Cass. com., 19 décembre 2018, n° 17-13.846
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Guérin
Avocats :
SCP Alain Bénabent, SCP Foussard et Froger, SCP Ortscheidt
Sur les premier et second moyens, pris en leur première branche :
Vu l'article L. 622-20, alinéa 1er, du code de commerce ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 1er avril 2003, la société Cogrema et M. Y... ont acquis les 3 300 actions composant le capital de la société A... ; qu'un projet de bilan de référence arrêté au 31 mars 2003 faisant apparaître des capitaux propres négatifs, M. Y..., devenu dirigeant de la société A... a, le 9 juillet 2003, déclaré la cessation des paiements de celle-ci, laquelle a été mise en redressement judiciaire le 11 juillet suivant ; que soutenant que la présentation de comptes faux lors de la négociation n'avait été rendue possible qu'en raison des manquements des professionnels ayant la charge d'établir et de vérifier les comptes, et que la prise de contrôle de la société A... leur avait causé un préjudice, la société Cogrema et M. Y... ont assigné en responsabilité la société Cabinet Francis F... associés, expert-comptable, en raison de l'établissement et de la présentation des comptes annuels, et M. Z..., commissaire aux comptes, du chef de la certification des comptes annuels au 31 décembre 2001 ; que la société Allianz Iard, assureur de la responsabilité de la société Cabinet Francis F... associés, est intervenue à l'instance ;
Attendu que pour déclarer la demande de la société Cogrema et de M. Y... irrecevable, l'arrêt retient que la perte de valeur des parts ou actions, celle des avantages (lire avances) en compte courant et les dépenses et frais divers exposés pour l'acquisition ne constituent pas un préjudice personnel distinct de celui subi collectivement par tous les créanciers, du fait de l'amoindrissement ou de la disparition du patrimoine social résultant de la cessation des paiements ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans distinguer entre les préjudices résultant pour les cessionnaires de l'impossibilité d'obtenir paiement par la société A... de leurs créances résultant des sommes avancées en compte courant et du coût de mise à disposition de deux salariés, lesquels préjudices ne constituent qu'une fraction du passif collectif dont l'apurement est assuré par le gage commun des créanciers, qu'il appartenait au seul mandataire judiciaire de reconstituer, et les préjudices liés directement au coût de leur investissement dans l'acquisition des actions de la société débitrice, dont la réparation, étrangère à la reconstitution du gage commun, devait être demandée par les cessionnaires eux-mêmes, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 décembre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse.