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Décisions

Cass. com., 11 juin 2003, n° 00-21.775

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Tricot

Rapporteur :

M. Chaise

Avocat général :

M. Viricelle

Avocats :

SCP Masse-Dessen et Thouvenin, Me Le Prado, SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez

Poitiers, du 19 sept. 2000

19 septembre 2000

Attendu, selon l'arrêt partiellement confirmatif attaqué (Poitiers, 19 septembre 2000) que, par acte authentique du 29 mars 1988, M. Freddy Z... a vendu un fonds de commerce de bar, restaurant, discothèque à la société La Grange, représentée par son gérant M. X..., lequel exploitait le fonds en location-gérance depuis 1982 ; que par le même acte, la SCI du Grallet dont les parts sont détenues par les consorts Z..., a donné à bail à la société La Grange l'ensemble immobilier dans lequel le fonds était exploité ; qu'invoquant un dol, en ce qu'il leur aurait été dissimulé que deux parcelles à usage d'aire de stationnement, alors affectées à l'exploitation du fonds, n'étaient pas comprises dans le bail, la société La Grange et M. X... ont, le 5 novembre 1996, assigné MM. Freddy et Eric Z..., ainsi que Mme Nicole Z... et la SCI du Grallet en annulation de la vente et du bail et en paiement de dommages-intérêts ; que la société La Grange a été mise en redressement judiciaire le 6 décembre 1996, puis en liquidation judiciaire ;

Sur l'irrecevabilité, soulevée d'office, du premier moyen du pourvoi principal, pris en ses deux branches, après avertissement donné aux parties :

Vu l'article 152, alinéa 1er, de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985, devenu l'article L. 622-9, alinéa 1er, du Code de commerce ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré prescrite l'action en nullité de la vente et du bail et d'avoir rejeté les demandes indemnitaires consécutives ;

Mais attendu que M. X... n'a pas qualité pour exercer une action concernant le patrimoine de la société La Grange que seul le liquidateur peut exercer à la suite du prononcé de la liquidation judiciaire de la société ; que le moyen est irrecevable ;

Et sur le second moyen, commun aux pourvois principal et incident, pris en ses deux branches :

Attendu que M. X... et Mme Y..., ès qualités, font grief à l'arrêt d'avoir prononcé leur condamnation solidaire à des dommages-intérêts pour procédure abusive alors, selon le moyen :

1°/ que seule une faute peut faire dégénérer en abus l'exercice du droit d'agir en justice ; qu'en ne se référant à aucune circonstance particulière propre à caractériser la faute commise en introduisant l'instance, la cour d'appel n'a conféré aucune base légale à sa décision au regard de l'article 1382 du Code civil ;

2°/ que le jugement d'ouverture d'une procédure collective interdit ou suspend toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance a son origine antérieurement audit jugement et tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ; que la SARL La Grange ayant été mise en redressement judiciaire durant l'instance au cours de laquelle les consorts Z... ou la SCI du Grallet avaient sollicité à titre reconventionnel la condamnation solidaire des demandeurs à des dommages-intérêts pour procédure abusive, il en résultait que ces créances indemnitaires avaient une origine antérieure au jugement d'ouverture ; qu'en déclarant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 47 et 48 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Mais attendu, d'une part, que l'arrêt relève, par motifs adoptés, que l'action avait été engagée par les demandeurs avec une particulière mauvaise foi, et qu'il retient, par motifs propres, qu'Eric et Nicole Z... ont été appelés à la procédure de façon injustifiée ;

Attendu, d'autre part, que la créance de dommages et intérêts pour procédure abusive trouve son origine dans la décision qui prononce la condamnation et entre dans les prévisions de l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985, devenu l'article L. 621-32 du Code de commerce, lorsque cette décision est postérieure au jugement d'ouverture de la procédure collective ; que la condamnation ayant été prononcée par une décision rendue après le jugement d'ouverture, la cour d'appel a exactement décidé que ces dommages-intérêts constituent une créance née postérieurement à ce jugement ;

D'où il suit que la cour d'appel ayant légalement justifié sa décision, le moyen n'est fondé en aucune de ses deux branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois tant principal qu'incident.