Cass. com., 3 février 2015, n° 13-25.256
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Avocats :
Me Foussard, Me Ricard
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 11 juin 2013), que, le 23 avril 2008, la cour administrative d'appel a rejeté la réclamation de la société Cashtex (la société) relative au redressement de son impôt sur les sociétés des années 1994 et 1995 et que, par jugement du 29 janvier 2010 devenu définitif, le tribunal administratif a rejeté la réclamation de la société sur le redressement au titre du même impôt pour les exercices 1998 et 1999 ; que, le 2 novembre 2009, la société a été placée en redressement judiciaire et que, le 9 novembre suivant puis le 28 janvier 2010, le comptable du service des impôts (le comptable) a déclaré au passif de cette procédure collective la créance résultant des décisions des juridictions administratives ; qu'à la suite de la contestation de la société et de son mandataire judiciaire, le comptable a ramené sa créance à la somme de 2 537 911, 73 euros ; que le juge-commissaire l'a admise à hauteur de 122 151 euros, la rejetant pour le surplus ;
Attendu que la société, son mandataire judiciaire et le commissaire à l'exécution du plan font grief à l'arrêt d'admettre la créance pour la somme de 2 537 911, 73 euros, à titre définitif, privilégié et hypothécaire alors, selon le moyen :
1°/ que si le juge administratif est compétent pour trancher les contestations relatives aux poursuites concernant des impôts dont le contentieux relève de la compétence du juge administratif lorsqu'elles portent sur l'existence de l'obligation de payer, sur la quotité ou sur l'exigibilité de l'impôt, le tribunal de la procédure collective est seul compétent pour connaître des contestations nées du redressement ou de la liquidation judiciaire, même si les créances concernées sont de nature fiscale et concernent un impôt dont le contentieux relève de la compétence de la juridiction administrative ; qu'en l'espèce, la contestation des créances fiscales déclarées étant fondée sur l'incidence de régularisations comptables, au demeurant non contestées, effectuées lors d'exercices postérieurs aux redressements, le tribunal de la procédure collective était compétent pour en vérifier l'incidence, s'agissant d'une contestation née des redressements et de la liquidation judiciaire ; qu'en refusant dès lors de tenir compte des règlements intervenus entre la date de notification du redressement fiscal et la date de déclaration de créance, à raison de l'impôt payé sur les exercices suivants, ensuite d'écritures de régularisation dont il n'a pas été tenu compte, la cour d'appel a violé les articles L. 281 du livre des procédures fiscales, L. 621-43 et L. 622-24 du code de commerce ;
2°/ que dans la mesure où la cour d'appel a pu juger que la contestation portait en réalité sur l'existence de l'obligation de payer, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués, sur l'exigibilité de la somme réclamée ou sur tout autre motif ne remettant pas en cause l'assiette et le calcul de l'impôt, il en résulte que la créance fiscale produite à la procédure collective était contestée dans son principe ; que dès lors, il appartenait à la cour d'appel, juge de la procédure collective, saisie d'un recours contre la décision de non admission du juge-commissaire, de renvoyer les parties à faire trancher la question préjudicielle dont dépendait la solution du litige par la juridiction administrative, exclusivement compétente en application des articles L. 190 et L. 199 du livre des procédures fiscales et, par conséquent, de surseoir à statuer à cette fin ; qu'en se bornant dès lors à admettre la créance fiscale la cour d'appel a excédé sa compétence en violation des textes précités ;
Mais attendu, d'une part, que l'article L. 621-43 du code de commerce ayant été abrogé par l'article 4 de l'ordonnance n° 2000-912 du 18 septembre 2000, la première branche du moyen n'est recevable qu'en ce qu'elle vise les articles L. 281 du livre des procédures fiscales et L. 622-24 du code de commerce dans leur rédaction applicable ;
Et attendu, d'autre part, que les créances fiscales ne peuvent être contestées, en cas d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire, que dans les conditions prévues au livre des procédures fiscales ; que l'arrêt constate que les impôts litigieux ont été mis en recouvrement les 30 juin 1999 et 1er octobre 2004 et que la déclaration de créance de l'administration fiscale du 28 janvier 2010 reprenait les montants d'imposition figurant sur les titres exécutoires émis avant l'ouverture de la procédure collective ; qu'il relève que, bien que se prévalant de règlements intervenus avant la déclaration de créance, à raison de l'impôt payé sur les exercices suivants, ainsi que de régularisations comptables fiscalisées à tort sur des exercices postérieurs à ceux redressés, la société débitrice ne justifie pas avoir saisi l'administration ou le juge compétent d'une réclamation depuis la mise en recouvrement ni sollicité de dégrèvement à raison de la reprise comptable d'une provision après confirmation par le juge de redressements afférents à celle-ci ; que de ces constatations, la cour d'appel a pu déduire, sans excéder sa compétence, que la contestation de la société portait non sur l'imputation de paiements mais sur le calcul de l'assiette de l'impôt sur des exercices postérieurs à ceux objets de redressements ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.