté ; D'où il suit que la cour d'appel a légalement justifié sa décision et que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.