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Décisions

Cass. com., 10 janvier 2012, n° 10-28.501

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Favre

Rapporteur :

Mme Guillou

Avocat général :

M. Le Mesle

Avocats :

Me Bertrand, SCP Boré et Salve de Bruneton

Versailles, du 4 nov. 2010

4 novembre 2010

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 4 novembre 2010), que par jugement du 9 octobre 2008 publié au BODACC le 26 octobre 2008, la société Ebrex France (la société Ebrex) a fait l'objet d'une procédure de sauvegarde, la société Bécheret-Thierry-Sénéchal-Gorrias étant désignée mandataire judiciaire et la société Facques-Hess-Bourbouloux, commissaire à l'exécution du plan ; que les institutions de retraite et de prévoyance Carcept, Carcept prévoyance, Ipriac, Fongecfa et AGFF (la Carcept), qui ne figuraient pas sur la liste des créanciers établie par la société Ebrex en application de l'article L. 622-6 du code de commerce dans sa rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises, ont déclaré hors délai une créance de cotisations et sollicité un relevé de forclusion ;

Attendu que la société Ebrex fait grief à l'arrêt d'avoir relevé de forclusion la Carcept, alors, selon le moyen :

1°) que l'omission volontaire du débiteur lors de l'établissement de la liste de ses créanciers constitue un cas autonome ouvrant droit à relevé de forclusion au bénéfice du créancier omis ; qu'en estimant que la société Ebrex avait volontairement omis d'inscrire les créances des sociétés du groupe Carcept sur la liste des créanciers, tout en relevant que ces créances étaient mentionnées dans la demande d'ouverture d'une procédure de sauvegarde formulée par la société Ebrex, d'où il résultait que l'omission des créances litigieuses de la liste des créanciers ne pouvait procéder d'une volonté délibérée de la part du débiteur de dissimuler sa dette, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article L. 622-26, alinéa 1er, du code de commerce ;

2°) que pour donner lieu à une décision de relevé de forclusion, le caractère volontaire de l'omission de la liste des créanciers doit être caractérisé ; qu'en déduisant le caractère volontaire de l'omission des créances des sociétés du groupe Carcept de la liste des créanciers de la société Ebrex du seul fait que celle-ci avait visé ces créances dans sa demande d'ouverture d'une procédure de sauvegarde, ce qui établissait qu'elle connaissait les créances en cause, la cour d'appel n'a pas caractérisé l'aspect volontaire de l'omission litigieuse et n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L. 622-26, alinéa 1er, du code de commerce ;

3°) que la bonne foi est toujours présumée ; qu'en retenant que la société Ebrex était une entreprise importante, munie de services administratifs spécialisés et rompus à ces déclarations, de sorte qu'une telle omission n'est pas admissible quand l'importance de la société débitrice ne permet pas de présumer le caractère volontaire d'une omission sur la liste des créanciers, la cour d'appel s'est déterminée par une motivation inopérante et a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 622-26, alinéa 1er, du code de commerce et de l'article 1134 du code civil ;

4°) que même si le caractère volontaire de l'omission de la créance litigieuse est démontré, le créancier qui sollicite un relevé de forclusion reste néanmoins tenu d'établir l'existence d'un lien de causalité entre son omission de la liste dressée par son débiteur et la tardiveté de sa déclaration de créance ; que la société Ebrex faisait valoir que le groupe Carcept était seul responsable de sa défaillance, puisqu'il avait été informé de la situation de son débiteur à une date où il lui était encore possible de déclarer sa créance dans le délai utile ; qu'en ne caractérisant pas le lien de causalité entre l'omission des créances du groupe Carcept de la liste des créanciers et la défaillance de celui-ci, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 622-26, alinéa 1er, du code de commerce ;

Mais attendu que si le caractère volontaire de l'omission d'une créance est démontré, le créancier qui sollicite un relevé de forclusion n'est pas tenu d'établir l'existence d'un lien de causalité entre son omission de la liste et la tardiveté de sa déclaration de créance ; qu'après avoir exactement énoncé que l'information dans la demande d'ouverture d'une procédure de sauvegarde, selon laquelle des cotisations sociales sont dues pour le troisième trimestre 2008, ne remplace pas l'indication de l'organisme social sur la liste des créanciers, l'arrêt retient que cette information démontre que la société Ebrex avait connaissance de l'existence de ce créancier, de sorte que l'omission de son nom sur la liste des créanciers a été volontaire ; qu'en l'état de ces constatations et énonciations, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à la recherche invoquée par la quatrième branche, et abstraction faite du grief de la troisième branche, qui attaque un motif surabondant, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.