Cass. com., 11 septembre 2012, n° 11-22.240
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Espel
Avocats :
Me Foussard, SCP Barthélemy, Matuchansky et Vexliard, SCP Blanc et Rousseau, SCP Potier de La Varde et Buk-Lament
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 12 mai 2011), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 16 décembre 2008, pourvoi n° 08-11.343), que la société Agris a vendu à la société Miprolact de la caséine, selon cinq factures du 12 janvier 1999, comportant une clause de réserve de propriété ; que la société Miprolact a affecté en gage cette marchandise, avec faculté de substitution, au profit de ses créanciers, le Crédit lyonnais, la société Caisse d'épargne et de prévoyance de Bretagne -Pays de Loire et le Crédit industriel de l'Ouest (les banques) ; que ces marchandises gagées ont été remises à la société Auxiga en qualité de tiers détenteur ; que la société Miprolact a été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 15 mai 2000 et 23 octobre 2000, M. X... étant nommé liquidateur judiciaire ; que la société Agris a revendiqué la propriété de ces marchandises ;
Attendu que la société Agris fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté son action en revendication, alors, selon le moyen :
1°) que le banquier, en sa qualité de professionnel du crédit, est tenu à une obligation de renseignement et de vérification qui l'oblige, avant de constituer un gage, de vérifier si les marchandises ne sont pas grevées d'une clause de réserve de propriété ; que la cour d'appel en énonçant, pour débouter la société Agris de son action en revendication des marchandises vendues, que les banques n'étaient pas tenues à des vérifications ou à des recherches et avaient pu valablement faire confiance à la société Miprolact pour accepter en gage les marchandises litigieuses, sans vérifier la situation de ces marchandises, a violé les articles 2072 et 2279 anciens du code civil ;
2°) que la substitution de nouvelles marchandises aux marchandises gagées ne peut résulter que d'un accord de volontés des parties ; qu'en se bornant, pour débouter la société Agris de son action en revendication des marchandises vendues, à énoncer que les marchandises objets des cinq factures litigieuses avaient intégré par substitution conventionnelle le gage des banques et que l'accord de la caisse d'épargne et du crédit lyonnais était attesté par les courriers adressés par elles à la société Auxiga les 28 août 1995 et 14 novembre 1996, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si la circonstance que lesdits courriers ne faisaient état que d'une autorisation générale et précaire de substitution qui ne concernait pas spécifiquement les marchandises objets des factures de la société Agris, sans qu'il soit par ailleurs justifié d'un remplacement simultané des marchandises par d'autres marchandises de même valeur, n'impliquait pas l'absence d'accord exprès de ces deux banques à la substitution des marchandises objets de la vente aux marchandises gagées à leur profit, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 2072 et 2279 anciens du code civil ;
3°) qu'en se bornant, pour débouter la société Agris de son action en revendication des marchandises vendues, à énoncer que la société Auxiga avait procédé à la substitution de marchandises depuis l'origine de la constitution du gage et qu'elle en avait fait de même pour les marchandises objets de la facture n 099 01 106, sans par ailleurs relever l'existence d'un accord exprès du Crédit industriel de l'Ouest à la substitution des marchandises objets de la vente aux marchandises gagées à son profit, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 2072 et 2279 anciens du code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt retient exactement qu'aucune obligation ne pèse sur les banques, en leur qualité de créancier gagiste, de vérifier, lors de la constitution du gage, que les marchandises litigieuses ne sont pas grevées d'une clause de réserve de propriété ;
Et attendu, en second lieu, que l'arrêt retient que la société Agris a régulièrement, en accord avec le Crédit lyonnais, la société Caisse d'épargne et de prévoyance de Bretagne-Pays de Loire et le Crédit industriel de l'Ouest, procédé à la substitution de nouvelles marchandises à celles initialement gagées, dès lors que l'accord pour la substitution de marchandises est attesté par les courriers adressées par les deux premières banques à la société Auxiga les 28 août 1995 et 14 novembre 1996 et que, si la lettre d'accord de la troisième, le Crédit industriel de l'Ouest, n'est pas produite aux débats, la société Auxiga justifie avoir procédé de la même manière depuis l'origine avec l'aval tacite de celui-ci, pour le stock gagé à son profit ; qu'il relève encore qu' il apparaît, au vu des états de stocks de la société Miprolact, que les marchandises objet des factures litigieuses ont intégré par substitution conventionnelle le gage des banques ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.