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Décisions

CA Besançon, 1re ch. civ. et com., 4 mai 2016, n° 15/02047

BESANÇON

Arrêt

Confirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Mazarin

Conseillers :

Mme Bittard, Mme Uguen-Laithier

Avocat :

Me Haennig

T. com. Belfort, du 29 sept. 2015

29 septembre 2015

Faits et prétentions des parties

Sur déclaration préalable de cessation des paiements en date du 26 avril 2013, le tribunal de commerce de Belfort a, par jugement du 7 mai 2013, ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l'encontre de M. X, restaurant pizzeria, alimentation générale, spécialités turques, pain spécial, et a provisoirement fixé la date de cessation des paiements au 1er mars 2012. Sur requête du procureur de la République près le tribunal de grande instance de Belfort en date du 9 juillet 2014, cette même juridiction a prononcé le 29 septembre 2015 à l'encontre de M. X, une mesure d'interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, toute entreprise commerciale ou artisanale et toute personne morale, pour une durée de 5 ans M. X, a interjeté appel de ce dernier jugement par déclaration au greffe de la cour en date du 15 octobre 2015. Dans ses écrits transmis le 29 décembre 2015, il conclut à son infirmation et au rejet de la requête du ministère public en faisant principalement valoir que son passif privé est plus important que son passif professionnel et qu'il dispose d'un actif immobilier restant à réaliser. Monsieur Y conclut à ce que la loi n° 2015-900 du 6 août 2015 soit déclarée applicable aux procédures en cours ainsi qu'à la confirmation du jugement déféré, sans préjudice d'une aggravation de la sanction prononcée portant sa durée à dix ans. L'ordonnance de clôture a été rendue le 16 mars 2016 et l'affaire a été évoquée à l'audience du 30 mars 2016 où ni M. X, ni son conseil, n'ont comparu.

Motifs de la décision

Le jugement critiqué ayant été signifié à la personne de l'épouse de M. X selon exploit d'huissier délivré le 5 octobre 2015, l'appel interjeté par ce dernier dans les formes et délai prescrits par la loi est recevable. En prononçant la sanction critiquée, le tribunal de commerce s'est fondé sur l'omission par M. X d'avoir fait, dans les 45 jours, la déclaration de cessation des paiements.

Ce grief, reconnu par l'intéressé, est établi dès lors que la procédure de liquidation judiciaire a été ouverte par jugement, aujourd'hui définitif faute de tout recours, du 7 mai 2013 qui fixé la date de cessation des paiements au 1er mars 2012. A défaut de disposition législative contraire, l'article 239 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques est applicable aux procédures en cours en ce qu'il exige par le terme 'sciemment', pour le prononcé de la sanction personnelle de l'interdiction de gérer, une condition supplémentaire restrictive tenant au caractère volontaire de l'omission de demander, dans les 45 jours de la cessation des paiements, l'ouverture d'une procédure collective. En l'espèce, il ressort d'un extrait du Registre du commerce et des sociétés daté du 19 juillet 2013 que M. X, exerçant à l'époque sous l'enseigne Ali Baba Grill la même activité que celle objet de la présente procédure, a été placé en redressement judiciaire le 9 décembre 1998 par le tribunal de grande instance de Montbéliard à compétence commerciale, procédure convertie en liquidation judiciaire le 5 février 2001, et qu'il a été condamné par le tribunal correctionnel de Montbéliard le 3 juillet 2001 à la faillite personnelle pour une durée de dix ans ce qui a entraîné, le 10 septembre 2001, sa radiation du Registre du commerce et des sociétés avec effet au 3 juillet 2001. Il ressort encore du rapport du mandataire en date du 4 juin 2013, que ce n'est que sur les conseils d'un juriste de la Chambre des Métiers qu'il a, après avoir beaucoup tardé, pris l'initiative de déposer son bilan.

Par conséquent, il résulte à suffisance de ce qui précède que M. X, du fait de ses activités commerciales passées et des conseils qui lui ont été prodigués, était parfaitement informé des obligations incombant à un commerçant en état de cessation des paiements qui, de surcroît, avait cessé son activité depuis le mois de juillet 2012, et qu'il a sciemment tardé à en effectuer la déclaration de sorte que les conditions d'application de l'article 239 sus-évoquées sont remplies. Pour le surplus, exerçant son activité à titre individuel, il importe peu que le passif professionnel soit ou non inférieur au passif privé, M. X ne disposant que d'un seul et même patrimoine et les pièces de la procédure démontrent suffisamment que ledit passif déclaré à hauteur d'une somme supérieure à 50.000 ne pourra pas être apuré par son actif constitué de deux véhicules anciens sans valeur vénale significative et d'un appartement, estimé à 55.000 , dont il ne détient que la moitié de la propriété en indivision avec son épouse. C'est dès lors de manière pertinente, alors que le retard pris par M. X pour effectuer la déclaration de ses paiements a nécessairement aggravé son passif, que les premiers juges ont prononcé à son encontre la peine d'interdiction critiquée pour une durée de cinq ans et leur décision sera confirmée toutes ses dispositions.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

Déclare l'appel de M. X recevable, mais mal fondé. Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 29 septembre 2015 par le tribunal de commerce de Belfort.

Condamne M. X aux dépens d'appel.