Cass. com., 28 janvier 2014, n° 12-27.215
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Espel
Avocats :
SCP Baraduc et Duhamel, SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 5 juin 2012), que M. X... s'est rendu caution solidaire auprès de la société HSBC France (la banque) des engagements de la société Energies natures, cette dernière ayant été mise par jugement du 11 septembre 2009 en redressement judiciaire, converti en liquidation judiciaire le 6 avril 2010 ; qu'après avoir déclaré ses créances au passif de la société Energies natures, la banque a assigné M. X... en exécution de ses engagements de caution ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné, en sa qualité de caution solidaire de la société Energies natures, à payer à la banque une certaine somme, alors, selon le moyen :
1°/ que lorsqu'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire est ouverte, les créanciers ne peuvent être tenus pour responsables des préjudices subis du fait des concours consentis, sauf le cas de fraude, d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou si les garanties prises en contrepartie de ces concours sont disproportionnées à ceux-ci ; que la fraude doit s'entendre de manoeuvres exercées par le créancier pour le seul service de ses propres intérêts ; que tel est le cas du prêt personnel octroyé par la banque lorsque ce prêt qui, sous couvert d'une augmentation de capital de l'entreprise, est en réalité destiné à combler une autorisation de découvert largement dépassé ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a énoncé que le seul fait que la banque ait crédité le compte de la société Energies natures le 29 décembre 2008 d'une somme de 20 000 euros - pouvant constituer la majeure partie du prêt personnel de 21 000 euros consenti à l'appelant- sous l'intitulé impropre « dépôt pour société en formation » ne caractérise pas un agissement frauduleux de la banque ; qu'en statuant de la sorte, sans rechercher si, outre cet intitulé impropre, la concomitance de plusieurs événements (ouverture par la banque d'un compte personnel au nom de M. X..., sur lequel a été créditée la somme de 21 000 euros, montant du prêt personnel qu'elle lui a consenti puis versement parallèle sur le compte de la société Energies natures de la somme de 20 000 euros dont la cour a admis qu'il pouvait constituer la majeure partie du prêt personnel de 21 000 euros enfin augmentation du capital de la société Energies natures décidée par l'assemblée générale du 23 décembre 2008 à hauteur de 20 000 euros, réservée en totalité à M. X... et dont la souscription a été libérée -nullement par le montant du prêt personnel consenti- mais, comme l'indique le procès-verbal d'assemblée générale, « par compensation avec des créances liquides et exigibles » que M. X... détenaient sur la société) ne permettait pas d'établir que la banque avait procédé à un montage frauduleux destiné, sous couvert d'une augmentation de capital, à combler à son seul avantage et en fraude des droits de M. X..., le découvert de la société Energies natures à l'aide du prêt personnel qu'elle lui avait consenti, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 650-1 du code de commerce ;
2°/ que lorsqu'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire est ouverte, les créanciers ne peuvent être tenus pour responsables des préjudices subis du fait des concours consentis, sauf les cas de fraude, d'immixtion caractérisée dans la gestion du débiteur ou si les garanties prises en contrepartie de ces concours sont disproportionnées à ceux-ci ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a énoncé qu'aucun des éléments versés aux débats, ni même le fait que la banque ait crédité le compte de la société Energies natures le 29 décembre 2008 d'une somme de 20 000 euros sous l'intitulé impropre « dépôt pour société en formation », n'établissait que la banque se serait livrée à une immixtion caractérisée dans la gestion de la société Energies natures au sens de l'article L. 650-1 du code de commerce ; qu'en statuant de la sorte, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si le montage ayant consisté -sous couvert d'une augmentation du capital de la société Energies natures, décidée par l'assemblée générale du 23 décembre 2008 et réservée en totalité à M. X... dont la souscription a été libérée, nullement à l'aide d'un apport en numéraire, mais par compensation avec des créances liquides et exigibles que M. X... détenait sur la société- à combler le découvert de la société Energies natures en accordant à M. X... un prêt personnel de 21 000 euros crédité tout d'abord sur un compte ouvert à cet effet dans les livres de la banque, puis sur le compte de la société Energies natures d'une somme de 20 000 euros, dont la cour d'appel a admis qu'il pouvait constituer la majeure partie du prêt personnel de 21 000 euros, ne révélait pas une immixtion caractérisée de la banque dans la gestion de la société Energies natures, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 650-1 du code de commerce ;
Mais attendu, d'une part, qu'après avoir constaté que M. X... ne soutenait pas que les concours ont été accordés à la société Energies natures dans un but autre que celui de maintenir l'activité ou de satisfaire à l'objet social, ou que la banque détenait des informations sur la situation de la société Energies natures que cette dernière ou son gérant ignorait, la cour d'appel a pu en déduire que M. X... ne démontrait pas le caractère frauduleux des concours accordés par la banque à la société Energies natures ;
Attendu, d'autre part, qu'après avoir relevé que M. X... n'a pas précisé la destination des fonds du prêt personnel, que la banque a débloqué le capital prêté en exécution des instructions expresses données à deux reprises par M. X..., et que ce dernier n'invoque pas l'existence d'une correspondance de la banque, antérieure à l'octroi du prêt personnel, dont il résulte qu'elle a été associée au projet d'augmentation du capital de la société Energies natures et à son mode de financement, voire qu'elle en a été l'instigatrice, l'arrêt retient encore qu'aucun élément n'établit que la banque se serait livrée à une immixtion caractérisée dans la gestion de la société Energies natures ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.