Cass. com., 20 mars 2001, n° 98-15.784
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Dumas
Rapporteur :
M. Badi
Avocat général :
M. Viricelle
Avocats :
SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, SCP Waquet, Farge et Hazan
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 24 mars 1998 n° 1512) rendu en matière de référé, que la SCI Gay Lussac (la SCI), propriétaire des locaux dans lesquels exerçait son activité la société Minilampe (la débitrice), mise en redressement judiciaire le 13 mai 1992 et dont le plan de cession a été arrêté, a assigné le commissaire à l'exécution du plan devant le juge des référés en paiement provisionnel des loyers échus postérieurement au jugement d'ouverture ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le commissaire à l'exécution du plan fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer, par provision, la somme de 376 982,20 francs à la SCI, alors, selon le moyen, que le jugement arrêtant le plan de cession de l'entreprise mettant fin, dès son prononcé, à la période d'observation, le débiteur retrouve la totalité de ses pouvoirs, sous réserve de ceux qui sont attribués à l'administrateur pour la mise en oeuvre du plan et au commissaire à l'exécution du plan pour veiller à l'exécution de celui-ci ; que, par ailleurs, les contestations relatives à l'établissement de la liste des créances nées régulièrement après le jugement de redressement judiciaire et demeurées impayées sont jugées par le Tribunal devant lequel s'est déroulé la procédure collective, le débiteur étant appelé à l'audience ; qu'il s'ensuit que l'action tendant au paiement d'une créance de la nature précitée doit également être dirigée contre le débiteur ; qu'en écartant la fin de non-recevoir qui était soulevée de ce chef par le commissaire à l'exécution du plan, la cour d'appel a violé les articles 14 du nouveau Code de procédure civile, 31 et 61 de la loi du 25 janvier 1985 et 61 du décret du 27 décembre 1985 dans leur rédaction applicable en la cause ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui n'était pas saisie d'une contestation relative à l'établissement de la liste des créances impayées nées régulièrement après le jugement d'ouverture, n'avait pas à se prononcer sur la régularité de la procédure au regard de l'article 61 du décret du 27 décembre 1985 dans sa rédaction applicable en la cause ; que le moyen qui invoque des dispositions étrangères au litige et dont la cour d'appel n'avait pas à faire application est inopérant et ainsi irrecevable ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que le commissaire à l'exécution du plan fait encore le même reproche à l'arrêt, alors, selon le moyen, que l'article 92 de la loi du 25 janvier 1985 prescrit qu'en cas de cession totale de l'entreprise, le prix de cession est réparti par le commissaire à l'exécution du plan entre les créanciers suivant leur rang ; qu'en accueillant, dès lors, l'action en paiement qui avait été exercée par la SCI postérieurement au jugement ordonnant la cession totale de l'entreprise, condamnant ainsi le commissaire à l'exécution du plan à lui verser le prix de cession, la cour d'appel a violé le texte précité et l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985, dans leur rédaction applicable en la cause ;
Mais attendu que les dispositions de l'article 92 de la loi du 25 janvier 1985 ne font pas obstacle à l'exercice par un créancier de son droit de poursuite individuelle afin d'obtenir un titre exécutoire pour le recouvrement d'une créance de loyer née après le jugement d'ouverture de la procédure collective et non réglée à son échéance ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le troisième moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que le commissaire à l'exécution du plan fait enfin le même reproche à l'arrêt, alors, selon le moyen :
1°) que seules sont payées à leur échéance les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture de la procédure collective ; qu'en se bornant à relever que le contrat de bail s'était poursuivi durant la période d'observation sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la dette de loyer en résultant pouvait être considérée comme régulière bien qu'il soit constant que les sociétés locataire et bailleresse étaient alors dirigées par la même personne physique. M. X..., qui exerçait à la fois les fonctions de président du conseil d'administration de la première et de gérant de la seconde, que la SCI n'avait jamais ni réclamé le paiement de ces loyers à la débitrice ni mis l'administrateur judiciaire, qui ne s'est vu confier qu'une simple mission d'assistance du débiteur, en demeure de prendre parti sur la continuation du bail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985 ;
2°) qu'en se prononçant de la sorte, dans de telles circonstances, la cour d'appel a tranché une contestation sérieuse et aini violé l'article 873, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'après avoir relevé que la débitrice avait conservé les locaux à sa disposition, que le commissaire à l'exécution du plan avait réglé une partie des loyers, que le bail avait été repris par le cessionnaire en tant que contrat en cours et que la cour d'appel avait, par un arrêt distinct, rejeté la demande d'annulation du jugement ayant ordonné le classement de la créance de la SCI au titre de l'article 40, l'arrêt retient qu'il ne peut être sérieusement soutenu que la preuve de la poursuite du contrat de bail n'est pas rapportée ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations écartant le caractère sérieux de la contestation de l'obligation, la cour d'appel n'a fait qu'user des pouvoirs qu'elle tient de l'article 873, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile en statuant comme elle a fait ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.