Cass. com., 18 mars 2003, n° 01-15.793
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Pau, 26 juin 2001), que la Caisse régionale de Crédit agricole du Tarn, aux droits de laquelle vient la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel Sud Alliance (la créancière), a consenti, suivant acte notarié du 11 mai 1988, des ouvertures de crédit à la société SOGEFIM (la débitrice) qu'elle a fait garantir par une hypothèque judiciaire ; que le tribunal a ouvert le redressement judiciaire de la débitrice ; que la créancière a déclaré une créance à titre privilégié hypothécaire le 4 août 1998 ; que, par courrier du 10 décembre 1998, le représentant des créanciers a informé la créancière que sa déclaration était contestée par la débitrice ; que, par ce même courrier, le représentant des créanciers a indiqué qu'il demandait la convocation des parties devant le juge-commissaire ; que, par ordonnance du 10 mai 1999, le juge-commissaire a sursis à statuer sur l'admission de la créance pour permettre au représentant des créanciers d'obtenir les justificatifs ; que, par ordonnance du 29 novembre 1999, le juge-commissaire a admis la créance déclarée ;
Sur le premier moyen, pris en ses trois branches ;
Attendu que la débitrice fait grief à l'arrêt d'avoir admis la créance pour la somme de 2 337 991,75 francs à titre hypothécaire alors, selon le moyen :
1°) qu'à défaut de réponse du créancier dans les trente jours, à la lettre par laquelle le représentant des créanciers l'avise, en application de l'article 54 de la loi du 25 janvier 1985, que sa créance fait l'objet d'une discussion, le créancier s'exclut lui-même du débat sur la créance et n'a donc pas à être convoqué pour être entendu par le juge-commissaire ; que dès lors, l'arrêt attaqué, confirmant les deux ordonnances en ce quelles avaient retenu que le délai de 30 jours avait été rendu caduc par la demande de convocation sollicitée par le représentant des créanciers par-devant le juge-commissaire, a violé les articles L. 621-47, L. 621-104 et L. 621-105 du Code de commerce ;
2°) que la comparution des parties devant le juge-commissaire n'ayant pas permis d'établir la réalité de la créance invoquée par la créancière, le juge-commissaire ne pouvait sans commettre un excès de pouvoir, en l'état du défaut de réponse par la créancière à la contestation transmise par le représentant des créanciers, surseoir à statuer et renvoyer le représentant des créanciers à obtenir de la créancière la justification de sa créance ; que dès lors, l'arrêt attaqué a encore violé les articles L. 621-47, L. 621-104 et L. 621-105 du Code de commerce ;
3°) que la déclaration de créance doit comporter le montant de la créance due au jour du jugement d'ouverture avec indication des sommes à échoir et de leurs échéances et doit préciser la nature du privilège ou de la sûreté dont la créance est assortie ; que le juge-commissaire ayant précisément invité, par son ordonnance avant dire droit du 3 mai 1999, la créancière à indiquer le montant des sommes effectivement versées à la débitrice à valoir sur les prêts consentis, le montant des remboursements effectués, ainsi que le montant des intérêts perçus avec la précision des périodes concernées et des taux pratiqués, la cour d'appel n'a pu déclarer que la créancière avait, en déclarant sa créance, donné l'ensemble des renseignements requis par les dispositions de l'article 51 de la loi du 25 janvier 1985 ; que, faute de déduire de l'ensemble des demandes exprimées par le juge-commissaire l'absence de régularité de la déclaration de créance effectuée par ledit créancier, l'arrêt attaqué a violé par fausse application l'article L. 621-44 du Code de commerce ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'ayant relevé par motifs adoptés que le représentant des créanciers avait indiqué dans le courrier par lequel il informait la créancière de la contestation de sa créance, qu'il demandait la convocation des parties devant le juge-commissaire, la cour d'appel en a exactement déduit que le délai de 30 jours prévu par l'article 54 de la loi du 25 janvier 1985, devenu l'article L. 621-47 du Code de commerce, n'était pas opposable à la créancière et que la créancière devait être convoquée ;
Et attendu, en second lieu, que la méconnaissance des dispositions de l'article 51 de la loi du 25 janvier 1985 devenu l'article L. 621-44 du Code de commerce n'est pas sanctionnée par la nullité de la déclaration ; que la cour d'appel a exactement retenu qu'en demandant à la créancière de produire divers justificatifs, le juge-commissaire n'avait pas excédé ses pouvoirs et que la déclaration était recevable ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé en aucune de ses branches ;
Et sur le second moyen :
Attendu que la débitrice fait encore grief à l'arrêt d'avoir statué comme il a fait alors, selon le moyen, que la cour d'appel n'a pas répondu au moyen des conclusions d'appel de la débitrice faisant valoir que le taux des intérêts pratiqués sur le prêt en francs français, unilatéralement mis en place par la créancière aux lieu et place des prêts en devises, n'avait fait l'objet d'aucun accord entre les parties, et ne figurait pas sur les relevés de compte adressés à celle-ci ; que l'arrêt faute de s'expliquer sur ce moyen tout en confirmant l'ordonnance entreprise du 26 novembre 1999 d'où résultait que la créancière avait appliqué des taux de 11,75 % et de 18,60 % différents du taux de prêt en devises du 6 mai 1988 faisant la loi des parties, a entaché sa décision d'un défaut de motif en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'il résulte des conclusions de la débitrice que celle-ci soutenait que le seul document contractuel incontestable concernant les intérêts était le contrat de prêt constaté par acte notarié du 11 mai 1988 mais que l'action en paiement relative à ce contrat était prescrite ; que la cour d'appel qui a relevé, par des motifs non critiqués par le moyen, que l'action en paiement des intérêts contractuels n'était pas prescrite, a implicitement mais nécessairement répondu aux conclusions prétendument omises ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.