Cass. com., 2 novembre 2016, n° 15-10.317
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Avocats :
Me Bouthors, SCP Rousseau et Tapie
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 18 novembre 2014), que, par un acte notarié du 7 mars 1995, la société Crédit d'équipement des petites et moyennes entreprises, devenue la société Oséo, puis la société Bpifrance financement (la banque), a consenti à la SCI Groupe TF (la SCI) un prêt garanti par la cession des loyers à elle dus par la société 4TF ; qu'à la suite de la liquidation judiciaire de cette dernière société, la SCI a elle-même été mise en liquidation judiciaire le 5 décembre 2012 ; que la banque a déclaré sa créance au titre du prêt ;
Attendu que la SCI et son liquidateur font grief à l'arrêt de prononcer l'admission des créances de la banque à la liquidation judiciaire de la première pour partie à titre privilégiée, pour l'autre à titre chirographaire, et d'admettre en outre la banque, sur la créance privilégiée, au titre des intérêts de retard sur le capital de 278 116,68 euros alors, selon le moyen :
1°) que le juge de la vérification des créances qui est saisi d'une contestation sérieuse ne relevant pas de son pouvoir juridictionnel et susceptible d'avoir une incidence sur l'existence, le montant ou la nature de la créance déclarée est tenu de surseoir à statuer sur l'admission de celle-ci, après avoir invité les parties à saisir le juge compétent ; que la procédure de vérification des créances n'ayant pour objet que de déterminer l'existence, le montant ou la nature de la créance déclarée, la contestation du liquidateur et du débiteur portant sur l'interprétation du contrat de prêt litigieux, relativement à son taux d'intérêt et aux modalités de calcul des intérêts, laquelle constitue une contestation sérieuse, ne relève pas du pouvoir juridictionnel du juge-commissaire et de la cour d'appel statuant dans la procédure de vérification des créances ; qu'en procédant cependant, pour admettre la créance de la société Bpifrance financement, à l'interprétation du prêt litigieux, la cour d'appel, qui devait surseoir à statuer sur l'admission de la créance après avoir invité les parties à saisir le juge compétent, a violé l'article L. 624-2 du code de commerce, ensemble l'article 125 du code de procédure civile ;
2°) que le juge de la vérification des créances qui est saisi d'une contestation sérieuse ne relevant pas de son pouvoir juridictionnel et susceptible d'avoir une incidence sur l'existence, le montant ou la nature de la créance déclarée est tenu de surseoir à statuer sur l'admission de celle-ci, après avoir invité les parties à saisir le juge compétent ; que la procédure de vérification des créances n'ayant pour objet que de déterminer l'existence, le montant ou la nature de la créance déclarée, la contestation du liquidateur et du débiteur faisant valoir que le document annexé à la déclaration de créance pour en justifier était un faux, laquelle constitue une contestation sérieuse, ne relève pas du pouvoir juridictionnel du juge-commissaire et de la cour d'appel statuant dans la procédure de vérification des créances ; qu'en décidant cependant, pour admettre la créance de la société Bpifrance financement, que le tableau d'amortissement de 2012 n'était pas un faux, la cour d'appel, qui devait surseoir à statuer sur l'admission de la créance après avoir invité les parties à saisir le juge compétent, a violé l'article L. 624-2 du code de commerce, ensemble l'article 125 du code de procédure civile ;
3°) que le juge de la vérification des créances qui est saisi d'une contestation sérieuse ne relevant pas de son pouvoir juridictionnel et susceptible d'avoir une incidence sur l'existence, le montant ou la nature de la créance déclarée est tenu de surseoir à statuer sur l'admission de celle-ci, après avoir invité les parties à saisir le juge compétent ; que la procédure de vérification des créances n'ayant pour objet que de déterminer l'existence, le montant ou la nature de la créance déclarée, la contestation du liquidateur et du débiteur relative à la faute du prêteur de deniers ne relève pas du pouvoir juridictionnel du juge-commissaire et de la cour d'appel statuant dans la procédure de vérification des créances ; que le liquidateur et le débiteur ayant invoqué une telle faute, ayant une incidence sur le montant de la créance et constituant ainsi une contestation sérieuse, il appartenait à la cour d'appel de surseoir à statuer sur l'admission de la créance après avoir invité les parties à saisir le juge compétent ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a donc violé l'article L. 624-2 du code de commerce, ensemble l'article 125 du code de procédure civile ;
4°) que la procédure de vérification des créances n'a pour objet que de déterminer l'existence, le montant ou la nature de la créance déclarée, à la date du jugement d'ouverture ; qu'en énonçant que la société Bpifrance financement devait également être admise au titre des intérêts de retard sur le capital de 278 116,68 euros à compter du 6 septembre 2012 au taux de 4,386 %, sans fixer le quantum de cette créance à la date du jugement d'ouverture, la cour d'appel a violé l'article L. 624-2 du code de commerce ;
Mais attendu, en premier lieu, que la cour d'appel, qui n'était saisie d'aucune contestation sérieuse sur ces points, a pu, sans excéder les pouvoirs du juge de la vérification du passif, déterminer le taux applicable au prêt litigieux et le montant des sommes dues par la simple application du contrat de prêt et du tableau d'amortissement réédité en 2012 à l'occasion de la déclaration de créance ;
Attendu, en second lieu, qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, non critiqués, que la banque justifiait se trouver dans l'impossibilité d'obtenir du débiteur cédé le paiement des loyers en vertu de la cession de créance prise en garantie du prêt, qu'il n'était pas démontré qu'une déclaration de créance à la procédure collective ouverte à l'égard de ce débiteur cédé eût permis à la banque de recouvrer des fonds, qu'à la date d'ouverture de la procédure collective du débiteur cédé, la banque n'avait pas de créance à déclarer puisque celui-ci était à jour de ses paiements et, enfin, qu'aucun préjudice n'était établi, la cour d'appel a fait ressortir que la contestation relative à la responsabilité de la banque était dépourvue de caractère sérieux et était sans influence sur l'existence ou le montant de sa créance ;
Et attendu, enfin, que pour admettre la créance de la banque au titre des intérêts de retard sur le capital de 278 116,68 euros, correspondant à des intérêts restant à courir après le jugement d'ouverture, l'arrêt indique les modalités de calcul desdits intérêts, en précisant leur taux et leur point de départ ; que la cour d'appel a ainsi satisfait aux exigences de l'article L. 624-2 du code de commerce ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.